Alors que le régime Macron ne cesse de faire s’agiter ses dictateurs de l’Afrique de l’Ouest pour tenter de monter une intervention armée sous l’égide de la CDAO qui ne serait que le paravent d’une nouvelle guerre d’occupation néocoloniale franco-américaine dans la région, c’est massivement que la population manifeste à Niamey en soutien au renversement du régime.
« Halte à l’intervention militaire », pouvait-on également lire sur des pancartes brandies par les milliers de manifestants rassemblés sur la place de la Concertation à Niamey. À Agadez, plusieurs centaines de manifestants ont « demandé le départ de toutes les bases militaires étrangères », notamment la base américaine installée à l’aéroport de la ville
Il est vrai que les première déclarations des militaires qui ont mené un coup d’etat sans effusion de sang, déclarant vouloir mettre fin à un régime de corruption et de misère, à rétablir la souveraineté du pays, ne pouvaient qu’attirer le large soutien des classes populaires nigériennes.
l’Unicef s’est alarmée de la situation humanitaire au Niger, estimant que plus deux millions d’enfants avaient « besoin d’aide », un chiffre aggravé par la crise en cours. Selon l’organisation onusienne, ces chiffres peuvent augmenter « si les prix des denrées alimentaires continuent de grimper et si une récession économique frappe les familles, les ménages et les revenus ». Le Niger est, depuis le 30 juillet, sous le coup de lourdes sanctions économiques imposées par la Cedeao
Dimanche au Vatican, le pape François a appelé à une « solution pacifique le plus tôt possible », disant se joindre « à l’appel des évêques en faveur de la paix dans le pays et de la stabilité au Sahel ».
La veille, l’Algérie, qui partage une longue frontière avec le Niger, avait fait de même. Niamey bénéficie par ailleurs du soutien de Bamako et Ouagadougou.
C’est dans ce contexte que Jean Pierre Combe invite à réfléchir à ce qu’est le camps de la paix.
Les communistes savent depuis toujours que Jaurès avait raison d’écrire que le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage : rappelons-nous aussi que l’habit ne fait pas le moine, et pensons de même que l’uniforme ni les galons ne font le fauteur de guerre.
En vérité, Jaurès aurait pu dire que les fauteurs de guerre de son temps portaient costume trois pièces à queue de pie taillé sur mesure, chapeau haut de forme et canne à pommeau d’argent.
Aujourd’hui, les signes du temps ont un peu changé : le costume des capitalistes est un peu différent, mais toujours taillé sur mesure ; surtout, il a bien fallu que ces messieurs admettent dans leur club des membres recrutés dans le tiers monde, tout aussi riches qu’eux, mais qui s’habillent autrement lorsqu’il s’agit d’exhiber leur richesse : voyez les images vidéo du président déchu Bazoum diffusées par la presse télévisée et numérique : ses costumes africains valent plusieurs fois ce que valent les costumes trois pièces qu’il m’est si difficile d’acheter en prêt-à-porter !… Ce président légalement élu est, comme d’autres présidents légalement élus de pays africains, aussi proche des propriétaires des plus gros capitaux mondialisés que l’est le président Macron…
Du point de vue institutionnel, nous avons en France l’expérience de la démocratie formelle : elle remet très rarement en cause le pouvoir des très riches capitalistes, et lorsqu’elle le fait, elle laisse toujours assez de pouvoir à la finance pour que ces très riches reprennent le gouvernement entre leurs mains ! Comment pourrions-nous croire que le respect de l’ordre constitutionnel formellement démocratique serait une garantie de la paix, au Niger ou en France ? Et le processus qui a porté au pouvoir le président Bazoum était-il vraiment démocratique ?
