A l’occasion du congrès académique du SNES-FSU de Lille les lundi 19 et mardi 20 février 2024, les militants syndicaux du SNES membres du PRCF, enseignants actifs, ainsi que d’autres retraités, ont constaté l’état de délabrement politique, syndical et idéologique de la section académique qui, jusqu’alors, était la plus euro-critique à l’intérieur d’une confédération ayant fait le choix de « l’Europe sociale » depuis très longtemps.
Pendant deux jours, portant de nombreux amendements (pour certains acceptés, pour un bon nombre rejetés au prix d’explications alambiquées…) contre le catastrophique alignement euro-atlantique transparaissant dans les textes soumis à discussion, les camarades du PRCF membres du SNES ont pourfendu : le « soutien à l’Ukraine » contre « l’impérialisme russe », sans qu’une seule fois apparaisse le nom OTAN dans les textes (! ) ; l’absence de nomination du MEDEF comme responsable de la politique de destruction des conquêtes sociales et des services publics (!) ; la faiblesses abyssale de la (non-)critique envers la marche à la guerre sous l’impulsion de l’hégémonisme états-unien ; l’absence de toute référence au processus de fascisation, noyée derrière des appels creux à « combattre les idées d’extrême droite » ; le silence assourdissant de toute référence à la destruction de la République une et indivisible et au « saut fédéral/impérial européen » porté par Macron ; et bien entendu, l’absence de condamnation de la fausse « gauche » ayant œuvré à l’euro-destruction du pays depuis ledit « tournant de la rigueur » de 1983.
Témoins de cette déchéance grandeur nature, ces camarades syndicalistes ont mené le combat et pu compter, à plusieurs reprises, sur des voix approuvant le constat certes alarmiste mais CONCRET ET FACTUEL de la réalité du monde en 2024 – tandis que la direction du SNES-FSU de Lille préférait « ne pas être trop pessimiste », préférant opter pour de nombreux silences qui la rendent complice de la capitulation face à l’ordre UE-OTAN. Refusant jusqu’au bout une telle fuite en avant favorisant la marche à la guerre généralisée et l’euro-fascisation, ils ont rédigé :
- Une motion distribuée et diffusée à l’occasion du congrès exhortant « la syndicalisme de transformation sociale à combattre le saut fédéral euro-atlantique en cours » ;
- Une lettre publique de Georges Gastaud, « adhérent du SNES sans discontinuer depuis 1971 », « à la suite du honteux congrès SOCIAL-IMPERIALISTE du SNES-Lille reniant tous ses mandats oppositionnels passés ».
Plus que jamais, le salut pour les enseignants désemparés viendra de la reconstruction d’un syndicalisme DE COMBAT ET DE RUPTURE avec le « saut fédéral/impérial européen », donc avec l’Axe UE-OTAN, et non avec une SNES-FSU ayant fait le choix, jusque dans son académie jusqu’alors la plus combative, de la capitulation face à la Réaction, trahissant ainsi les paroles du philosophe Georges Politzer qui affirmait : « l’indépendance intellectuelle, l’esprit critique ne consiste pas à céder à la réaction, mais au contraire A NE PAS LUI CEDER » !
A lire :
- Que fait le syndicalisme, dans les eaux glacées du « grand bain néolibéral » de l’Europe ? Réponse au dossier sur l’Europe du SNES-FSU
- Education Nationale : valse des ministres mais continuité des euro-directives d’austérité et de privatisation.
- La moitié des enseignants en grève, blocage des routes par les paysans, action pour les salaires dans l’Energie. Construire la résistance générale tous ensemble ?
