En Bolivie, le gouvernement a confirmé le 26 aout l’assassinat de Rodolfo Illanes, vice ministre de l’intérieur du gouvernement de Bolivie, détenu et probablement torturés par un mouvement de mineurs coopératistes le 25 aout.Illanes avait été enlevé dans le secteur de Pandura, sur l’autoroute entre les villes de La Paz et Oruro, une route sujette à des blocages. Des blocages routiers qui ne sont pas sans rappelé la grève patronale des routiers lancée au Chili peu avant le coup d’état contre Allende.
Le Chef de l’état, Evo Morales a dénoncé l’assassinat de Rodolfo Illanes et déclaré que la mobilisation des coopératives minières dans le pays poursuit un but politique et non pas des revendications pour le secteur
Evo Morales a déclaré vendredi que la mobilisation des coopératives minières dans leur nation avait un arrière-plan politique et non pas la poursuite des revendications pour le secteur.
Les mineurs bloquent depuis plusieurs jours un axe routier important. S’ils demandent de meilleures conditions de travail et salaires, les propriétaires de coopératives protestent contre réforme du droit du travail qui instaure, notamment, la création de syndicats au sein des coopératives de mineurs. Les propriétaires réclament surtout la réforme du code minier du pays, incluant la suppression des obligations environnementales. En réalité, ce mouvement de protestation vise à obtenir l’autorisation de louer leurs concessions minières à des entreprises privées et étrangères, ce qui est interdit par la Constitution.
Le gouvernement a conduit plus de 100 arrestations suite à cet assassinat.
Ces tensions en Bolivie après celles au Venezuela et la tentative de coup d’état parlementaire en cours au Brésil montrent le durcissement et l’extension de l’offensive impérialiste pour déstabiliser les autorités progressistes en Amérique Latine, en une répétition du plan Condor : l’oligarchie capitaliste n’acceptant jamais que sa dictature implacable ne soit remise en cause par les travailleurs.
JBC pour www.initiative-communiste.fr
d’après sources d’agences.
Bolivie : 10 questions et 10 réponses sur le conflit avec les « coopératives » minières (telesur)
Katu Arkonada
Comment sont nées les coopératives en Bolivie ?Les coopératives minières ont pour origine la crise économique mondiale provoquée par le crack de la Bourse de New York en 1929. Beaucoup d’entreprises transnationales entrent en crise et doivent licencier des travailleurs à qui elles remettent des parcelles pour qu’il ses exploitent.La Révolution de 1952 amène avec elle la nationalisation des mines sous le gouvernement de Víctor Paz Estenssoro et la création de la Corporation Minière de Bolivie (COMIBOL) en renforçant l’exploitation par l’Etat et en affaiblissant l’exploitation indépendante.
Comment se transforme-t-elle en patronat minier ?On ne peut pas comprendre le parcours de la corporation minière avec des travailleurs associés comme n’importe où dans le monde vers la conversion en petites entreprises minières qui tirent une plus-value non seulement des ressources naturelles mais des travailleurs engagés sans comprendre comment s’implante le néolibéralisme en Bolivie.C’est en 1985, de nouveau sous le gouvernement de Víctor Paz Estenssoro qu’est mis en place le Décret 21060 qui permet la « flexibilisation du travail » et entre 1985 et 1986, il y a plus de 20.000 licenciements dans le secteur minier d’Etat qui viennent s’organiser autour des coopératives minières.
Ensuite, c’est Gonzalo Sánchez de Losada, un patron de mine, qui finit de démanteler COMIBOL en remettant les grandes entreprises aux transnationales et en donnant des concessions et/ou en transférant à des associés membres de coopératives les machines, les perforatrices, les excavatrices, etc…, les transformant en petits patrons.
Pourquoi le secteur des coopératives est-il devenu un allié du processus de changement ?Bien qu’ils aient été favorisés par Gonzalo Sánchez de Losada, les membres des coopératives minières sont devenus l’avant-garde de la lutte contre le néolibéralisme. Ils ont été des acteurs essentiels des mobilisations contre le Gouvernement de Goni, arrivant à prendre la Place San Francisco, l’action militaire la plus importante des protestations anti-néolibérales. En 2005, quand Carlos Mesa démissionne, ils deviennent l’acteur principal qui empêche les hommes politiques de droite Hormando Vaca Díaz et Mario Cossío deviennent respectivement Président du Sénat et Président de la Chambre des Députés, facilitant l’accès à la direction de l’Etat à Eduardo Rodríguez Veltzé, Président de la Cour Suprême qui organisera ensuite les élection que gagnera Evo Morales.C’est pour cela qu’en tant qu’acteur politique de première importance, aussi bien en qualité qu’en quantité puisque des 454 coopératives minières de 1990, on passe en 2005 à 778 coopératives qui emploient des dizaines de milliers de travailleurs.
