Appel contre la répression politique en Corée du Sud, contre l’interdiction du Parti progressiste unifié
Le 19 décembre 2014, la Cour constitutionnelle de la République de Corée (Corée du Sud) a prononcé l’interdiction du Parti progressiste unifié (PPU). En elle-même une telle mesure est d’une extrême gravité dans la mesure où elle intervient dans un des domaines essentiels de la liberté d’association. Elle ne peut être qu’exceptionnelle, et sous le respect de toutes les garanties démocratiques essentielles telles que proclamées par les textes internationaux porteurs de la conscience universelle. Or, selon nos informations, c’est loin ici d’être le cas.
Les conditions mêmes dans lesquelles cette mesure a été prise, sans avoir été précédée d’un débat contradictoire assurant le plein exercice des droits de la défense, constituent une grave atteinte au droit fondamental à un procès régulier, proclamé par la Déclaration universelle des droits de l’homme et le Pacte des Nations Unies du 16 décembre 1966 sur les droits civils et politiques.
Le volume de la sentence, de 347 pages, est aussi contraire à toutes les exigences de la démocratie, dans la mesure où elle ne se prête pas à une large diffusion qui permette à l’opinion publique d’en vérifier la légitimité.
Mais plus graves encore sont les motifs de cette décision. En effet, il n’est reproché au PPU, et encore moins prouvé, aucun acte délictuel concret, mais seulement de développer des thèses de tendance socialiste, qui de ce fait seraient la preuve d’une obédience à la République populaire démocratique de Corée (Corée du Nord).
Tout d’abord, le fait de fonder la décision sur les thèses qui sont imputées au PPU caractérise le délit d’opinion, contraire aux droits fondamentaux sur la liberté de conscience et d’expression proclamés par les textes internationaux ci-dessus rappelés.
Il est d’ailleurs significatif que ces mesures ne peuvent être prises qu’en vertu d’une loi dite de sécurité nationale, datant de 1948 et héritée d’une période dictatoriale qui devrait l’avoir rendue aujourd’hui obsolète.
Et l’on peut encore moins admettre que le développement de thèses de tendance socialiste serait en soi une preuve d’obédience à la Corée du Nord, car il faudrait alors considérer non seulement que la Corée du Nord serait l’inspiratrice de tous les zélateurs de courants socialistes de par le monde, mais aussi qu’elle aurait déjà inspiré les thèses socialistes développées depuis le XIXe siècle.
Au surplus, les principes démocratiques, universellement consacrés par la Charte des Nations Unies, comme étant le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes impliquent le droit et l’utilité des débats démocratiques sur les formes dans lesquelles doit et peut s’exercer cette libre disposition. C’est également à ce droit fondamental que porte atteinte l’interdiction d’un parti sous prétexte qu’il serait porteur de certains termes de ce débat.
Enfin, le grief d’obédience à la Corée du Nord au seul motif de ces thèses est d’autant plus surprenant et irrecevable que dans le même temps les autorités sud-coréennes se déclarent favorables à un dialogue entre les gouvernements des deux Corée, que cela répond au droit du peuple coréen en son ensemble à disposer de lui-même, et que l’article IV de l’accord de cessez-le-feu du 27 juillet 1953 recommandait aux deux gouvernements coréens de tenir dans les trois mois une conférence au niveau le plus élevé pour résoudre la question coréenne.
Toutes ces raisons nous dictent de faire valoir aux autorités de Corée du Sud combien l’interdiction du Parti progressiste unifié, et plus encore l’ensemble des mesures de répression politique qui en sont le cortège peuvent porter atteinte à l’image démocratique dont elles se revendiquent, et de rétablir le PPU et ses membres dans l’intégralité de leurs droits et libertés.
les signataires, membres du Comité international pour les libertés démocratiques en Corée du Sud (ex-Comité d’initiative contre la répression politique en Corée du Sud)
Le PRCF s’associe à cet appel