2016 aura été l’année du vote en faveur du Brexit. En France, la majorité des citoyens se prononce pour un référendum pour la sortie de l’UE et de l’euro (lire ici). Une pétition en ce sens initiée par le PRCF a d’ailleurs recueilli plusieurs milliers de signatures.
Et si ce référendum était organisé, il est probable qu’une majorité de français voterait pour la sortie de l’UE et de l’Euro. Logique puisque l’Union Européenne et l’Euro, c’est
la guerre contre les salaires et les droits sociaux, la libéralisation et la privatisation des services publics, le dumping social à travers les délocalisations et la « concurrence libre et non faussée », l’évasion fiscale avec la « libre circulation des capitaux ». L’UE c’est également la guerre et la fascisation, comme les guerres sanglantes en Yougoslavie, et désormais en Ukraine l’ont démontré. L’UE et l’Euro sont en effet des armes d’exploitation massive des travailleurs, renforçant et sanctuarisant la dictature de plus en plus dure et visible de la classe capitaliste.
Dans ces conditions, il est légitime que nombreux soient ceux qui déplorent – rejoignant ainsi les analyses et propositions des communistes, portées par le PRCF et rejointes par de plus en plus de personnalités et mouvements politiques qui lui donnent raison – que perdure encore l’illusion d’une réforme de l’Union Européenne. Ce « plan A » décrédibilise d’ailleurs les programmes populaires, faisant peser par exemple un flou sur la campagne de Mélenchon, un flou démobilisant qui permet d’ailleurs au FN de se poser hypocritement en critique de l’UE, et ce alors que Marine Le Pen a par ailleurs promis qu’elle élue la France ne sortirait ni de l’UE, ni de l’Euro, mais « négocierait » (lire ici).
Mais il faut également déplorer le flou et la confusion entretenus par d’autres, tel le mouvement de M. Asselineau, candidat à la présidentielle, qui tout en prétendant être pour la sortie de l’UE et de l’Euro, indique que l’UPR refuse une sortie de l’UE qui ne se feraient pas aux conditions de l’article 50 du traité de fonctionnement de l’Union Européenne. Une condition bien étrange, venant limiter la souveraineté populaire à l’opposé de l’engagement clair, net, précis et détaillé dans son programme candidat 2017, du PRCF pour le Frexit populaire, sans autre condition que celle que les travailleurs français le décide. Pour faire place aux peuples.
Car de fait, l’article 50 interdit en pratique une sortie dans de bonnes conditions pour le peuple français de l’Union Européenne et de l’Euro. Il interdit, qui plus est, pendant 2 ans de mener une politique par et pour les travailleurs français, laissant les mains libres à la dictature des marchés financiers – via l’Euro – pour écraser une France pieds et poings liés par l’article 50. Rappelons par ailleurs aux partisans inconditionnels de l’article 50 qui se réfèrent au Brexit, cette différence qui ne peut leur avoir échappé que le Royaume Uni dispose de sa monnaie et contrôle sa banque centrale, ce qui change considérablement les effets des négociations en cours sous l’égide de l’article 50. Par ailleurs, chacun peut observer les menaces scandaleuses, violentes, exercées par la Commission Européenne, qui prennent appui justement sur l’activation d’une sortie par l’Article 50.
www.initiative-communiste.fr avait dès 2014 posé clairement les dangers de l’art 50, démasquant cette illusion. En cette période électorale, alors que les passions se déchaînent, la majorité des français qui souhaitent, il est important de repartager cette analyse, ainsi que les précisions apportées par le M’PEP
L’illusion de la sortie de l’UE par l’article 50 du traité de Lisbonne
Certains partis à prétention hégémonique fondés par des politiciens venus de l’UMP cherchent à faire croire que le seul moyen viable de sortir de l’Union Européenne est l’article 50.
Examinons ce que dit le traité et donc les conditions de sortie de l’UE par l’article 50.
Voici ce fameux article 50:
- Tout État membre peut décider, conformément à ses règles constitutionnelles, de se retirer de l’Union.
