Alors qu’au sein du mouvement communiste international, certains dirigent leurs feux à l’encontre de la Plateforme anti-impérialiste mondiale, il est utile de mettre en exergue ce que sont les objectifs de la plateforme. Des objectifs que devraient avoir en partage l’ensemble des communistes. Dans une tribune publiée par le troisième numéro de la revue de la plateforme, Stephen Cho, coordinateur du Forum Coréen international, revient sur ces objectifs ; un article traduit par le collectif international de la JRCF pour Initiative Communiste
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Les trois objectifs majeurs de la Plateforme anti-impérialiste mondiale.
13 Octobre 2023 – Par Stephen Cho, coordinateur du Forum coréen international – troisième numéro de l’Organe de la Plateforme.
Lorsque la Plateforme anti-impérialiste mondiale fut fondée, trois objectifs étaient mentionnés : le renforcement de la lutte anti-impérialiste, le renforcement de la lutte idéologique au sein des mouvements anti-impérialistes et communistes, et le renforcement du mouvement communiste international. Ce sont les trois plus importants objectifs de la Plateforme, en lien avec son caractère essentiel, et sont fermement liés entre eux. Depuis sa fondation à Paris, en Octobre 2022, la Plateforme a dépensé son énergie en l’honneur de ces trois objectifs, en tenant des conférences internationales et en organisant des manifestations et rassemblements en plus de ses autres activités : à Belgrade (Serbie) en Décembre 2022, à Caracas (Venezuela) en Mars 2023, et à Gwangju et Seoul (Corée) en Mai 2023.
Le premier objectif de la Plateforme est de promouvoir la lutte anti-impérialiste.
C’est l’objectif le plus important de la Plateforme anti-impérialiste mondiale. Renforcer la lutte anti-impérialiste mondiale signifie renforcer ces luttes dans son propre pays tout en les coordonnant avec les autres luttes anti-impérialistes dans le monde. La lutte anti-impérialiste à l’intérieur de chaque pays et la lutte anti-impérialiste au niveau mondial s’inscrivent dans un rapport dialectique entre le national et l’international.
“Anti-impérialisme”, cette expression signifie s’opposer aux forces impérialistes. En ce sens, “s’opposer” ne signifie pas seulement combattre les politiques des impérialistes, mais aussi combattre l’existence de l’impérialisme lui-même. Cela signifie le combattre jusqu’à ce que ses dernières traces soient effacées. Il faut donc en plus de combattre l’existence physique de l’impérialisme, affirmer l’existence de son contraire, le socialisme, et s’engager pour.
Ce n’est pas de l’antifascisme ; c’est de l’anti-impérialisme. Durant la Seconde Guerre mondiale, les forces antifascistes ont remporté la victoire en formant des fronts antifascistes à l’échelle mondiale. Aujourd’hui, alors que la troisième guerre mondiale est imminente, le front qui doit être organisé au niveau mondial est un front anti-impérialiste, même si cela n’exclut pas la formation de fronts antifascistes dans des pays ou des régions en particulier. Il convient de rappeler que le fascisme pendant la Seconde Guerre mondiale n’était qu’une variante de l’impérialisme, un moyen de maintenir la domination des classes dirigeantes impérialistes sur leurs populations nationales pendant une période d’intense lutte des classes. Le fascisme que nous voyons dans le monde aujourd’hui, en revanche, est exporté par les impérialistes vers leurs États fantoches dans les pays opprimés et colonisés par l’impérialisme.
Dans les conditions actuelles, l’impérialisme est la cible principale de notre attaque, tandis que le fascisme est une cible auxiliaire.
Diverses formes de lutte doivent être combinées. Nous devons toujours prêter attention à la combinaison de la lutte politique et de la lutte économique, des luttes légales et semi-légales, des luttes à grande échelle et à petite et moyenne échelle, des luttes quotidiennes et des luttes lors d’événements particuliers. Il faut diriger la lutte et la lutte de masse.
