La direction de la SNCF a annoncé la suppression de plus de 2080 emplois en 2018. Soit une baisse de 1,5% des effectifs, identique à celle conduite ces dernières années. Un plan social qui ne dit pas son nom, et qui s’inscrit dans la dynamique de privatisation de ce service public stratégique et essentiel de la Nation. Une privatisation ordonnée par l’Union Européenne et qui se double de la liquidation de l’industrie ferroviaire française – l’un des fleurons de la capacité productive stratégique de la Nation – avec le démantèlement d’Alstom. Un scandale qui est d’ailleurs à mettre au passif de Macron, alors conseiller de Hollande puis son ministre des finances.
Le transport ferroviaire de voyageurs en France est l’un des plus développés d’Europe, la part du rail en France étant supérieure de 10% à celle du rail en Grande-Bretagne et même 20% par comparaison à l’Allemagne, avec une part modale de 10%, en croissance ces 20 dernières années. Ces résultats sont la preuve de l’efficacité du service public nationalisé. Chaque jour ce sont 3,2 millions de voyageurs qui sont transportés, dans quelques 11 000 trains, 87% de ces voyageurs étant ceux transportés par les RER et TER. Malgré une forte baisse de l’offre de transport ferroviaire (-4,2% en 2016) le nombre de kilomètres passagers parcouru (87 milliards) est stable. Le chiffre d’affaires du rail, 13,4 milliards d’euros en 2016, est un énorme marché qui échappe pour le moment à la prédation des capitalistes. Une situation interdite par l’Union Européenne dont les directives imposent la privatisation du service public, tout en favorisant non pas la concurrence mais la concentration du secteur au sein de multinationales privées. Ce sont les cheminots, les ouvriers de l’industrie ferroviaire et les usagers du rail qui vont payer le prix terrible de la casse du service public. Les pannes d’ampleur à répétition – les dernières à Montparnasse dont il se dit qu’elles seraient liées à la privatisation rampante de la LGV sud-ouest – mais également les tragiques catastrophes (comme celle de Brétigny), mais également les suppressions massives de lignes et de trains ainsi que les non moins fortes augmentations de tarifs sont là pour rappeler à chaque usager de quoi privatisation et exploitation sont le nom.
C’est pourquoi les cheminots se doivent de réagir et de défendre le service public de la Nation contre l’euro-privatisation !
Avec tes hommes en noirs, qui prennent nos requêtes,
Pour se les renvoyer comme sur des raquettes,
Et, tout bas, les malins ! se disent : « qu’ils sont sots ! »
Pour mitonner des lois, coller de petits pots
Pleins de jolis décrets roses et de droguailles
S’amuser à couper proprement quelques tailles,
Puis se boucher le nez quand nous marchons près d’eux,
– Nos doux représentants qui nous trouvent crasseux !-
Pour ne rien redouter…………………………..Le Forgeron Arthur Rimbaud
UNION SACRÉE POUR L’EUROPE ? ou AMOUR SACRÉ DE LA PATRIE ?
CHEMINOTES ET CHEMINOTS VOUS CHOISISSEZ NATIONALISATION DES SOCIÉTÉS DE CHEMINS DE FER UNE REVENDICATION DE 100 ANS !
Les cheminots ont fêté les 100 ans de la création, en janvier 1917, de la Fédération nationale des travailleurs des chemins de fer, affiliée à la Confédération Générale du Travail. Dès l’année suivante lors de son premier congrès, en juin 1918, la fédération CGT des cheminots revendiquait la nationalisation des compagnies privées de chemins de fer et de la compagnie de l’État (réseau de l’ouest).
Aujourd’hui les cheminots se doivent de revendiquer cet acquis de 100 ans de luttes pour la renationalisation de la SNCF depuis 1983 devenue une société étatique commerciale et industrielle aujourd’hui éclatée en trois EPIC avec leurs centaines de filiales toutes de nature capitaliste c’est-à-dire recherchant le profit maximum du capital dont elles sont constituées.
Que nous apprend donc l’histoire de la naissance du syndicat unifié des cheminots ?
