Rédigé par Christophe – JRCF et publié depuis Overblog
Depuis 1831, Colombie et Venezuela sont deux pays indépendants après avoir formé la République de Colombie (aujourd’hui appelée « Grande Colombie » pour ne pas la confondre avec l’actuelle République de Colombie), créée sous l’impulsion de Simón Bolívar, de 1821 à 1831, incluant l’actuel Équateur, le Panama et quelques territoires appartenant aujourd’hui au Brésil. Désormais indépendants, Colombie et Venezuela ont en commun leur passé immédiat en tant que colonies de l’Espagne, dont l’impérialisme initié dès que le XVIè siècle touchait à sa fin dans les années 1820 avec l’indépendance de la plupart des pays latino-américains. Ainsi, en 1810, quelques provinces de la vice-royauté de Nouvelle Grenade, qui formaient alors la plus grande partie de la Colombie contemporaine, déclarent leur indépendance vis-à-vis du royaume d’Espagne, que cette dernière finit par reconnaître en 1819. Le Venezuela, qui comprend six provinces au sein de la Nouvelle Grenade, fait de même en 1811 et ne sera reconnu indépendant par l’Espagne qu’en 1845.
À cette époque, le Venezuela est une terre très agricole qui exporte du cuir, du café, du cacao, du tabac et de l’indigo vers l’Europe(1), malgré l’interdiction de commerce imposée par l’Espagne. Francisco (de) Miranda, connu comme le « précurseur » de l’indépendance de l’Amérique latine, aux côtés de Simón Bolívar, surnommé le « libérateur » dès 1813, sont issus de familles aristocratiques, ont beaucoup voyagé, notamment en Europe lors de la Révolution française, avant de regagner l’Amérique du Sud au XIXè siècle. En 1810, ils rejoignent la Société Patriotique, organe révolutionnaire ressemblant au club des Jacobins. L’indépendance vis-à-vis de l’Espagne déclarée en 1811(2), la Première République du Venezuela – dont la constitution fédérale est fortement critiquée par Bolívar(3) – apparaît la même année et est très vite secouée par les groupes royalistes fidèles à la couronne d’Espagne. Ces groupes royalistes, principalement des régions de Maracaibo, de Guayana et de Coro, imposent un blocus commercial à l’ensemble des côtes du Venezuela. En 1812, Caracas est presque totalement détruite par le tremblement de terre du 26 mars. Les groupes royalistes en profitent pour convaincre les ignorants que ce séisme est une « punition divine » infligée au Venezuela pour avoir désobéi au roi d’Espagne. Le président Francisco de Miranda capitule face aux royalistes fin juillet 1812, ce qui engendre la perte de Caracas par les groupes patriotes. Bolívar se retire par la suite à Carthagène des Indes, dans l’État libre de Carthagène, c’est-à-dire en actuelle Colombie. En 1813, les groupes patriotes menés par Bolívar lancent ce qui sera appelé la « Campagne admirable » et reprennent Caracas. Bolívar proclame alors la Deuxième République, qui existera d’août 1813 à décembre 1814. Mais dès lors, l’Espagne, dotée d’une constitution depuis 1812 et débarrassée de Napoléon et des Français sur son territoire européen, renforce ses troupes. Les forces royalistes reprennent le contrôle de la plus grande partie du Venezuela, les groupes patriotes de Bolívar étant réduits à l’intérieur des terres et sur l’île de Margarita. Jusqu’en 1819, les groupes patriotes tentent tant bien que mal de s’imposer face aux royalistes fidèles à l’Espagne. Néanmoins, ils parviennent en 1817 à prendre le contrôle de la province de Guayana et installent un siège à Angostura, l’actuelle Ciudad Bolívar, au bord du fleuve Orénoque. Angostura devient ainsi la capitale temporaire de la République du Venezuela. Le congrès qui s’y tient en 1819 jette les bases de ce qui deviendra en 1821 la République de Colombie, c’est-à-dire l’union du Venezuela, de l’actuelle Colombie et de l’actuel Équateur.
