Ce texte se veut prioritairement l’expression d’artistes, animateurs culturels et techniciens.
Si vous souhaitez vous y joindre, veuillez indiquer par courriel à cessezlefeu [arobase] mailo.com vos noms et qualités.
Depuis six mois maintenant, nous assistons à l’Est de l’Europe à l’extension d’un conflit en cours depuis huit ans sans qu’on ait vu jusqu’alors grand monde s’en émouvoir . La France officielle a pris une position guerrière après avoir choisi la non-intervention depuis 2014. Aujourd’hui, la fourniture d’armes au gouvernement ukrainien, l’explosion des budgets militaires sont devenus choses normales et la pression propagandiste des médias est telle qu’il est difficile de résister et de garder un peu d’indépendance d’esprit et de réflexion. De hauts gradés expliquent que notre participation au conflit de haute intensité qui vient est inévitable. Les parlementaires approuvent. Comme si le « nous sommes en guerre ! » du locataire de l’Elysée était une prophétie auto-réalisatrice.
Il est normal d’accueillir les ar-tistes qui fuient les combats quelles que soient leur nationalité et leurs convictions, lorsqu’elles ne sont pas antihumanistes. Moins normal et tout à fait inédit que la nationalité de cer-tains les oblige, comme Valeri Ger-giev, à exprimer leurs positions poli-tiques en public ou à démissionner.
Artistes, critiques et spectateurs sont appelés à participer à une pro-pagande guerrière. Des podiums d’Aurillac à la devanture de l’Opéra-Bastille, le drapeau d’un des belligé-rants se voit partout. La culture ukrainienne nous est certes chère mais ni plus ni moins que toutes les cultures du monde.( Ainsi bannir Pouchkine, par exemple – voire en approuver les autodafés ? est soit ridicule, soit odieux) ; toutes en re-vanche sont plus ou moins mises en péril par l’imposition de ce que les Etats-Unis produisent de plus mau-vais. « Penseurs » et journalistes dis-sertent sur la prétendue situation « coloniale » qui aurait été imposée à l’Ukraine par la Russie. Compte tenu du passé de la France « civilisatrice » en la matière, ils s’expriment en ex-perts !
Avant d’être citoyens du monde, nous avons des comptes à rendre de notre action de citoyens français dans une Union Européenne qui, de plus en plus tend vers le militarisme. Songer à la diversité des cultures européennes et mondiales, cela deviendra une considération futile si l’un ou l’autre des belligérants recourt à l’arme nucléaire. Ils auront bonne mine les drapeaux bleus et jaunes au milieu des ruines et des cadavres ! Les options officielles ne laissent aucune porte ouverte à des négociations de paix. Membre d’une OTAN qui s’étend toujours plus à l’Est (en s’appuyant sur des Etats où la nostalgie du IIIe Reich a depuis longtemps dépassé le stade de l’anecdotique ) notre pays est certes mal placé pour agir en médiateur.
Mais nous, citoyens, nous pou-vons manifester notre engagement pour la paix, notre refus d’une guerre qui, encore une fois, n’est pas celle des peuples, ni des Français, ni des Ukrainiens, ni des Allemands ni des Russes, ni de quelque peuple que ce soit, mais celle, de nouveau, des marchands de canons. Les effets humains de ce conflit sont déjà terri-fiants. Son extension ne fermerait pas seulement les théâtres par manque de chauffage et l’extinction des projecteurs et des amplificateurs. Le risque de destruction de l’humani-té est réel. Sans préalable et sans exclusive, nous prenons position et entendons agir pour la désescalade et pour une issue négociée.
Romain Rolland écrivait il y a plus de cent ans :
« Cette élite intellectuelle, ces églises, ces partis ouvriers n’ont pas voulu la guerre…soit.. Qu’ont-ils fait pour l’em-pêcher ? Que font-ils pour l’at-ténuer ? Ils attisent l’incendie. Chacun y porte son fagot ».
Romain Rolland
Il dénonçait ceux qui « entonnent des péans de haine » et qui ne manquent pas actuellement de successeurs.
Si l’engrenage actuel se poursuit, personne ne sera en mesure dans un siècle de le regretter !