Par Georges Gastaud 7 août 2022
La France macroniste, qui piétine la langue française à domicile, et le Canada anglophone, qui ne siège dans l’Organisation Internationale de la Francophonie que pour y bloquer l’indépendantisme québécois, s’associent pour retarder sans fin le sommet francophone qui doit se tenir à Tunis. Il s’agit de « punir » le président tunisien qui, à tort ou à raison, est accusé de déroger aux prétendues « règles de bonne gouvernance » et autres « valeurs humanistes » censément chères à l’OIF. En clair de se servir de la Francophonie internationale pour s’ingérer dans les affaires d’un Etat souverain. Quant à Ottawa, si elle pouvait se servir de cette occasion pour dynamiter l’OIF et affaiblir encore plus la situation déjà délicate du français à l’international au moment où le Québec durcit sa législation protectrice du français, il est évident que Trudeau Junior, le Macron canadien, servile créature de l’impérialisme anglo-saxon, ne se priverait pas d’une telle aubaine…
Et la provocation fonctionne : côté africain, plusieurs chefs d’État qui ne sont pas de francs amis de la langue française et de la Francophonie parlent publiquement de scission de l’OIF et disent que, au besoin, ils tiendront le Sommet de Tunis sans la France et sans le Canada. Ils allèguent que la majorité des Francophones du monde se trouve désormais en Afrique et que les leçons pseudo humanistes et de fait, néocoloniales de Paris appartiennent à une autre époque.
Cela pourrait contenter de véritables anticolonialistes, voire de vrais amis de la langue française, tant le discrédit mérité de la Francafrique et les attitudes supérieures de Paris et du cheval de Troie anglophone canadien, nuisent à ce bien commun à des centaines de millions d’hommes qu’est la langue de Jaurès, de Toussaint Louverture et de Sankara.
Hélas, quand on parcourt les déclarations des chefs d’État du sud, on ne saurait se faire trop d’illusions et l’on a même le sentiment que la langue française est pour eux un prétexte. Ils croient même bon d’ajouter, pour faire monter les enchères avec Paris, qu’en Afrique nombre d’étudiants préféreraient désormais apprendre l’anglais ou l’allemand, ne disant pas un mot du portugais, grande langue africaine, ni du chinois et du russe, et considérant donc le français avec le plus grand mépris, voire comme une monnaie d’échange qu’ils sont prêts à sacrifier. Déjà le Gabon a rejoint le Commonwealth, le Rwanda, qui préside l’OIF avec l’appui de Macron a substitué l’anglais au français dans ses écoles, ne parlons pas des pays du Maghreb qui, eux aussi, se détachent du français et se dirigent vers l’anglais en prenant des POSTURES anti-impérialistes qui signifient seulement que ces États post-coloniaux bien plus qu’ils ne sont anticolonialistes, se cherchent un maître plus puissant que le maître français en plein déclin géopolitique : le maître américain.
On mesure à quel point, par la faute des gouvernements atlantistes qui se succèdent à Paris, l’OIF n’est qu’un colosse aux pieds d’argile. Elle blablate à perte de vue sur de prétendues « valeurs » dont tous se moquent, et elle ne défend pas la langue française dans sa diversité en favorisant avant tout les échanges de tous ordres entre francophones…
Bref, sans négliger la fracture Nord Sud qui pourrait, en d’autres mains que celles des chefs d’État actuels, donner un sens anti-impérialiste mondial à la défense du français et à la résistance au tout anglais globalitaire, il faut surtout prendre conscience que l’avenir du français et de la Francophonie est avant tout dans les mains des peuples, des travailleurs et des citoyens. A tous les résistants linguistiques et sociaux du monde entier d’en tirer toutes les conséquences.