Depuis le début de la guerre en 1914 les organisations syndicales, de secours et d’entraide, de mutuelles ou par exemple d’orphelinats des cheminots revendiquaient une indemnité de vie chère alors que les salaires étaient bloqués et que les prix avaient augmenté de 50% depuis 1914. Les gouvernements et les compagnies ferroviaires s’opposaient à satisfaire cette revendication au nom de l’union sacrée pour la guerre qui associait tous les partis politiques, les entreprises, au premier rang desquelles les compagnies de chemin de fer mais aussi la confédération CGT. Les cheminots, leurs familles, qui connaissaient les malheurs de l’hécatombe des tranchées, subissaient également une surexploitation au travail due à la diminution des effectifs que ne compensait pas le recours aux retraités, aux femmes des cheminots envoyés au front alors que le trafic s’était accru de 35% depuis 1914 et que les compagnies apparaissaient comme de véritables profiteurs de guerre doublés d’une particulière incurie dans l’organisation des transports soulevant même de violentes accusations de l’état-major.
Devant la montée du mécontentement, le gouvernement de guerre avec les dirigeants syndicaux CGT convoquèrent les organisations syndicales et associations de cheminots (mutuelles, orphelinats, cheminots catholiques etc.) en janvier 1917, pour la création d’une seule organisation syndicale unifiée des cheminots affiliée à la CGT, mais dans le dessein de mieux contenir les luttes revendicatives des cheminots . Ainsi ces derniers purent-ils entendre le secrétaire de la confédération CGT , Léon Jouhaux, membre du ministère des travaux publics de Marcel Sembat, saluant en ces termes la conférence d’unification syndicale :
« Désormais, l’unité de revendication déterminera l’unité d’action. On vous a traité d’antimilitaristes autrefois, mais aujourd’hui ce sont nos gouvernants qui sont antimilitaristes puisqu’ils veulent abattre par tous les moyens le militarisme prussien. Le traité de paix de demain contiendra les bases solides de la véritable paix : les intérêts de tous seront respectés et bientôt les cheminots obtiendront leur part dans la direction des chemins de fer ».
Nous voyons comment une aspiration à l’unité des cheminots pour établir un rapport de forces favorable face aux compagnies ferroviaires est retournée contre eux-mêmes par le secrétaire de la confédération CGT qui leur demande d’attendre le rétablissement de la paix pour la satisfaction de leurs revendications. Remettre au lendemain, lorsque les conditions seraient réalisées, la satisfaction des revendications c’est une ligne réformiste qui se refuse à organiser l’action des forces du travail face au capital a fortiori « d’abolir le salariat et le patronat » comme la CGT pourtant l’inscrivait dans ses statuts inspirés de la charte d’Amiens en 1905. Nous voyons bien aujourd’hui, qu’ayant rayé de ses objectifs l’abolition du salariat et du patronat depuis 1994, la confédération CGT à l’unisson des grandes organisations syndicales œuvre à un syndicalisme rassemblé dans une Europe sociale laquelle, pour reprendre la formule de notre ancien secrétaire Bernard Thibault, garantirait une sécurité sociale professionnelle de haut niveau à chaque salarié européen, un salaire à vie, qu’il travaille, qu’il soit malade, qu’il soit trop âgé pour travailler ou qu’il soit sans emploi.
Hélas pour notre infortuné secrétaire de la confédération CGT de la guerre 14/18, dès juin 1918, avant donc l’armistice du 11 novembre 1918, le premier congrès de la Fédération CGT des cheminots demandait l’augmentation des salaires, le paiement de l’indemnité de vie chère et dans le souffle de la révolution d’octobre en Russie revendiquait la nationalisation des compagnies de chemin de fer sans indemnité. Deux ans plus tard la fédération CGT s’engagea dans la célèbre grève de 1920 pour la nationalisation des compagnies de chemins de fer. Cette grève, provoquée par les compagnies ferroviaires et le gouvernement pour juguler le syndicalisme révolutionnaire, fut écrasée dans le sang (par exemple 11 cheminots tués par la troupe en gare de Capdenac) , les dirigeants de la fédération CGT jetés en prison le lendemain du déclenchement de la grève, le licenciement de centaines de militants. En dépit de cette répression, la fédération CGT continua à associer les luttes des cheminots pour leurs revendications immédiates à l’expropriation des compagnies ferroviaires et à la nationalisation des chemins de fer de la France ce qui se réalisa en 1938.
Hideux dans leur apothéose,
Les rois de la mine et du rail
Ont-ils jamais fait autre chose
Que dévaliser le travail?
Dans les coffres-forts de la bande
Ce qu’il a créé s’est fondu.