Le deuxième objectif de la Plateforme est d’intensifier la lutte idéologique
Les cibles de la guerre idéologique sont le révisionnisme, l’opportunisme et le sectarisme. Le révisionnisme nie l’essence révolutionnaire du marxisme-léninisme, l’opportunisme vend les intérêts à long terme de la révolution aux intérêts à court terme de tous ou de quelques-uns et commet des erreurs de droite et de « gauche », tandis que le sectarisme divise nos rangs. Le révisionnisme est un problème idéologique, l’opportunisme est une question de ligne politique et le sectarisme est un problème organisationnel. Le révisionnisme, l’opportunisme et le sectarisme sont étroitement liés en tant que trois aspects d’une même entité. Ils sont tous des effets de la pression exercée par la classe capitaliste sur la lutte de la classe ouvrière et tendent à provoquer une scission dans les rangs du socialisme, nous neutralisant ainsi en tant que force majeure dans la politique mondiale.
Aujourd’hui, le principal objectif de la guerre idéologique de la Plateforme est l’opportunisme sectaire du Parti communiste grec (KKE). La direction du KKE est tombée dans le piège du révisionnisme, depuis qu’elle a expulsé le sincère secrétaire général révolutionnaire Nikos Zachariadis et ses camarades révolutionnaires du parti en 1957, sous l’influence de Nikita Khrouchtchev, le chef de file du révisionnisme moderne. Ces derniers temps, le KKE a semé la confusion et la division dans les rangs communistes à l’intérieur et à l’extérieur de son propre pays, en se livrant à un opportunisme et à un sectarisme sévères de droite et de « gauche ».
Solidnet », le réseau de solidarité qui fait autorité dans le mouvement communiste international, a virtuellement terminé sa vie car il n’a pas rempli son devoir périodique, politique et organisationnel en raison de l’opportunisme sectaire de son principal organisateur, le KKE. Cette situation est comparable à l’incapacité de la Deuxième Internationale à remplir son rôle en raison de l’opportunisme de Karl Kautsky et d’autres, et à sa fin avec la Première Guerre mondiale.
La théorie de la « pyramide impérialiste » du KKE dépassera-t-elle en infamie la théorie de l' »ultra-impérialisme » de Kautsky ? Tout comme Kautsky s’est inspiré des idées de l’économiste bourgeois anglais JA Hobson sur l' »inter-impérialisme », la théorie de la pyramide du KKE est entachée de théories petites-bourgeoises, y compris le trotskisme, définissant tous les pays capitalistes comme ayant un certain niveau de développement impérialiste et affirmant que « tous les pays capitalistes du monde, sans exception, constituent la pyramide impérialiste ». (« Sur l’impérialisme – La pyramide impérialiste » par Aleka Papariga, 2013)
Le KKE a eu la témérité de réviser le titre même de l’ouvrage de Lénine qui a marqué l’époque, « L’impérialisme, stade suprême du capitalisme », publié en 1916. Dans l’histoire du révisionnisme, il est rare de trouver un cas aussi audacieux de révision du titre même d’un livre. En ce sens, la clairvoyance de Lénine, qui a souligné l’importance du terme « stade » dans le titre, est évidente. Ainsi, la théorie de la « pyramide impérialiste » nie les « étapes » et donc toute tactique dans le mouvement révolutionnaire.
Ce n’est pas une coïncidence si le KKE, à l’instar de Trotsky, dénonce la tactique du Comintern consistant à organiser un front uni international contre le fascisme, nie la nature révolutionnaire et l’existence des luttes de libération nationale dans le monde opprimé, et a commis des erreurs gauchistes lors du soulèvement populaire dans son propre pays au début des années 2010.
