Né le 19 mai 1890 à Hoang Tru, district de Nam Dan, province de Nghe An, protectorat d’Annam, mort le 3 septembre 1969 à Hanoï (Vietnam), Ho Chi Minh fut membre du Parti socialiste SFIO en 1919 puis du Parti communiste français en 1920, représentant du Komintern en Asie du Sud-Est en 1927-1931, fondateur du Parti communiste vietnamien en 1930. Il est aussi le fondateur de la Ligue vietminh en 1941, président du premier gouvernement de la République démocratique du Vietnam en août 1945.
Nguyen Tat Thanh était le troisième enfant de Nguyen Sinh Sac (1863-1929), lettré de la province de Nghe An, reçu au grade de licencié au concours littéraire de 1894. Jusqu’à l’âge de dix ans, il porta le nom de Nguyen Sinh Cung. Nguyen Sinh Huy fréquenta les lettrés patriotes du pays et se lia avec Phan Boi Chau qui organisa en 1902 le mouvement « Dong Du » (Exode vers l’Est) en direction du Japon, dans le but de ranimer la résistance nationale. Il pencha toutefois plutôt du côté des thèses de Phan Chau Trinh et des partisans de la modernisation de la société et de la culture vietnamiennes et inculqua à son fils l’idée qu’il était d’abord nécessaire de maîtriser le savoir moderne. Durant les années 1905-1908, le mouvement national connaissait un essor très rapide. En 1908, se déroulèrent en Annam et notamment à Hué, de graves manifestations paysannes contre les impôts. Les nationalistes organisèrent, la même année, des conspirations, comme la célèbre tentative d’empoisonnement de la garnison de Hanoï. Les lettrés modernistes faisaient campagne en faveur de la rénovation culturelle, de l’éducation du peuple et de la démocratie et préconisaient l’ouverture d’écoles destinées à devenir les foyers d’une nouvelle culture nationale. C’est dans cette atmosphère de bouillonnement intellectuel et politique que se forma Nguyen Tat Thanh.
Arrivé à Marseille en 1911, il adressa le 15 septembre une lettre au président de la République sollicitant son admission comme interne à l’École coloniale. Celle-ci comptait depuis sa création en 1885 par Auguste Pavie, une section d’élèves indochinois qui, tout en étant internes à l’école, poursuivaient en même temps d’autres études. « Je suis entièrement dénué de ressources, écrivait le jeune homme, et avide de m’instruire. Je désirerais devenir utile à la France vis-à-vis de mes compatriotes et pouvoir en même temps les faire bénéficier des bienfaits de l’instruction. » Sa candidature qui n’était pas patronnée par le Gouvernement général de l’Indochine fut rejetée mais il est vraisemblable que Thanh était parti en France dans le but d’acquérir une formation intellectuelle moderne, ce qui constituait la priorité pour les lettrés réformistes.
Ce « voyage à l’Ouest » fut pour le futur Ho Chi Minh le début de trente années d’errance à travers le monde et de recherches politiques qui ne devaient s’achever qu’en 1941, lorsqu’il revint par la Chine sur le sol vietnamien. Vers 1914, il se fixa un moment à Londres où il semble avoir travaillé au célèbre hôtel Carlton et adhéré à une fraternité de travailleurs chinois émigrés, les « Travailleurs d’outre-mer ». Il entretint une correspondance avec Phan Chau Trinh qui vivait depuis 1911 en France, où son ami Phan Van Truong avait mis sur pied un petit groupe de patriotes modernistes, la « Dong Bao Than Ai » (Fraternité des compatriotes). Il s’installa en France à une date imprécise, peut-être dès la fin de l’année 1917, comme l’écrivent la plupart de ses biographes, ou seulement en juin 1919 comme l’indiquent les services de la préfecture de police qui ne l’identifient qu’à l’automne 1919, après la distribution des célèbres « Revendications du peuple annamite » adressées en juin 1919 à la Conférence de Versailles et signées du pseudonyme qu’il venait de se donner, Nguyen Ai Quoc (Nguyen le patriote).
