Le discours du président français aux Nations unies appelant à un statut d’Etat observateur pour les Palestiniens n’a pas convaincu certains pays arabes qui y voient un alignement sur la position américaine. Al-Quds Al-Arabi, quotidien nationaliste, en témoigne.
Quand le président français propose de doter les Palestiniens d’un statut d’Etat observateur et d’adopter un délai d’un an pour parvenir à un « accord de paix définitif », il est difficile de croire qu’il le fait sans avoir consulté les Américains et les Israéliens. La solution qu’il préconise est en effet destinée à éviter aux Etats-Unis d’user de leur droit de veto contre l’adhésion à l’ONU d’un futur Etat palestinien avec un statut de membre à part entière.
De toute évidence, Washington se trouve dans une impasse morale et politique puisqu’un tel veto serait en contradiction flagrante avec les engagements pris [il y a un an] par le président Obama en faveur de l’établissement d’un Etat palestinien indépendant dans les frontières de 1967.
Le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a remercié Obama pour avoir rejoint la position israélienne. Il s’est arrêté en particulier sur le passage du discours où Obama affirme qu’Israéliens et Palestiniens devaient s’asseoir ensemble pour discuter d’une solution durable de paix.
Bref, la reconnaissance d’un Etat palestinien, que ce soit en tant que membre de l’ONU à part entière ou en tant qu’observateur, est conditionnée à un retour aux négociations bilatérales directes. Autrement dit, un retour à la case départ. Et cela sans satisfaire les demandes palestiniennes d’un arrêt de la colonisation [dans les Territoires palestiniens].
Cela correspond au vœu de Nétanyahou de renouer avec un « processus de paix » qui lui permet de briller dans l’art de gagner du temps, art dans lequel il excelle autant que ses prédécesseurs. Nétanyahou refuse catégoriquement d’accepter les frontières de 1967 [avant la guerre des six jours], tout comme il refuse la moindre forme de souveraineté palestinienne sur la frontière avec la Jordanie, insistant pour garder ces frontières sous le contrôle exclusif de l’armée israélienne.
Depuis vingt ans, Mahmoud Abbas négocie avec les Israéliens. Sans aucun progrès, notamment en ce qui concerne le futur statut de Jérusalem et le droit au retour des réfugiés. Les Israéliens refusent tout simplement d’en discuter, mais insistent pour que les Palestiniens reconnaissent le caractère juif de l’Etat Israël.
Pour avoir torpillé le processus de paix, les Israéliens se trouvent dans une situation inconfortable. L’objectif d’Obama et de Sarkozy est de les en sortir et de faire en sorte que ce soient les Palestiniens qui soient de nouveau tenus pour responsables d’un échec de la reprise des négociations.
Mahmoud Abbas sera le principal perdant s’il devait accepter une semi-reconnaissance et renoncer à son projet d’aller devant l’Assemblée générale. Nétanyahou en revanche retournera en vainqueur dans la Jérusalem occupée. Il aura réussi à consolider sa place et à briser l’isolement international de son pays, lui permettant de continuer d’occuper les Palestiniens et de spolier leurs droits.
Si les Américains devaient user de leur droit de veto [contre la reconnaissance de l’Etat palestinien à l’ONU], cela déclencherait des manifestations arabes devant les ambassades dans les pays arabo-musulmans. Si Mahmoud Abbas devait céder aux pressions américaines et aux douces promesses de Sarkozy, cela pourrait provoquer des manifestations de colère devant le siège de l’Autorité palestinienne à Ramallah. S’il veut éviter de revenir de New York comme principal perdant, Abbas doit bien réfléchir avant d’arrêter son choix.