Il y a un peu moins d’un ans, en application des directives européennes, et notamment des instructions données par la commission européenne au gouvernement français, la Loi de Transition Energétique organisait la privatisation des barrages hydroélectriques, patrimoine commun de la Nation. La Commission Européenne exige que le gouvernement Valls accélère encore le mouvement.
La Commission Européenne lance une enquête pour contraindre la France à accélérer la privatisation des barrages hydroélectriques
Dans une lettre adressée à Laurent Fabius la Commissaire Européenne à l’Energie, Margrethe Vestager, indique qu’elle a ouverte une enquête sur les concessions hydrauliques accordées en France à EDF.
« La commission considère que les mesures par lesquelles les autorités françaises ont attribué à EDF et maintenu à son bénéfice l’essentiel des concessions hydroélectriques en France sont incompatibles avec l’article 106 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne », informe la commissaire européenne.
Article 106 du traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne – (ex-article 86 du TCE auquel les français ont dit NON par référendum le 29 mai 2005)
1. Les États membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n’édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux règles des traités, notamment à celles prévues aux articles 18 et 101 à 109 inclus.
2. Les entreprises chargées de la gestion de services d’intérêt économique général ou présentant le caractère d’un monopole fiscal sont soumises aux règles des traités, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l’application de ces règles ne fait pas échec à l’accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l’intérêt de l’Union.
3. La Commission veille à l’application des dispositions du présent article et adresse, en tant que de besoin, les directives ou décisions appropriées aux États membres.
Article 3 du traité sur l’Union Européenne et son protocole (n° 27) sur le marché intérieur et la concurrence
« COMPTE TENU du fait que le marché intérieur tel qu’il est défini à l’article 3 du traité sur l’Union européenne comprend un système garantissant que la concurrence n’est pas faussée »
Afin de bien préciser sa pensée, la direction de la concurrence écrit dans l’introduction de son rapport que ces attributions créent « une inégalité des chances entre les opérateurs économiques dans l’accès aux ressources hydrauliques aux fins de la production d’électricité permettant à EDF de maintenir ou de renforcer sa position dominante en France sur les marchés de la fourniture d’électricité au détail »
C’est la démonstration éclatante de ce qu’explique depuis des années les militants du PRCF : il n’y a de possibilité de défendre et d’étendre nos services publics qu’en dénonçant les traités européens qui consacrent – et ce depuis le traité de Rome instituant l’Union Européenne en 1957 – la « concurrence libre et non faussée », c’est en dire en sortant de l’Union Européenne (Article 2F du traité de Rome : f) l’établissement d’un régime assurant que la concurrence n’est pas faussée dans le marché commun, repris par l’article 3A du traité de Maastricht). Rester dans l’Union Européenne des patrons, c’est condamner les travailleurs de notre pays à être écrasés par cette arme d’exploitation massive des travailleurs. Ceux qui prêchent en dépit des réalités pour la tragique illusion de l’europe sociale se font les défenseurs objectifs de l’exploitation patronales et du saccage des conquêtes sociales et démocratiques des travailleurs. Ils sont les complices objectifs – quand ils n’en sont pas les responsables directs tels les ministres ayant participé au gouvernement Jospin de la gauche plus rien qui a engagé la privatisation de nombre de secteurs publics, en application des directives européennes – des privatisations.
Et la réaction du gouvernement Valls-euro-MEDEF à ce nouveau diktat de la Commission Européenne ne s’est pas faite attendre puisque Ségolène Royal s’est empressée d’accélérer le processus de publication des décrets d’application de la loi de transition énergétique qui organise la privatisation des barrages hydroélectrique et le démantèlement du service public nationalisé de l’énergie créé par Marcel Paul ministre communiste à la libération en application du programme du conseil national de la résistance.
l’Union Européenne c’est la destruction des services publics, au nom du profit maximal pour la classe capitaliste
Financés par l’argent des travailleurs, les barrages hydroélectriques sont aujourd’hui la source de production d’électricité la moins chère et des plus rentable. Selon les services mêmes du gouvernement, le parc hydroélectrique concédé dégage aujourd’hui une plus value de 2.5 Milliards d’euros par ans correspondant à un bénéficie net annuel de 1,2 milliard d’euro. Un gâteau que les capitalistes veulent s’accaparer et ne plus laisser à un monopole public en cours de démantèlement et déjà partiellement privatisé.
