Tout en maintenant sa position de principe: la défense de la République populaire de Chine contre l’entreprise d’encerclement militaire des impérialismes occidental et japonais, la condamnation du séparatisme réactionnaire au Tibet, le refus de « marcher » dans les campagnes occidentales en faveur de « dissidents » chinois anticommunistes qui affichent cyniquement leur désir néocolonial de placer la Chine sous contrôle occidental,
le PRCF n’a jamais caché son inquiétude à propos de la restauration progressive de l’exploitation capitaliste en Chine, de l’intégration de ce pays dans le libre-échange orchestré par l’OMC, de l’utilisation par le capital occidental de la libéralisation économique chinoise pour hâter la désindustrialison des pays occidentaux et le déclassement du prolétariat industriel dans notre pays avec à la clé, la consolidation d’une bourgeoisie capitaliste chinoise pratiquant la spoliation, la surexploitation et la corruption à une large échelle au détriment des paysans et du prolétariat, et ayant même le droit désormais d’adhérer au PC chinois au titre des « forces productives modernes »… Qui ne voit en effet que cette bourgeoisie chinoise attend son heure pour balayer tout reste de socialisme en Chine et renverser le « parti unique » en rétablissant une démocratie bourgeoise qui ferait courir les plus grands risques à l’indépendance et à l’unité territoriale du pays ? Au demeurant, ces critiques marxistes sont d’ailleurs reprises en Chine même par des vétérans communistes de la Révolution de 1949 qui refusent d’assister passivement au bouillonnement des conflits sociaux qui, à l’initiative des ouvriers chinois des multinationales, secouent la Chine depuis plusieurs années.
Tout en restant conscient de ces graves dérives, il importe d’apprécier dialectiquement l’évolution contradictoire de la formation socio-politique chinoise.
En effet, contrairement à la France capitaliste, dont la classe dominante et son chef de file, Sarkozy, s’évertuent à détruire l’indépendance nationale au nom de la « construction » européenne et de l’intégration atlantique, la RPC a pris soin de préserver sa souveraineté politique, clé de son développement industriel et social autocentré, de défendre son unité territoriale, de promouvoir la langue chinoise à l’international, de conserver un secteur industriel et bancaire d’Etat, de maintenir une planification « macroéconomique ». Cela ne suffit certes pas pour que prédomine en Chine le mode de production socialiste et ce serait une faute, du point de vue marxiste, que de prétendre réduire la lutte révolutionnaire à la défense de l’indépendance nationale (qui constitue sa condition nécessaire mais non suffisante), que de prétendre que l’accès aux technologies de pointe du capitalisme est en soi un fait révolutionnaire, que d’ignorer la thèse plus vraie que jamais que la construction socialiste est impossible sans un rôle dirigeant de la classe ouvrière dans l’économie et la vie politique. Et ce n’est pas la référence constante du PCC à la thèse antimarxiste de l' »harmonie sociale », donc de la collaboration des classes entre ouvriers et capitalistes, qui permettra à la classe ouvrière de retrouver ce rôle dirigeant.
Cela étant dit, comment ne pas voir plusieurs phénomènes nouveaux et potentiellement positifs qui se sont fait jour en Chine dans la dernière période:
a) la montée en puissance extrêmement positive à l’échelle historique des luttes du prolétariat chinois des multinationales avec de puissantes grèves offensives qui ont imposé de fortes augmentations de salaires ainsi que la reconnaissance de l’organisation syndicale dans l’entreprise. C’est une bonne nouvelle pour le prolétariat mondial: en effet, tant que les capitalistes occidentaux pouvaient à loisir casser l’industrie, déclasser la classe ouvrière, briser les syndicats de classe et les acquis sociaux des pays industrialisés en allant surexploiter les ouvriers chinois issus de la paysannerie socialement inexpérimentée, le prolétariat mondial était contraint à la défensive. Que le prolétariat chinois, après les ouvriers roumains de Dacia-Renault et en même temps que les ouvriers bangladais, passe à l’offensive pour les salaires, cela mettra tôt ou tard le prolétariat mondial, classe ouvrière de France inclue, en position offensive dans la lutte anticapitaliste. Encore faut-il que le Mouvement communiste international et que les PC nationaux soient partout à l’offensive sur des bases léninistes pour que les grandes luttes à venir ne puissent être dévoyées et qu’elles s’orientent clairement vers la rupture avec le capitalisme et vers la construction du socialisme…
b) il est positif que le gouvernement chinois, après avoir longtemps pratiqué la répression des mouvement populaires, semble avoir décidé ces derniers temps
* de forcer les sociétés capitalistes étrangères à augmenter les salaires et à accepter la formation de sections syndicales d’usine (reste à faire en sorte que la classe ouvrière devienne pleinement maîtresse desdits syndicats);
* d’amorcer un virage vers le développement autocentré de l’industrie et du marché national chinois dans la perspective du prochain plan quinquennal. Certes, cette mesure répond plus, dans l’immédiat, aux besoins de la bourgeoisie chinoise; celle-ci cherche en effet à contourner la crise capitaliste mondiale qui se traduit déjà par un rétrécissement des exportations (et les choses vont s’aggraver avec les politiques d’austérité pratiquées par l’UE et par les USA); mais cette orientation nationale autocentrée de la politique économique chinoise ne peut que renforcer la souveraineté du peuple chinois et que porter un coup au libre-échangisme euro-mondialisé qui permet jusqu’ici au grand capital financier de régner en soumettant les ouvriers du monde entier au moins-disant social.
Sans affaiblir notre vigilance critique à propos du prétendu « socialisme de marché » en tant qu’il constitue, au pis, un abandon de la perspective communiste, au mieux un recul tactique de longue durée qu’il faut présenter comme tel sans le travestir en « solution-miracle » pour l’avenir du socialisme, le PRCF appelle les progressistes à dénoncer les campagnes anti-chinoises de la droite et de la fausse gauche, à démasquer l’hypocrisie d’un Sarkozy donnant des leçons de droits de l’homme au peuple chinois tout en durcissant la politique répressive en France (le président chinois serait fondé à exiger la libération immédiate des lycéens et des syndicalistes ouvriers réprimés pendant le mouvement pour les retraites!), à aider les travailleurs de France à passer à la contre-offensive en exigeant la réindustrialisation de notre pays dans un esprit de coopération avec tous les pays du monde, Chine comprise, sans s’enfermer dans le carcan mortel de l’UE, de la mondialisation néolibérale, du libre-échangisme ravageur, de la « concurrence libre et non faussée » et du mensonge social-impérialiste de « l’Europe sociale ».