« Il y a toujours des milliards pour faire la guerre, mais pas un sous pour les infirmières ». Ce slogan crié dans les manifestations pour l’hôpital public de ces derniers mois et il y a quelques jours dans les cortèges du 27 janvier pour les salaires trouve une parfaite illustration avec la crise ukrainienne. Depuis la contre-révolution qui a conduit à l’explosion de l’URSS, l’Axe impérialiste États-Unis-Union Européenne et son bras armé qu’est l’OTAN n’a eu de cesse que d’étendre sa stratégie d’encerclement de la Russie. Après avoir mis la main sur les pays de l’Europe centrale en implantant ses bases militaires de la mer Noire à la Baltique et en intégrant au sein de l’OTAN en dépit des engagements pris en 1991 les Pays Baltes, Roumanie et Bulgarie, après un cuisant échec en Géorgie, l’Axe a réussi par un coup d’État eurofasciste, le sanglant coup de force de Maïdan mené par des milices néonazies, à mettre la main sur Kiev en 2014. Depuis lors la stratégie de confrontation guerrière n’a jamais cessé. Sur le sol ukrainien d’abord avec une sanglante répression contre les antifascistes et tout particulièrement les communistes et plus largement contre les parties les plus russophones de l’ex-république soviétique d’Ukraine. La Russie est intervenue militairement pour intégrer suite à un referendum la Crimée à ses frontières, tandis que dans le Donbass la résistance antifasciste refusant de reconnaître la junte de Kiev issue du Maïdan lançait une résistance d’abord pacifique et massive devant les parlements régionaux de Kharkov, Marioupol, Kramatorsk, Odessa, Donetsk. Devant les exactions commises de Sloviansk à Odessa par l’armée de la junte de Kiev, appuyée par les militaires de la société américaine Academy Blackawater, la résistance prenait alors une tournure militaire, avant que les millions d’Ukrainiens du Donbass votent l’indépendance des républiques du Donbass autour de Donetsk et Lougansk. Dès la mi 2014, l’UE et les USA procèdent à des livraisons massives d’armes, et notamment de blindés à la junte de Kiev. En 2015, les États-Unis installent de façon permanente leurs soldats en Ukraine.
En 2014, l’armée ukrainienne ne comprenait que 6 000 soldats prêts au combat. Gonflés par les financements de l’OTAN et les prélèvements sur les travailleurs ukrainiens, l’armée ukrainienne compte désormais 150 000 soldats. Elle vient de promulguer une loi instituant la mobilisation obligatoire, y compris des femmes, dans des « bataillons de défense territoriale ». Pour activer ce surarmement alors que le peuple ukrainien crève de misère, ce sont plus de 14 milliards de dollars qui ont été fournis par l’OTAN. L’Union Européenne a versé 11 milliards d’euros à la junte, malgré la corruption notoire, entre 2014 et 2020. À cela il faut ajouter une assistance d’un milliard d’euros de prêts en 2018, s’ajoutant aux 1.6 milliard et 1.8 milliard consentis en 2014 et 2015.
Le résultat c’est une énorme augmentation des dépenses militaires de l’Ukraine, multipliées par 10.