D’ores et déjà le processus de mise en concurrence de plusieurs concessions hydroélectriques est déjà lancée, aussi bien dans les Pyrénées, les Alpes que le Massif Central.
Dans le même temps, et alors que le processus de privatisation de l’Energie résultant de l’application des directives se poursuit, les salariés de l’énergie ne peuvent que constater la baisse continuelle de leurs salaires pendant que les groupes EDF et ENGIE (ex GDF Suez Lyonnaise des eaux) ont versé près de 5 milliards de dividendes à leurs actionnaires. Démontrant manifestement que les privilégiés ne sont pas les salariés, mais bien les actionnaires.
Mobilisé contre l’Union Européenne du capital, les syndicalistes organisent la riposte : grève et occupation d’usines
Contre « les diktats de Bruxelles », les syndicats de l’énergie organisent la mobilisation, et plusieurs mouvements de grève ont eu lieu au cours de ce mois de novembre pour combattre la privatisation de l’hydroélectrique, accompagné d’occupation d’usines.
Dans un communiqué, la CGT «condamne l’injonction insupportable de Bruxelles sur l’hydroélectricité, bradant au privé le patrimoine hydraulique national», et demande à l’État français de «prendre ses responsabilités en refusant de se soumettre à cette mise en demeure».
L’énergie dans l’action, 12 000 MW de baisse : Le réseau sous tension…
Dans la continuité de l’action du 4 novembre, les salariés du secteur de l’énergie agissent à nouveau pour défendre leur outil de travail et les salaires.
Les hydrauliciens, plus déterminés que jamais, se sont appropriés et ont maîtrisé leur outil de travail, avec de nombreuses occupations d’usines dans tout le pays, dès hier soir ! Très vite rejoints par les agents des centrales thermiques, notamment à Gardanne et à Porcheville ainsi que ceux des centrales nucléaires de Chinon, de Golfech et du Blayais.
Ces actions ont contraint le gestionnaire de réseau (RTE), dès 7h, à empêcher toute nouvelle baisse de charge afin de garantir la sûreté et le maintien du réseau. A 8h, il a fallu renforcer le réseau pour éviter toute coupure
Les salariés, avec la FNME CGT, se félicitent de ces premiers résultats avec une action qui a mobilisé de nombreux jeunes et vont continuer à s’opposer au démantèlement des entreprises afin de regagner un vrai service public de l’énergie.
Et l’on ne peut comme Éric Lolagne, délégué syndical CGT, technicien d’exploitation à Saint-Lary, ne pas faire le parallèle avec ce qui s’est passé pour la privatisation des concessions des autoroutes. «Une fois des investissements conséquents réalisés par l’État, voilà que nos installations sont livrées à la concurrence. Nous demandons une renationalisation», Comme pour la privatisation des autoroutes, là aussi décidé pour répondre aux injonctions d’eurostérité imposé par l’euro et l’Union Européenne, il faut craindre des augmentations de tarifs. Mais également s’agissant d’ouvrage représentant des risques majeurs pour la sécurité, et indispensable à la stabilité du réseau électrique, s’inquiété de l’entretien des ouvrages alors que la privatisation engage un processus de cource effrénée au profit immédiat pour les actionnaires des exploitants privatisés.
LA FNME CGT ET LES SALARIÉS REVENDIQUAIENT DE BAISSE DE PRODUCTION ELECTRIQUE
La mobilisation des grévistes fait baisser la production de 15 % en France !
La journée d’action et de grève du 4 novembre 2015 accentue les mobilisations de la nuit précédente. Tels les relayeurs sur la piste d’athlétisme, les salariés de la production d’électricité hydraulique, thermique et nucléaire se sont passé le témoin !
