Nous choisissons de relayer cet article très intéressant, qui fait la part belle au PRCF comme héritier en droit et en acte du PCF, et d’autant plus objectif qu’il provient d’un site (A gauche) qui ne partage pas notre option du patriotisme populaire et progressiste.
Ce qui est important, c’est que cet article postule – puis démontre avec trois courants bien définis (communiste, trotskyste et maoïste) – que les organisations qui ont de l’avenir et constituent un espoir dans notre pays sont celles qui savent s’inscrire dans le temps long de l’histoire du mouvement ouvrier français et visent à refonder un – si ce n’est « le » – parti.
A contrario, cela prouve, à rebours des idées médiatiques reçues, l’inanité du « mouvementisme » cher à la FI et autres « mutations » qui ont épuisé le PCF jusqu’à l’os.
À noter, en complément, que ce qui fait aussi la force du PRCF est que celui-ci a choisi de se placer dans la continuité du PCF de 1935 jusqu’à l’opposition au traité de Maastricht, bref de sa grande histoire patriotique, résistante et populaire, issue largement du VIIe congrès de l’Internationale communiste, et non, exclusivement, dans celle du seul PCF des ambiguës et équivoques années 1970-1980, comme ce même site l’affirme, à tort, dans un autre article.
Pour ce qui est des deux autres familles politiques évoquées (le trotskisme et le maoïsme français), nous nous permettrons néanmoins de douter à terme de la survie politique d’un mouvement trotskyste (fût-il ressourcé par le « morénisme argentin » comme le suggère « À gauche » à propos de Révolution permanente) avec l’hypothèque qui pèse de plus en plus sur la capacité à se référer de façon positive à Trotsky. Nous pensons au livre dévastateur « La vol de Piatakov. La collaboration tactique entre Trotsky et les nazis », paru récemment mais qui s’appuie sur d’intenses recherches antérieures et constitue par ses compléments un saut qualitatif dans l’accumulation de preuves corroborant le second procès de Moscou centré autour de la collaboration entre Trotsky et les nazis. Livre non manichéen en ce qu’il ne prétend pas trancher toute la controverse Staline/Trotski des années trente s’avère néanmoins rédhibitoire pour l’image même de Trotsky et sa capacité à servir de boussole.
Pour le maoïsme français, nous doutons également de la capacité de ce courant à fédérer de nouveau en l’absence de référent tangible, puisque le sectarisme proverbial de ce courant fait que la République populaire de Chine, malgré ses 700 millions de citoyens sortis de la pauvreté et son opposition objective à l’impérialisme états-unien, ne trouve nullement grâce à leurs yeux. Au PRCF, nous ne méprisons presque rien, comme disait Leibniz, et surtout pas les différentes expériences socialistes qui sont un trésor pour l’avenir. Mais nous revendiquons, léninistement, l’examen critique de l’héritage, avec en ligne de mire – et c’est le point central – la reconstruction du grand parti dont notre peuple a tant besoin. Et c’est pourquoi, ne craignant ni les longues marches anti-revisionnistes, ni les fauteurs de Thermidor contre-révolutionnaires, nous gagnerons.
Gauche pour le Parti: trois lignes programmatiques
Voici trois exemples d’affirmation idéologique affirmant être à la hauteur d’une époque vue comme nouvelle.
La crise a estomaqué une large partie de la Gauche et de nombreuses structures ont disparu du jour au lendemain (tel en juillet 2020 le Rassemblement Organisé des Communistes Marxistes-Léninistes et le Parti Communiste Maoïste). C’est qu’il y avait trop de questions, trop de pression. Les choses se virent attribuer une dimension nouvelle, poser une ligne idéologique de gauche était trop compliqué. D’où un repli encore plus grand vers le côté « pratique », avec des initiatives « militantes », mais sans assumer un positionnement réel sur le plan des idées.
On peut citer néanmoins trois exemples, avec trois structures qui, comme le dit l’expression, « envoient du lourd », puisqu’il ne s’agit pas moins que de refonder « le Parti ». Profitant d’un arrière-plan idéologique développé, la crise a littéralement alimenté ces structures sur le plan des idées, leur accordant un réel optimisme au sujet d’une nouvelle affirmation programmatique. Leurs approches sont cependant évidemment très différentes.