- L’État membre qui décide de se retirer notifie son intention au Conseil européen. À la lumière des orientations du Conseil européen, l’Union négocie et conclut avec cet État un accord fixant les modalités de son retrait, en tenant compte du cadre de ses relations futures avec l’Union. Cet accord est négocié conformément à l’article 218, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Il est conclu au nom de l’Union par le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, après approbation du Parlement européen.
- Les traités cessent d’être applicables à l’État concerné à partir de la date d’entrée en vigueur de l’accord de retrait ou, à défaut, deux ans après la notification visée au paragraphe 2, sauf si le Conseil européen, en accord avec l’État membre concerné, décide à l’unanimité de proroger ce délai.
- Aux fins des paragraphes 2 et 3, le membre du Conseil européen et du Conseil représentant l’État membre qui se retire ne participe ni aux délibérations ni aux décisions du Conseil européen et du Conseil qui le concernent.La majorité qualifiée se définit conformément à l’article 238, paragraphe 3, point b), du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.
- Si l’État qui s’est retiré de l’Union demande à adhérer à nouveau, sa demande est soumise à la procédure visée à l’article 49.
Donc en conclusion, tant que les autres États de l’UE ne sont pas d’accord sur les conditions du retrait, le pays reste soumis à la Commission Européenne (Commission de Bruxelles) pendant deux ans. On voit bien que dans cette configuration, le pays qui veut sortir par l’article 50 est en position de faiblesse au cours des négociations du retrait. Pour sûr la Commission Européenne et les puissances atlantistes ne se priveraient pas de mettre la pagaille dans le pays réfractaire s’il était trop dur dans les négociations (NDLR. cf. notre article au sujet des menaces de la BCE). On ne peut donc que s’attendre à ce qu’un gouvernement passionnément épris de légalisme se plie à leurs exigences, surtout s’il est favorable au système capitaliste, c’est-à-dire au pouvoir des détenteurs du capital.
Derrière le paravent de l’Art 50, une porte de sortie pour le système…
On voit donc bien que les partis qui proclament la sortie de l’UE par l’article 50 offrent objectivement une issue de secours au grand capital dans la situation où le maintien dans l’Union Européenne du pays concerné serait combattu massivement par la population
Donc en conclusion, tant que les autres États de l’UE ne sont pas d’accord sur les conditions du retrait, pendant une durée qui peut aller jusqu’à deux longues années, le pays reste soumis à la Commission Européenne (Commission de Bruxelles).
MF pour www.initiative-communiste.fr
La tribune du M’PEP le 30 novembre 2015.
Pour sortir de l’Union européenne, ne surtout pas utiliser le miroir aux alouettes de l’article 50 du traite de Lisbonne !
Jusqu’à présent, le Mouvement politique d’émancipation populaire, devenu depuis le Parti de l’émancipation du peuple, a considéré que la sortie de l’Union européenne, et donc de la zone euro, pouvait se faire au moyen de l’activation de l’article 50 du Traité de Lisbonne (voir cet article intégralement à la fin de ce texte). Comme nous pensons que la sortie de l’Union européenne et de l’euro est la condition fondamentale pour résoudre les difficultés du pays, et principalement le chômage et la précarité, même si elle ne suffit pas, nous avons donc préconisé la sortie par l’article 50. Aujourd’hui, après de nombreuses discussions, notamment avec des juristes, et surtout après l’expérience de la Grèce, nous arrivons au constat que la sortie de l’Union européenne en utilisant l’article 50 est non seulement illusoire, mais qu’elle est extrêmement dangereuse. Elle constitue une grave diversion ne pouvant aboutir qu’à l’enlisement du processus de retrait et à la démobilisation de la population. La sortie de l’Union européenne et de l’euro doit au contraire se faire par une décision unilatérale d’un pays, en créant une situation de fait, démarche qui ressemble à la politique de la « chaise vide » menée par le Général de Gaulle entre juin 1965 et janvier 1966.
Respecter la parole de la France ?