Cette nuit, la FNME CGT et les salariés revendiquaient 7 000 MW de baisse de production. Les chiffres de la matinée montrent un renforcement du mouvement avec 9 000 MW de baisse de production à 10h00.
Après la forte mobilisation dans l’hydraulique des régions Alpes, Pyrénées et Sud-Ouest, les hydrauliciens de Méditerranée, du Centre et de l’Est sont rentrés dans le combat !
Au-delà des baisses de production, c’est l’arrêt de la navigation sur le Rhin avec 100 manifestants sur l’écluse de Marckolsheim et un grand rassemblement des salariés de l’hydraulique qui est attendu à Grenoble en fin de matinée.
La pression va crescendo avec de nouvelles baisses de charges dans le nucléaire et dans le thermique (2 000 MW à Cordemais, 800 à Belleville, 400 au Blayais et 1 300 à Dampierre). Les salariés de la production d’électricité sont entrés dans la lutte pour contrer le dépeçage de leur outil industriel et pour le maintien de l’emploi statutaire.
La FNME CGT condamne l’injonction insupportable de Bruxelles sur l’hydroélectricité bradant au privé le patrimoine hydraulique. L’Etat français doit prendre ses responsabilités en refusant de se soumettre à cette mise en demeure ! Comme l’ont fait les autres pays européens.
De même, il n’est pas acceptable que la Xlière thermique soit sacriXée sur l’autel de la dite « Transition énergétique » alors que les besoins de sûreté réseau et de production seront toujours présents dans les années à venir. Cela doit également passer par le développement de la recherche sur cette Xlière.
La journée du 4 novembre 2015 sonne comme le démarrage d’une mobilisation d’ampleur dans les Industries Electriques et Gazières en ce 3ème trimestre 2015. Dès à présent, la FNME CGT invite ses syndicats, ses syndiqués et les salariés à décider de la continuité des actions et de la lutte. Il nous faut ampliXer la mobilisation pour l’emploi, les salaires, la défense de nos garanties statutaires et du service public de l’énergie ! La FNME CGT invite l’ensemble des salariés à construire dès à présent le 24 Novembre, nouvelle grande journée nationale de grève, de manifestations et d’interventions sur l’outil de travail !
Pas d’austérité dans les IEG ! Pas de bradage du patrimoine de production national !
Communiqué de la CGT FNME 4 novembre 2015
La privatisation de l’énergie imposée par l’Union Européenne, démontre une fois de plus le caractère de classe de la construction européenne. Oui l’Union Européenne, l’euro sont bien des armes pour détruire les conquêtes sociales, pour privatiser et liquider les services publics. France Telecom, Air France, la SNCF, EDF GDF, ou le ministère de l’équipement et son ingénierie publique, les autoroutes, voila autant de secteurs privatisés en vertu des directives européennes… Oui pour s’en sortir, pour une politique de gauche, de progrès social, de transition écologique à l’heure des risques pesant sur le climat, de sécurité énergétique, oui il faut sortir de l’Union Européenne et de l’Euro. Pour recréer un grand pôle public de l’Energie là où l’Union Européenne impose le monopole des groupes privés capitalistes. L’heure est à la mobilisation pour redonner le pouvoir au peuple et scier les barreaux de cette prison des peuples qu’est l’Union Européenne du Capital. Par exemple, en signant la pétition pour exiger un référendum sur l’Union Européenne et l’Euro.
JBC pour www.initiative-communiste.fr site web du PRCF
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www.initiative-communiste.fr site web du PRCF est engagé depuis des années pour combattre la libéralisation du secteur de l’énergie, et dénoncer la privatisation des barrages hydroélectriques :
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Loi de transition énergétique = privatisation des barrages hydroélectriques #scandale
Energie : à vue, sans plan et à contre-courant – le non sens de la privatisation d’EDF-GDF
- Halte à la privatisation des barrages hydroélectriques ! Oui à un grand pôle public, 100% nationalisé, de l’énergie
- Sortir de l’UE, contre les privatisations, nationaliser : Alstom, énergie, transports … [le dossier d’initiative-communiste.fr]
- Energie nucléaire: Pour un référendum sur la nationalisation d’EDF
- Santé, Éducation, Énergie, Poste : Tous ensemble pour le service public !
