Sur le site de « Faire vivre et développer le PCF » est parue, sauf erreur ans signature revendiquée, une critique de la stratégie dite « mélenchoniste » de la « Nouvelle Union Populaire, Ecologique et Sociale »; en clair, une critique qui se veut marxiste de cette « NUPES » qu’ont ensemble portée sur les fonds baptismaux électoraux MM. Mélenchon, Bayou, Roussel et Faure.
La critique principale énoncée par l’auteur du texte reproduit ci-dessous est que la NUPES contournerait le lieu central de la bataille politique que sont les entreprises en plaçant au cœur de son action la « rue » et les élections. Tout cela au risque d’abandonner les classes populaires et de ne faire le poids, ni par rapport à Macron, ni par rapport au danger du lepénisme.
On peut approuver dans ses grandes lignes cette critique de portée très générale. Mais outre que l’on ne saurait reprocher à un bloc électoral réformiste et centré sur la gauche petite-bourgeoise, tel que l’est ouvertement la N.U.P.E.S., de se dérober au travail politique prolétarien que devrait typiquement accomplir quotidiennement un vrai parti communiste, il est stupéfiant que l’auteur de cet article « critique » élude plusieurs vices de conception flagrants et majeurs qui caractérisent la N.U.P.E.S. et qui, en effet, la rendent à terme incapable de porter la moindre alternative cohérente et solide à l’euro-libéralisme atlantiste de Macron comme à l’alternative fascisante et mortifère proposée par le RN.
Une « critique » totalement muette sur les vices programmatiques de la plateforme N.U.P.E.S.
Tout d’abord, pourquoi la critique du « mélenchonisme » proposée par le texte de « Faire vivre et développer le PCF » élude-t-elle totalement la critique du programme de la N.U.P.E.S. et pourquoi ne va-t-elle pas à l’essentiel, qui consiste en ceci: la N.U.P.E.S. qui va du P.C.F. au « Verts » en passant par le P.S. ne veut ni ne peut rompre le moins du monde avec l’euro, ce carcan austéritaire continental, ni avec l’UE, ce bloc politico-militaire agressif dominé par le couple asymétrique Washington-Berlin, encore moins avec l’OTAN, que soutiennent mordicus les « partenaires » PS et EELV de Mélenchon (et que ne critiquent plus que le dimanche et la nuit le PCF et LFI…); sans parler bien entendu de la propriété capitaliste sur les secteurs-clés de l’économie qui est la grande oubliée de la N.U.P.E.S., comme d’ailleurs de L.F.I. et du P.C.F. pseudo-identitaire de Roussel?
Ne parlons pas de la bataille du « produire en France », que refusent les européistes du PS et les « décroissants » verts d’EELV et qui est pourtant vitale au contraire pour la classe ouvrière. A supposer, cher auteur de la critique ici critiquée, que les tenants de la N.U.P.E.S. mènent dans les entreprises et pas seulement dans les urnes la bataille pour leur programme euro-compatible, MEDEF-compatible et atlantico-formaté, cela rendrait-il ce programme moins indécent aux yeux des marxistes-léninistes, des syndicalistes de classe, des militants de la classe ouvrière ou de la paysannerie laborieuse? Au passage, cher critique du « mélenchonisme », pourquoi ne pas signaler qu’entre 2017, où Mélenchon disait encore « l’Union européenne, on la change ou on la quitte! », ce qui lui valait l’intérêt des ouvriers (qui ont voté à 80% non à la constitution européenne en 2005), et 2022, où tout la N.U.P.E.S. et L.F.I. se sont ralliés dans le principe à la « construction » supranationale, Mélenchon et son état-major se sont recentrés sur l’euro-gauche plurielle en abandonnant à la fois l’ « indépendantisme français » et la centralité des classes populaires tout en privilégiant les thèmes sociétaux qui séduisent les couches moyennes supérieures, exaspèrent les ouvriers… et font actuellement boomerang sur LFI en la privant de son coordinateur national Adrien Quattennens?
Pas problématique l’alliance de L.F.I. et du P.C.F. avec le P.S. et E.E.-L.V. ?
Ensuite pourquoi le périmètre électoral de l’alliance N.U.P.E.S., n’est-il même pas égratigné par l’article de « Faire vivre et développer le PCF »? Là encore, à supposer que la N.U.P.E.S. fît le nécessaire pour s’implanter dans les entreprises et en classe ouvrière, serait-il davantage acceptable que L.F.I. et que le P.C.F., qui se réclament encore à la marge d’un anticapitalisme vague, voire d’un certain euroscepticisme décaféiné, aident à réimplanter en milieu prolétarien ces ennemis acharnés de la nation indépendante, de la classe laborieuse et de la transformation sociale que sont EELV, le bras idéologique de l’OTAN dans la gauche européenne, et le PS, cette courroie de transmission de l’UE au sein de la gauche française et européenne ? Bien entendu que non: qu’une alliance nantie d’un tel périmètre politique indécent, notamment au regard du bilan catastrophique du PS jospino-hollando-mitterrandien, tentât de s’implanter en classe ouvrière serait encore bien plus dangereux que ne l’est l’actuel comportement prudemment électoraliste de MM. Faure, Bayou-Rousseau, Roussel, Mélenchon!
