Critiques du communiqué de Ian Brossat sur le Brexit
Réaction de Caroline Andreani :
En lisant le communiqué de Ian Brossat sur le Brexit, je suis partagée entre une profonde colère et un sentiment d’irréalité.
Ma colère porte sur le fond, plus que sur la forme, mais la forme elle-même interroge. Sur une question aussi cruciale que l’Union européenne, est-il pertinent de privilégier la réaction d’un seul individu, fut-il dirigeant national, sur une prise de position du secrétaire national ? Qu’en est-il de la réflexion et la discussion collective dans les instances du parti, à commencer par le Conseil national ? Le congrès a, me semble-t-il, acté que notre positionnement sur l’UE devait faire l’objet d’un réexamen. Quelle place est laissée au débat si un candidat à une élection tranche seul une question aussi centrale ? C’est la démocratie interne du parti qui est bafouée.
Quant au sentiment d’irréalité, je vous livre pêle-mêle quelques réflexions.
Les députés britanniques ont en effet massivement rejeté l’accord négocié par leur Première ministre. Mais pour quelles raisons ? Entre les rapports de forces au sein des conservateurs, les députés favorables au Brexit qui ne sont pas tous d’accord sur les termes de la sortie de l’UE, les travaillistes qui y voient l’occasion de se renforcer politiquement, les raisons sont multiples [1]. En dernière analyse, le fond du problème n’est-il pas, comme pour le vote des Français sur le TCE, que ces élus ne respectent pas le vote populaire ? N’avons-nous aucune appréciation sur cette question oh combien centrale ?
« Au vu de ces turpitudes, on se dit que l’idée d’une sortie de l’UE serait une folie pour la France » nous assène-t-on. À ce compte-là, il ne fallait pas faire de révolution en Octobre 1917, ni de grèves en 1936, ni résister en 1940, ni, ni, ni… Puisque les maîtres de l’UE tentent par tous les moyens de briser les résistances populaires, autant accepter l’inacceptable ? Curieux positionnement pour un parti communiste.
La cerise sur le gâteau vient du TINA repris par notre candidat : il n’y a pas d’alternative hors de l’UE, donc restons dans le carcan européen… pour construire la rupture. C’est d’une logique imparable : puisque nous avons peur de ce qui pourrait arriver en sortant de l’UE, restons-y pour mener une « transformation profonde » de l’intérieur. Cela rappelle les vieilles antiennes trotskistes de l’entrisme. Jusqu’à présent, je n’ai pas vu que cela conduise à autre chose qu’au retournement de ceux qui prétendaient prendre le pouvoir de l’intérieur.
Il est urgent de réfléchir collectivement à notre positionnement sur l’Europe.
Ce qui se passe en Grande-Bretagne est l’expression de la pression des instances européennes sur un pays dont on criminalise le choix sorti des urnes. L’Union européenne a procédé de la même manière avec la Grèce, précipitant son peuple dans la misère, détruisant son économie, la forçant à brader ses services publics, ses entreprises nationales, jusqu’à des pans de son territoire vendus à l’encan.
Quant à l’appréciation sur l’intégration économique de la France qui empêcherait tout horizon de rupture, je crois qu’elle permettrait au contraire à la France de négocier bien mieux une éventuelle sortie.
Depuis « Bouge l’Europe » et le retournement « européophile » de nos instances dirigeantes, le parti s’interdit d’émettre l’hypothèse d’une sortie de l’UE ou de l’abandon de l’euro, qui seul permettrait la reprise en main de la politique économique de notre pays. Pire, ceux qui l’envisagent sont renvoyés au positionnement de Marine Le Pen. Non seulement cette attitude est intellectuellement scandaleuse, mais elle revient à laisser le champ libre à l’extrême droite. Proposer de construire la rupture au sein de l’Union européenne comme seul champ d’intervention pour combattre l’UE – en d’autres temps, on parlait de « construire l’Europe sociale » – est une chimère, avec des conséquences politiques qui peuvent s’avérer désastreuses : jeter dans les bras de l’extrême droite une frange de l’électorat populaire qui n’en peut plus du carcan des politiques européennes ultralibérales.
Quant à notre positionnement – « Il n’y a donc pas d’autre choix qu’une transformation profonde de l’Union européenne, en rupture franche avec les logiques libérales et les traités qui les soutiennent » – il relève avant tout de l’incantation. Depuis le temps que le PCF a intégré le Parti de la gauche européenne, on ne voit pas quelles avancées ont été obtenues : ni transformation de l’UE, ni remise en cause des logiques libérales, et encore moins des traités européens. Au rythme de nos hypothétiques avancées, il faudra des siècles pour obtenir quoi que ce soit !
Le mouvement des gilets jaunes, issu d’une colère légitime après des décennies d’écrasement et de reculs sociaux, montre qu’il y a parfois des accélérations de l’histoire. Refusons le prêt-à-penser pro-européen et affrontons sereinement la question de l’Union européenne. Elle risque se poser rapidement, et dans des termes que nous n’aurons pas prévus.
Caroline Andreani
Le 15/01/2019
Effectivement, la position actuelle du PCF est d’autant plus inacceptable que le RN montre en ce moment son vrai visage puisque MLP n’est plus pour une sortie de l’Europe. Or, comme les traités sont ultra-libéraux ou, pour mieux dire, écrits par l’oligarchie pour l’oligarchie, en voulant rester dans l’Europe le RN avoue implicitement son ultra-libéralisme. Le FN, devenu RN, a toujours été ultra-libéral, en plus du reste, mais il trompe certains prolétaires en feignant d’adopter un discours soi-disant social. Mais, là, ce retournement du RN vis-à-vis de l’Europe aurait dû être exploité par le PCF, s’il était digne de son nom. On ne peut être communiste et vouloir demeurer dans l’Europe de Maastricht dont les traités EMPECHENT de mettre en oeuvre la plus petite politique sociale. C’est simple, cela reviendrait à dire à son assureur que l’on ne veut pas respecter le contrat que l’on a signé. Si l’on ne supporte plus les clauses du contrat d’assurance, il faut changer d’assurance! Pour l’Europe, c’est pareil, il FAUT EN SORTIR, sinon on est obligé d’appliquer ce que l’on a signé! Ce n’est pourtant guère difficile à comprendre. Donc, le PCF se moque du monde! C’est odieux, quand on pense que nous devons au PCF de 1945 (Ambroise Croizat) la création du régime général de Sécurité Sociale, le statut de la fonction publique, que la droite et la pseudo-gauche ont commencé à détruire ces dernières années, etc, et que l’actuel PCF, en prenant les Français pour des C…, c’est-à-dire en voulant rester dans cette Europe, est prêt à cautionner la destruction des services publiques, de la Sécu, des retraites. Il y a de quoi pleurer. Ce n’est guère étonnant qu’ensuite le peuple n’ait plus confiance dans les partis qui prétendent les défendre ( PCF)
Merci aux camarades militants du PRCF et merci à Caroline Andréani. Heureusement qu’ils existent.