Date | Dépenses de défense (M.€) | Dépenses de défense (% budget) | Dépenses de défense (%PIB) | Dépenses de défense per hab. | |
2020 | 5614,3 | 8,80 % | 4,13 % | 136,00 € | |
2019 | 4845,5 | 8,50 % | 3,52 % | 116,00 € | |
2018 | 3538,8 | 7,65 % | 3,19 % | 84,00 € | |
2017 | 2862,5 | 6,96 % | 2,88 % | 68,00 € | |
2016 | 2659,5 | 7,78 % | 3,15 % | 63,00 € | |
2015 | 2651,3 | 7,55 % | 3,25 % | 62,00 € | |
2014 | 2206,5 | 5,01 % | 2,25 % | 52,00 € | |
2013 | 2135,4 | 3,28 % | 1,58 % | 47,00 € | |
2012 | 2206,3 | 3,29 % | 1,61 % | 49,00 € | |
2011 | 1797,6 | 3,36 % | 1,53 % | 40,00 € | |
2010 | 1951,7 | 3,87 % | 1,90 % | 43,00 € | |
2009 | 1602,4 | 4,08 % | 1,91 % | 35,00 € | |
2008 | 2318,6 | 3,97 % | 1,88 % | 50,00 € | |
2007 | 2111,1 | 4,61 % | 2,02 % | 46,00 € | |
2006 | 1673,9 | 4,37 % | 1,95 % | 36,00 € | |
2005 | 1358,3 | 4,46 % | 1,97 % | 29,00 € | |
2004 | 1024 | 4,91 % | 1,97 % | 22,00 € | |
2003 | 940,7 | 5,67 % | 2,12 % | 20,00 € | |
2002 | 888,6 | 5,44 % | 1,98 % | 19,00 € | |
2001 | 797,7 | 5,34 % | 1,89 % | 17,00 € | |
2000 | 753 | 6,07 % | 2,15 % | 15,00 € | |
1999 | 582,5 | 7,35 % | 1,90 % | 12,00 € | |
https://fr.countryeconomy.com/gouvernement/depenses/defense/ukraine |
Pour aller plus loin dans cette terrible comptabilité on lira-ci dessous le récent article où Manlio Dinucci revient sur les dépenses considérables engagées par l’Axe USA-UE-OTAN pour lancer la guerre contre la Russie en Ukraine. Chacun pourra juger de la folie des sommes engagées pour permettre aux multinationales de s’emparer de l’Ukraine, mais aussi de s’attaquer à la Russie pour s’arroger ses richesses. Des budgets colossaux au moment où l’Union Européenne ne cesse, dans le cadre de ses ordres passés en application du TSCG dans le cadre du semestre européen, de réduire budgets des écoles et des hôpitaux publics !
L’ensemble de ces faits illustrent un point qui devrait être mis au cœur de l’actuelle campagne présidentielle : la lutte pour la paix rejoint parfaitement la lutte contre l’austérité. De fait, guerre impérialisme, dumping européen anti- social, pression euro-austéritaire contres les services publics et les salaires ne sont que les mêmes facettes du capitalisme. Pour la prospérité du plus grand nombre, pour la paix de tous, la sortie conjointe de l’OTAN, de l’Union Européenne et de l’Euro, et du Capitalisme, est un mot d’ordre qui peut et qui doit unir la très large majorité des travailleurs du pays. Un appel à la paix et à la solidarité pour lequel s’active la campagne politique de terrain menée par les communistes des JRCF et du PRCF. À l’opposé des discours haineux et belliqueux entonnés en cœur par les candidats du parti unique capitaliste et de ses différentes chapelles, les Le Pen-Zemmour, les Macron-Pecresse et les Taubira-Hidalgo-Jadot, qui vouent notre pays à l’explosion, aux larmes de la misère et au sang des guerres impérialistes, voire de la guerre mondiale. Si Union Européenne, Euro et OTAN riment avec affrontements sanglants, mobilisation pacifiste et progressiste rime avec frexit progressiste.
JBC pour www.initiative-communiste.fr
Blackwater est dans le Donbass avec le bataillon Azov
Manlio Dinucci
L’entretien téléphonique entre le président Biden et le président ukrainien Zelensky “ne s’est pas bien passé”, titre Cnn : alors que “Biden a prévenu qu’est pratiquement sûre l’invasion russe en février, quand le terrain gelé rend possible le passage des chars d’assaut”, Zelensky “a demandé à Biden de baisser le ton, soutenant que la menace russe est encore ambiguë”. Pendant que le président ukrainien lui-même prend une attitude plus prudente, les forces armées ukrainiennes s’amassent dans le Donbass au bord de l’aire de Donetsk et Lougansk habitée par des populations russes. Selon des informations provenant de la Mission de surveillance spéciale de l’OSCE en Ukraine, occultées par nos mainstream qui ne parlent que du déploiement russe, il y a là des unités de l’Armée et de la Garde nationale ukrainiennes pour un montant d’environ 150 mille soldats. Ils sont armés et entraînés, donc de fait commandés, par des conseillers militaires et instructeurs USA/Otan.