Il n’est plus surprenant que Dimitris Koutsoúmbas, le secrétaire général du KKE, ait comparé l’opération militaire spéciale de la Russie au bombardement de la Yougoslavie par l’OTAN dans une interview accordée aux médias grand public en mai. La guerre en Ukraine a mis en lumière les problèmes idéologiques du KKE. Il est dans la nature de l’opportunisme de la direction du KKE de trahir le léninisme tout en citant les paroles de Lénine, de recycler les paroles et les justifications des impérialistes de l’OTAN tout en prétendant être contre l’impérialisme, et de s’immerger dans l’eurocommunisme tout en le condamnant.
Le problème est que la direction du KKE, comme les révisionnistes et les opportunistes l’ont toujours fait, incite les autres partis à suivre la même voie du révisionnisme et de l’opportunisme, et s’ils refusent, elle intervient auprès d’eux sur le plan organisationnel pour les briser.Ces actes criminels, qui se sont produits à d’innombrables reprises, de l’Espagne il y a quelques années à l’Argentine cette année, confirment objectivement que le KKE est la principale force sectaire internationale qui divise le mouvement communiste international aujourd’hui.
La Plateforme ne lutte pas contre le KKE lui-même, mais contre le révisionnisme, l’opportunisme et le sectarisme de sa direction. La direction du KKE s’oppose au léninisme tout en se référant au léninisme, s’oppose à la révolution tout en se référant à la révolution, et s’oppose à l’anti-impérialisme tout en se référant à l’anti-impérialisme. Ainsi, la guerre idéologique contre le révisionnisme, l’opportunisme et le sectarisme de la direction du KKE se termine par une description précise du léninisme, de la révolution et de l’anti-impérialisme. En ce sens, la récente décision du congrès du Parti communiste de Belgique (PCB-CPB) est très encourageante.
Le troisième objectif de la plateforme est de consolider les forces communistes internationales.
La raison pour laquelle nous parlons de consolider non pas les partis communistes mais les forces communistes est que les forces communistes sont actuellement organisées non seulement en partis mais aussi en d’autres types d’organisations politiques.
Comme nous le savons, après les années 1990, les forces communistes ont traversé partout des périodes très difficiles. La condition préalable au principe selon lequel il ne devrait y avoir qu’un seul parti communiste dans un pays donné est que le parti communiste traditionnel de chaque pays suive une ligne révolutionnaire correcte et joue son rôle historique avec cohérence et dévouement. Mais en réalité, de nombreux partis n’ont pas agi de la sorte. Dans les conditions actuelles, il est inéluctable que les militants communistes de nombreux pays aient dû créer des organisations politiques alternatives en dehors de la formation traditionnelle du parti afin de mener des activités révolutionnaires.
Dans la lutte anti-impérialiste mondiale, non seulement les communistes mais aussi de nombreuses forces non communistes des pays opprimés peuvent s’unir sous la bannière de l’anti-impérialisme. En ce sens, le renforcement de la lutte anti-impérialiste mondiale passe par la création d’un front uni, avec les communistes en tête.Renforcer les forces du communisme international dans ce contexte de front uni, c’est comme renforcer les forces révolutionnaires dans n’importe quel pays. Il garantit une direction meilleure et plus résolue pour l’ensemble de la lutte. Renforcer les forces communistes internationales dans un tel contexte, c’est comme renforcer le parti dans un contexte national.
Tout comme la relation entre un parti et un front uni peut être comparée à la relation entre l’avant-garde et les courroies de transmission dans un pays, les forces communistes internationales et les forces anti-impérialistes mondiales doivent construire la relation entre la locomotive et les wagons de ce « train » de lutte à l’échelle mondiale, métaphoriquement parlant. En d’autres termes, les forces communistes internationales doivent développer davantage leur rôle au sein du mouvement anti-impérialiste mondial en tant qu’avant-garde capable de mettre en avant la ligne correcte et d’organiser et de mobiliser puissamment le peuple. Alors que la lutte anti-impérialiste vise une force maximale contre l’ennemi principal, le mouvement communiste vise à construire une avant-garde pour les luttes des masses, non seulement contre l’impérialisme, mais aussi pour le socialisme, qui est la seule véritable solution aux problèmes auxquels l’humanité est confrontée.
