Nous reproduisons, ici, de larges extraits du discours prononcé par le premier secrétaire du Parti communiste d’Ukraine, Piotr Simonenko (sur la photo plus haut), lors de la 22e Conférence internationale des Partis communistes et Ouvriers qui se tenait à La Havane, à Cuba, à la fin octobre.
Beaucoup de gens, à gauche et à travers le monde, disent soutenir le Parti communiste d’Ukraine contre la répression qu’ils subissent; mais prennent-ils seulement le temps d’écouter en même temps ce que ce parti dit ? Ci-joint, donc, de larges extraits de ce que le principal leader de ce parti avait à dire à La Havane sur toutes ces questions.
Le régime Zelenski a franchi le rubicon en ratifiant l’interdiction du parti communiste d’Ukraine, qui était visée depuis 2014 et le coup d’Etat de Maidan. Cette interdiction a été suivie en très peu de temps au cours de cette année 2022 de celle de la plupart des partis d’opposition, la répression des syndicats, la suppression du droit de grève. Ces derniers jours à la suite de la décision de piller les biens du KPU, et puisque là aussi lorsque la digue de la résistance antifasciste est forcée le pire est à suivre, ce sont les biens des églises et la liberté de culte qui est remise en question.
Chers camarades !
Au nom du Parti communiste d’Ukraine, je souhaite cordialement la bienvenue aux participants à la 22e Rencontre internationale des partis communistes et ouvriers. Notre parti a été illégalement interdit dans mon pays. Nos camarades et nos semblables subissent des persécutions politiques, des arrestations et des violences physiques de la part du régime néo-nazi et oligarchique présentement au pouvoir, un régime qui est, par essence, réactionnaire et fasciste.
Nous nous sommes réunis ici sur l’Ile de la Liberté à un moment difficile. Les forces de l’impérialisme international, les requins de la mondialisation, dans leur lutte pour redessiner la carte politique du monde, pour les ressources et les marchés des matières premières, recourent à toutes les méthodes et agissent en fait comme des instigateurs de la Troisième Guerre mondiale. La tragédie est que les forces réactionnaires utilisent activement le néonazisme et le néofascisme pour atteindre leurs objectifs.
(…) Après l’éclatement de l’URSS, ce sont les États-Unis et la Grande-Bretagne qui ont entrepris de créer un État néofasciste sur le territoire de l’ancienne Ukraine soviétique et en sont devenus les principaux commanditaires et bénéficiaires.
Les réformes qu’ils imposaient à l’Ukraine, donnaient au capital le contrôle de toutes les sphères de la vie de la société et assuraient le contrôle total des sociétés transnationales sur la vie socio-économique du pays et, par conséquent, créaient la base matérielle de l’avènement et de l’établissement, à la suite d’un coup d’État armé de février 2014, du pouvoir des forces les plus réactionnaires : la bourgeoisie compradore alliée aux néo-fascistes et au crime organisé.
Ce sont ces mêmes forces, en Ukraine, qui ont aussi contribué à détruire tous les acquis socialistes, ainsi que notre souveraineté économique et qui auront également provoqué une profonde lumpenisation de la société.
C’est au travers de ces mêmes forces que les États-Unis ont formé une structure de pouvoir vertical fantoche et s’assurent depuis d’un contrôle externe sur notre pays.
C’est enfin aussi par ces forces que les USA ont déclenché en Ukraine une guerre civile fratricide, une guerre contre les citoyens du Donbass qui défendaient leurs droits et libertés constitutionnels. Ce sont ces forces qui, à l’instigation des milieux dirigeants américains, ont fait évoluer la guerre civile du Donbass vers une guerre contre la Russie (…)
Le sénateur américain Lindsey Graham a dit, à un moment donné, de manière très cynique, qu’avec les armes américaines, l’Ukraine combattra la Russie jusqu’au dernier homme. Des civils, des innocents — des personnes âgées, des femmes et des enfants — meurent en Ukraine. C’est une tragédie (…)
De telles déclarations de faucons de guerre justifient notre position : la menace d’une offensive fasciste est réelle, la guerre que les États-Unis et l’OTAN mènent aux mains des Ukrainiens sur le territoire ukrainien est une guerre servant uniquement les intérêts des impérialistes américains.
Des milliards de dollars sont investis dans la production d’armes et de munitions léthales; la nouvelle Première ministre britannique, Liz Truss, se dit prête à utiliser des armes nucléaires, un grand nombre de troupes de l’OTAN sont concentrées aux frontières de l’Ukraine et de la Biélorussie.
Les impérialistes ferment les yeux sur le fait que le régime profasciste de Zelensky se débarrasse impitoyablement des opposants politiques. Toute manifestation de libre pensée est anéantie par des unités punitives. Les crimes des hitlériens et de leurs complices, pendant la Seconde Guerre mondiale, qui ont brûlé vifs des gens à Oswiecim et qui ont organisé les massacres de Gernica et Khatyn, sont glorifiés (…)
Camarades !
