Georges POLITZER, fusillé au Mont-Valérien en 1942.
Nous avons une chance exceptionnelle d’avoir des textes d’une telle qualité qui s’adaptent à la période actuelle, et ce serait un crime de ne pas s’en servir.
RACE NATION ET PEUPLE
Il est impossible de s’orienter dans les questions politiques si l’on ne remonte pas du politique au social.
En nous montrant l’identification du peuple avec la nation, Maurice Thorez a dégagé le contenu social de l’idée nationale. Dès lors, les divers aspects du problème tel qu’il se pose aujourd’hui s’éclairent parfaitement.
Le racisme fasciste qui veut écraser le peuple est violemment antinational, précisément parce qu’il est violemment antisocial. Il ne peut y avoir et il n’y a pas d’affirmation de la nation qui puisse ne pas être en même temps celle du peuple, de la classe ouvrière.
En se dressant contre le peuple, contre la classe ouvrière on se dresse contre ceux qui assurent, en fait, et assureront, quoi qu’il arrive, la continuité et la liberté de la nation. La sincérité même du sentiment national doit avoir pour conséquence l’union avec le peuple. En se séparant du peuple, en se dressant contre lui, c’est de la nation qu’on se sépare et c’est contre elle qu’on se dresse, et il ne saurait y avoir de redressement national sans la classe ouvrière ou contre elle, mais seulement avec elle. Précisément parce que la nation est peuple, une politique vraiment nationale ne saurait avoir pour condition des mesures antisociales. C’est contre la nation elle-même qu’une politique antisociale est dirigée et c’est elle qu’une telle politique affaiblit. La contradiction n’est pas entre la justice sociale et la défense nationale, mais entre la défense nationale et la réaction sociale. On s’en aperçoit bien lorsqu’on constate comment les ennemis du peuple se liguent avec les ennemis de la nation. Aujourd’hui, plus que jamais, opposer la défense de la démocratie et la défense de la nation est suspect du point de vue même des intérêts de la France. On constate du reste que ce sont les hitlériens, ceux qui veulent affaiblir la France, qui sont en même temps les détracteurs les plus acharnés de la démocratie.
Quant à l’opposition que certains affectent d’établir entre le sentiment national et l’internationalisme, elle n’est pas plus authentique. Maurice Thorez a cité cette parole de Jaurès : « Un peu d’internationalisme éloigne de la patrie, beaucoup d’internationalisme ramène à la patrie »
L’Espagne a été, à cet égard, la pierre de touche.
Ce sont ceux qui affectent de ne pas pouvoir unir patrie et humanité qui ont été les partisans les plus acharnés de la non-intervention qui a permis d’abattre provisoirement l’Espagne républicaine. Ceux-là ne voient pas dans la nation le peuple et dans l’humanité les peuples. Leur « nationalisme » ou leur « internationalisme », ce sont des noms qu’ils donnent, suivant les circonstances, à leur incapacité de résister ou à leur volonté de céder aux ennemis du peuple.
Pour la classe ouvrière, nation et humanité sont indissolublement unies. Cette union dans la conscience des travailleurs est le reflet de ce qu’ils sont eux-mêmes économiquement et socialement. La classe ouvrière n’exploite personne ; elle n’a pas de privilèges sociaux à perdre qui peuvent la mettre en contradiction avec la nation, avec le peuple, c’est-à-dire avec elle-même. Il n’y a pas dans son cœur, de bourgeois qui puisse, selon l’expression de M. de Kérillis, parler plus fort que le patriote.
Il existe un « internationalisme » qui nie la nation : c’est celui des émigrés de Koblentz , l’internationalisme des ennemis du peuple, des trusts, de ceux qui font passer leurs privilèges de classe avant les intérêts de la nation. C’est aussi l’internationalisme de leurs agents : celui de Franco, de Henlein et des hitlériens de tout acabit.