LE SYNDICALISME DE TRANSFORMATION SOCIALE DOIT COMBATTRE LE SAUT FEDERAL EURO-ATLANTIQUE EN COURS
Motion pour le congrès académique du SNES de Lille – 20 février 2024
Au minimum depuis le Traité de Maastricht (1992), la logique de la « construction » européenne dévoie les idéaux internationalistes de Victor Hugo, Jean Jaurès et Romain Rolland pour instituer une Europe supranationale, néolibérale, antidémocratique et atlantique dont la logique, entièrement au service du capital oligarchique, déstabilise nos services publics et l’ensemble des conquêtes sociales, laïques et démocratiques héritées des luttes passées. Sécurité sociale, nationalisations, statuts nationaux, Education nationale publique et laïque, code du travail protecteur, emploi productif industriel, agricole ou halieutique, recherche publique, exception culturelle française, tout doit disparaître dans ce cadre délétère qu’est l’UE. Du reste, le peuple français en général et les classes populaires en particulier, ouvriers, employés, paysans (plus les 18/25 ans dans leur majorité), sont si conscients de la nocivité intrinsèque de l’UE, cette caricature de l’Internationale des peuples, qu’ils ont massivement voté Non à la Constitution européenne en 2005. Une constitution qu’on leur a néanmoins imposée honteusement à travers le Traité de Lisbonne voté en 2008 par ratification parlementaire.
Et voilà que maintenant, le Parlement européen, aussitôt suivi par les députés français, vient de voter une motion (novembre 2023) qui, à quelques mois des européennes, invite à modifier en profondeur les traités européens, non pas dans le sens d’une Europe des travailleurs et des peuples souverains coopérant pour construire la paix mondiale, la diversité culturelle et la transition environnementale, mais dans celui d’un Etat fédéral euro-atlantique doté d’un gouvernement supranational, fonctionnant à la majorité (donc mettant fin au droit de veto des pays membres), destituant les Etats-nations au profit de l’Europe des grandes régions, appuyé sur une « armée européenne » arrimée à l’OTAN, permettant à ses armées de voyager à leur guise de Gibraltar à Riga et s’inscrivant ouvertement dans la perspective de ce que le chef d’état-major des armées françaises appelle un « conflit global de haute intensité ». Lequel, à l’époque des armes nucléaires et des ruineuses lois de programmation militaire abondant la course aux armements, pourrait bien causer la fin de l’humanité, si ce n’est celle du vivant sur Terre !
A l’arrière-plan de ce projet impérial écrasant se trouve la stratégie du MEDEF qui, dès 2012, appelait ouvertement par la voix de son manifeste « Besoin d’aire », à transférer la souveraineté française à des « Etats-Unis d’Europe » s’inscrivant dans ce que le patronat appelait alors l’« Union transatlantique », tout en « reconfigurant les territoires » pour supprimer les communes et amoindrir l’Etat-nation et les départements au profit des euro-régions et des « métropoles ». Le tout sur fond d’abandon de la diversité linguistique de l’Europe et de promotion unilatérale de l’anglo-américain, ouvertement adopté désormais, sans le moindre débat, comme LA langue unique de travail de la Commission européenne, du Parquet européen et de la Cour de justice européenne.
Dans ces conditions, il n’est plus temps de rêver les yeux ouverts d’une « réorientation progressiste de l’UE » dans le cadre de traités européens de plus en plus favorables à la supranationalité, à l’atlantisme débridé et, in fine, aux classes dominantes de la société capitaliste. En effet, une telle construction « fédérale », et en réalité, impériale, ne peut conduire qu’à la guerre continentale, qu’à la destruction déjà bien engagée des libertés démocratiques, qu’à l’essor des extrêmes droites nostalgiques du pire, qu’à l’austérité salariale sans fin sur laquelle s’est construite la monnaie unique depuis 1983, qu’à l’arasement des conquis sociaux. Et pour finir, qu’au désossage final de l’Education nationale elle-même.
C’est pourquoi notre syndicat, loin de s’aligner sur le piteux conformisme euro-atlantique de la Confédération Européenne des Syndicats, doit alerter les personnels sur la dangerosité sans précédent du « saut fédéral européen » que concoctent les oligarchies européennes, gouvernement Macron en tête, dans le dos des peuples, en violant à nouveau le Non référendaire de 2005 et en contournant le débat public.
