Ce 26 novembre 2023 c’est une belle mobilisation populaire pour la paix qui a eu lieu à Berlin, alors que le gouvernement ne cesse d’activer une politique de guerre, directement calquée sur la ligne impérialiste euroatlantique fixée à Washington. Le chancelier Scholz et son ministre de la guerre Pistorius, SPD (équivalent du PS NDLR) et sa ministre des affaires étrangères allemande Annalena Baerbock sont à la pointe du « soutien inconditionnel » à la guerre contre le peuple palestinien menée par le régime Netanyahu. Ils se sont ainsi employés, de concert avec la cheffe de la commission européenne Van Der Leyen à interdire tout appel au cessez le feu à Gaza ! Ils sont aussi les premiers financeurs en Europe de l’escalade guerrière en Ukraine face à la Russie, contribuant à prolonger la guerre par des livraisons massives de blindés, directement ou par les pays de l’UE qu’ils arment. Alors que l’Allemagne subie une forte inflation et une grave récession, leur priorité est d’abord celle de l’augmentation massive du budget de l’armée pour réarmer l’Allemagne. Un choix on ne peut plus clair d’une politique de guerre.
Dans une RFA qui voit depuis de longues années une coagulation au sein de l’exercice obligée de la grande coalisation des différentes facettes du parti politique bourgeois dans ses différentes composantes réactionnaire allant de la droite extrême CSU CDU aux verts en passant évidemment par le SPD ou les libéraux, les voix de la paix, c’est à dire la voie populaire, sont étouffées. Etouffées par le verrouillage médiatique, mais aussi par le silence d’une partie des organisations dites de gauche, alors que le partie Die Linke, n’en fini pas de s’étioler à mesure qu’il accélère sa dérive à droite toute vers le SPD. Dans ces conditions, cette manifestation du 26 novembre sous le slogan « Non aux guerres – Arrêtez la folie des armements – Façonnez l’avenir de manière pacifique et juste » qui a réuni 20 000 manifestants, dont un grand nombre portaient les drapeaux rouges notamment du DKP, à la porte de Brandebourg apparait comme à la fois une vraie réussite, mais aussi une porte ouverte pour l’espoir. Pour la paix. Mais aussi pour la construction d’une alternative politique résolument antifasciste alors que monte la fascisation, pas seulement par la montée directe de l’extrême droite mais aussi par l’autoritarisme violent et répressif des pouvoirs en place. Oui pour la paix, pour les salaires, pour les libertés ou pour l’environnement, ce qui face à l’exterminisme capitaliste n’est qu’une même question, il est temps de réunir et d’unir les travailleurs, en un vrai front rouge !
Après la manifestation nationale de février, cette journée de mobilisation était le deuxième temps fort d’action du mouvement pacifiste allemand, qui reste sur le terrain, compte tenu de la la guerre en cours en Ukraine, pour montrer à nouveau sa présence dans les rues en raison du programme de réarmement du gouvernement fédéral et maintenant aussi de l’escalade actuelle au Moyen-Orient. Certe, il y a eu moins de monde qu’en février – mais la participation toujours élevé, et ce dans un contexte politique difficile, signe une très forte envie populaire de voire le mouvement se développer. Il convient également de noter que cette fois-ci, la droite n’a pas tenté de s’introduire de force dans la manifestation. Les organisateurs avaient en effet clairement indiqué au préalable que « le racisme, l’antisémitisme, le fascisme et toutes les formes de misanthropie de groupe » n’avaient « pas leur place » lors de cet événement. On ne manquera pas en France, et singulièrement à Paris, de faire la comparaison avec les alliances de fait nouées par le bloc PS PCF EELV pour manifester de façon conjointe avec Macron et ses alliés objectifs de la droite extrême et de l’extrême droite.
Les organisateurs ont dénombré plus de 20 000 participants (au moins 10 000 selon la police), ne peuvent donc que se féliciter par communiqué d’un « grand succès ». Cette journée montre que le mouvement pacifiste se renforce : « Cela nous encourage à poursuivre notre engagement avec encore plus d’engagement. » Le gouvernement fédéral doit œuvrer en faveur d’un cessez-le-feu immédiat en Ukraine et au Moyen-Orient. Concernant la situation en Allemagne, il ajoute : « Nous ne nous laisserons pas retomber dans les « prouesses guerrières » allemandes et nous sommes résolument opposés à l’incitation et à la construction d’images ennemies par le ministre Pistorius et des soi-disant experts comme Masala et Münkler . »
Des photos de la manifestation prises par notre camarade Eva à Berlin
Des prises de paroles pour la paix s’opposant à ces sociaux démocrates toujours fervents partisans de l’union sacrée et de la guerre
La députée du Bundestag Sahra Wagenknecht, qui s’est exprimée samedi au début du rassemblement, a qualifié de « pure folie » l’exigence du ministre de la Défense Boris Pistorius (SPD) selon laquelle l’Allemagne doit être « prête à la guerre ». « Qu’est devenu le parti de Willy Brandt ? », s’est-elle exclamée. Wagenknecht a notamment critiqué la récente augmentation des milliards destinés aux livraisons d’armes à l’Ukraine. Dans le cas des Verts, il est difficilement concevable que le parti soit issu du mouvement pacifiste. Faisant référence à la ministre des Affaires étrangères Annalena Baerbock, elle a déclaré que « cette femme » avait récemment déclaré que ce n’était pas le rôle des hommes politiques de veiller à ce que les armes restent silencieuses. Wagenknecht a qualifié cela d’« absurdité ». Dans le contexte des attaques israéliennes sur la bande de Gaza, Wagenknecht a expliqué que la responsabilité particulière de l’Allemagne à l’égard de la vie des juifs et du droit d’Israël à exister « ne nous oblige pas à blanchir et à soutenir la guerre impitoyable du gouvernement Netanyahu en tant qu’auto-défense ».
