Aymeric Monville invité de RT
« Sortir de l’UE, de l’Euro et de l’OTAN »
Notre camarade Aymeric Monville était invité sur le plateau de RT France, il commente le 22e acte du mouvement des Gilets jaunes, première journée de mobilisation sous le coup de la loi anticasseurs.
Aymeric Monville a notamment pointé le rôle important joué par l’Union Européenne et l’Euro pour interdire de satisfaire aux revendications des gilets jaunes. Défendant les libertés individuelles, les libertés de la presse, Aymeric Monville explique pourquoi le PRCF alerte contre ce qu’il faut bien désigner comme de la fascisation, dont la répression policière ultra violente des gilets jaunes, l’arrestation de Julian Assange, les lois totalitaire comme celle restreignant le droit de manifester sont des symptômes de plus en plus nombreux et de plus en grave.
Aymeric Monville souligne également le moyen de gagner qui peut se former si un large front populaire, impliquant les syndicats de combat que sont la CGT et la FSU, se forment, rappelant que les mobilisations des gilets jaunes et les manifetations et grèves du 1er mai, du 9 mai, du 27 avril peuvent s’unir.
Magali Forestier (RT France) : Bonjour, nous sommes avec Aymeric Monville, éditeur aux Editions Delga, bonsoir Monsieur. Merci beaucoup d’être avec nous sur RT France.
Aymeric Monville : Bonsoir Magali.
MF : On le voit, 22e samedi de mobilisation. Pas de réponses concrètes en tout cas. Réponses qui sont très attendues la semaine prochaine. Le chef de l’Etat doit prendre la parole. Selon vous, que faut-il comme actions fortes, en tout cas de la part du chef de l’Etat pour répondre à ces revendications?
AM : Effectivement, si le chef de l’Etat était capable d’organiser un referendum pour la sortie de l’euro, de l’Union européenne, de l’OTAN ou du mode de production capitaliste, cela pourrait changer la donne.
MF : Là vous visez très haut.
AM : Voilà, j’ai nommé les carcans qui bloquent la situation. Car à l’intérieur de ce système-là, on l’a bien vu le 10 décembre, il a déjà tout donné. Ils ont eu très peur entre l’acte III et l’acte IV, et tout ce qu’ils ont donné, c’est une sorte de recomposition de nos impôts.
MF : Il n’a rien donné en fait, c’est ce que disent les gilets jaunes.
AM : Exactement. Cela ne remettait rien en cause. Mais il faut arrêter de focaliser sur la personne d’Emmanuel Macron, parce que, subjectivement, il est l’exécutant d’un système qui est de tout façon bloqué. Et je n’ai pas parlé non plus du blocage institutionnel qui est celui de la Ve République. Et en plus on va vers des élections européennes qui entérinent notre propre abandon de souveraineté. C’est-à-dire qu’on fait voter des gens pour qu’ils abandonnent leur souveraineté.
MF : Alors pour vous le problème majeur c’est la question de la représentativité politique aujourd’hui?
AM : Oui, et puis celui de l’organisation même de l’ensemble de la production. Je ne veux pas parler pour les gilets jaunes, car on trouve toujours des ventriloques pour les faire parler d’une manière ou d’une autre. Mais vous avez parmi eux autant des gens de gauche qui sont pour une remise en cause évidente des conditions mêmes de la production que des gens de droite – certains les traitent de fascistes, ce qui est scandaleux, ce sont des patriotes tout à fait légitimes – mais qui ont une certaine nostalgie du gaullisme. Simplement ce gaullisme-là, sans figure de De Gaulle et sans bourgeoisie nationale anti-atlantiste comme on pouvait l’avoir, et encore très timidement, à l’époque de De Gaulle, c’est une voie qui, à mon avis, me semble totalement exclue. C’est pourquoi je suis attentif, en tant qu’analyste à ce que va faire la CGT. S’il y avait des débats, le débat le plus important serait « où en est la CGT? », car on ne comprend pas pourquoi elle ne s’est pas encore mise en avant. Bon il y a eu le 5 février, effectivement, qui a été timide.
MF : Alors il y a la manifestation du 1er mai qui apparemment va être rejointe par les gilets jaunes.