Il y a bien aujourd’hui deux logiques antagoniques : l’une est celle de la défense des statuts nationaux, des concours nationaux, des diplômes nationaux, des qualifications et du baccalauréat national, d’une l’Education nationale de qualité pour tous pour la promotion desquels le SNES et la FSU ont toujours lutté sans les opposer nullement à la solidarité internationale des travailleurs en lutte et à la solidarité avec les travailleurs immigrés. L’autre est celle, de plus en plus menaçante pour les peuples, l’émancipation et l’humanité, que tente de porter à son comble un saut impérial euro-atlantique qu’il serait syndicalement et humainement suicidaire de cautionner si peu que ce fût.
A la suite du honteux congrès SOCIAL-IMPERIALISTE du SNES-Lille reniant tous ses mandats oppositionnels passés : Où va le SNES-FSU?
Par Georges Gastaud
Adhérent du SNES sans discontinuer depuis 1971, époque où j’étais surveillant d’externat à Nice, c’est avec effarement que je contemple l’évolution navrante de ce syndicat, pilier de la FSU et syndicat majoritaire, quoique déclinant, du second degré. Un syndicat qui s’est longtemps réclamé à juste raison du syndicalisme de lutte et de transformation.
Non seulement le SNES n’a pas réussi, ne serait-ce qu’à freiner sérieusement une seule contre-« réforme » de l’Education de Claude Allègre à Blanquer en passant par Fillon et Chatel (le bouquet final étant la mise à mort par Blanquer du bac national, ex-premier grade universitaire, au nom de Parcours Sup) ; non seulement le SNES n’a pas su stopper la dégradation constante des salaires des profs, la démolition de leur retraite (combien de profs finissent-ils leur carrière sur les genoux à 65 ans et plus ?), de leurs conditions de travail et, tout bonnement du respect dû aux enseignants par l’administration face aux innombrables incivilités qu’ils subissent. Mais à aucun moment, le SNES n’aura eu la force de proposer une autocritique sincère et approfondie sur ses échecs revendicatifs à répétition qui mettent aujourd’hui en danger de casse finale, globale et imminente l’Education nationale, le statut des fonctionnaires, voire l’existence du second degré long…
Tout est lié. Non seulement ce syndicat qui, au temps de sa splendeur, était dirigé par des communistes proches de la CGT de classe de Frachon et de Krasucki, se range depuis plusieurs décennie, au moins dans le principe, du côté de la « construction européenne » (une « construction » funeste que les congrès successif du SNES évitent de mettre en cause quoi que fasse l’UE) que le SNES promet sans cesse bien vainement de changer du dedans ; mais le syndicat se positionne désormais clairement du côté de l’OTAN (que plus aucun texte officiel du SNES ne met en accusation : ce qui relève du soutien par omission quand le SNES retrouve une voix de stentor pour dénoncer l’« impérialisme russe »). Le SNES soutient même désormais l’envoi d’armes à l’Ukraine (notoirement pro-nazie !) de Zelensky et, tout en palabrant platoniquement sur la paix (sur le mot, pas sur la chose !), il se montre indifférent au fait que ces positions jusqu’au-boutistes mènent tout droit à la guerre continentale voire mondiale, avec des conséquences potentiellement exterminatrices pour la population française car qu’arrivera-t-il si l’UE-OTAN affronte globalement, et tôt ou tard, nucléairement, le bloc Chine-Russie ?