La tendance Révolution Permanente du Nouveau Parti Anticapitaliste pose ainsi une nouvelle approche militante, conforme selon elle à un changement d’époque et de mentalités. Il y aurait un nouveau profil aux luttes et il faut s’y conformer. Voici des extraits du document du 30 mars 2021 La nouvelle génération ouvrière et la nécessité d’un Parti Révolutionnaire des Travailleurs, dont le titre résume parfaitement la conception.
« Depuis plus d’un an, la pandémie de coronavirus a ouvert une situation de crise aux conséquences durables. De fait, pour assurer le remboursement de la dette publique contractée et restaurer le taux de profit des entreprises capitalistes, les classes dominantes se préparent en effet à faire payer les travailleurs à coup de réformes néo-libérales, d’augmentation de la productivité et de mesures d’austérité. Or, face à cette sombre perspective, aucun projet politique à même de défendre les intérêts des travailleurs avec une stratégie à la hauteur ne semble émerger.
Une situation en profond décalage avec la politisation et les luttes intenses qui se sont enchaînées ces cinq dernières années en France.
En 2016 contre la Loi Travail, en 2018 dans le cadre du mouvement contre la réforme ferroviaire et de la lutte contre la sélection à l’université, en 2018-2019 avec le mouvement historique des Gilets jaunes, en 2019-2020 avec le mouvement contre la réforme des retraites et la grève historique du secteur des transports franciliens. Dans différents secteurs on a en parallèle assisté à un renouveau des luttes, comme dans l’Éducation Nationale ou du côté des personnels des universités (…).
En ce qui concerne le NPA, un tel recul de sa capacité d’intervention est évidemment en lien avec la crise profonde que traverse le parti et qui fait aujourd’hui peser sur lui une menace d’implosion. Mais cela n’est que le dénouement d’un long processus, initié par la LCR dans les années 1980-1990, d’abandon d’une stratégie centrée sur le rôle de la classe ouvrière (dont le néo-libéralisme avait proclamé la mort), au profit de l’intervention dans les « mouvements sociaux », avant de se dissoudre dans un parti large non délimité stratégiquement, le NPA.
Du côté de Lutte Ouvrière, qui possède encore des bastions dans des secteurs stratégiques, règne une forme de scepticisme, accompagnée d’une dose de nostalgie du vieux mouvement ouvrier français, façonné par le PCF.
Ce scepticisme, qui rejette toujours la faute sur les travailleurs qui ne voudraient pas lutter, couvre en réalité le refus de prendre une part active au travail d’organisation des couches les plus avancées de la classe et d’une nouvelle génération ouvrière en gestation, ainsi que de combattre la politique néfaste des directions syndicales bureaucratiques (…).
Le mouvement ouvrier a vu notamment émerger une nouvelle génération qui pourrait être le levier de la construction d’une organisation de ce type. Nous l’avons vu pour la première fois en 2014, dans la grève de la SNCF, où, ne partageant pas les codes de la gauche politique et syndicale, voire partageant de façon peu consciente ceux de personnages confusionnistes comme Dieudonné (nous étions au sommet du phénomène des « quenelles »), ils et elles ont été souvent boudés par les militants d’extrême-gauche.
Depuis, nous les avons vu prendre leur place dans chacune des grandes mobilisations qui ont traversé le pays, avec des profils très variés : souvent racisés et issus de l’immigration dans les grandes agglomérations, ouvriers et ouvrières gilet-jaunisés dans la France périurbaine, militantes et militants syndicaux combatifs ou travailleurs du rang… (…)
Au NPA – Révolution Permanente, nous avons eu le mérite relatif d’avoir saisi l’émergence de cette nouvelle génération ouvrière assez tôt et d’avoir essayé de fusionner avec elle.
Que ce soit dans le cadre de la « Bataille du Rail » de 2018 avec la construction de la rencontre Intergare, de la grève victorieuse d’Onet, du mouvement des Gilets jaunes, du mouvement des retraites au travers de la coordination RATP-SNCF, où actuellement des grèves de Grandpuits et des agents d’entretien des voies (Infra-pôle) de Gare du Nord, nous sommes intervenus avec une même logique : celle de déployer dans chaque bataille un arsenal stratégique et programmatique qui permette de pousser ces expériences le plus loin possible, en sortant du cadre imposé par la routine syndicale.
