Critique au sujet de « Cuba, Parole à la Défense » de Salim Lamrani
« Ce bouquin, je vous le dis, rend heureux ! »
Michel Taupin
Cuba Si France
C’est presque une banalité que de saluer en Salim Lamrani, sa connaissance approfondie et sa maîtrise de l’histoire politique de Cuba, de sa Révolution et des relations cubano-étasuniennes. Depuis plus de 10 ans, grâce à ses recherches rigoureuses, à ses publications régulières, acérées comme autant d’épines plantées dans les coups tordus de l’Empire, à ses ouvrages toujours implacablement documentés et à ses conférences exigeantes, il est sans doute celui qui a le mieux organisé scientifiquement non seulement la démolition de tous les mensonges d’Etat et autres arguties étasuniens destinés à isoler Cuba de la communauté internationale et étrangler la Révolution cubaine (intoxication planétaire qui a été servilement relayée par les politiques et médias occidentaux), mais qui a fait apparaître méthodiquement, contre vents et marées médiatiques, la vérité de la réalité cubaine. S’il est une crucifixion pour les imposteurs de la diaspora contre-révolutionnaire, pour les journalistes godillots, les courtisans de l’Empire et pour l’administration étasunienne elle-même, le travail de Salim Lamrani est une bénédiction pour tous ceux, spécialistes ou non de Cuba, qui cherchent à connaître, à comprendre, à démêler le vrai du faux, plongés qu’ils sont dans un marécage de mauvaise foi, d’idéologie bornée, d’escroqueries et de tricheries. En une décennie, Salim Lamrani a construit un argumentaire particulièrement cruel pour la propagande anti-cubaine car établi avec une objectivité redoutable, sur les faits et rien que les faits, en dehors de toute idéologie.
« Parole à la défense » est une réponse cinglante et jubilatoire de personnalités cubaines et internationales prestigieuses, aux accusations récurrentes et systématiques proférées contre Cuba, ses dirigeants et son système politique et social. De plus, cet ouvrage marque une nette différence par rapports aux précédents puisque Salim Lamrani l’a voulu sous la forme de conversations qui lui confèrent une humanité, une sensibilité, une proximité des personnages, particulièrement réjouissantes. C’est la première force du livre !
Mais c’est aussi un coffret à gourmandises que l’on déguste, une à une, avec délectation. Salim Lamrani nous offre à travers ses conversations inédites, le plaisir immense et ô combien nécessaire, de nous faire ressentir que l’on ne se bat jamais pour rien. S’il joue parfois le candide ou se fait l’avocat du diable, c’est que Salim Lamrani se veut sans concession envers des interlocuteurs qu’il connaît et respecte infiniment. Alors, pas de sujets tabous, pas de langue de bois ! Les thèmes les plus épineux sont abordés comme le droit à la diversité sexuelle, l’homosexualité, les dissidents, les prisonniers « politiques », la prostitution, les effets du tourisme, les réformes économiques en cours, la politique migratoire, les relations avec l’Union Européenne, Fidel Castro, le rôle clé de la culture, l’alliance avec l’Union soviétique et les négociations en cours avec les Etats-Unis, pour n’en citer que quelques uns car la liste est longue. Mais quels interlocuteurs ! Brillantissimes ! Parmi eux : Mariela Castro, Ricardo Alarcon, Max Lesnik, Miguel Barnet, Eusebio Leal, Abel Prieto et Alfredo Guevara. C’est du lourd ! Et les réponses sont lumineuses. A leur sincérité, à leur finesse d’analyse et à l’argumentation convaincante qu’ils présentent, s’ajoutent une grande hauteur de vue et une passion vissée au corps, pour leur peuple et sa souveraineté. Avec de tels défenseurs, Cuba gagne tous ses procès. C’est la seconde force du livre et non la moindre ! Ce bouquin, je vous le dis, il rend heureux !
Surtout ne manquez pas la Préface d’André Chassaigne ! Elle ne manque ni de franchise, ni de conviction, ni de clairvoyance. Elle est à l’image de cet homme éloquent, lutteur pugnace et rêveur qui a engagé sa vie en faveur des humbles et qui ne pouvait donc pas, ne pas se reconnaître dans le combat héroïque du peuple cubain et de sa Révolution. Miguel Barnet le dit : « La révolution n’a pas été faite pour les blancs ou les noirs mais pour les humbles ».
A déguster sans modération !
Conversations avec Abel Prieto, conseiller spécial du Président Raúl Castro
SL : Que représente Fidel Castro à vos yeux ?
Abel Prieto : J’avais huit ans quand la Révolution a triomphé. Mon père avait été membre du Mouvement 26 Juillet, adepte de José Martí et grand admirateur de Fidel Castro. Je me souviens des longs discours de Fidel Castro à la télévision. Je ne comprenais pas grand-chose aux discours car j’étais très jeune mais c’était quelqu’un de captivant.
Je me souviens de Fidel lors de la crise des missiles et du courage des gens. Nous courrions le danger d’être balayés de la face de la terre, mais il n’y avait pas de panique parmi la population.
Lorsque j’étais à l’Université, je l’avais vu à plusieurs reprises. Je l’ai connu personnellement à la Casa de las Américas dans les années 1970. Il y avait un atelier autour des jeunes écrivains et Roberto Fernández Retamar me l’avait présenté. Je me souviens que Fidel avait plaisanté avec Gabriel García Márquez qui se trouvait en sa compagnie en lui demandant : « Tu penses que l’un d’entre eux sera un jour Prix Nobel ? ».
Lorsque j’ai intégré l’Union des écrivains et artistes de Cuba en tant que Président, j’ai ensuite eu le privilège exceptionnel, lors d’un Congrès, d’une rencontre avec Fidel. Je me souviens qu’un ami m’avait dit que Fidel ne s’intéressait jamais de manière superficielle aux choses et qu’il posait beaucoup de questions. Je me suis donc bien préparé et j’ai réuni toutes les données concernant le nombre de membres de l’UNEAC, par province, le nombre de femmes, l’éventail générationnel, etc. Je les ai apprises par cœur. Le lendemain, je suis arrivé à la réunion, très stressé. Je me souviens d’une question, qui m’a marquée, car je n’avais pas la réponse : « Combien de mètres carrés disposent le patio du siège de l’UNEAC ? ». Mon secrétaire m’a soufflé un chiffre qui était faux à l’évidence, et Fidel avait éclaté de rire. Je crois que je dispose du record national dès lors qu’il s’agit de donner des chiffres erronés à Fidel Castro. Je me suis trompé à de nombreuses reprises.
Ce fut un grand privilège, car j’ai rencontré un homme qui avait à la fois une grande vision stratégique et une passion pour le détail. Il est capable de synthétiser le futur de l’humanité et en même temps d’évaluer avec une grande précision chaque détail.
Cuba, parole à la défense !
Paris, Editions Estrella, 2015
20€
ISBN : 9782953128444
Ouvrage disponible en librairie et sur Amazon.
Pour les copies dédicacées et commandes, contacter Salim Lamrani : lamranisalim@yahoo.fr