Le rouleau compresseur macronien semble avancer inexorablement : droit du travail, SNCF, statuts de la Fonction Publique, bac et parcousup, baisse d’impôts sur les riches et les grosses entreprises et baisse du pouvoir d’achat des plus modestes, logement populaire, loi sur les « fake news », retraites, budget militaire, baisse des budgets dans les hôpitaux, répression des mouvements sociaux avec le concours d’officines d’extrême-droite…. quel que soit l’endroit où l’on regarde, c’est la même politique de casse sociale et de régression démocratique au profit des grands capitalistes et de leurs serviteurs, le tout piloté directement par le MEDEF et par l’UE.
Macron tente ainsi de réaliser en France le vieux rêve patronal de la thatchérisation de la France avec l’imposition d’une société de marchandisation généralisée, c’est-à-dire en réalité d’une « non-société » où seuls comptent le droit du plus fort et la concurrence entre individus, les plus riches étant bien sûr ceux gouvernent et qui gagnent à la fin.
C’est l’aboutissement du système capitaliste livré depuis la chute de l’URSS et l’affaiblissement des forces de classe et de masse à sa seule logique de fonctionnement et à ses contradictions qui lui imposent de revenir sur tous les conquis sociaux tout en continuant à produire pour le profit maximum, entraînant à la fois l’épuisement des Hommes et de la Terre.
Secondé au quotidien par l’énorme appareil de désinformation médiatique aux ordres de l’oligarchie capitaliste, il pourrait apparaître que Macron a partie gagnée et que le mouvement populaire ne parvient pas à résister.
Pourtant, Macron est bien vu comme le président des riches et les luttes sont toujours extrêmement nombreuses dans le pays (pour les conditions de travail, les salaires, contre les licenciements, les fermetures…) tandis que les cheminots continuent héroïquement leur lutte admirable contre la privatisation du Chemin de fer et la casse de leurs statuts qui les protègent en même temps que les usagers.
Et surtout, de plus en plus souvent et clairement s’exprime la nécessité de renouer avec les principes gagnants du syndicalisme de classe et de masse. En témoignent notamment les fédérations et les UD de la CGT qui rallient ou envisagent de rallier la Fédération Syndicale Mondiale ou les organisations de la FSU qui prennent leurs distances avec la direction nationale embourbée dans un « dialogue social » perdant.
D’un côté, soutenir, développer les luttes bien entendu pour résister aux mauvais coups donnés en permanence par le pouvoir et les patrons.
Mais de l’autre, renouer avec la nécessité de poser les problèmes à l’échelle globale : tant que la société est dominée par le capital et ses serviteurs, les travailleurs peuvent au mieux parer quelques coups mais sont toujours condamnés à lutter de manière défensive. Il leur est donc nécessaire de cibler le système lui-même (et pas seulement chacune de ses conséquences), d’être prêts à poser la question du pouvoir de classe , de mener la bataille pour vaincre l’adversaire de classe pour le changement de société.
Ce qui s’exprime dans les cortèges, les manifestations, ce qui a été expérimenté le 14 avril à Marseille ou le 26 mai dans toute la France grâce à la constitution d’un front entre forces syndicale, politiques et associatives, n’est finalement que la reprise de ce qu’affirmait déjà sur ce plan la charte d’Amiens : « Le syndicalisme poursuit la coordination des efforts ouvriers, l’accroissement du mieux-être des travailleurs par la réalisation d’améliorations immédiates. (…) Mais cette besogne n’est qu’un côté de l’œuvre du syndicalisme : il prépare l’émancipation intégrale, qui ne peut se réaliser que par l’expropriation capitaliste. »
Et que Marx expliquait déjà avant elle : « Les syndicats agissent utilement en tant que centres de résistance aux empiétements du capital. Ils manquent en partie leur but dès qu’ils font un emploi peu judicieux de leur puissance. Ils manquent entièrement leur but dès qu’ils se bornent à une guerre d’escarmouches contre les effets du régime existant, au lieu de travailler en même temps à sa transformation et de se servir de leur force organisée comme d’un levier pour l’émancipation définitive de la classe travailleuse, c’est-à-dire pour l’abolition définitive du salariat. »
C’est pourquoi le mouvement syndical doit de toute urgence réinvestir le terrain politique pour contribuer à bâtir, grâce à son apport spécifique, une alternative populaire menant la lutte frontale contre le pouvoir des capitalistes, ne se laissant pas prendre au piège de ne réagir qu’au coup par coup mais ciblant les origines patronales de toutes les contre-réformes ainsi que la construction européenne qui orchestre la casse à l’échelle du continent sans omettre de cultiver l’internationalisme et de mettre les guerres impérialistes de l’OTAN et la course ruineuse au surarmement. Et permettant comme cela fut le cas en 1936 ou 1945, de soutenir les luttes par l’espoir d’un changement de société et d’une France enfin débarrassée de l’exploitation capitaliste.
Front Syndical de Classe, 8 juin 2018