AM : Oui, et il y a le 27 avril, où il y a plusieurs Unions départementales de la CGT qui ont appelé à se mobiliser, plusieurs fédérations, dont notamment celles qui sont toujours à la FSM (Fédération syndicale mondiale). Parce que vous savez qu’il y a un conflit à l’intérieur de la CGT, c’est pour cela qu’elle ne s’est pas encore mise en mouvement. Mais si on a une situation comme en mai 68… Le 13 mai la CGT est rentrée dans le mouvement, et là vous avez 35% d’augmentation du SMIG (SMIC de l’époque).
MF : Parce que pour vous la clef est dans les mains de la CGT?
AM : Non, je n’ai pas dit cela. Mais pour que la mayonnaise prenne, il faut rajouter les éléments du syndicat le plus batailleur historiquement, même s’il a de gros soucis. Il est notamment entravé par la Confédération européenne des syndicats. Et il faut parler aussi de la FSU, dans l’enseignement. Parce que là aussi vous allez avoir une grosse journée de mobilisation qui se prépare le 9 mai. 1er mai et 9 mai. Et là sur les réformes Blanquer. En effet c’est une convergence des luttes qui est l’élément important pour faire gagner les revendications des gilets jaunes. Je ne veux pas donner l’impression qu’il n’y a de sortie que par la gauche, mais pour l’instant il n’y a de mouvement possible que par la gauche. Je n’en vois pas d’autres de ce point de vue-là.
MF : Alors vous me parlez de ces mouvements syndicaux, or le président de la République va s’exprimer lundi, mardi ou mercredi, ce n’est pas encore divulgué. Les réponses finalement elles sont déjà là, dans ces manifestations. Vous pensez que le gouvernement va encore changer de cap, s’il change de cap en tout cas.
AM : C’est la technique du « cause toujours » et dans les manifs, on le voit, c’est plutôt « ferme-la ». Répression policière, répression du droit de manifester. Effectivement il y avait une certaine constitution des droits de l’homme qui disait : « l’insurrection est pour le peuple le plus sacré des droits et le plus indispensable des devoirs ». Simplement on n’est pas encore dans une insurrection. On est dans une réelle insubordination depuis cinq mois, mais effectivement le plus important, c’est de créer les conditions d’une grève générale interprofessionnelle reconductible. Et là je peux vous dire que le gouvernement sera à genoux. Une grande grève comme ce fut le cas en 36 et en 68.
MF : Alors, vous en avez parlé de la loi anti-casseurs qui est entrée en vigueur et qui s’applique, notamment aujourd’hui on a vu des échauffourées à Toulouse, quelques petits heurts à Paris. C’est quoi? C’est l’échec de cette loi?
AM : D’une part. Mais surtout ce qui est très inquiétant, c’est qu’on voit l’arrestation de Julian Assange avant, les menaces contre nos libertés publiques. Car très concrètement on est en train de mettre en prison un journaliste qui a dit la vérité. Et on est en train d’entraver depuis de nombreux mois le droit de manifester. Avec des arrestations préventives. Qu’est-ce que ça veut dire en termes de droit formel?
MF : Est-ce que pour vous les élections européennes qui se profilent sont des élections test pour Emmanuel Macron et sa politique justement ?
AM : Ce qui est terrible c’est qu’avec le grand débat, il motive les gens à voter contre lui pour tel ou tel parti aux européennes. C’est un piège. Ce à quoi il faudrait pousser c’est plutôt à l’abstention pour décrédibiliser complètement ce Parlement européen qui de toute façon n’a aucun pouvoir, paye les élus 8000 euros par mois à ne rien faire sauf insulter le Venezuela comme on l’a vu récemment.
MF : Sauf que l’abstention n’est pas prise en compte dans le vote.
AM : On a montré que nous étions sans doute l’un des peuples les plus politiques du monde. C’est pas un peuple de pêcheurs à la ligne le dimanche. Si les gens ne vont pas voter c’est qu’ils ont des raisons et ça pèse dans l’opinion publique. ça pesait déjà en 2014.
MF : Et donc la prise en compte du vote blanc sera peut-être l’une des mesures annoncées par Emmanuel Macron.
AM : Pourquoi pas? Mais l’important c’est le taux d’abstention et l’abstention et la grève générale me semblent deux bonnes solutions pour les gilets jaunes. Cela peut aider cet immense phénomène à devenir un véritable mouvement.
MF : Merci beaucoup, Aymeric Monville, d’avoir répondu à nos questions sur RT France.
AM : Je vous en prie.