C’est au travers de ces expériences que nous avons pu faire entrer dans nos rangs de nombreux jeunes militants ouvriers, parmi lesquels de véritables figures dans leur région ou branche, à l’image d’Anasse Kazib à la SNCF, d’Adrien Cornet chez Total, de Gaëtan Gracia dans le bastion toulousain de l’aéronautique, de Christian Porta chez Neuhauser (industrie agro-alimentaire) en Moselle, mais aussi de jeunes militants comme Rozenn à Chronodrive ainsi que d’autres camarades dans le privé ou dans le public, à la RATP, dans la Santé, la Culture ou l’Éducation Nationale.
C’est aux côtés et au travers de ces militants que nous souhaitons aujourd’hui lancer une campagne autour de la nécessité d’un Parti Révolutionnaire des Travailleurs. »
La tendance Révolution Permanente du NPA affirme ainsi, pour résumer, qu’elle a réussi à attirer à elle une nouvelle génération, que cela donne du sens à un nouveau projet. De manière intéressante, c’est l’inverse qui est vrai pour le Pôle de Renaissance Communiste en France (PRCF). Lui dit qu’il a réussi à attirer à lui l’ancienne génération et que cela donne du sens à un ancien projet. Il s’agit en effet de refonder le Parti Communiste Français tel qu’il a existé dans les années 1970-1980.
Le PRCF a historiquement un pied dans le PCF et un pied dehors, désormais la ligne est celle de prendre sa place. En ce sens, le PRCF vise à présenter un candidat à la prochaine présidentielle, afin d’établir un réel socle pour un « Frexit progressiste ». Voici un extrait de la Déclaration du Secrétariat national du PRCF du 1er avril 2021.
« Voilà pourquoi, pour sortir rapidement et définitivement de ce cauchemar sans fin, il est vital de proposer la seule alternative en mesure d’empêcher un nouveau scénario catastrophe en 2022 que serait un faux « duel » et vrai duo Macron-Le Pen, entre le tyran nostalgique de la monarchie qui déroule un tapis brun à la fascisation en célébrant Maurras et Pétain à longueur de temps, et la mensongère « souverainiste » du prétendu « Rassemblement national » qui ne veut sortir de l’euro, ni de l’UE – dont la responsabilité dans le désastre sanitaire est immense, à l’image de la Commission européenne appelant à 63 reprises les États-membres, entre 2011 et 2018, à « réduire les dépenses de santé » –, ni de l’espace Schengen, ni de l’OTAN, ni du capitalisme.
Cette alternative franchement communiste et franchement insoumise ne peut être que rouge-tricolore, nécessitant une rupture définitive et totale avec l’euro, l’UE, l’OTAN et le capitalisme exterministe.
Elle ne peut pas s’incarner dans une resucée d’« union de la gauche » associant les faux « socialistes » et « écologistes » et les « communistes » et « insoumis » édulcorés, autant de forces discréditées aux yeux des classes populaires – et notamment de la classe ouvrière – et faisant miroiter une impossible « Europe sociale ».
Cette alternative rouge-tricolore, patriotique et populaire, antifasciste et internationaliste – en cela diamétralement opposée à l’utopique et dangereuse « union des souverainistes des deux rives », qui sert de marchepied au RN –, écologiste et anticapitaliste, est portée par le PRCF et son porte-parole désigné Fadi Kassem.
Partout en France, de nombreux militants sont actifs dans la campagne auprès des communes rurales et populaires, des travailleurs – dont ceux de la classe ouvrière – et des citoyens attachés à la République une et indivisible, sociale et laïque, souveraine et démocratique, fraternelle et pacifique, alors que le risque d’effondrement de la France et de fascisation mortelle pour le mouvement ouvrier et les forces progressistes, à commencer par les communistes, ne cesse de s’accroître.
