3e article de la série de reportage de notre ami Maxime Vivas du site d’information legrandsoir.info
3/4- Voyage en Chine musulmane
Petit rappel : j’étais en Chine du 23 mai au 4 juin, principalement dans la région autonome du Xinjiang, 23 millions d’habitants, 3 fois la superficie de la France, religion musulmane (voir mes deux articles précédents) et j’ai prévenu que je n’étais pas parti si loin pour écrire à mon retour « Le Guide du routard ».
Pour nos médias qui s’alarment de la montée en puissance de la Chine et de l’affaiblissement de l’impérialisme états-unien, prédateur mondial numéro un, la Chine n’a QUE des défauts et elle s’ébroue dans un contexte de catastrophes répétitives : pluies, inondations, glissements de terrain, coulées de boue, coups de grisou, accidents de cars, de trains ou d’avions, pollution, émissions record de CO2, épidémies, intoxications alimentaires, utilisation de vaccins périmés, incendies dans une usine de produits chimiques, etc. N’oublions pas la corruption, la spéculation immobilière, les scandales sanitaires, la dissidence, la contrefaçon, le contrôle des ONG étrangères et du numérique (Baidu préféré à Google), les crises au Parti communiste, la fuite des capitaux, les épurations, le durcissement de la législation, le raidissement politique, les limogeages, le culte de la personnalité, la censure, la chute de la Bourse, le ralentissement de la croissance, la dette, le massacre des chiens, les vols (et le commerce) de bébés…
Allez donc comprendre comment ce pays, connu chez nous pour tous ses problèmes, ses échecs et ses famines à répétition (la dernière au début des années 60), est devenu sans à-coups majeurs la première puissance économique du monde. Et ce, malgré son système politique dont nous ne saurions nous accommoder, habitués que nous sommes à la démocratie qui nous protège d’un président qui ferait pendant 5 ans le contraire de ce pourquoi il a été élu.
Le Figaro : « L’euro, place Tiananmen et avenue Montaigne.
La Chine a […] le Produit intérieur brut (PIB) le plus « important », en « parité de pouvoir d’achat », précise le FMI, qui considère par ailleurs que ce concept est tout à fait significatif et particulièrement utile. Il part de l’observation qu’avec un euro ou un dollar, on achète plus de choses à Pékin qu’à Paris, essentiellement pour la raison que la main d’œuvre y est moins chère. Il est ainsi moins coûteux de se faire coiffer près de la place Tiananmen qu’avenue Montaigne. La « parité de pouvoir d’achat » des monnaies n’est donc pas exactement celle que font apparaître les cours des devises sur les marchés de change » (12 avril 2016 ).
Abruti par la désinformation ou des informations essentiellement négatives, le Français moyen n’a pas vu la Chine s’éveiller, se dresser et devenir ce qu’elle est, pas plus qu’il ne comprendra ce qu’elle sera demain et qui va susciter chez lui un sentiment de peur, l’hostilité étant déjà là.
Je me souviens d’un débat à Toulouse où Ignacio Ramonet était venu présenter son remarquable ouvrage « Fidel Castro. Biographie à deux voix » (Fayard/Galilée, 2007). Quelqu’un lui demanda son point de vue sur les milliers de prisonniers politiques cubains. L’auteur lui répondit : « Des milliers ? Vous savez, la règle veut qu’on puisse même dire des dizaines de milliers sans être contredits ».
Les principaux médias français appartiennent à moins de 10 milliardaires qui façonnent l’opinion de dizaines de millions de Français sur la France, mais aussi sur le reste du monde, avec des traitements agressifs pour des pays qui agacent l’Oncle Sam, comme Cuba, le Venezuela, la Bolivie, l’Equateur, la Russie, la Chine, etc.
Une loi non écrite, mais incontournable, veut qu’un journaliste peut dire n’importe quoi sur ces pays, sans risquer d’être contredit par un confrère. Soit le confrère est ignare (ce n’est pas si rare, tant le nombre de sujets à traiter est varié et le temps mesuré), soit il est complice. Complice ? C’est presque toujours le cas des journalistes vedettes.
Des exemples ?
Prenons José Bové, candidat écologiste à l’élection présidentielle de 2002 qui raconta dans deux émissions de télévision qu’il a été « expulsé de Cuba par Fidel Castro », ce qui était une invention. Pourquoi aucun journaliste ne l’a découvert alors que je l’ai fait sans difficulté ? http://www.legrandsoir.info/cuba-jose-bove-savate-le-tiers-monde.html
Prenons David Pujadas, annonçant au JT de France 2, la veille d’une élection au Venezuela, que ce pays ne compte qu’une ligne de chemin de fer et que la pauvreté a augmenté sous la présidence de Chavez, deux fausses informations qu’il fut obligé de démentir… après le vote !
