Porteur, non sans diversités locales, d’une langue, d’une histoire et d’une culture communes, le peuple et le territoire kurdes ont été divisés de manière largement arbitraire entre plusieurs États (Turquie, Iran, Irak, Syrie, Russie…) lors des différents partages coloniaux du Proche-Orient qu’ont successivement dictés les impérialismes rivaux au gré des rapports de forces militaires et sans le moindre souci des droits des peuples à disposer d’eux-mêmes.
Il s’en est suivi, à des degrés divers, des situations d’oppression nationale, les États bourgeois étant par nature incapables d’assurer l’égalité entre les peuples et les individus qui vivent à l’intérieur de leurs frontières. Il faut en particulier saluer la longue et héroïque lutte des travailleurs du Kurdistan turc qui ont constamment affronté, parfois sous la bannière du marxisme et du communisme, les fascisants gouvernements turcs successifs. Ceux-ci ont persécuté et persécutent encore, non seulement les militants kurdes, mais les forces turques communistes, ouvrières, laïques et démocratiques. En Irak également, le pouvoir de Saddam Hussein a fait montre d’une brutalité inouïe à l’encontre des populations kurdes.
En même temps, l’impérialisme, notamment étasunien, qui passe son temps à violer l’indépendance des peuples dominés, sait également se servir habilement, quand cela favorise ses manigances, des revendications nationales des peuples dominés pour diviser les États constitués dès lors que certains d’entre eux font obstacle à ses visées prédatrices. C’est bien évidemment pour démanteler l’Irak ou la Syrie, ou pour affaiblir l’Iran dans la perspective d’une guerre impérialiste contre lui, et certainement pas pour favoriser l’épanouissement des peuples et leur coopération fraternelle, que les États-Unis et leurs vassaux français ou européens ont soudain découvert les revendications indépendantistes des Kurdes d’Irak, que ce soit sous Saddam Hussein ou présentement, pour les laisser ensuite se faire tailler en pièces par Bagdad. De même que les puissances impérialistes ont constamment fermé les yeux sur les exactions d’Ankara contre le peuple kurde de Turquie, spécialement contre les militants du Parti des travailleurs du Kurdistan, mais aussi actuellement contre les Kurdes de Syrie, en considérant que l’État turc était une pièce essentielle de l’encerclement de l’URSS, puis de la Russie post-soviétique, par les troupes d’agression de l’OTAN.
La situation est donc complexe et variable d’un État proche-oriental à l’autre et l’on ne peut oublier en outre que le projet mortifère de « Grand Moyen-Orient » remodelé par Bush, Obama et Trump au gré des intérêts pétroliers nord-américains, ainsi que les manœuvres bellicistes de l’Arabie saoudite, sur-déterminent tous les rapports de forces en apparence purement « internes » dans cette région explosive du monde.
L’aspiration de nombreux Kurdes à vivre dans un seul État national de langue kurde est donc fort compréhensible et respectable, les persécutions de type fasciste contre l’organisation politique des Kurdes et contre le libre usage de leur langue doivent être sévèrement dénoncées et combattues par tous les démocrates. En même temps, des communistes et des marxistes doivent exclure toute naïveté : il faut rester vigilant contre toute tentative impérialiste de dévoyer les légitimes sentiments nationaux kurdes pour remodeler le Proche-Orient selon les vœux des transnationales du pétrole, et dénoncer l’exploitation, par l’impérialisme, du vieux principe « diviser pour régner ». Sur le fond, seul le socialisme, en instaurant et en planifiant une coopération mutuellement avantageuse entre les Etats voisins du Proche-Orient pourra tout à la fois assurer les droits nationaux (économiques, sociaux, culturels, linguistiques, politiques) du peuple kurde, permettre la libre circulation et les plus larges échanges entre les Kurdes appartenant aux différents Etats limitrophes, sans exclure – si les Kurdes et leurs voisins en décident un jour librement et fraternellement – la naissance d’un État national kurde démocratique et socialiste qui servirait moins de pomme de discorde entre voisins que de passerelle culturelle, politique et économique aux États proche-orientaux que le capitalisme dresse présentement les uns contre les autres.
Dans l’immédiat, les communistes français sont tenus à la fois
- de contrer les manœuvres impérialistes visant l’unité territoriale des États ciblés par les États-Unis : Syrie, Iran, Irak, Russie, car une « indépendance » sous protectorat impérialiste ne saurait être qu’un faux-semblant sanglant comme on l’a vu récemment par exemple au Soudan-Sud, au Kosovo, et dans d’autres pays,
- et de défendre les militants démocrates et les patriotes kurdes, notamment les syndicalistes et les marxistes-léninistes, contre les persécutions qui les visent, notamment en Turquie ou sur notre sol, où les supplétifs fascistes de l’État turc n’ont que trop fait régner la terreur et la mort sans jamais être sérieusement inquiétés par l’État français.
C’est donc au cas par cas, pays par pays, situation par situation, qu’il faudra que le PRCF soutienne les revendications des travailleurs et des démocrates kurdes sans jamais cautionner pour autant les « nationalistes » bourgeois comme Barzani, toujours prêts à s’acoquiner avec l’impérialisme américain pour se partager le pétrole irakien, tout cela sans jamais perdre de vue que l’impérialisme reste l’ennemi principal de TOUS les travailleurs de langue kurde, mais aussi turque, perse, russe ou arabe.
A lire :
Le point sur la situation à Afrine au 4 févirer 2018 :
L’armée turque – utilisant ses dizaines de chasseurs bombardiers F16 fournis par les Etats-Unis et ses tanks léopards fournis par l’Allemagne et s’appuyant sur les milices terroristes islamistes qu’elles a armé et soutient dans la province d’Idleb en Syrie – a lancé une violente invasion contre la province de Afrine à la frontière syrio-turque dans le nord ouest de la Syie. Violant ainsi le droit internationale dans le silence complice de ses alliés de l’OTAN, dont la France, l’Union Européenne et les Etats Unis. Les forces d’autodéfenses kurdes résistent causant des pertes significatives aux forces d’invasion, tandis que les populations d’Afrine sont victimes des bombardements turques. Malgré les importants moyens militaires engagés par la Turquie, ce n’est que quelques villages du kurdistan syrien qui ont été occupés par l’armée turques et ses suppétifs. Signe de ces difficultés, le régime de l’islamiste fasciste Erdogan a du rappeler le 4 février une partie de ses milices de l’Armée Syrienne Libre depuis la province d’Idleb vers la ville turque de Hatay, d’où ils seront lancé à l’assaut de la frontière ouest de la province d’Afrine. Démasquant au passage qui sont les terroristes qui sèment la guerre dans le nord de la Syrie et quels intérêts ils servent.
Dans ce maelstrom de la guerre inter impérialistes qu’est la syrie, le 3 février c’est un avion russe qui a été abattu au dessus de la ville de Saraqeb dans la province d’Idleb. Son pilote – un soldat de Crimée – qui a réussi à s’éjecter, assailli au sol par les terroristes islamistes après avoir vidé utilisé ses armes s’est fait sauter plutôt que d’être fait prisonnier. Les nombreuses décapitations de prisonniers commises par les terroristes islamistes – y compris en instrumentalisant des enfants – expliquent son geste. La question posée par la Russie est celle de l’armement de ces milices terroristes dans la zone sous influence turques de missiles sol air ? quelle est le pays de l’OTAN qui a fourni ses dangereuses armes aux terroristes islamistes ? Rappelons que le régime Hollande / Macron n’a eu de cesse que de soutenir y compris par des livraisons d’armes les terroristes islamistes en Syrie.