Au vu de tout ce qui se passe en Ukraine, il faut constater qu’il n’y a malheureusement pas de consensus entre les partis communistes et ouvriers sur la nature du conflit armé en Ukraine, ainsi que sur la position du Parti communiste du la Fédération de Russie, qui a soutenu l’opération spéciale.
Étant donné que toute confrontation militaire a ses propres caractéristiques spécifiques, la toute première tâche de tout marxiste est d’identifier sa nature orientée, avec une évaluation appropriée.
La guerre du Donbass, contre le régime de Kiev, doit être considérée comme une lutte de libération nationale, essentiellement une guerre pour l’indépendance du régime fasciste au pouvoir, pour le droit du peuple à parler sa langue russe natale et à ne pas suivre le cours antirusse imposé par les États-Unis.
Sur la base de la théorie marxiste, le conflit militaire en Ukraine ne doit pas être considéré comme une guerre inter-impérialiste au sens littéral du terme, et de plus, du point de vue de la Russie, il est considéré comme la lutte contre une menace extérieure à la sécurité nationale et le fascisme.
Comprenons-nous bien tous ; les milices populaires du Donbass n’aurait pas été en mesure de résister à l’armée ukrainienne équipées de toutes ces armes étrangères, de sorte que leur défaite aurait inévitablement conduit à la destruction totale de la population russophone, dont beaucoup étaient des citoyens russes.
Une armée de milliers de nationalistes ukrainiens, sous le commandement d’instructeurs américains et de l’OTAN, s’était concentrée sur les frontières de ces 2 républiques, un plan d’invasion détaillé avait été élaboré à l’avance par les généraux de Washington. Ils attendaient tous les ordres. Pour protéger ses citoyens et assurer la sécurité nationale, la Russie n’avait pas d’autre choix non plus que de mener une frappe préventive.
Conformément à la Constitution de la Fédération de Russie, le Président a pris les mesures stipulées par la loi, car il était impossible de résister à l’agression d’une autre manière.
De plus, le processus de négociation dans le cadre des accords de Minsk avait été délibérément saboté par Kiev, avec le soutien des États-Unis et de l’Union européenne. L’instauration de la paix en Ukraine ne faisait pas partie des plans de Washington et de l’OTAN.
Dans un tel contexte, la position du Parti communiste de la Fédération de Russie était et demeure tout à fait raisonnable (…)
Compte tenu de la situation dans le monde et de la nécessité de lutter pour la fin de la guerre et l’établissement d’un ordre mondial juste, nous — les communistes et les ouvriers parties prenantes — devrions concentrer nos efforts dans les domaines suivants :
- Le renforcement de notre solidarité, entre nous, mais aussi avec les autres forces progressistes, dans la lutte contre le néofascisme et les instigateurs d’une troisième guerre mondiale;
- Organiser un système d’information publique véridique sur ce qui se passe en Ukraine aujourd’hui, comment cela menace l’Europe et comment cela menace aussi l’humanité ;
- Expliquer aux gens que la guerre civile dans le Donbass, entre 2014 et 2022, de même que la guerre entre Ukraine et la Russie, furent provoquées et déclenchées par les régimes profascistes en Ukraine à la demande et dans l’intérêt des États-Unis afin de créer une tête de pont pour le démembrement et la destruction de la Russie en tant que rival géopolitique;
- Intensifier la lutte contre toute tentative de glorification de l’idéologie nazie, restaurer la véritable histoire de la Seconde Guerre mondiale; soutenir ceux qui se prononcent pour un règlement pacifique et la fin de la guerre en Ukraine, quelle que soit leur affiliation politique. De tels politiciens et de telles forces existent dans tous les pays.
Il serait également nécessaire de déployer, au niveau des parlements nationaux, ainsi que du Parlement européen, pour neutraliser le plus possible les actions provocatrices des États-Unis et de leurs alliés dans la région Asie-Pacifique contre la Chine. Combinées à la guerre en Ukraine et à une éventuel affrontement plus direct entre la Chine et les États-Unis, en particulier dans le contexte des déclarations sur une « menace nucléaire » russe, les pires prévisions pourraient malheureusement devenir réalité.
Chers camarades !
La lutte pour mettre fin à la guerre fratricide en Ukraine, déclenchée par les multinationales et leurs laquais au sein des différents gouvernements des États européens et pas seulement européens, une guerre dans laquelle l’OTAN, dirigée par Washington, est de facto partie prenante du conflit (fourniture de armes, munitions et formation des forces armées ukrainiennes, financement et contrôle de la campagne militaire) est la lutte pour empêcher une troisième guerre mondiale qui n’est qu’à un pas de nous. Nous devons tout faire pour l’empêcher.
Merci de m’avoir donné l’occasion de m’adresser aux participants à cette réunion internationale et d’exprimer la confiance en notre victoire, une victoire de la « lumière » sur les « ténèbres ».
Piotr Simonenko, premier secrétaire du Parti communiste d’Ukraine,
22e Conférence internationale des Partis Communistes et Ouvriers à La Havane, Cuba
Octobre 2022