Au niveau international, des campagnes de propagande sont organisées lors des élections. Comment ce phénomène est-il considéré à Cuba ?La propagande à Cuba est bien différente : elle se résume à une simple feuille de papier, sur laquelle apparaît la photo du candidat et une synthèse de sa biographie. La photo est affichée dans les lieux publics les plus fréquentés par la population : le marché, la boucherie, une boutique… afin que les électeurs aient des informations sur les candidats désignés.
Nous fonctionnons sur la base de l’unité et sur la base de la conformation d’un système politique unique. C’est pourquoi personne n’a de programme individuel.
Il ne faut pas confondre propagande électorale avec campagne électorale. Dans le cadre de la propagande, la Commission électorale organise des visites dans les différentes provinces, durant lesquelles les candidats se réunissent avec les électeurs. Ça, c’est une chose, une campagne électorale en est une autre, à savoir des villes recouvertes d’affiches, de photos, et des batailles électorales agressives, comme cela se passe dans d’autres pays.
Dans les élections, quel est le lien entre les concepts de représentation et de participation ?
Tout citoyen a le droit d’élire et d’être élu. Seules conditions fixées par la loi interdisant d’être candidat : être handicapé mental, ne pas avoir l’âge établi ou être déclaré juridiquement incapable. Dès l’instant où vous participez aux élections et que vous votez pour quelqu’un, vous lui transférez votre représentativité. Pour autant, lorsque cette personne agit, elle représente l’ensemble des électeurs qui lui ont conféré cette capacité de représentativité.
Cependant, cela ne signifie pas qu’il vous soit impossible de participer directement à la prise de décisions. Par exemple : lors de l’élaboration du Code du travail, tous les travailleurs du pays ont été consultés et ont eu la possibilité d’exprimer leurs critères, qu’ils soient négatifs ou positifs, et d’apporter des suggestions.
C’est une forme de participation directe dans l’exercice du pouvoir, et c’est aussi une forme directe de participer aux élections, car vous désignez, vous élisez les représentants dans les organes de direction représentative du pays.
Lorsque vous élisez un candidat aux élections municipales, vous élisez le gouvernement territorial. Cette personne que vous avez élue vous représente dans l’exercice du gouvernement local.
Certains se demandent pourquoi des députés sont élus dans des provinces où ils ne vivent pas…
Il s’agit d’une erreur d’appréciation. Le député n’a pas de représentation territoriale, mais nationale. À l’Assemblée nationale, on discute et l’on décide des grands problèmes d’intérêt général de la nation, et pas des problèmes territoriaux.
Lorsque l’Assemblée se réunit pour adopter le budget de l’État, par exemple, ce n’est pas pour construire une école ou réparer un cabinet médical de la famille. Il est plutôt question de dire : « Nous disposons de tant de millions de pesos pour la Santé publique, tant pour l’éducation, etc ». Ensuite, nous attribuons le budget. Les problèmes territoriaux se canalisent et sont résolus au niveau de la commune et de la province.
Ce sur quoi nous devons effectivement travailler, c’est augmenter les liens et les échanges entre les députés et les électeurs de la circonscription, du district et de la municipalité. À cet effet, il existe à l’heure actuelle un programme qui a été adopté par la direction du Parti qui s’appelle Perfectionnement des organes du Pouvoir populaire.
Une autre des questions les plus fréquentes sur les élections est de savoir pourquoi nous n’élisons pas le président ?
Pour l’élection à cette fonction, la Loi électorale a fixé une élection à suffrage indirect, à laquelle votent les organes représentatifs élus. Lorsque j’élis un député à l’Assemblée nationale, je l’investis de tous les pouvoirs souverains de prendre des décisions. Ainsi, l’une des facultés du député est de choisir qui sera le président du Conseil d’État et du Conseil des ministres.
Sur cet aspect, nous ne sommes pas une exception. Comment l’Espagne élit-elle le chef du gouvernement ? Il est élu par les « cortes » (parlement). Le président du gouvernement espagnol n’est pas élu au suffrage universel direct.
Par ailleurs, notre système n’est pas présidentialiste. C’est un système semi-parlementaire. Notre président ne dispose pas de la faculté de prendre seul des décisions : il ne peut ni nommer un ministre ni le destituer, il n’attribue pas de fonction honorifique, ne nomme pas les ambassadeurs. Autrement dit, toutes les grandes décisions reviennent aux organes collégiaux, non à une personne.
Aussi, l’élection d’un président en tant que personne unique n’a-t-elle pas de raison d’être, étant donné que la direction est assurée par un organe collégial, peut-on conclure.
Ajoutons que pour arriver à cette fonction notre président doit passer par cinq étapes électorales : premièrement, il doit être désigné et investi par un vote en assemblée plénière d’une organisation sociale ou de masse ; deuxièmement, il doit être élu par un vote de l’Assemblée municipale ; troisièmement, il doit être élu par un vote direct et secret des électeurs d’une circonscription électorale. S’il n’est pas élu par cette voie, il ne pourra pas être député ; quatrièmement, sa candidature doit être approuvée par l’Assemblée nationale et, cinquièmement, il doit être élu au vote direct et secret par les députés. Ainsi, peut-on dire que les étapes électorales pour être élu président sont plus que suffisantes.
Préalablement, nous avons parlé de la réduction du nombre de députés à l’Assemblée nationale et vous avez signalé que cette étude s’effectuera ultérieurement. De quels autres éléments tiendra-t-on compte pour la modification de la Loi électorale ?
Nous travaillons à l’élaboration d’une nouvelle Loi électorale. Autres thèmes qui nous occupent : la composition des élections, la mise en place d’un organe permanent, professionnel, chargé de diriger les élections, différent du système dont nous disposons aujourd’hui : une commission électorale dont les fonctions s’achèvent au terme des élections. Ce sont certaines des questions que nous allons examiner.
Pour conclure, l’une des plus grandes inquiétudes concerne les élections 2017-2018, et la continuité après le départ de la direction historique. Quelle importance accordez-vous aux prochaines élections ?
Les prochaines élections seront des élections générales, et c’est là toute leur importance. Nous allons élire les organes supérieurs du Pouvoir populaire de l’État cubain ; les candidats qui seront élus dirigeront le pays durant les cinq prochaines années. Personnellement, je pense que c’est en cela que réside leur importance.
Je crois qu’elles seront marquées par un événement de taille : comme l’a annoncé Raul, le mandat de la direction historique à la tête de l’État s’achève. Cela confère à ces élections un caractère très spécial, mais avec la sagesse et la vision de la direction historique de la Révolution et du général d’armée Raul Castro, les conditions pour ce moment ont été préparées.
Ce ne sera pas un moment traumatisant, car nous sommes tous prêts à le vivre. Il s’agit d’une préparation idéologique et politique de la force révolutionnaire pour vivre un moment historique pour ce pays, et nous sommes préparés pour ce changement.
Ensuite, notre confiance dans le Parti, dans sa direction, fera de ces élections un processus très important pour le pays, mais un processus naturel. L’important, c’est la sérénité qui a toujours caractérisé notre peuple.