Voir : http://www.acrimed.org/Venezuela-France-2-se-plante-et-se-corrige-un-peu
Prenons Ariel Wisman, un animateur télé inventant tranquillement au cours d’un débat, dans un silence respectueux de ses confrères, que Chavez a créé « des escadrons de la mort ».
Voir :http://www.legrandsoir.info/hugo-chavez-et-le-venezuela-ariel-wizman-n… et : http://www.acrimed.org/Cinq-minutes-de-proces-contre-Hugo-Chavez-sur-C…
– Prenons Ursula Gauthier : le 1er décembre 2015, cette correspondante de l’Obs en Chine nous alerte sur ce qui s’est passé en 2013 en Chine : « … un gravissime épisode d’ »airpocalypse » qui asphyxie la moitié du pays deux mois durant… ». Mesurez le goût de la nuance et de la vérité. Deux mois durant, sans un répit dû à un souffle de vent salvateur, la moitié d’un pays grand comme 14 fois la France a été asphyxié. Plus de 650 millions de Chinois asphyxiés et les revoilà plus nombreux qu’avant.
http://tempsreel.nouvelobs.com/planete/cop21/20151130.OBS0404/chai-jin…
-Prenons encore Ursula Gauthier : dans l’Obs, le 18 novembre 2015, la même déplore, en caractères gras « l’écrasement sans merci de la minorité musulmane Ouïgour ». Pesons les mots : « écrasement », « sans merci », « minorité ».
http://www.legrandsoir.info/pourquoi-ursula-gauthier-de-l-obs-a-du-qui…
La minorité ? Certes, mais elle représente 45 % de la population de la région, la plus forte nationalité parmi les 9 ethnies qui y cohabitent. Ecrasement ? Pourquoi pas génocide ? Sans merci ? Dame ! nous suggère implicitement Ursula Gauthier, n’attendons pas le moindre sentiment humain du gouvernement de Pékin.
Prenons Robert Ménard, cible de mon livre de 2008 (« La face cachée de Reporters sans frontières ») dont TOUS les journalistes avaient percé l’exécrable personnalité et qui me le disaient en privé quand TOUTE la presse l’encensait (même la presse communiste).
– Prenons Jean-Hébert Armengaud de Libération (aujourd’hui rédacteur en chef de l’hebdomadaire « Courrier international ») qui traficota une phrase d’Hugo Chavez pour en faire un antisémite. La falsification ayant été prouvée, il fut soutenu jusqu’au bout par son directeur de l’époque : Pierre Haski, ennemi obsessionnel de la Chine et futur cofondateur du site Rue89 qui appartient désormais à l’Obs.
http://www.legrandsoir.info/Chavez-antisemitisme-et-campagne-de-desinf…
-Prenons Charb (paix à son âme), refusant de rectifier dans Charlie Hebdo une calomnie d’un de ses collaborateurs m’accusant en substance (et tout LGS avec) de nazisme et d’antisémitisme.
http://www.legrandsoir.info/le-fascisme-reviendra-sous-couvert-d-antif…
Prenons François Lenglet de France 2 et ses fariboles sur le président bolivien Evo Morales qu’il traita de corrompu sur la base 3 informations qui étaient toutes fausses.
http://www.legrandsoir.info/retour-sur-3-mensonges-a-des-paroles-et-de…
http://www.legrandsoir.info/francois-lenglet-ou-la-corruption-du-debat…
Prenons Yann Barthès de Canal + laissant dire à Ursula Gauthier, que son visa de presse n’a pas été renouvelé en décembre 2015 parce qu’elle a refusé d’écrire pratiquement sous la dictée de Pékin.
http://www.legrandsoir.info/ursula-gauthier-est-en-france-helas.html
Dans tous les cas que je viens de citer, un journaliste honnête sait que ses confrères ont menti. S’il ne le sait pas, il lui est assez facile de le vérifier. S’il est pigiste, conseillons-lui de se taire pour garder son emploi. S’il est une vedette des médias, on peut lui reprocher de couvrir les mensonges.
Bref, entre les journalistes qui ne peuvent et ceux qui ne veulent, surgissent les journalistes des réseaux sociaux, la presse alternative dans laquelle des journalistes non rétribués apparaîtront comme des discoureurs-militants, des idéologues (pouah !) chaque fois qu’ils apporteront une vérité qui, dans le meilleur des cas, sera prise comme une « opinion différente » alors qu’elle est LA vérité. Je vais donc continuer à apporter des éléments d’informations utiles pour voir la Chine dans sa complexité et hors du schéma manichéen prisé par notre classe politico-médiatique.
Maxime VIVAS
(Prochain et dernier article : « Choses vues et enjeu international du Xinjiang »)