Après Wagenknecht, la journaliste Gabriele Krone-Schmalz a pris la parole. Elle ne veut plus accepter les « cris de guerre éhontés » et a l’impression que la majorité des gens veulent moins de rhétorique de guerre et « des activités diplomatiques plus sérieuses ». « Notre démocratie n’est pas défendue en Ukraine, tout comme elle ne l’a pas été dans l’Hindu Kush », a déclaré Krone-Schmalz. Ce combat se déroule « à l’intérieur de nos frontières nationales ». Elle a reçu de nombreux applaudissements pour cela, notamment lorsqu’elle a exprimé l’espoir que les jeunes qui font actuellement preuve d’un grand engagement dans la lutte contre le changement climatique « découvriront la question de la paix ».
Après les deux mentionnés, l’ancien membre du SPD au Bundestag Michael Müller, l’ancien diplomate de l’ONU Michael von derschulenburg, Iris Hefets de la Voix juive pour une paix juste au Moyen-Orient et l’avocate Nadija Samour ont pris la parole samedi.
un contexte de mobilisation différent de la marche de février
En matière de mobilisation, les choses se sont cette fois déroulées différemment de février . Il n’y a pas eu de violente campagne dans les grands médias contre l’événement et ses organisateurs soi-disant « de droite » ; Au contraire, cette fois, l’organisation de la manifestation et les appels à y participer ont tout simplement été censurés. Le Parti Die Linke, dont la direction avait participé à la contre-campagne de février pour tenter de faire baisser la mobilisation, a également agi avec plus de flexibilité. Alors que la direction de l’association régionale de Berlin n’a pas levé le petit doigt pour se mobiliser en faveur de la manifestation, la direction fédérale a toléré la mobilisation d’organisations de base individuelles et d’associations de district ainsi que le soutien à l’appel initial de membres éminents du parti. L’un des dirigeants adjoints du parti – Ates Gürpinar – a pris la parole lors du rassemblement final. La direction du parti a également lancé son propre appel quelques jours avant la manifestation.
L’explication de ce changement de pied, dans les formes du moins est lié essentiellement à des considérations internes. Notamment un effet d’affichage pour les nombreux militants qui continuent à contester la position prise par Die Linke en participant à la campagne contre la manifestation de février. Cela pourrait en -effet devenir important en janvier, lorsque beaucoup se demanderont s’ils doivent rejoindre le nouveau « Parti Wagenknecht » ou rester dans le Parti Die Linke.
Les dirigeants syndicaux ne s’embarrassent pas de telles subtilités tactiques. Les syndicats sont une nouvelle fois restés sur la touche samedi. Ils n’ont pas appelé à manifester et les signataires individuels de l’appel initial issus du spectre syndical étaient pour la plupart d’anciens responsables.
Sur chaque rives du Rhin, choisir entre l’UE du Capital ou la Paix
On ne manquera pas d’observer les similitudes qui apparaissent sur les deux rives du Rhin. Alors que l’Union Européenne organise – jusque dans les obligations de dépenses militaires massives fixée à 2% du PIB ainsi que de l’intégration à l’OTAN – l’escalade impérialiste et guerrière de façon systématique, certaines organisations se réclamant de la gauche et pourtant issue de l’histoire prestigieuses du mouvement ouvrier – on peut citer le PCF en France – en faisant le choix de ne plus s’opposer à cette superstructure mais au contraire de s’y fondre, ajoute jour après de jour de nouvelles sourdine pour en venir à ne plus participer au combat pour la paix. Voir pire, à soutenir directement les budgets de guerre. Cela a par exemple été le cas du PCF de Fabien Roussel, votant les crédits de guerre en Ukraine à l’assemblée nationale. Il est vrai que ce positionnement n’est pas une surprise pour qui se souvient de l’alignement opportuniste lors de la première guerre mondiale des sociaux démocrate sur l’Union Sacrée et les politiques bellicistes. Il permet à ses organisations dont le but affiché est la rupture avec les positions historiquement socialistes dont le cœur battant a toujours été la bataille pour la paix contre les guerres impérialiste, que ce soit à travers la « mutation » en France ou à travers le rejet du « socialisme » en Allemagne, de pouvoir rechercher des strapontins dans des coalitions auprès des forces « sociales impérialistes » tels que le PS / SPD ou EELV / Les Verts. Ces forces qui sont les collaborateurs acharnées de la construction de cette même Union Européenne qui s’est forgée dans un but essentiellement guerrier. Guerre froide d’abord contre le camps du progrès social, de l’antimpérialisme de la décolonisation et de la paix qui était celui de l’Union Soviétique, puis guerre tout court en provoquant l’explosion de la Yougoslavie et 20 ans d’affrontements sanglants et depuis le milieu des années 2000 l’offensive en Ukraine jusqu’à provoquer par le violent coup de force de 2013 de l’Euromaidan la guerre en Ukraine. De fait, europe atlantique ou monde pacifique, chaque travailleurs, l’heure est au choix, sur les deux rives du Rhin qui en la matière ne sauraient séparer les travailleurs d’Europe.
JBC pour www.initiative-communiste.fr