Et la paix dans tout ça?
Enfin le plus grave est que les mots « PAIX » et « ANTIFASCISME » ne figurent même pas dans la « critique » de FVD-PCF. Quoi, le PS et EELV ne cessent de réclamer des armes offensives pour le régime pronazi de Kiev, un régime qui célèbre le génocidaire hitlérien Bandera et que soutiennent les bataillons néonazis Aïdar et Azov, quoi, Bayou, Faure et Glucksmann réclament toujours plus d’alignement sur les boutefeux planétaires de l’OTAN et de l’UE, quoi, ces pantins idéologiques de la « gauche » atlantiste ferment les yeux sur le réarmement massif de l’impérialisme allemand rêvant de revanche sur le pays de Stalingrad, et tout ce que pourrait dire au sujet de la N.U.P.E.S. un publiciste communiste, voire « marxiste-léniniste », voire un partisan déclaré de l’amitié avec la Chine populaire et avec le Donbass ouvrier, ce serait que la N.U.P.E.S. est trop électoraliste, trop tournée vers la « rue » et les « urnes », pas assez implantée dans les entreprises? Mais s’implanter en entreprise pour y faire quoi et pour y dire quoi? Qu’il faut que la France continue de se transformer chaque jour davantage en co-belligérant face à la Russie en oubliant, d’une part que « la Russie soviétique a joué le rôle principal dans notre libération » (de Gaulle), d’autre part que la Russie actuelle possède assez de missiles hypersoniques et de têtes nucléaires pour araser notre pays si les choses continuent de dégénérer à l’initiative du bloc atlantiste soutenu par Macron en alliance idéologique étroite avec EELV et le PS, ces deux piliers idéologiques de la N.U.P.E.S. auquel L.F.I. et le P.C.F. ont eu l’indécence de s’allier pour obtenir des places… électorales?
Critique de classe ou querelles d’appareils ?
En réalité, l’auteur de la critique du « mélenchonisme » n’a qu’un vrai différend de fond avec la N.U.P.E.S.: il lui reproche de faire de l’ombre à la relance politique d’un P.C.F.. Or celui-ci n’a pas attendu Mélenchon pour désorienter idéologiquement les classes populaires en abandonnant durant quatre décennies (excusez du peu!) ses références fondatrices (dictature du prolétariat, 1976, marxisme-léninisme et internationalisme prolétarien, 1979, centralisme démocratique, socialisme, marxisme et classe ouvrière, 1993, ses pratiques de classe (unité de combat avec la C.G.T. de classe, cellules d’entreprise…), sa critique de fond de la social-démocratie (participation ministérielle du P.C.F. de 1981 et de 1997-2002), son rejet de principe de la « construction » européenne (tournant « euroconstructif » de 1993), sa défense du « produire en France » sans lequel la paysannerie laborieuse et le prolétariat industriel sont socialement condamnés à mort.
Pour nous, militants franchement communistes qui jugeons des forces politiques à leur contenu de classe, à leurs pratiques et à leur programme, pas seulement à leur ciblage sociologique, la question n’est donc pas de tirer à vue sur un Mélenchon, du reste en perte de vitesse politique (retrait du Parlement, succession délicate à la tête de L.F.I., absence d’ancrage syndical…). Mais
a) d’appeler à reconstruire un parti communiste de combat qui remettra « le monde du travail au centre de la vie nationale » comme y appelaient les cofondateurs communistes du CNR, et qui, sans se soucier de N.U.P.E.S., de L.F.I., etc., se reconstruira de fond en comble en allant prioritairement aux entreprises, usines, chantiers, raffineries, gares routières et ferroviaires, ports et docks, centraux EDF, aéroports, plateformes logistiques, etc.;
b) d’aider par tous les moyens, sans ménager les appareils confédéraux euro-formatés, à reconstruire le syndicalisme de classe et de masse et avec lui, le « tous ensemble en même temps » indispensable pour vaincre, dans la rue et dans les entreprises à la fois, l’alliance maléfique Macron-MEDEF-UE;
c) de faire naître une alternative rouge et tricolore articulant Frexit progressiste et visée du socialisme-communisme pour la France,
d) dès maintenant, au lieu de s’accrocher à la bouée de plomb qu’est la direction euro- et OTAN-complaisante de Roussel, de populariser le mot d’ordre « augmentez les salaires, pas un rond pour la guerre! », « sortons de l’UE-OTAN maintenant! »,
e) de rompre tous les liens électoraux et autres avec les dirigeants sociaux-impérialistes et écolo-exterministes d’EELV et du PS en considérant le combat de classe comme l’essentiel au lieu de courir les places en s’alliant avec n’importe qui et pour faire n’importe quoi.
Tout cela sans cesser une seconde de continuer à agir « en bas » avec les très honorables militants populaires de L.F.I. et du P.C.F., y compris – il ne tient qu’à eux – avec les militants marxistes-léninistes un tant soit peu conséquents de « Faire vivre et développer le P.C.F. ».
https://lepcf.fr/Parlement-Nupes-et-marche-parisienne-l-impasse-strategique-de-la-France