Les territoires à l’Ouest et au Sud-Ouest du Venezuela, à savoir, en particulier, ceux de la Colombie contemporaine, appelée Nouvelle Grenade à l’époque, sont sujets à de vives tensions depuis l’indépendance déclarée à l’Espagne en 1810. En effet, fédéralistes, centralistes et royalistes se disputent le territoire. Les centralistes furent portés vers la victoire de 1812 face à l’Espagne avec à leur tête Simón Bolívar. Dès lors, certaines régions de la Nouvelle Grenade se rassemblent autour du modèle centraliste (Cundinamarca, Mariquita, Chocó), leur capitale étant Bogotá. D’autres régions se forment sur le modèle fédéraliste (notamment Carthagène, Antioche et Pamplona). L’extrême-nord et l’extrême-sud restent aux mains des royalistes. Les luttes politiques et territoriales entre les centralistes et les fédéralistes – qui combattent dans le même temps les royalistes – se traduisent en des guerres civiles profitant directement aux royalistes, qui reconquièrent ainsi l’ensemble du territoire dès 1815. Il faudra attendre jusqu’en 1819, après le Congrès d’Angostura, pour que les forces bolivariennes libèrent le territoire de la Colombie du contrôle absolu des royalistes. La bataille de Boyacá d’août 1819 permet aux patriotes de s’imposer et de prendre Bogotá. Cette même année, la Grande Colombie, qui rassemble le Venezuela, la Nouvelle Grenade et l’Équateur, est effectivement créée et sera dotée en 1821 d’une constitution(4). Bolívar, centraliste par excellence, devient le président du nouveau pays jusqu’à sa mort en 1830. D’autres expéditions seront menées par Bolívar : au Pérou en 1824 et en Bolivie en 1826 où il est également nommé président de la République.
Bien que l’empire espagnol ait disparu dès la moitié des années 1820, les difficultés ne sont pas terminées. En effet, les anciennes luttes entre centralistes et fédéralistes ressurgissent. Cela va précipiter la fin de la Grande Colombie, définitivement dissoute en 1831. En 1830, le Venezuela fait sécession et devient la République bolivarienne du Venezuela. La même année, l’Équateur quitte également la Grande Colombie pour devenir la République de l’Équateur. La Nouvelle Grenade, c’est-à-dire la Colombie contemporaine, trouve alors ses frontières quasi-actuelles si l’on fait omission de Panama, devenu indépendant en 1903.
La fin de la Grande Colombie est significative dans l’histoire du Venezuela et de la Colombie. Au sein des deux jeunes pays, dont l’objectif était à l’époque la consolidation face à la domination de l’Espagne, ainsi que pour les autres pays latino-américains, le XIXè siècle à partir des années 1830 impose de nouvelles pensées et tendances politiques et économiques, très similaires à celles qui existent dans les pays européens, notamment libérales. Cela sera surtout le cas vers la fin du XIXè siècle au Venezuela et en Colombie. Les deux pays seront également confrontés à de fortes instabilités intérieures et aux incursions d’autres empires, comme celui de la Grande-Bretagne et celui naissant des États-Unis qui se renforce tout au long du XIXè siècle et qui devient écrasant au début du XXè siècle sur le continent américain.
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1. Diagnostico del Sector Agricola Venezolano [en ligne]. IICA Biblioteca Venezuela, 1994. [Consulté le 15 juin 2020]. Disponible à l’adresse : https://books.google.fr/books?id=KTQqAAAAYAAJ
2. Vénézuéla, Proclamation de l’indépendance, 5 juillet 1811, Digithèque MJP. [en ligne]. [Consulté le 16 juin 2020]. Disponible à l’adresse : https://mjp.univ-perp.fr/constit/ve1811.htm
3. CERVANTES, Biblioteca Virtual Miguel de. Constitución Federal de 1811. Biblioteca Virtual Miguel de Cervantes [en ligne]. [Consulté le 16 juin 2020]. Disponible à l’adresse : http://www.cervantesvirtual.com/obra-visor/constitucion-federal-de-los-estados-de-venezuela-21-de-diciembre-1811/html/86de8dbc-4b14-4131-a616-9a65e65e856a_2.html
4. Constitución política de Cúcuta (1821). [en ligne]. [Consulté le 16 juin 2020]. Disponible à l’adresse : http://www.suin-juriscol.gov.co/clp/contenidos.dll/Constitucion/30020077?fn=document-frame.htm$f=templates$3.0
5. Mappa das republicas de Venezuela, Nova Granada e Ecuador. Gallica [en ligne]. [Consulté le 16 juin 2020]. Disponible à l’adresse : https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8441178s