La grève générale pour défendre sa retraite, ce n’est pas une méthode franco française. C’est le meilleure moyen de se défendre et de faire avancer ses droits pour les travailleurs partout dans le monde. A l’image de la grève nationale qui continue en Colombie. Un mouvement nationale qui s’est levé notamment pour stopper le régime Duque qui veut réduire et privatiser les retraites…
La grève nationale en Colombie continue
Depuis le 21 novembre dernier, des centaines de milliers de Colombiens se mobilisent dans tout le pays pour refuser les politiques antipopulaires et néolibérales du président Iván Duque.
28 novembre 2019 par Tanya Wadhwa
La résistance du peuple colombien se poursuit contre le gouvernement de droite du président Iván Duque et sa politique néolibérale, de guerre et de violence.
Le 27 novembre, derrière la banderole « Contre le paquet néolibéral de Duque, l’Organisation pour la coopération économique et le développement (OCDE), le Fonds monétaire international (FM) et la Banque mondiale. Pour la vie et la paix », des centaines de milliers de citoyens, d’étudiants, d’enseignants, de travailleurs et de membres de plusieurs organisations féministes, de défense des droits de l’homme, autochtones, paysannes et sociales, ainsi que des syndicats, ont participé à des mobilisations dans toute la Colombie.
Dans la capitale Bogotá, les foules se sont rassemblées au Parc national et ont marché vers la place Bolivar pour rejeter les mesures d’austérité du gouvernement national et la lourde répression policière des manifestations sociales.
De vastes manifestations similaires ont été organisées dans les villes de Barranquilla, Bucaramanga, Cali et Medellín, entre autres.
Les mobilisations se sont déroulées le cadre d’une grève Générale appelée par le Comité national de grève, vu l’absence d’accord obtenu lors du dialogue avec le gouvernement qui avait commencé la veille, le 26 novembre.
Le Comité national de grève est une plateforme qui réunit des douzaines de syndicats et d’organisations populaires en grève depuis le 21 novembre et qui se mobilisent dans tout le pays.
L’appel à la grève a aussi été lance pour rendre hommage à Dilan Cruz, un étudiant de 18 ans qui a succombé à ses blessures après qu’un officier de la Brigade mobile anti-émeute (ESMAD) lui a tiré dessus. La dissolution immédiate de l’ESMAD est une des revendications principales de ces manifestations.
La veille, le 26 novembre, le Comité avait appelé à un cacerolazo national pour la vie, pour demander la fin de la répression de l’État et de la criminalisation des protestations sociales. Plusieurs cacerolazos, une manifestation dans laquelle les gens frappent des casseroles et des poêles, ont aussi eu lieu en de nombreux endroit du pays pour rejeter le meurtre du jeune homme et exprimer le mécontentement populaire devant l’usage excessif de la force par l’ESMAD. De nombreuses marches aux chandelles ont aussi été organisées en l’honneur du jeune étudiant.
Le 25 novembre, les mobilisations antigouvernementales ont vu une participation massive des femmes, puisque ce jour-là était celui de la Journée internationale pour l’élimination de la violence contre les femmes. Des milliers de femmes se sont mobilisées dans tout le pays pour rejeter les inégalités et l’insécurité basées sur le sexe et pour commémorer les femmes qui ont été tuées et ont souffert de la violence fondée sur le sexe.
À Bogotá, la capitale, sur la place Bolivar, une multitude de femmes, y compris des femmes autochtones et des membres de diverses organisations féministes, sociales et de défense des droits de l’homme, ont accompli un acte symbolique en défense de la vie et de la paix et contre la politique de guerre et de violence du gouvernement de Duque. En même temps, dans le parc national, des milliers de citoyens, de travailleurs et de membres de divers mouvements sociaux ont manifesté pacifiquement contre le paquetazo (le « paquet ») néolibéral.
Répression
Pendant les jours de lutte et de mobilisation, les responsables de l’ESMAD ont attaqué les manifestants avec des gaz lacrymogènes, des grenades assourdissantes, des canons à eau et des armes non conventionnelles. En sept jours de manifestations contre le gouvernement, plus de 800 personnes ont été arrêtées et une centaine ont été gravement blessées.
L’indignation de la population contre le terrorisme d’État s’est intensifiee après la nuit du 25 novembre, lorsque la triste nouvelle de la mort de Dilan Cruz fut connue. Le jeune garçon a été tué d’une balle dans la tête tirée à bout portant par des agents de l’ESMAD le 23 novembre, lors d’une mobilisation antigouvernement dans la capitale. Il est mort à San Ignacio à Bogotá après trois jours dans l’unité de soins intensifs.