Ainsi, cet ex-syndicat de lutte tourne-t-il totalement le dos, malgré ses trémolos sur les « valeurs progressistes » au conseil que surent courageusement donner à leur peuple respectif le Russe Lénine, le Français Jaurès, l’Allemand Liebknecht ou la Polonaise Luxemburg en 1914 : si tu veux défendre la paix, balaye devant ta porte et au lieu de participer lâchement à l’union sacrée contre l’ennemi étranger avec tes capitalistes, considère que « l’ennemi principal est dans ton pays ». Désormais, des dirigeants du SNES anciennement communistes ou insoumis qui, jadis, défilaient contre l’OTAN et comprenaient encore il y a quelques années seulement, qu’il n’y a que du mauvais à attendre de l’impérialisme états-unien et de ses valets européens, ménagent l’UE, sur laquelle ils mentent par omission (ils font comme si elle n’existait pas et ne la critiquent jamais frontalement !). Cela malgré les innombrables attaques antisociales et anti-laïques qui émanent d’elle depuis 40 ans au nom de l’euro et des critères d’austérité strangulant les retraites, les « monopoles publics » (Poste, EDF, SNCF…), les « dépenses de santé », le « coût du travail », le « droit du travail », et donnant toute latitude aux capitalistes « français » pour délocaliser l’industrie française (donc déclasser nos ouvriers et ingénieurs) et de la PAC européenne détruisant la pêche artisanale et l’agriculture paysanne. On ne peut pas en effet accepter d’un cœur léger l’euro, donc les critères de convergence austéritaire qu’ils comportent, et construire le tous ensemble des travailleurs du public et du privé, des salariés et des paysans, car pour fédérer les luttes, encore faut-il remonter à la racine de la casse euro-atlantique géante qui frappe, au profit de l’oligarchie capitaliste, les ouvriers, les agents publics et les petits entrepreneurs de la ville et de la campagne. Qui plus est, le SNES défile désormais dans le cadre d’une brillante « Intersyndicale » plus prompte à demander (au nom de la « paix », monstrueuse hypocrisie !) des armes pour l’Ukraine qu’à condamner les 413 milliards d’euros de la loi de programmation militaire.
Plus globalement, comment peut-on croire que laisser mettre en place l’Etat supranational que prépare le « saut fédéral européen » imminent en vue d’un « conflit global de haute intensité » très officiellement préparé par le chef d’état-major des armées françaises, peut se faire sans rire… en défendant l’Education nationale, les statuts nationaux, la laïcité à la française, voire, pour les moins décaféinés des actuels dirigeants syndicaux, la « nationalisation de l’école privée » ? Mensonge éhonté ou sottise incurable ?
Quand l’Etat-Nation français se sera dissout dans les eaux glaciales des « Etats-Unis d’Europe » affiliés à l’« Union transatlantique » des traités du libre-échange mondial, des guerres otanesques et du tout-anglais balayant nos langues nationales, alors vraiment, les mots Education nationale, statut national, diplômes nationaux, conventions collectives nationale de branche, ne susciteront plus à raison que l’hilarité du côté des actionnaires du CAC 40 ! Et l’on pourra toujours alors amender et sous-amender à l’infini dans les congrès syndicaux byzantins des « mandats » léchés que, d’ores et déjà, les administrations grossièrement antidémocratiques de l’Education dé-« nationale » assises sur l’état de droit piétinent quotidiennement avec un gros rire méchant !
Tant pis pour ceux qui, à la manière du corbeau de la fable, jureront alors « mais un peu tard » » qu’on ne les y reprendra plus. Comme certes, on ne surprendra plus désormais les citoyens bernés de l’ex-RDA regrettant leur pays perdu à l’instar de cette écrasante majorité de Russes qui, sans l’avoir défendue en 1991 quand il était encore temps, pleurent aujourd’hui les acquis socialistes, la paix civile, la sécurité externe, les relations égalitaires et le haut héritage culturel dévasté de l’ex-Union soviétique.
Ci dessous un communiqué de la FSU, passant sous silence toute à la fois la concomitance de la coupe budgétaire frappant les salaires des enseignants et de l’augmentation de 3 milliards d’euros des dépense en livraison d’arme pour 2024 pour la guerre en Ukraine, et celle de l’ordre du respect des critères de Maastricht par l’Union Européenne résultant en ce nouveau tour de vis euro-austéritaire.