Le 26 juillet 1953, 150 guérilleros (dont Fidel et Raúl Castro), échouaient dans l’attaque de la caserne de Moncada, à Santiago de Cuba. Beaucoup périrent lors de l’assaut, d’autres furent fait prisonniers, torturés, exécutés. Avant de se replier dans le maquis de la Sierra Maestra, les survivants erraient dans les rues où les soldats les repéraient à leur accent de La Havane avant de les abattre.
Parmi les passants égarés, un assaillant qui passa inaperçu grâce à sa petite taille et à son visage enfantin (on lui donnait 15 ans). C’était Raúl Castro (photo).
Le 2 décembre 1956, 82 guérilleros, partis du Mexique sur un bateau nommé Granma, débarquaient sur une plage cubaine où les attendaient en embuscade les soldats du dictateur Batista. Il y eut seulement 22 survivants, dont Fidel et Raúl Castro, le Che, Camillo Cienfuegos.
Le 8 janvier 1959, ces trompe-la-mort et 5000 barbudos entraient triomphalement à La Havane.
Raúl Castro fut aussitôt chargé de créer une armée, tâche vitale devant les menaces des USA (Cf. entre autres, l’invasion de la Baie des Cochons). Il le fit avec l’autorité que lui conféraient son héroïsme dans la guérilla et les fonctions de N° 2 du gouvernement qui lui furent attribuées pour réussir : premier vice-président du Conseil d’Etat, deuxième secrétaire du Parti communiste cubain.
C’est donc par « méritocratie » et non par népotisme, qu’il a succédé au N° 1, Fidel Castro (1).
Raúl Castro sera à Paris le 1er février 2016.
Quelques professionnels du mensonge, fanatiques reaganiens (qui ne savent pas qu’Obama envisage d’aller à La Havane), s’insurgent. Ils seront (ils sont déjà) médiatisés. Victor Hugo se moquait de ceux qui « mordent les talons de qui marche devant » et qui « sont humiliés d’aboyer, ne pouvant, jusqu’au rugissement hisser leur petitesse ».
L’enfumage est donc programmé pour cette visite du président cubain, même si un demi-siècle de mensonges politico-médiatiques ne peut plus être resservi à l’identique. Déjà, le président de la plus grande puissance militaire du monde l’ayant autorisé, nos médias ne disent plus « le dictateur cubain », mais « le président cubain ».
Aphatie, « journaliste »
Rappelons-nous ce tweet (14 mai 2015) de Jean-Michel Aphatie : « Fidel #Castro, cet assassin de l’espoir a reçu @fhollande. Je suis très triste pour la République française ».
Il aurait pu dire : « François Hollande, ce fossoyeur du socialisme est allé à Canossa. Je suis très triste pour le FMI ».
Il avait qualifié sur Canal + de « farce de l’histoire » la présence de Raul Castro aux obsèques de Nelson Mandela. A coup sûr, il n’avait pas la moindre information sur les raisons de la présence du Cubain et sur l’invitation qu’il reçut à prononcer un discours.
Aphatie et la plupart de ses confrères n’ont pas su (ou, s’ils l’ont su, ils n’ont pas voulu que nous le sachions) que l’armée cubaine (conduite à son arrivée en Afrique par Che Guevara, qui poursuivit ensuite la lutte en d’autres lieux, comme on le sait) infligea en 1988 à l’armée d’Afrique du Sud à Cuito Cuanavale (Angola) une défaite qui allait ébranler l’apartheid et permettre la libération de Nelson Mandela (qui alla à La Havane en remercier les Cubains). Mandela n’alla pas à Paris. Ni Sarkozy ni Hollande ne furent conviés à parler devant son cercueil et l’omniprésent Aphatie, le plus connu, le mieux payé de nos journalistes ne sait pas pourquoi. Il investigue uniquement dans son salon, en robe de chambre, en lisant les dépêches de l’AFP et les articles de ses confrères. Ne dites pas à sa mère qu’il est joueur de pipeau dans un bordel, elle le croit journaliste.
Encore quelques années et quelques gestes d’un président états-unien et les Français finiront par comprendre ce mystère : accablée chez nous de tous les défauts, l’île des Caraïbes est adulée par les peuples du tiers monde, par tous les dirigeants de gauche latino-américains (même « modérés »).