Légende: Dans la nuit du 26 novembre, des centaines de personnes se sont rassemblées à l’angle de la 19e rue et de la 4e route à Bogotá, l’endroit où Dilan a été tué, et ont rendu hommage au jeune homme avec des bougies et des fleurs, dénonçant la violence de l’ESMAD. Photo: Colombia Informa
Une autre victime de la répression brutale de la police, Duván Villegas, se bat pour rester en vie à l’hôpital universitaire du département de Valle de Cauca. C’est un graphiste de 27 ans et un policier lui a tiré dans le dos dans la ville de Cali le 21 novembre, pendant le couvre-feu, alors qu’il rentrait chez lui en vélo.
Dans les rues, Dilan et son esprit combattif symbolisent tous les enfants et les jeunes tués et blesses par l’ESMAD et l’État colombien.
Depuis sa formation en 1999, les responsables de l’ESMAD ont tué plus de 21 personnes Durant ces vingt dernières années. Il n’y a toutefois pas de chiffres exacts du nombre de cas d’agressions violentes commises par cette escouade à l’encontre de manifestants, d’étudiants, de paysans et de personnes autochtones.
Décret de la société financière publique
Au milieu de la grève nationale et du chaos social, le gouvernement a émis un décret qui privatiserait les entreprises publiques.
Le 24 novembre, le ministre colombien des Finances, Alberto Carrasquilla, a approuvé la création du Groupe du bicentenaire, une société financière publique, par le décret 2111 de 2019. Cette mesure fait partie du « paquet » néolibéral de Duque.
Selon des syndicats nationaux comme la Centrale unitaire des travailleurs de Colombie (CUT), la Confédération Générale du travail (CGT) et la Confédération des travailleurs de Colombie (CTC), le Groupe du bicentenaire supprimera le contrôle direct de l’État sur l’argent des sociétés financières et ouvrira la porte à la privatisation d’au moins 16 entreprises publiques, ce qui entraînera le licenciement massif de plus de 17 000 travailleurs.
Négociations avec le gouvernement
Le 26 novembre, les représentants du Comité national de grève ont pris part à une réunion de négociation avec le président Duque.
Lors de la réunion, les représentants ont remis au président Iván Duque une charte de revendications en 13 points, qui comprend le retrait immédiat du décret de création de la société financière publique, la dissolution immédiate de l’ESMAD et la purification de la Police nationale, la mise en place de mesures efficaces mettant fin au génocide des dirigeants sociaux, paysans et indigènes, le respect des accords de paix avec les guérilleros des Forces armées révolutionnaires de la Colombie – Armée populaire (FARC-EP) ainsi que des accords signés par le gouvernement de l’ancien président avec les enseignants, les paysans, les autochtones et beaucoup d’autres syndicats, entre autres.
Au cours de la réunion, le président Duque a proposé de poursuivre les négociations dans une rencontre élargie, intitulée la Grande conversation nationale, qui inclut d’autres secteurs tels que les hommes d’affaires et les représentants d’organes de contrôle de l’État, le Bureau du procureur général et le Bureau du médiateur. Le comité a refusé la proposition car elle n’incluait pas d’autres secteurs qui ne font pas partie du comité et a fait part de son intention de maintenir un dialogue direct avec le président.
Après la réunion, le comité a appelé les travailleurs à poursuivre la grève et les mobilisations qu’ils mènent depuis six jours.
Le mouvement social et politique, le Congreso de los Pueblos (le Congrès des peuples), a également rejeté l’appel du président à un dialogue sans participation populaire.
Le Congrès des peuples a précisé cette position dans une déclaration officielle : « Nous refusons le faux appel au dialogue lance par le gouvernement national qui cherche à légitimer sa politique, à diviser la lutte et à continuer à approfondir le modèle néolibéral et le terrorisme d’État. Par conséquent, nous joignons nos voix à celle qui rejettent ce dialogue manipulé jusqu’à ce qu’il y ait une manifestation claire de retour sur les contre-réformes qui veulent aggraver nos conditions de vie, privatiser l’héritage public et assécher les biens communs. Il ne peut pas non plus y avoir de dialogue sans décision de démanteler l’ESMAD et sans déterminer les responsables des centaines de violations des droits de l’homme. »
Solidarité internationale
Divers mouvements sociaux et organisations de défense des droits de l’homme en Amérique latine et dans le monde ont dénoncé l’extrémisme des forces de police contre des manifestants pacifiques et ont exprimé leur solidarité avec la lutte du people colombien
Le 26 novembre à Buenos Aires, un groupe important de Colombiens résidant en Argentine, en même temps que des dirigeants sociaux et politiques argentins, ont manifesté devant le consulat de Colombie. Les manifestants ont rendu hommage à Dilan Cruz et exprimé leur solidarité avec toutes les personnes blesses et détenues par les gouvernements fascistes d’Iván Duque et de l’ancien président Álvaro Uribe Vélez.
Traduit par DG pour www.initiative-communiste.fr d’après https://peoplesdispatch.org/2019/11/28/colombian-national-strike-continues/