On entend dire, ici ou là, que ne pas utiliser l’article 50 du Traité de Lisbonne, qui permettrait précisément de sortir légalement de l’Union européenne, puisque c’est écrit, reviendrait à ne pas respecter la parole de la France, notre pays ayant ratifié ce Traité. Mais c’est exactement le contraire ! Ce serait en activant l’article 50 que la souveraineté du peuple français serait bafouée ! En effet, le Traité de Lisbonne est illégitime depuis 2005. Il ne faudrait quand même pas oublier que le peuple français, le 29 mai 2005, à 55%, a dit NON au Traité constitutionnel européen. Or le Traité de Lisbonne n’est qu’un résumé du Traité constitutionnel européen. En outre, le Traité de Lisbonne a été ratifié par la France à la suite d’un coup d’État parlementaire. Le Congrès (réunion de l’Assemblée nationale et du Sénat) a d’abord révisé la Constitution française le 4 février 2008 pour introduire un Titre XV intitulé « De l’Union européenne » qui fait de l’appartenance à l’Union européenne, en citant le Traité de Lisbonne, une obligation constitutionnelle. Puis, le 8 février, le Congrès (PS, droite, verts) a ratifié le Traité de Lisbonne, passant outre le vote du peuple lors du référendum.
Si nos concitoyens votaient pour la sortie de l’Union européenne et de l’euro, la France aurait alors toute légitimité pour en sortir par un acte unilatéral, sans passer par l’article 50. Ajoutons que le mandat politique donné à la nouvelle majorité imposera qu’elle le respecte ce qui est incompatible avec le recours à l’article 50.
La sortie par l’article 50 est illusoire car c’est un parcours du combattant organisé pour empêcher toute sortie de l’UE
Une lecture attentive de l’article 50, éclairée par l’expérience grecque, montre le caractère parfaitement illusoire de l’utilisation de l’article 50. Qu’on en juge :
Un processus de négociation qui dépend uniquement du bon vouloir du Conseil européen
L’alinéa 2 de l’article 50 stipule que « l’Union négocie et conclut avec cet État [celui qui veut sortir de l’UE] un accord fixant les modalités de son retrait ». Pour nous, la souveraineté d’un État ne peut se « négocier ». Certes, il est évident que des discussions doivent s’engager entre l’État qui veut sortir de l’UE et les représentants de l’UE au niveau du Conseil. Mais en aucun cas il ne peut s’agir de « négociations », ce ne peut être que des discussions, pouvant déboucher – ou non – sur un protocole d’accord. Si aucun « accord » n’est trouvé, l’État souhaitant sortir sera bien obligé de prendre une décision. Par conséquent, autant prendre cette décision le plus vite possible afin d’éviter d’entrer dans le processus de l’article 50.
En outre, cet « accord » doit être « négocié » conformément à l’article 188 N, paragraphe 3 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Ce dernier prévoit que « la Commission […] présente des recommandations au Conseil, qui adopte une décision autorisant l’ouverture des négociations. » Autrement dit, le Conseil peut décider de ne pas ouvrir de « négociations ». C’est une raison supplémentaire pour se passer de son avis et indiquer au Conseil, si ce dernier tarde ou refuse d’ouvrir ces « négociations » ou les retarde, les conditions mises par l’État sortant.
Il faut « l’approbation du Parlement européen »
Si le Parlement européen vote pour la sortie de l’État demandeur (dans quels délais ?), il ouvre la voie à la décision du Conseil. Mais s’il vote contre, que va-t-il se passer ? Une nouvelle fois, le plus simple est de ne pas entrer dans ce garrot et de prendre une décision unilatérale.
Le Conseil doit statuer à la majorité qualifiée
Celle-ci est définie par l’article 205 du TFUE, paragraphe 3, point b, qui stipule : « la majorité qualifiée se définit comme étant égale à au moins 72% des membres du Conseil représentant les États membres participants, réunissant au moins 65% de la population de ces États. » Ainsi, une majorité « qualifiée » peut refuser la sortie d’un État souverain qui le demande, ou lui proposer des conditions inacceptables. Là encore le plus simple est de ne pas mettre le doigt dans cet engrenage.
Les délais peuvent atteindre deux ans !
Le délai commence à partir de la « notification » de l’État au Conseil. Mais en deux ans il peut se passer beaucoup de choses, notamment des tentatives de déstabilisation du gouvernement qui s’engagerait dans cette voie.
Des « négociations » qui excluent le pays demandeur !