Les forces communistes internationales ont réalisé de grandes avancées au cours de la période du grand tournant. La Première Internationale a été créée après la révolution de février 1848, la Deuxième Internationale après la Commune de Paris de 1871 et la Troisième Internationale après la révolution russe de 1917.
La Première Guerre mondiale a été l’élément déclencheur décisif qui a révélé la pourriture de la Deuxième Internationale, qui avait été constamment trompée par Eduard Bernstein et Karl Kautsky après la mort de Friedrich Engels. Après la victoire de la révolution socialiste d’octobre en Russie, menée par Lénine et les bolcheviks, la Troisième Internationale a été créée. Pendant la période de la Seconde Guerre mondiale, la Troisième Internationale a été dissoute parce que les forces subjectives de la révolution s’étaient renforcées dans chaque pays et pour faciliter l’inclusion des États-Unis et de la Grande-Bretagne dans le front anti-impérialiste mondial.
Avec la victoire du front antifasciste mondial lors de la Seconde Guerre mondiale, le camp socialiste international s’est considérablement élargi, s’étendant à l’Europe de l’Est et à l’Asie de l’Est, tandis que les mouvements de libération nationale dans le monde opprimé prenaient un élan irrésistible.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, la « stratégie du front antifasciste mondial » de Josef Staline et Georgi Dimitrov a été le stratagème le plus important qui a conduit à la victoire des forces antifascistes, en isolant le camp fasciste et en empêchant les impérialistes mondiaux de dévorer ensemble l’URSS socialiste.
Aujourd’hui, le front anti-impérialiste mondial formé par la RPDC socialiste et la Chine avec la Russie capitaliste et d’autres pays doit être considéré de la même manière que le front uni mondial contre le fascisme que l’Union soviétique socialiste a créé avec les États-Unis et la Grande-Bretagne impérialistes – comme une force capable d’écraser l’ennemi principal et de déclencher une nouvelle vague de révolutions dans le monde alors que le système impérialiste s’enfonce de plus en plus dans la crise et ne parvient pas à se revigorer par de nouvelles conquêtes dans la guerre.
En 2022, la guerre d’Ukraine s’est intensifiée en Europe de l’Est. Lorsque la guerre s’étendra à la Corée du Sud et à Taïwan, il sera incontestable que la troisième guerre mondiale est arrivée. Cette guerre mondiale, qui a sans aucun doute été provoquée par la partie impérialiste, entraînera une nouvelle période de grande transition après la victoire de la guerre de libération en Asie de l’Est, accélérant de manière décisive la fin des forces impérialistes et faisant entrer le monde dans une période de grand essor.
La lutte anti-impérialiste, la lutte idéologique et les forces communistes sont interconnectées.
La lutte anti-impérialiste est notre pratique, la lutte idéologique est notre théorie et les forces communistes sont notre organisation. La lutte anti-impérialiste et la guerre idéologique ont la relation de la pratique à la théorie, tandis que la guerre idéologique et les forces communistes ont la relation de la théorie à l’organisation. Les forces communistes et la lutte anti-impérialiste ont la relation de l’organisation à la pratique.
Aujourd’hui, l’anti-impérialisme est la justice et le pro-impérialisme est l’injustice. L’histoire exige de nous que le juste front anti-impérialiste et la juste guerre anti-impérialiste soient victorieux. Le prolétariat et les peuples du monde doivent s’unir sous la bannière de l’anti-impérialisme et avancer vers la victoire finale de la révolution socialiste.
En ce moment grave, où le déclenchement de la troisième guerre mondiale est imminent, la Plate-forme fera tout ce qui est en son pouvoir pour atteindre ses objectifs sacrés en trois points : renforcer la lutte anti-impérialiste, renforcer la lutte idéologique et renforcer les forces internationales du communisme.