La privatisation des barrages relancée sous la pression de Bruxelles
Source : Médiapart, Martine Orange, 03-11-2015e Orange, 03-11-2015
Après les autoroutes, les barrages: le bradage du patrimoine public devrait se poursuivre. La direction européenne de la concurrence vient d’ouvrir une enquête pour position dominante d’EDF dans l’hydroélectricité. Le gouvernement semble tout disposé à y répondre en remettant la rente hydraulique au privé, sans réciprocité. Nos révélations.
C’est une lettre qui semble n’avoir jamais été reçue. La teneur du message est pourtant de celles auxquelles il est habituellement porté la plus grande attention. Le 22 octobre, la commissaire européenne chargée de la concurrence, Margrethe Vestager, a adressé à Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères et responsable à ce titre des questions européennes, un courrier pour l’informer de l’ouverture d’une enquête sur les concessions hydrauliques accordées en France à EDF.
Pourtant, ni le ministère des affaires étrangères, premier destinataire de ce courrier, ni le ministère du développement durable, directement impliqué, ni le ministère des finances, ni même EDF, premier concerné, n’en accusent officiellement réception. Interrogés tour à tour, tous feignent l’ignorance ou disent ne pas être concernés. Car reconnaître l’existence de cette enquête européenne reviendrait à mettre le sujet dans le débat public et, encore plus, obligerait Paris à adopter – pour une fois – des positions claires tant en France que vis-à-vis de l’Europe. Mais le gouvernement a plutôt envie de poursuivre les négociations en coulisses, comme cela se pratique sur le dossier de l’énergie depuis quinze ans.
Difficile, il est vrai, d’annoncer en plein sommet sur le changement climatique que l’État s’apprête à renoncer à toute maîtrise sur la gestion collective d’un bien public comme l’eau, et à abandonner l’énergie renouvelable la moins chère et la plus rentable au privé. Encore plus inavouable de la part du gouvernement de reconnaître qu’il accepte de mettre à bas tout le système de péréquation tarifaire et de service public de l’électricité – système auquel nos dirigeants se disent, dans de grandes envolées d’estrades, si attachés.
Car c’est bien de cela qu’il s’agit. Le courrier de Margrethe Vestager, accompagné d’un rapport de 69 pages sur les implications de l’enquête, est sans ambiguïté. « La commission considère que les mesures par lesquelles les autorités françaises ont attribué à EDF et maintenu à son bénéfice l’essentiel des concessions hydroélectriques en France sont incompatibles avec l’article 106 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne », informe la commissaire européenne. Afin de bien préciser sa pensée, la direction de la concurrence écrit dans l’introduction de son rapport que ces attributions créent « une inégalité des chances entre les opérateurs économiques dans l’accès aux ressources hydrauliques aux fins de la production d’électricité permettant à EDF de maintenir ou de renforcer sa position dominante en France sur les marchés de la fourniture d’électricité au détail ».
(Des extraits de cette lettre ont été blanchis pour des raisons de confidentialité)
Cette remise en cause est lourde de conséquences, non seulement pour EDF, mais pour l’ensemble du système électrique français. Car l’énergie hydroélectrique est une des pierres angulaires de ce système. Représentant un peu plus de 12 % de la production électrique en France, les barrages constituent la seule énergie stockable, disponible à tout moment, pour assurer la continuité sur le réseau face aux consommations de pointe et aux intermittences de production, devenues de plus en plus fréquentes avec l’émergence des autres énergies renouvelables (éolien et solaire). Ce sont aussi les barrages qui soutiennent la sûreté du parc nucléaire français, bâti au bord de l’eau, en fournissant l’eau nécessaire au refroidissement des centrales, et en prévenant le risque d’inondations de sites nucléaires.