Il est en effet indiqué que l’État qui demande à bénéficier de l’article 50 « ne participe ni aux délibérations ni aux décisions du Conseil qui le concernent ». C’est cela que le Traité de Lisbonne appelle des « négociations » ! Et c’est à cette mascarade que nous avons cru jusqu’ aujourd’hui.
Utiliser l’article 50 est extrêmement dangereux et même fatal
De fausses « négociations » qui placent le pays voulant sortir en position de faiblesse
Le pays qui voudrait sortir par l’article 50 se mettrait lui-même en position de faiblesse au cours de « négociations » jouées d’avance, qui reviennent à se mettre la tête dans la gueule du loup.
Offrir aux européistes de tous poils le temps de mettre la pagaille dans le pays sortant.
L’exemple de la Grèce au cours de l’année 2015 doit être médité. Si le Premier ministre Tsipras a capitulé, c’est aussi à la suite des pressions énormes exercées par les oligarques européens et leurs relais en Grèce : grand patronat, grands médias, certains syndicats… Les conditions mises par l’article 50 sont telles, qu’elles sont de nature à empêcher toute réaction immédiate de l’État concerné à des attaques des marchés financiers ou à des troubles organisés par les classes dirigeantes.
Étaler une profonde incohérence politique
Un gouvernement qui s’engagerait dans cette voie serait un gouvernement à 60%, avec un président de la République qui accepterait de sacrifier 40% de son mandat (2 années sur 5) au nom du respect de la signature de la France d’un traité dont il veut pourtant se débarrasser. Où est la cohérence de cette position qui consiste à respecter à 100% les traités européens pendant les deux années de la « négociation », pour pouvoir ensuite en sortir totalement, mais uniquement passé ce délai ? C’est une attitude totalement incompréhensible pour la population à qui on expliquerait qu’elle doit attendre deux ans pour voir appliquer le programme pour lequel elle a voté. C’est même franchement ridicule et suicidaire.
L’article 50 vise en réalité à engluer dans des procédures juridiques interminables et incompréhensibles pour la majorité de la population, les États qui voudraient sortir de l’UE.
Sortir vite en créant un état de fait
Charles de Gaulle, dans C’était de Gaulle, tome 2, d’Alain Peyrefitte, écrit que « C’est de la rigolade ! Vous avez déjà vu un grand pays s’engager à rester couillonné, sous prétexte qu’un traité n’a rien prévu au cas où il serait couillonné ? Non. Quand on est couillonné, on dit : « Je suis couillonné. Eh bien, voilà, je fous le camp ! Ce sont des histoires de juristes et de diplomates, tout ça » ». Nous sommes entièrement d’accord avec cette remarque frappée au coin du bon sens.
La sortie de la France de l’Union européenne ne se fera surtout pas au moyen de l’article 50 du traité de Lisbonne. Pour sortir, la France invoquera les articles 61 et 62 de la Convention de Vienne du 23 mai 1969 sur le droit des traités. Ces articles décrivent le droit de retrait d’un traité international par un État, au motif notamment d’un « changement fondamental de circonstances ».
La sortie de l’Union européenne devra être rapide et unilatérale, autrement dit la France décidera, seule, de sortir. Son geste, à n’en pas douter, provoquera une réaction en chaîne souhaitable, incitant les peuples des autres pays à se mobiliser pour retrouver leur liberté.
La sortie de l’Union européenne s’accompagnera d’un référendum pour réviser la Constitution française afin d’en éliminer tous les articles qui placent le droit français sous la tutelle du droit communautaire européen, particulièrement ceux contenus dans le titre XV intitulé « De l’Union européenne ».
La tragédie grecque démontre qu’aucune négociation n’est possible avec les représentants de l’Union européenne. Ses dignitaires ont dit à plusieurs reprises que les pays membres de la zone euro y étaient pour toujours. Il faut donc éviter la moindre naïveté et préparer dès à présent nos concitoyens à des épreuves qui ne pourront pas être « sereines ». L’angélisme, le juridisme, la naïveté, réels ou simulés, constituent une très grave faute politique.
La voie juridique de l’article 50, ce miroir aux alouettes, est une impasse politique aux conséquences désastreuses.