Encore quelques années et de nouveaux gestes d’un président états-unien et les Français sauront que, sans Cuba, le règne des dictatures militaires, des gouvernements fascistes, des tortionnaires, des affameurs, des pilleurs, perdurerait sur toute l’Amérique latine où le courage de dire non est venu de l’exemple donné par un pays de moins de 12 millions d’habitants qui fut un territoire états-unien et qui refuse obstinément de le redevenir (« Patria o muerte ! »).
Encore quelques progrès dans la normalisation des rapports Cuba/USA et nos intellectuels de « gôche » nous expliqueront pourquoi l’indomptable peuple cubain qui chassa les Espagnols et les « Yanquis » s’est accommodé, sans contre-révolution depuis 1959, du socialisme caribéen, du « goulag tropical » avant que Guantanamo, (comment faire ?) ne s’approprie le titre. Ils nous diront pourquoi Fidel Castro, le chef d’Etat le plus menacé du monde (il a échappé à plus de 600 attentats ou tentatives d’attentats) pouvait se promener sans trois rangées de CRS, dans les rues de La Havane, sous la protection de la population qui l’acclamait, voulait le toucher, le tutoyait, l’appelait par son prénom (n’allez pas faire lire ça à Manuel Valls, ça lui ferait mal).
J’ai lu (chez mon médecin ou chez un coiffeur ?) que si les Cubains riaient, chantaient et jouaient de la musique plus qu’aucun autre peuple, c’était pour « contrebalancer leur douleur et leur désespoir » ! Normal, à chaque coup de marteau sur vos doigts ou à chaque rencontre de votre petit orteil avec un meuble, vous faites ça aussi (en moins artistique sans doute, vous n’en feriez pas un CD. Vous n’êtes pas Compay Segundo).
Viendra le temps où la vérité sur l’horreur du blocus le plus long de l’histoire du monde sera décrite par nos médias qui nous raconteront comment l’île du Crocodile vert s’est pourtant développée, a battu des records en matière d’éducation, de recherche médicale et pharmacologique, d’écologie, d’espérance de vie, de survie à la naissance, d’égalité, de justice sociale, d’internationalisme.
Viendra le temps où l’on pourra écrire cela sans être suspectés d’être « un agent de Castro ».
Anecdote et confidence : depuis sa création, le site Le Grand Soir tient sur Cuba le même discours de vérité. D’autres que nous y viennent à présent, peu à peu, à reculons, à contrecœur, loin derrière les peuples du tiers monde et de toutes les organisations politiques qui croient que l’Histoire n’est pas finie, qu’un monde plus fraternel est possible. Au début, nombre de nos lecteurs nous faisaient reproche de nos articles sur Cuba (car : dictature, balseros, pénuries, dissidents, leader maximo, communisme…). Ils se lassèrent de nous le répéter (ou nous quittèrent). Puis nos articles sur Cuba furent acceptés sans remous (mais assez peu lus). Puis, ils ont trouvé un lectorat curieux d’une contre-information basée sur des faits, des chiffres, sans manichéisme, sans adoration béate (Ah ! un paradis !) et surtout sans mensonge (2).
Il n’est pas besoin d’être castriste, il suffit d’être informés pour comprendre que, le 1er février 2016, François Hollande, énarque, apparatchik du PS, carriériste pépère, va serrer la main d’un héros qui a tout risqué pour son peuple et pour son petit pays sous le nez du géant états-unien qui domine l’Europe, qui nous embrigade dans l’OTAN et nous entraîne dans les massacres de peuples du tiers-monde.
Allez savoir si une photo subliminale nous montrera Raúl et François sur le perron du palais de l’Elysée, tels qu’ils sont intrinsèquement, l’un en treillis, l’autre en pyjama.
Maxime Vivas
Cuba si ! yankis no !
(1) Notons au passage que les enfants du Che, de Raúl et de Fidel Castro n’occupent aucune fonction gouvernementale. A Cuba, le pouvoir et les avantages afférents ne sont pas attribués par filiation, ce qui surprend les sept rois et reines de l’U.E. et quelques banquiers et oligarques des beaux quartiers où vivent nos médiacrates et une partie de la caste politique molle du genou.
(2) Ah, José Bové affirmant dans deux émissions son expulsion de Cuba dont il apprit lui-même l’existence au moment précis où il l’inventa devant les caméras de la télévision ! ICI