Que dit la Constitution bolivienne sur les ressources naturelles, la propriété de celles-ci et la coopérative minière ?La Constitution Politique, dans son article 311, dans le chapitre Structure et Organisation Économique de l’Etat, stipule que « Les ressources naturelles sont la propriété du peuple bolivien et seront administrées par l’Etat. »L’article 369 indique que : « L’Etat sera responsable des richesses en minerais qui se trouvent sur le sol et dans le sous-sol quelle que soit leur origine et leur utilisation sera contrôlée par le loi. On reconnaît comme acteurs d production l’industrie minière d’Etat, l’industrie minière privée et les sociétés coopératives. »
De même, l’article 370 affirme que « l’Etat accordera des droits sur les mines à toute la chaîne de production, signera les contrats miniers avec des personnes individuelles et collectives après que les règles établies par la loi aient été respectées. II. L’Etat encouragera et renforcera les coopératives minières pour qu’elles contribuent au développement économique et social du pays. III Le droit sur les mines dans toute la chaîne de production ainsi que les contrats miniers doivent avoir une fonction économique et sociale qui s’exerce directement sur ses membres. » Mais, surtout, l’article 371 est clair : Les zones d’exploitation des mines accordées par contrat ne peuvent être ni transférées ni saisies ni transmises par héritage. »
Que demandent les membres des coopératives minières ? La deuxième semaine d’août, les membres des coopératives minières ont annoncé une grève illimitée sur tout le territoire bolivien si on ne tient pas compte d’un cahier de doléances en 10 points qui tout au long du conflit, se transformera en 24 revendications parmi lesquelles nous pouvons détacher :Le rejet de la Loi Générale sur les Coopératives Minières, en particulier du point qui permet la syndicalisation. Les membres des coopératives, devenus des patrons capitalistes, ne veulent pas de syndicats dans leurs entreprises.
Le rejet de la Loi 535 sur les Mines et la Métallurgie : Cette Loi empêche les entreprises privées (nationales ou transnationales) d’investir dans les concessions des coopératives et exige que les concessions minières soient accordées par COMIBOL. Actuellement, les membres des coopératives ont signé au moins 31 contrats avec des entreprises privées, parmi lesquelles certaines transnationales comme la COMSUR de Sánchez de Losada.
L’assouplissement des règles environnementales : Les coopératives minières se plaignent des démarches strictes pour obtenir les licences environnementales bien que 80% d’entre elles n’accomplissent pas ces démarches.
Lignes d réseaux d’énergie à tarifs différenciés : Les membres des coopératives minières demandent que l’Etat installe des lignes électriques dans tous les endroits où ils ont des concessions et qu’en plus, leur tarif soit subventionné.
Réinvestissement des ressources provenant des primes minières dans le secteur des coopératives. La demande de réinvestissement des primes qu’ils paient sur la vente des minerais révèle que les membres des coopératives minières ne paient à l’Etat que 25% des primes contre 85% pour les entreprises privées.
Quelle a été la position du Gouvernement face à ces revendications ?Le Gouvernement bolivien a eu une position de dialogue en convoquant les membres des coopératives minières à des réunions avec les ministres de la Présidence, du Gouvernement et des Mines tout en se montrant ferme dans sa position de ne pas violer la Constitution face aux demandes corporatistes d’un groupe de patrons qui ont cessé de penser au pays pour penser à leur intérêt privé.
Y a-t-il eu une conspiration comme l’a dénoncé Evo Morales ?Il y a 2 choses sur lesquelles on devrait enquêter ces prochains jours mais c’est une réalité que quand les 2 parties, le gouvernement bolivien et les membres des coopératives minières, se sont rapprochées pour s’asseoir à une table, un fait qui a rendu impossible le dialogue est survenu :Le lundi 22 août « est apparu » un faux ordre d’arrestation de dirigeants des mines qui a provoqué le passage dans la clandestinité de la direction des coopératives et l’intensification des blocages, le mardi.
Le mercredi 24 s’est produit l’assassinat de 2 mineurs membres de coopératives pendant les blocages et dans des circonstances pas encore éclaircies mais tous les indices font penser qu’il s’agit d’une embuscade car l’arme utilisée, de 9 mm de calibre, a dû tirer de très près pour causer une blessure mortelle, plus encore quand l’un des mineurs tués a été atteint au côté. Il y a 2 hypothèses : ou un tir ami (étant donné que l’utilisation d’armes à feu par les membres des coopératives a été prouvée) ou un tir de la police (une hypothèse soutenue par une dénonciation du Défenseur du Peuple). Au cas où les tirs seraient venus de la police, ce serait une désobéissance à l’ordre direct du Président Evo Morales non seulement de ne pas tirer mais de ne même pas porter d’armes à feu sur le lieu des blocages.