Plus que jamais, il est temps d’en finir avec le pseudo « Nouveau Monde » de Macron et ses laquais et l’Ancien Monde incarné par le RN et ses satellites. Afin qu’adviennent les « nouveaux Jours heureux » dont nous avons urgemment besoin, rejoignez le PRCF et menons, tous ensemble en même temps, la campagne en faveur de la seule alternative en mesure de faire gagner le monde du travail en 2022, celle de l’alternative rouge-tricolore pour une souveraineté nationale et populaire pleine et entière. Plus que jamais, Frexit progressiste, et vite ! »
Enfin, à rebours du terrain « militant » trotskiste de la tendance Révolution permanente du NPA et de l’affirmation électorale du PRCF, qui sont très concrètes, on trouve l’option maoïste, bien plus abstraite ou bien plus conceptuelle. Dans la perspective de la révolution culturelle, il y a chez le PCF(mlm) l’idée de suivre l’époque « avec de la hauteur » et de considérer qu’il faut l’idéologie au poste de commande, pour tout révolutionner. Voici ce qu’on lit notamment dans Le marxisme-léninisme-maoïsme est l’idéologie communiste de notre époque, du 1er avril 2021.
« Mao Zedong a affirmé dans les années 1960 que les 50-100 années à venir seraient celles d’un bouleversement comme l’humanité n’en a jamais connu. Cette position découlait de sa compréhension des contradictions propres à notre époque, des tendances en développement, des nécessités historiques.
Et aujourd’hui, au début des années 2020, l’humanité toute entière sait que plus rien ne peut être comme avant. Il y a le constat du rapport destructeur à la Nature, avec des contre-coups tel le COVID-19 et le dérèglement climatique, mais en général il est flagrant que le modèle de vie proposé par le capitalisme est à bout de souffle moralement et culturellement.
C’est la raison pour laquelle les gens sont tétanisés : ils sentent que le changement doit être complet, qu’il va falloir révolutionner les modes de vie, modifier les conceptions du monde, changer les rapports aux animaux, à la Nature en général, et bien entendu transformer l’ensemble des moyens de production et des manières de consommer.
Le défi est d’autant plus immense qu’il exige une réponse mondiale. En ce sens, nous affirmons que la position communiste est de parvenir à une révolution dans un pays donné, afin d’en faire l’exemple à tous les niveaux pour le reste de l’humanité (…).
Les années de référence doivent être 1948-1952 pour l’URSS et 1966-1976 pour la Chine populaire, ces deux périodes formant l’aboutissement le plus développé de l’expérience communiste (…). Le marxisme-léninisme-maoïsme n’est pas une méthode, il ne fournit pas des recettes : il est une vision du monde et par conséquent il doit être une réalité pour tous les aspects de la vie (…).
Nous affirmons que l’irruption de la crise du COVID-19 correspond à l’affirmation de la seconde crise générale du capitalisme, que l’idéologie marxiste-léniniste-maoïste doit en comprendre tous les aspects et fournir les réponses à la crise, à tous les niveaux.
C’est le sens de la révolution mondiale que d’être un bouleversement à tous les niveaux, dans tous les domaines ; la guerre populaire est la systématisation des réponses communistes à tous les niveaux, dans tous les domaines. »
On a là trois perspectives bien différentes, avec trois structures présentant certainement les économies politiques les plus développées à gauche. La raison en est bien entendu qu’on a ici trois traditions bien françaises : le trotskisme, le PCF, le maoïsme. Ancrées dans leurs traditions, elles se relancent. De manière fictive ou réelle ? Il est évident qu’une seule de ces mises en perspective peut se concrétiser.
Aussi différentes qu’elles soient, ces lignes programmatiques sont en effet opposées dans leur fond. Et pas simplement sur le plan des idées : dans leur démarche même, cela n’a rien à voir. La tendance Révolution permanente du NPA propose un activisme militant dans l’air du temps pour un Parti de lutte, le PRCF vise à la mise en place d’un Parti de masse pour une affirmation patriotique et sociale, les maoïstes proposent une introspection idéologique pour s’élancer culturellement à travers un Parti de cadres.
Cela reflète, dans tous les cas, une maturation de fond de la société française. Si on ne peut pas encore parler ici de résurgence, car c’est somme toute très marginal, il y a en tout cas une sorte de réaffirmation, comme si les dés de l’Histoire s’étaient remis à rouler.