Du point de vue de la paix internationale, l’expérience mondiale de la première moitié du vingtième siècle a conduit les gouvernements vainqueurs du nazisme et du fascisme à inscrire le principe de la non-ingérence mutuelle dans les affaires intérieures des Etats dans le statut de l’Organisation des Nations Unies : ce n’est certainement pas l’ultimatum formulé par la CEDEAO, ce club des Etats clients de la France, et adressé sous son évidente direction au groupe des militaires qui ont déposé le président Bazoum, qui assurera la paix au Niger !…
Il faut donc regarder du côté de ceux qui ont forcé le gouvernement nigérien à changer…
Le Comité narional pour la Sauvegarde de la Patrie nigérienne (CNSP), qui a pris le pouvoir, est formé d’une vingtaine de militaires du plus haut rang de l’armée nigérienne : donc à très peu près l’Etat-major de l’armée nigérienne lui-même ; sa prise de pouvoir n’a donné lieu à aucune violence au Niger, mais à des manifestations populaires impressionnantes par leur nombre et par leur discipline, bruyantes et sans débordements, sauf deux fenêtres brisées et la plaque arrachée de l’ambassade de France : à Niamey, le peuple, nombreux, soutient les militaires du CNSP.
Que veulent-ils faire ? Ils n’avaient aucune intention de chasser les ressortissants français ; sur le plan militaire, ils revendiquent seulement la fermeture et l’évacuation de la base dont les quinze mille militaires ont échoué dans leur mission de combattre le terrorisme ; logiquement, la fermeture de la base US devrait suivre de peu.
Sur le plan civil, ils revendiquent que la propriété et l’exploitation des gisements d’uranium soient rendues au Niger : aux yeux des communistes que nous sommes, c’est une juste revendication que la France doit satisfaire : le CNSP, c’est le camp de la paix au Niger.
Sur le plan militaire, le gouvernement français vient de manifester son intention de rendre le pouvoir au Niger au président déchu, et d’entrer en guerre contre les justes revendications du CNSP nigérien, en utilisant pour cela le club des Etats clients de la France, la CEDEAO. Le président déchu Bazoum, la CDAO et le gouvernement français prétendent contraindre le Niger à continuer une politique dont le peuple ne veut plus : c’est le camp de la guerre au Niger.
Deux pays voisins du Niger, le Pays de l’Homme intègre (Bourkina Faso) et le Mali se portent immédiatement au secours de la paix, et dans les autres pays d’Afrique occidentale et centrale, divers mouvements populaires manifestent une sympathie agissante pour le CNSP nigérien ; en vérité, les militaires « poutchistes » n’ont pas agi sur un coup de tête, mais en exécution d’une politique qu’ils ont longuement délibérée au sein d’un mouvement d’idées né en Haïti au sein de la lutte révolutionnaire pour son indépendance (victorieuse de l’Empire de Napoléon Bonaparte en novembre 1 804) et développé ensuite dans les luttes de libération des peuples de toute l’Afrique ; l’objectif de ce mouvement de pensée est de découvrir et de mettre en évidence les intérêts antiimpérialistes qui leur sont communs : ce courant d’idées ainsi que la politique qu’il engendre portent le nom de Panafricanisme.
Depuis l’entre-deux guerres du vingtième siècle, diverses personnalités ont inscrit leur engagement politique dans le mouvement panafricaniste.
Parmi eux Kwamé N’Krumah, Sékou Touré, Modibo Keïta, Houphouët Boigny, Léopold Sédar Senghor ont bénéficié de l’impulsion donnée aux mouvements populaires de libération par le programme du Conseil national de la Résistance antinazie et antifasciste (CNR).
Plus récemment, nous citerons encore Patrice Lumumba, Thomas Sankara, Nathalie Yamb, Kémi Séba, et Ibrahim Traoré qui préside le Conseil national de Transition du Bourkina Faso…
D’autres encore, beaucoup trop nombreux pour que nous puissions les citer tous…
Il me semble important de remarquer la profondeur des liens qui unissaient d’abord le mouvement panafricaniste aux luttes libératrices de la Révolution française, et qui se sont confirmés lors des luttes contre le nazisme et le fascisme par le fait que dans leur jeunesse, certaines des personnalités importantes du panafricanisme avaient vécu en France et participé aux luttes sociales et démocratiques de notre peuple : ce ne sont pas les obligations pourries héritées du colonialisme qui portent l’avenir de relations pacifiques entre notre pays et les pays d’Afrique : ce sont les liens tissés par eux entre nos peuples au cours des luttes convergentes contre l’exploitation capitaliste, contre l’impérialisme !…
8 août 2 023, Jean-Pierre Combe