Notre gouvernement peut compter sur les bonnes oeuvres de la Cour des Comptes pour attaquer les derniers “tabous” de l’éducation en France. Ce qu’ils appellent tabous, nous appelons conquêtes sociales. Ce qu’ils appellent Cour des Comptes, nous appelons ça officine servile de la bourgeoisie Macronienne vendue au grand capital.
Le “tabou” du jour est ce que Le Monde a l’indécence d’appeler la “quasi-gratuité” de l’université. “Quasi” en effet. Il est bon de le souligner messieurs les grands reporters, car vous semblez oublier que l’université, frais d’inscription mis à part (170 euros en licence actuellement), ce sont des coûts de vie : logement, transports…
Cela vous aura peut-être échappé mais ces coûts de vie ne sauraient être couverts par des aides sociales bien insuffisantes (les bourses du CROUS n’ont jamais suffi à faire vivre qui que ce soit) ni par un travail salarié à temps partiel, à moins que celui-ci ne soit si important en volume horaire qu’il ne compromette entièrement la réussite scolaire (ce qui est bien souvent le cas).
Coûts de vie d’une part mais également coûts d’opportunité : le bachelier qui vient d’un milieu pauvre se retrouvera face à l’alternative suivante: chercher un travail peu ou pas qualifié pour accéder au plus vite à une (bien dérisoire) sécurité économique ou prendre le risque de dépenser beaucoup dans des études dont l’issue est incertaine, restant donc à charge du foyer familial ? Aussi nombre d’enfants de pauvres choisissent les filières les plus courtes et les moins rémunératrices voire pas de filière du tout car ils y sont poussés par la misère.
A cette “quasi-gratuité” devenue insupportable aux yeux de ceux qui n’ont que la “réduction des dépenses publiques” en tête, s’oppose une double logique de pseudo-bon sens économique et de panurgisme budgétaire.
Le bon-sens consisterait à dire que les universités manquent d’argent, ce qui est une réalité. La solution ? Faire payer les élèves ! Les 40 milliards de cadeaux fiscaux accordés au patronat avec le CICE peuvent dormir tranquille, à l’abri dans les coffres de Suisse ou des îles Caïmans.
Taxer le capital pour financer l’enseignement supérieur ? Allons vous n’y pensez pas, les capitalistes mettent leurs enfants dans des écoles privées hors de prix, souvent à l’étranger. Il serait absurde qu’ils participent à l’effort éducatif national. Les formations privées (ou semi-publiques, voire publiques) hors de prix ont en effet un rôle à jouer dans le train de réformes antisociales que l’on nous impose. La Cour des Comptes assène en effet comme argument une liste de formations dispensées à des prix prohibitifs : SciencesPo, certaines écoles d’ingénieurs, les “diplômes universitaires” des universités…
Tous les raisonnements patronaux convergent vers un même point : augmenter les frais d’inscription, pour que l’état puisse faire de nouvelles coupes budgétaires. Les frais d’inscription en licence resteraient à leur niveau actuel, mais les masters passeraient de 243 à 965 euros l’année, et les doctorats de 380 à 781 euros.
Pour les étrangers désirant étudier en France, la sanction est infiniment plus sévère. Alors qu’auparavant ils devaient payer les mêmes droits d’inscription que les Français, les licences devraient passer à 2770 euros l’année, 3770 pour les masters et doctorats.
Personne à la “gauche de la gauche” ne sera surpris par ces mesures. Elles étaient dans les bacs du projet Macronien depuis le début, voir les fameux “Macronleaks” que nous avions dénoncés dès le début.
Peu surprenantes, ces mesures n’en sont pas moins révoltantes.
Alors que le mouvement des gilets jaunes fait entendre des revendications d’une partie paupérisée de la population (qui compte aussi bien une petite-bourgeoisie d’entrepreneurs et de petits patrons que des prolétaires stricto sensu), il est nécessaire de faire comprendre que les revendications à porter ne touchent pas au “racket fiscal” mais à la vie chère. Sur ces bases seulement pourra s’opérer une convergence entre étudiants plus ou moins avancés dans la précarisation et travailleurs subissant les caprices d’une classe capitaliste insatiable. Alors l’espoir révolutionnaire qui sommeille depuis trop longtemps en France pourra être réveillé.