Toutes ces données ne semblent pas prises en considération, la sécurité paraissant par définition acquise à la commission. « La procédure en cours, dans la mesure où elle vise à faire respecter les règles de concurrence, ne remet aucunement en cause l’application des règles assurant la sécurité approvisionnement, qui continuent à être applicables », nous a répondu le porte-parole de la direction de la concurrence. « Bien sûr, il y a des cahiers des charges qui peuvent poser des obligations de sécurité. Mais que valent-ils face à la perspective de gains rapides, de la vente d’électricité hydraulique quand le MW est le plus cher ? Cela fonctionne jusqu’au jour où il y a un accident », remarque un spécialiste du réseau.
De toutes façons, la grande affaire pour la commission européenne, c’est l’entorse à la concurrence libre et non faussée sur le marché de l’énergie. La France possède le deuxième réseau hydroélectrique européen. Bâti pour l’essentiel au sortir de la Seconde Guerre mondiale, il est totalement amorti. Il permet de produire l’énergie renouvelable la moins chère, entre 20 et 30 euros le mégawattheure, contre plus de 50 euros pour le nucléaire, au-delà de 80 euros pour l’éolien et le solaire. Selon la direction générale de l’énergie et du climat, les installations hydroélectriques dégagent un excédent brut d’exploitation de 2,5 milliards d’euros par an. Investissements et rémunération du capital déduits, le bénéfice s’élèverait à quelque 1,25 milliard d’euros par an.
De tels résultats suscitent bien des convoitises. Tous les privés en veulent leur part. Dès 2006, date de l’ouverture du marché français de l’énergie à la concurrence, les rivaux d’EDF ont demandé à bénéficier eux aussi des concessions hydrauliques, exploitées jusqu’alors à 80 % par EDF et 17 % par Engie (ex-GDF-Suez) dans le cadre de la nationalisation de l’électricité et de la loi sur l’eau. En 2012, l’association française indépendante de l’électricité et du gaz (Afieg), regroupant l’allemand E.ON, l’italien Enel, le suédois Vattenfall, le suisse Alpiq, s’est à nouveau manifestée pour réclamer d’avoir sa part dans les concessions hydrauliques. Depuis, certains membres semblent s’être beaucoup activés pour porter le dossier devant la commission européenne.
Le cas n’aurait pas pris aussi mauvaise tournure si le gouvernement français n’avait pas adopté des positions volontairement floues, pratiquant depuis des années un double langage, promettant une chose à Paris, une autre à Bruxelles. « Le problème ne vient pas tant de la réglementation européenne que de la loi Sapin [de 1993, qui oblige la mise en concurrence et un appel d’offres lors des renégociations de concession – ndlr]. En changeant le statut d’EDF en 2006, en abandonnant le statut de service public, l’État s’est retrouvé dans l’obligation de lancer des appels d’offres lors du renouvellement des concessions hydroélectriques. La droite a enterré le problème. En 2011, il aurait été possible, lors la discussion de la directive européenne sur les concessions, d’exclure les barrages. Le gouvernement allemand, incité par des lobbies très actifs, y est parvenu. Mais le gouvernement français n’a rien fait. En arrivant au ministère, j’ai hérité de la patate chaude », raconte la députée Delphine Batho, ancienne ministre de l’écologie (de mai 2012 à juillet 2013).
À l’époque, Delphine Batho, considérant que ce capital hydraulique payé par les générations passées devait être conservé dans des mains publiques, a cherché des alternatives pour éviter de dilapider ce patrimoine. Elle ira jusqu’à proposer la renationalisation de la production hydroélectrique et la création d’un établissement public pour le gérer. Renationaliser, quel vilain mot ! L’idée est enterrée à toute vitesse par le gouvernement et Bercy, alors que les lobbies électriques européens se mettent en branle pour conjurer tout projet pouvant contrer leurs intérêts.