De 1991 à 2014, selon le Service de recherche du Congrès US, les États-Unis ont fourni à l’Ukraine une assistance militaire de 4 milliards de dollars, auxquels se sont ajoutés plus de 2,5 milliards après 2014, et plus d’un milliard fourni par le Fons fiduciaire OTAN auquel participe aussi l’Italie. Cela n’est qu’une partie des investissements militaires faits par les plus grandes puissances de l’OTAN en Ukraine. La Grande-Bretagne, par exemple, a conclu avec Kiev divers accords militaires, investissant notamment 1,7 milliards de livres sterling dans la potentialisation des capacités navales de l’Ukraine : ce programme prévoit l’armement de navires ukrainiens avec des missiles britanniques, la production conjointe de 8 unités lance-missiles rapides, la construction de bases navales sur la Mer Noire et aussi sur la Mer d’Azov entre Ukraine, Crimée et Russie. Dans ce cadre, la dépense militaire ukrainienne, qui en 2014 équivalait à 3% du PIB est passée à 6% en 2022, correspondant à plus de 11 milliards de dollars.
Aux investissements militaires USA-OTAN en Ukraine s’ajoute celui de 10 milliards de dollars prévu par le plan qu’est en train de réaliser Erik Prince, fondateur de la compagnie militaire privée étasunienne Blackwater -à présent rebaptisée Academy- qui a fourni des mercenaires à la CIA, au Pentagone et au Département d’État pour des opérations secrètes (dont tortures et assassinats), en gagnant des milliards de dollars. Le plan d’Erik Prince, révélé par une enquête de la revue Time, consiste à créer en Ukraine une armée privée à travers un partenariat entre la compagnie Lancaster 6, par laquelle Prince a fourni des mercenaires au Moyen-Orient et Afrique, et le principal bureau de renseignements ukrainien contrôlé par la CIA. On ne sait pas, évidemment, quelles seraient les missions de l’armée privée créée en Ukraine par le fondateur de Blackwater, sûrement avec des financements de la CIA. On peut en tous cas prévoir que, depuis la base en Ukraine, il conduirait des opérations secrètes en Europe, Russie et autres régions.
Sur un tel fond se trouve particulièrement alarmante la dénonciation, par le ministre russe de la Défense Choïgu, indiquant que dans la région de Donetsk se trouvent “des compagnies militaires privées US qui préparent une provocation avec emploi de substances chimiques inconnues”. Ce pourrait être l’étincelle qui provoque la détonation d’une guerre au cœur de l’Europe : une attaque chimique contre des civils ukrainiens dans le Donbass, immédiatement attribuée aux Russes de Donetsk et Lougansk, qui seraient attaqués par les forces ukrainiennes prépondérantes déjà déployées dans la région, afin d’obliger la Russie à intervenir militairement pour leur défense. En première ligne, prêt à massacrer des Russes du Donbass, il y a le bataillon Azov, promu régiment de forces spéciales, entraîné et armé par les USA et l’OTAN, qui s’est distingué par sa férocité dans les attaques contre les populations russes d’Ukraine. L’Azov, qui recrute des néo-nazis de toute l’Europe sous la bannière calquée sur celle des SS Das Reich, est commandé par son fondateur Andrey Biletsky, promu colonel. Ce n’est pas qu’une unité militaire, mais un mouvement idéologique et politique, dont Biletsky est le chef charismatique en particulier pour l’organisation de la jeunesse qui est éduquée dans la haine des Russes avec son livre “Les paroles du Führer blanc”.
Édition de mardi 1er février 2022 d’il manifesto
https://ilmanifesto.it/la-blackwater-e-nel-donbass-col-battaglione-azov/
Traduit de l’italien par M-A P