Sur ce qui se passe en Grèce par les syndicalistes du Front Syndical de Classe
Ce qui se passe en Grèce est édifiant : un peuple s’exprime sans ambiguïté contre la politique d’austérité qui le plonge dans la misère, le malheur et … aussitôt les premiers dirigeants de l’Union européenne font savoir que ce vote ne compte pour rien et que tout doit continuer comme avant!
Ils imposent de premiers reculs au nouveau pouvoir, la contestation des accords conclus avec l’UE le 20 février ne tardant cependant pas à se manifester fortement à l’intérieur de Syriza, Stathis Kouvelakis membre de son comité central s’exclamant : « Ces institutions ont été créées pour verrouiller les politiques néo-libérales et les soustraire au contrôle populaire. On ne peut pas rompre avec les politiques d’austérité et les mécanismes de mémorandum sans entrer dans une confrontation avec l’Union européenne, et le cas échéant sortir de la zone euro« .
Et tout montre en effet :
- qu’il n’est pas possible dans le cadre de l’UE et de ses traités de mettre en œuvre une véritable politique en faveur du peuple, sans rupture avec ce cadre et avec ces traités!
- que l’objectif d’une « Europe sociale » transformée de l’intérieur est une pure illusion!
- que le silence retentissant de la Confédération Européenne des Syndicats face au chantage de l’UE est la marque de la dépendance de cette centrale aux institutions européennes y compris financièrement.
Elle montre aussi qu’il est indispensable pour les syndicalistes de mener campagne contre l’UE et mais aussi contre ses outils, Confédération Européenne des syndicats » en tête qui aujourd’hui influencent et orientent les principales directions syndicales nationales.
Pendant longtemps, la CGT a justement mené ce combat, jusqu’aux années 90 où l’état-major confédéral a négocié son entrée dans la CES.
Tournant le dos à l’héritage combatif et populaire de la CGT, la Conf’ a alors abandonné toute campagne contre l’Europe, promu le mot d‘ordre trompeur d’Europe sociale, jusqu’à envisager de voter oui au TCE en 2005, ce qui a pu être évité par un vote historique du CCN contrecarrant cette orientation et appelant à voter NON !
Dans ce contexte, les réflexions de Benoit Frachon, secrétaire général de la CGT entre 1945 et 1967 sont d’une brûlante actualité :
« Dans tous les pays du Marché commun, l’Etat fait corps avec les monopoles et met à leur service le pouvoir politique. Comme on le voit, le Marché commun n’est pas ce qu’en disent en général ses promoteurs, un moyen d’améliorer le niveau de vie général des populations. C’est une entente, une association des grands capitalistes en vue d’essayer de surmonter leurs contradictions et de renforcer leur puissance sur le dos des masses exploitées. L’habilité des capitalistes est d’avoir obtenu de certains dirigeants réformistes, qui siègent sur des strapontins au Marché commun, qu’ils couvrent leur marchandise. »
Benoit Frachon, L’Humanité du 8 février 1962
et
« La CGT a dénoncé ces mensonges et mis à jour le caractère impérialiste de cette opération des monopoles qui ne visait ni au bien des peuples ni à l’amélioration des conditions de vie et de travail des prolétaires ni à l’établissement d’une amitié entre les peuples favorables à la paix, mais uniquement aux intérêts des capitalistes, placés dans les conditions actuelles, devant la nécessité d’une concentration industrielle et bancaire de plus en plus impérieuse.
Le Marché commun n’a pas et ne pouvait pas aboutir à l’amélioration de la situation de la classe ouvrière. Il l’a aggravée. Le Marché commun, sous le signe des monopoles, ne pouvait pas ne pas aboutir à ce que ces derniers dominent de plus en plus l’Etat dans chacun de ses pays où tous les gouvernements exécutent désormais fidèlement leur politique.
La domination des monopoles qui a abouti, dans tous les pays du Marché commun, à l’installation de gouvernements à leur dévotion, est une menace permanente pour les libertés ouvrières et démocratiques.
Nous le disons très franchement aux militants des organisations qui participent aux institutions du Marché Commun, nous n’avons aucune confiance dans la possibilité de transformer ces organismes, de les infléchir vers une politique différente.
Quelles que soient les modifications qui puissent leur être apportées, ils poursuivront leur politique actuelle aussi longtemps que les représentants des monopoles et les gouvernements à leur dévotion en seront les animateurs et les bénéficiaires. Nous devons au contraire démasquer leurs subterfuges et expliquer que les Etats-Unis d’Europe dont parlent d’abondance les représentants les plus typiques des monopoles, ne seraient qu’une simple association réactionnaire d’exploiteurs unissant leurs efforts pour maintenir les peuples sous leur domination, et empêcher l’évolution de la société vers le socialisme, vers une véritable collaboration fraternelle des peuples. »
Benoit Frachon, Au rythme des jours, 1967
FSC, mars 2015
IL EST BON DE CITER BENOIT FRACHON,le front syndical de classe renoue avec la combativité et ouvre la voie aux prolétaires de leur délivrance et de leur émancipation de l’exploitation de l’homme par l’homme!