La pièce de Carole Thibaut en tournée
Création du Théâtre des Ilets, Centre Dramatique National de Montluçon
- Durée : 2h15. Dés 14 ans
Carole Thibaut a écrit et mis en scène cette pièce pour neuf comédiens et comédiennes.
Galia Libertad est un personnage fictif d’ancienne ouvrière du textile doublée d’une femme libre et indépendante, dont la vie traverse le 20ème siècle. A l’occasion de sa mort prochaine, elle réunit famille et amis autour d’elle. Pour Galia, comme pour chacun des personnages des trois générations présentes sur scène, ce sera l’occasion de raconter son histoire nécessairement constituée et chamboulée par l’histoire économique politique et sociale du pays.
La voix off de Carole Thibaut ( « on raconte….) en début de spectacle est là pour nous plonger dans ce qui sera une légende, la légende du siècle plus précisément celle du peuple. Cette fresque familiale et historique qui passe par la guerre d’Espagne, la Deuxième Guerre Mondiale, l’ère du développement industriel suivie par celle de la délocalisation des usines, c’est la vie, retranscrite par Carole Thibaud, d’une ouvrière de Montluçon et de ses amis et descendants, originaires d’une petite ville de l’Allier, dont le destin fera écho pourtant à bien d’autres vies et à bien d’autres villes françaises.
Parce qu’il est si rare au théâtre aujourd’hui d’entendre la parole du peuple, je ne saurai trop vous inviter à assister à ce spectacle.
Certes, Carole Thibaut commence par évoquer la mort comme le moment où l’âme se sépare du corps, ce qui n’est guère une conception matérialiste de la mort. Mais très vite on comprend – notamment par la scénographie empruntée à la fête des morts mexicaine- que si les morts et les vivants se côtoient ce n’est bien que dans la vie elle-même par le travail de mémoire. Et se souvenir des morts et de leurs luttes, c’est aussi la mission que Carole Thibaut confère au théâtre grâce au rêve éveillé que permet la scène d’un théâtre.
Et puis cette pièce, dans la tradition d’un théâtre populaire exigeant, émeut et sollicite l’intelligence tout à la fois, nous fait passer de la poésie au charivari, de l’initiation aux sciences et aux techniques industrielles à la promotion des traditions culinaires locales, des problèmes relationnels personnels aux grandes luttes collectives de notre histoire et ce dans un mixte d’arts croisés. Autant dire que l’écriture, comme la mise en scène et la scénographie relèvent du baroque. Spectacle tellement foisonnant qu’on est tenté de se dire à la fin que tout est dit, mais surtout tenté plus que jamais d’honorer Galia (symbole de la lutte ouvrière et de la lutte féministe) en reprenant le flambeau de la lutte.
Marion Gandiglio