Dans un article d’octobre 2020, le Monde Diplomatique titre : « Bolivie, chronique d’un fiasco médiatique », mimétisant le titre du roman de Garcia Marquez : « Chronique d’une mort annoncée ».
Les commentaires en italiques sont d’Antoine Luci.
Dans une introduction objective qui rappelle l’analyse du site Cochabamba de la Jeunesse Communiste de Bolivie, le MD se veut rassurant. En deux tours, prévus par la constitution bolivarienne, le président sortant Evo Morales devance son adversaire Carlos Mesa de plus de 10 points et est déclaré vainqueur avec 48% de voix contre 36,51% pour Mesa.
Malgré l’évidence des faits, Mme Jeannine Añez, une sénatrice de second rang, s’autoproclame alors présidente, sans quorum au parlement, tandis que la presse internationale dénonce une tentative de fraude, dont on sait, souligne le chroniqueur, qu’elle n’a jamais eu lieu.
De quoi rappeler l’objectif des États-Unis de mener la guerre au Venezuela et à la Bolivie, projet clairement dessiné par l’administration Trump !
Si bien que Sintes, sur France Inter, lui reconnaît les vertus d’un président extrêmement populaire, d’une longévité largement supérieure à celle de ses prédécesseurs tandis que Xavier Mauduit dans « 28 minutes » sur Arte, le 12 Novembre 2019, lance en souvenir qu’en 1871, Mariano Melgarejo, ancien président bolivien indien, fut renversé après avoir endetté et cumulé les défaites lors de conflits territoriaux.
Que vient faire cette comparaison insidieuse colportée par les médias de masse ? Car cette allusion à l’histoire de la Bolivie est totalement anachronique et cache l’obstination des États-Unis depuis la Enmienda Platt, 25 février 1901, cette volonté de soumettre les peuples d’Amérique Latine à la soif des États-Unis d’empêcher l’émancipation des peuples. Rappelons qu’Evo Morales a beaucoup fait pour son peuple : construction de logements, redistribution des profits, expropriation des terres pour les redonner aux paysans, nationalisation des hydrocarbures.
La junte Anez, nouveau pouvoir bolivien, poursuit Evo Morales pour « terrorisme et sédition », un chef d’accusation passible de 30 ans de prison qui l’empêche de se présenter.
C’est alors qu’intervient la démission d’Evo Morales le 10 Novembre. Rappelons qu’Evo a dû se réfugier, sous la pression de l’état-major de l’armée et des exactions de l’opposition, au Mexique pour rejoindre l’Argentine.
Interrogé, le consultant engagé par l’Organisation des États d’Amérique (OEA), le professeur Irfan Nooruellin suggère dans son silence la réponse implicite suivante : la Bolivie vient de subir une rupture de l’ordre constitutionnel appuyée par l’armée, autrement dit un coup d’État.
Le Président élu en exil depuis le Mexique et lors d’une émission retransmise en direct sur la chaine UNAM Université National du Mexique s’explique :silence dans les médias internationaux !
Coup d’État militaire contre un gouvernement populaire ? La rédaction de Médiapart, pourtant toujours avide de défendre la “liberté d’expression” et la démocratie, explique le 14 décembre qu’il s’agit d’« une logique beaucoup plus complexe et aléatoire liée à la dynamique cumulative et aléatoire liée à la dynamique cumulative des événements. »
Cette dialectique en apparence a le mérite de révéler combien les joutes verbales sèment la confusion dans les consciences au risque de dire la vérité sur un Président aimé par son peuple et proclamé dans les urnes comme le libérateur du joug du capitalisme et un ancrage au socialisme et à la révolution bolivarienne.
Et le Figaro d’ajouter sa pierre de touche à l’édifice journalistique : « ce n’était pas un coup d’État, c’était un vide constitutionnel”, sous la plume de Patrick Bèle.
Et si, tout simplement, comme le pense le mouvement marxiste, il s’agissait d’une négligence d’Evo Morales de remettre sa confiance aux forces armées au lieu de constituer une armée du peuple au service de la construction bolivarienne et du socialisme ?
C’est pourquoi la Jeunesse communiste de Bolivie a publié sur son site l’analyse de John Curiel, scientifique chercheur au laboratoire des sciences et des données électorales du MIT, titulaire d’un doctorat en sciences politiques de l’Université de Caroline du Nord, comme l’a fait le PRCF (lire ici).
Et la jeunesse communiste de Cochabamba de conclure : La fraude électorale est un problème grave, certes, mais faire confiance à des preuves non vérifiées en tant que preuves de fraude est une menace sérieuse pour toute démocratie.
Gageons que la victoire le 18 Octobre des forces démocratiques et populaires incarnées par les mouvements Mas et « somos Evos » saura relever le défi, refermer une triste page de l’histoire de l’impérialisme états-unien, et rouvrir la chronique d’une victoire annoncée.
Par Antoine LUCI, commission Internationale Amérique Latine, PRCF.
d’après des informations de