Sans réciprocité
Le gouvernement ira plus loin. Tandis que le ministre des finances d’alors, Pierre Moscovici, aujourd’hui commissaire européen aux affaires économiques et financières, négocie début 2013 avec la commission de nouveaux dépassements budgétaires français par rapport aux règles de Maastricht, un codicille est discrètement introduit lors de ces négociations. En contrepartie de la bienveillance de la commission européenne sur ses écarts budgétaires, l’État français propose de privatiser ses concessions hydrauliques. « Aucun autre État européen n’a accepté de renoncer à avoir la maîtrise de ses barrages », s’indignent alors plusieurs députés.
Venant en défense de la proposition gouvernementale, la Cour des comptes émet un opportun référé le 21 juin 2013. Elle y relève que l’État n’a pas respecté ses engagements de mise en concurrence des installations hydroélectriques. Ces manquements, insiste-t-elle, entraînent une perte de recettes budgétaires, estimées selon elle à 250 millions d’euros d’ici à 2016 et surtout à une captation de la rente hydroélectrique par les concessionnaires, en d’autres termes EDF.
Mais de quelle rente parle-t-on, interrogent dans un rapport parlementaire d’octobre 2013 sur les concessions hydrauliques les députés Marie-Noëlle Battistel (PS, suppléante de Didier Migaud, elle lui a succédé lorsque celui-ci a pris la présidence de la Cour des comptes) et Éric Straumann (LR). « Comment peut-on considérer que la rente hydroélectrique soit abandonnée au concessionnaire sortant dès lors que celui-ci est obligé, dans les tarifs réglementés de vente, de fournir l’électricité au coût de production ? La rente hydroélectrique profite en réalité au consommateur, directement concerné par la question du pouvoir d’achat… », écrivent alors les rapporteurs en réplique à l’analyse de la Cour des comptes, tout en rappelant que les collectivités, par le biais des redevances, et l’État, grâce aux dividendes d’EDF, sont directement intéressés aux résultats de l’entreprise publique et de sa gestion du parc hydraulique.
Dans leur rapport, les deux députés insistent aussi sur l’importance d’assurer la sécurité du système électrique, de gérer les usages de l’eau (de nombreuses usines et exploitations agricoles sont liées aux infrastructures hydrauliques), de préparer la transition du système énergétique français. Ils soulignent aussi les risques de dégradation des territoires, de suppression d’emplois, de délitement du modèle français. Dans leur recommandation, ils préconisent de confier la gestion du parc hydraulique à un exploitant unique sous la forme d’attribution, afin que l’État conserve la maîtrise de tout le système de l’eau. Le rapport fut adopté à l’unanimité par les membres de la commission des affaires économiques.
Le gouvernement est resté sourd à tous ces arguments. À l’occasion de la loi de transition énergétique, il a lancé la privatisation des barrages. Lors de la discussion sur le projet de loi, les députés de droite comme de gauche ont tenté de s’opposer à cette disposition et défendu le maintien d’un contrôle public du parc hydraulique. En vain. « C’est la raison pour laquelle je me suis abstenue lors du vote de la loi», dit Delphine Batho. L’alliance de circonstance entre une haute administration qui, par idéologie, réfute tout intérêt de l’État, des lobbies privés et des élus qui rêvent de conforter leur pouvoir en captant une partie de la manne des barrages a eu raison de toutes les résistances et objections.
Pour sauver les apparences, le gouvernement prévoit, dans le cadre de la loi sur la transition énergétique adoptée en juillet, une privatisation partielle et non totale. Il est prévu que les concessions des ouvrages hydrauliques soient remises en concurrence par le biais d’appels d’offres. Leur exploitation doit se faire par le biais de sociétés d’économie mixte, l’État ou les collectivités locales détenant au moins 34 % du capital, l’opérateur au moins 34 % aussi. Alors que les affaires liées à l’attribution des concessions d’eau dans les municipalités sont encore dans toutes les mémoires, on n’ose imaginer ce qu’il pourra advenir alors que les enjeux sur ces concessions hydrauliques se chiffrent en centaines de millions d’euros.