En décrétant qu’on le lui rende
Le peuple ne veut que son dûL’Internationale
Pour un service public ferroviaire nationalisé, contre sa destruction par l’Union Européenne du Capital
Aujourd’hui, nous voyons bien que la fédération CGT s’inspire des aspirations des cheminots à s’approprier leur outil de travail que l’État détourne de l’intérêt supérieur de la nation française pour mettre l’appareil ferroviaire au service du capital financier. Après le Brexit et l’arrivée de Macron, la direction de la SNCF suit une double orientation catastrophique pour notre pays : la soumission à l’impérialisme allemand dans le cadre de l’Union européenne et la vassalisation à l’impérialisme américain. La fédération CGT des cheminots dans son journal INFO VRAI ENSEMBLE POUR LE FER met en accusation la direction prise par le Directeur Général , Claude Pépy, prêt à participer à un grand partage des systèmes de transport dans le monde, grâce aux 1000 filiales du groupe SNCF réparties dans 120 pays et ,en même temps (dixit Macron), contraint de se soumettre à l’impérialisme allemand qui demain avec Siemens et la DB maîtriserait l’Airbus TGV européen et seraient les donneurs d’ordre pour Alstom et la SNCF. Furieuses passes d’armes en perspective, avec les conséquences pour tous les travailleurs, entre impérialismes allemand et américain jetant dans la bataille Siemens contre General Electric et et les sociétés des pays compradores telles que Bombardier et Alstom. Il y a quelque chose de pathétique dans cette quête d’une dimension supranationale d’une direction de la SNCF qui s’est résolument écartée de sa mission nationale de répondre, en toute indépendance par rapport aux pays étrangers, aux besoins de transport et d’aménagement équilibré du territoire de la France.
Le journal «INFO VRAI » argumente donc fort bien sur tous les aspects néfastes pour l’efficacité, la capacité et la qualité du transport ferroviaire, qu’engendrent la gestion séparée des différents domaines d’activité de la SNCF, la privatisation ou l’externalisation touchant tant l’infrastructure, le matériel roulant , l’exploitation, voire les services administratifs. Cependant cette accusation légitime est tempérée, pour le moins, par cette supplique lancinante, d’une Europe des chemins de fer harmonisant la concurrence libre et non faussée des sociétés ferroviaires étatiques ou privées des différents pays de l’Europe, avec un statut des cheminots européens de haut niveau qui mettrait fin à la concurrence entre les cheminots d’Europe, ce dumping social sur lequel se lamentent des dirigeants syndicaux désignant du doigt bien sûr ces cheminots de certains pays acceptant de travailler pour un moindre salaire que nous, en France.
Cependant : « la preuve du pudding , est qu’on le mange » (Karl Marx)
Mais alors, cheminots, que vous espériez encore ou pas en une Union européenne félicitée de tous les exploités sur terre, vous n’attendez pas ce futur enchanteur et vous luttez avec acharnement pour l’augmentation des salaires, pour le maintien et l’amélioration du statut, pour la défense de votre outil de travail, contre les fermetures de lignes, le déclin du transport ferroviaire de marchandises, le transfert des trains régionaux et inter-cités vers les cars Macron !
Grand Dieu ! Par des mains enchaînées
Nos fronts sous le joug se ploieraient
De vils despotes deviendraient
Les maîtres des destinées.La Marseillaise
Cheminots, luttez pour que le chemin de fer soit au service de la Nation et non pas de la dictature du Capital
Mais vous tous cheminots, syndiqués ou non, que vous ayez votez ou pas pour quelque parti que ce soit à la présidentielle, France Insoumise, Front National, ou quel qu’autre candidat de droite ou de gauche, vous êtes attachés à votre pays, à son indépendance, à la République une et indivisible, vous connaissez les luttes des cheminots communistes, gaullistes, croyants ou non croyants contre l’occupant allemand, la grève insurrectionnelle à l’appel de la CGT et de la CFTC pour la libération de Paris. Vous qui luttez toujours pour que le chemin de fer soit au service de la Nation et non pas à celui du capital et de l’État à son service , vous continuez le combat de 100 ans pour la nationalisation des compagnies ferroviaires, aujourd’hui trois sociétés étatiques EPIC et leurs filiales privées.
Cheminote, cheminot, n’oublie jamais que les cendres de tes aînés battent sur ton cœur !
Ensemble pour la nouvelle bataille du rail,
Ensemble pour la franche nationalisation démocratique des chemins de fer de France
Références des citations littéraires dans l’ordre :
– Le Forgeron, Arthur Rimbaud
-L’Internationale
-La Marseillaise
-Till Eulenspiegel