L’anticommunisme a toujours ceci de réjouissant que, confronté à ses contradictions internes – car personne dans les médias ne lui oppose de contradicteurs -, il finit par révéler ce qu’il est : une apologétique indirecte de la réaction.
Eric Zemmour vient, une fois de plus, de tomber le masque :
« Cette guerre de Syrie est bel et bien notre guerre d’Espagne. (…) La gauche pacifiste déjà aveuglée par ses chimères défendait les Républicains espagnols sans voir que les communistes massacraient tous ceux qui s’opposaient à eux. De jeunes ouvriers français s’engageaient par idéal dans les brigades internationales, comme de jeunes musulmans français rejoignent aujourd’hui les armées de l’Etat islamique. Les uns étaient des lecteurs fervents de L’Huma ; les autres sont des citoyens fanatiques de l’Oumma. Hier la patrie des prolétaires, aujourd’hui la patrie des musulmans. Hier l’Internationale communiste, aujourd’hui l’Internationale islamiste. Les uns reniaient la France de Léon Blum qui avait décrété une prudente non-intervention, les autres vouent aux gémonies la France de François Hollande (…) » (RTL, 9 février 2016).
Nous nous contenterons de répondre factuellement :
- La République étaient le régime légitime ; les franquistes (dont Zemmour fait comme s’ils n’existaient pas) s’y sont opposés par un coup d’Etat et ont déclenché la guerre civile, puis internationale, soutenus qu’ils étaient par les régimes fascistes et pas seulement.
- Les Soviétiques ont toujours défendu la République espagnole sous sa forme légale et dans le cadre d’alliances avec ses représentants légitimes. L’objectif international de l’URSS étant de gagner la France et la Grande-Bretagne à un pacte de sécurité collective, il s’agissait également d’éviter les provocations en tout genre. Comment peut-on dire que les communistes « massacraient tous ceux qui s’opposaient à eux » quand l’Union soviétique était le seul pays étranger qui soit venu en aide au gouvernement légitime menacé par les pires régimes fascistes?
- Comment peut-on qualifier la « non-intervention » prônée par Léon Blum de « prudente » tout en fustigeant, comme le fait M. Zemmour, la gauche « pacifiste déjà aveuglée par ses chimères »? Cette gauche pacifiste allait massivement grossir les rangs des munichois puis des vichystes, comme on le sait.
- Enfin, comment ne pas voir le parallèle évident entre le nihilisme exterminateur, le fanatisme médiéval, le culte de la violence, et enfin l’anticommunisme, qui désignent le fascisme sous toutes ses couleurs, noir, brun, vert ou adepte du Christ Roi? Le slogan fétiche du franquisme était ¡Viva la muerte! Rappelons qu’à Miguel de Unamuno, les franquistes osaient crier sans honte : « A bas l’intelligence! » Quel rapport avec le marxisme, l’un des plus beaux fruits des Lumières et condition même de leur renouvellement?
Certes M. Zemmour ne criera jamais « A bas l’intelligence! » Il paraît même qu’il est l’une de nos gloires en la matière. La bourgeoisie a les Voltaire qu’elle peut. Mais quels que soient ses travers, rappelons que Voltaire n’a jamais transigé avec l’infâme. Il a toujours nommé, décrit, désigné, expliqué l’infâme. Or Zemmour vient de réaliser le tour de force de parler de la guerre d’Espagne sans parler du franquisme et sans désigner le fascisme. Ce fascisme qui, grâce en partie à Zemmour, n’est nulle part car il est désormais chez lui partout.
Aymeric Monville, 9 février 2016
Pourquoi s’intéresser à un minus comme Zemmour ? Il peut faire sa publicité sans nous, les appuis ne lui manquent pas pour cela.
Devrait on le laisser sans contradicteur?