Mais il y avait un risque pour le gouvernement, que le nouveau système mette trop longtemps à se mettre en place. La mise en demeure de la direction européenne de la concurrence tombe à pic. Elle devrait permettre d’accélérer le processus et de remettre en cause des concessions qui n’auraient peut-être été renouvelées que dans dix ou quinze ans, voire plus, au motif que l’État se doit de répondre aux injonctions de Bruxelles.
Reste un problème, cependant, qu’il va bien falloir justifier tant au niveau européen qu’au niveau français. Comment expliquer que la France soit la seule à ouvrir ses barrages hydrauliques à la concurrence, alors que tous les autres États européens en conservent un contrôle étroit ? L’Allemagne a exclu ses barrages de la concurrence. Les concessions sont octroyées par les Länder pour une durée de 40 à 80 ans. Et la commune dispose d’un droit de veto sur tout nouvel exploitant. La Suède, dont un des opérateurs lorgne les barrages français, a mis ses barrages sous le régime de l’autorisation publique. En Norvège, les exploitations hydrauliques sont obligatoirement accordées à une structure publique pour une durée illimitée. En Autriche, les concessions sont accordées pour une durée de 60 à 80 ans. En Italie, les concessions attribuées à l’Enel, l’électricien historique, sont toutes maintenues au moins jusqu’en 2029. La Suisse, candidate aussi pour reprendre des barrages en France, ne relève pas du droit européen.
« Vos rapporteurs ont été soumis à la pression insistante d’opérateurs étrangers qui souhaitent pénétrer le marché français sans être menacés sur leur propre marché. Lorsque nous les avons interrogés, ils ont été bien en peine de répondre à nos questions sur la réciprocité. Aucun autre État membre n’est amené à mettre en concurrence un parc hydraulique conséquent dans les mêmes conditions que la France », rappelaient Marie-Noëlle Battistel et Éric Straumann dans leur rapport.
Pour l’instant, l’argument ne semble pas gêner la direction européenne de la concurrence. Celle-ci pourrait même aller encore plus loin. Selon des rumeurs persistantes, elle pourrait interdire à EDF de présenter sa candidature à tout appel d’offres sur les renouvellements de concession. Interrogé à ce sujet, le porte-parole de la commission n’a pas voulu répondre, indiquant que la question était prématurée.
Si ce n’est pas une mise à mort programmée du modèle français, cela y ressemble beaucoup. Le système intégré et unifié, mis en place après la Seconde Guerre mondiale, paraît condamné pour faire place à un système privatisé, morcelé, tel qu’il existait dans les années 1930 et qui se révéla incapable de mener à bien l’équipement du territoire. Les dispositifs prévus signent à terme la fin de la péréquation et des tarifs régulés. La gestion de la Compagnie nationale du Rhône, détenue à 51 % par des collectivités locales et 49 % par Engie, donne une illustration des nouvelles pratiques à venir. Si les collectivités locales touchent quelque 200 millions d’euros de redevances par an, les dizaines de millions de bénéfices restants vont aux actionnaires et aux dirigeants, en aucun cas aux consommateurs. Ce qui s’appelle partager la rente.
Quant à EDF, s’il se trouve privé de tout ou partie de sa production hydraulique, alors que dans le même temps, il lui faut gérer la réduction du nucléaire et le démantèlement de son parc, et que l’État ne cesse de lui imposer de nouvelles obligations, il ne peut que crouler sous les contraintes et être condamné à augmenter sans cesse les tarifs. Toute la charge va être reportée sur les consommateurs et les contribuables. C’est ce qui s’appelle sans doute les bénéfices de la concurrence libre et non faussée.
Source : Médiapart, Martine Orange, 03-11-2015
Privatiser les barrages hydrauliques français, c’est une honte de la part des socialistes, ils nous auront vraiment tout fait et en plus il faudrait voter pour, il ne faut pas qu’il compte sur moi.
Ils sont pire qu’Alexis Tsipras pour la Grèce..