Il fréquentait les milieux nationalistes étrangers, les Coréens, les Irlandais, les Indiens, alors actifs à Paris, en raison de l’attraction que constituaient pour eux, les travaux de la Conférence de la Paix, alors réunie à Paris. Il était très influencé par la pensée moderniste et démocratique de Phan Chau Trinh, ce qui le conduisit à s’intéresser au socialisme français. Il se lia à des socialistes et à des syndicalistes parisiens, adhéra au Parti socialiste, vraisemblablement en 1920, année où l’Internationale communiste, qui venait de consacrer son IIe congrès (19 juillet-17 août) à la question nationale et coloniale, réunit à Bakou le Congrès des peuples d’Orient (ler-8 septembre). Il participa aux débats relatifs à l’adhésion à la IIIe Internationale. C’est en tant que délégué d’une fantomatique Fédération d’Indochine qu’il assista au XVIIIe congrès de la SFIO à Tours en décembre 1920. Il y prit la parole le 26 décembre pour réclamer avec véhémence que le parti entreprenne une action véritable en direction des colonisés. Pour Ho Chi Minh, adhérer au communisme, c’était opter pour l’Internationale qui ne posait plus le problème colonial seulement en termes moraux d’abus ou de justice, mais en termes politiques de libération nationale et de lutte révolutionnaire.
Premier communiste vietnamien inscrit à la 9e section parisienne de la SFIC, il devint alors, avec une poignée d’autres militants originaires de Madagascar, des Antilles, du Maghreb ou d’Indochine, en particulier le chimiste Nguyen The Truyen, lui aussi membre du Parti communiste, l’un des animateurs les plus actifs du communisme parmi les peuples colonisés. Il signa de nombreux articles sous divers pseudonymes dans les journaux et les revues comme, l’Humanité, la Vie ouvrière, le Journal du peuple, le Libertaire, ou même, provinciaux tel le Quatrième état de Toulouse. Il fut membre du Comité d’études coloniales, créé par le PC en juin 1921, qui préfigurait la future section coloniale du comité central. Il participa, semble-t-il, en 1921, au Ier congrès des Jeunesses communistes à Montluçon et au congrès du PCF à Marseille. Surtout, il fut l’un des fondateurs de l’Union intercoloniale qui vit le jour en juillet 1921 et de son journal, le Paria, dont les trente-huit numéros parurent d’avril 1922 à avril 1926. Enfin, il entreprit de rédiger en collaboration avec Nguyen The Truyen un tableau critique d’ensemble du système colonial français, le célèbre Procès de la colonisation dont le premier volume parut sous sa signature, en 1925. Le Paria et le Procès eurent un écho réel en Indochine et exercèrent une certaine influence sur la presse d’opposition vietnamienne dont ils constituèrent l’une des sources d’inspiration.
Ho Chi Minh développa dans ses écrits une approche particulière du communisme combinant à la fois des références marxistes, des thèmes patriotiques et des analyses populistes. Dans un article publié en mai 1921 dans la Revue communiste, il exprima sa conviction que le communisme était susceptible de s’implanter en Asie « plus facilement qu’en Europe ». À cela, plusieurs raisons : la force des traditions collectivistes dans la culture asiatique, la persistance de la communauté villageoise, le sens de l’égalitarisme de la société paysanne. En Asie, le communisme devait donc se développer moins comme un produit de la lutte de classe prolétarienne que comme la révolution des nations opprimées. Toute son action consista à démontrer inlassablement, l’existence d’un potentiel révolutionnaire insoupçonné chez les peuples d’Extrême-Orient, à affirmer au fond leur « majorité révolutionnaire ». Les sociétés paysannes de l’Asie, possédaient des réponses propres, différentes de celles de l’Europe, mais non pas inférieures, au problème du développement du communisme dans le monde et à celui du passage au socialisme. Élaborées plus ou moins intuitivement par Nguyen Ai Quoc au cours de son séjour en France, elles allaient constituer pour lui un acquis durable qui devait orienter son action ultérieure. Il quitta la France au début de l’été 1923 pour se rendre en tant que délégué des colonies françaises au congrès de fondation de l’Internationale paysanne (Krestintern) convoqué à Moscou pour le 1er octobre 1923.
Désormais, son activité militante allait se situer dans un contexte politique nouveau, celui de l’action du Komintern dont il allait être l’un des représentants en Asie du sud-est de 1925 à 1933. Fondateur du Parti communiste vietminh en 1941, il allait organiser la Révolution d’août 1945 au Vietnam et présider le premier gouvernement de la République démocratique du Vietnam du 2 septembre 1945 à sa mort. Nous n’avons pas besoin de raconter plus le destin hors du commun d’Ho Chi Minh, qui est bien connu et a donné lieu à l’édification d’un des derniers Etats socialistes encore debout après la chute de l’URSS. Souvenons-nous de sa présence lors de la création du PCF au Congrès de Tours et du fier service qu’il a rendu au peuple français et aux peuples colonisés.
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