Qui était Rodolfo Illanes et pourquoi a-t-il été assassiné ?Rodolfo Illanes, militant du processus de changement qui avait assumé de nombreux postes d responsabilité était Vice-ministre de l’Intérieur et de la Police. Illanes avait été volontaire pour aller à Panduro, le lieu du blocage principal, pour dialoguer avec le direction des coopératives. A Panduro, il a été enlevé et retenu pendant tout le jeudi 25.Dans une troisième étape qui doit être éclaircie, et quand le gouvernement et la direction des coopératives s’étaient déjà mis d’accord pour renouer le dialogue, se produisit un affrontement confus qui semble avoir fait un troisième mort parmi les mineurs, ce qui aurait été utilisé pour provoquer le lynchage du Vice-ministre Illanes, qui est assassiné et dont le corps est abandonné sur le bas-côté de la route dans la matinée. Illanes est mort d’un traumatisme crânien.
Quel a été le rôle des médias privés dans ce conflit ?Nous pouvons distinguer 2 phases dans l’action d’une bonne partie des médias boliviens dans le conflit aves les mineurs des coopératives.Jusqu’à le semaine tragique qui s’achève avec l’assassinat d’Illanes, la plupart des médias installent l’idée que le conflit avec le patronat des coopératives minières est une bagarre entre alliés politiques, rejetant et critiquant leurs revendications.
Pendant la semaine qui débute le 22 août, une bonne partie des médias attise le conflit à partir des faux ordres d’arrestation. Ils accordent même un espace et donnent la parole aux dirigeants des coopératives pour démentir le Ministre du Gouvernement qui avait déclaré que les ordres étaient faux. Cette nouvelle déclenche les mobilisations et à partir de là, on continue d’alimenter le scénario de confrontation.
Le jeudi 25 et le vendredi 26, avec déjà un vice-ministre enlevé, torturé et assassiné en plus de 3 mineurs tombés dans les affrontements, les journalistes de la droite bolivienne cherchent à installer l’idée que ce qui est arrivé est le fruit de l’intransigeance du gouvernement et de l’absence de dialogue pour faire porter la responsabilité des morts à deux bandes qui s’affrontent.
Quelle est la situation dans l’immédiat dans le conflit avec les membres des coopératives ?Le conflit avec les mineurs des coopératives est un différend entre le peuple et le capital pour l’excédent. Les mal nommées coopératives veulent la liberté de pouvoir s’associer avec de transnationales et exploiter les ressources naturelles pour obtenir la plus-value la plus élevée possible aussi bien sur la Terre Mère que sur les travailleurs salariés. En ce sens, le gouvernement peut s’asseoir et écouter les demandes mais il ne peut pas violer la souveraineté du peuple bolivien sur les ressources naturelles établie par la Constitution Politique de l’Etat.Il faut aussi mentionner la position des mouvements sociaux boliviens, des syndicats paysans et des peuples indigènes qui ont demandé que reviennent les concessions minières et les privilèges dont jouissent les membres des coopératives.
Un scénario possible est un remaniement dans la politique d’alliances sociales de l’actuel gouvernement dans lequel les mineurs des coopératives, très discrédités après une semaine tragique qui a fait plusieurs morts dans les manifestations, perdent leur position et leur légitimité politique. Le remaniement se fera aussi à l’intérieur car il semble peu probable que l’actuelle direction des coopératives puisse continuer à conduire le mouvement avec en plus, le fait que certains de ses dirigeants pourraient être accusé d’être les auteurs matériels ou intellectuels de l’assassinat du Vice-ministre Illanes.
Dans tous les cas, il faut déterminer le niveau de la conspiration intérieure et extérieure dénoncée par le Président Evo Morales lors de la conférence de presse de vendredi 26 car la conspiration sera un élément déterminant de l’augmentation des conflits sociaux d’ici à 2019, année pendant laquelle la poursuite du processus de changement que conduit le Président Evo Morales se jouera.
Source en espagnol : http://www.telesurtv.net/bloggers/10-preguntas-y-10-respuestas-sobre-e…
Ce ne sont pas des « mineurs » (des travailleurs) mais des exploitants miniers, de petits entrepreneurs, qui ne veulent pas de syndicats de travailleurs. La droite est derrière eux