C’est pour défendre des milliers d’emplois, les leurs et ceux de toutes les chaines économiques associées, que les travailleurs de General Electric, avec ceux d’Alstom, se battent, lançant des actions, des manifestations et des grèves malgré les couvre-feux et autres confinement. Car depuis que la branche énergie d’Alstom a été vendue à la découpe sous l’égide de Macron à la multinationale concurrente américaine General Electric, aux « réorganisations » succèdent désormais les plans de fermeture des usines et des centres de recherche et développement. Une casse sociale qui se double de la casse industrielle d’outils de production industrielle et d’un savoir faire technique et d’ingénierie stratégique pour la Nation, tout particulièrement à l’heure de la transition énergétique. C’est pourquoi alors que la commission lutte du PRCF appelle à soutenir les actions, Initiative Communiste se devait de donner la parole aux syndicalistes CGT de General Electric.
Aujourd’hui, 500 salariés se réunissèrent devant leur entreprise GRID à Villeurbanne, accompagnés de délégation CGT…
Publiée par CGT General Electric sur Mercredi 28 octobre 2020
Initiative Communiste : Bonjour Serge Paolozzi : pouvez-vous, dans un premier temps, vous présenter ?
Serge Paolozzi CGT General Electric : Je m’appelle Serge Paolozzi, j’ai 59 ans, je travaille chez General Electric, anciennement Alstom, depuis 39ans. Je suis technicien en bureau d’études et je suis délégué syndical central CGT, une société qui compte aujourd’hui 2400 salariés sur 5 établissements.
Initiative Communiste : Depuis le démantèlement d’Alstom, les mauvais coups pour l’emploi et la production ne cessent. Depuis quand votre site est-il entré en lutte ?
Serge Paolozzi CGT General Electric : Nous avons subi un premier plan l’année dernière mais nous avons été racheté par General Electric en 2015.
Après un engagement de ne pas supprimer d’emplois, nous avons eu une période relativement calme en termes d’emploi mais compliqué en termes de réorganisation.
Depuis le rachat, on a l’impression que General Motors ne connaît pas l’activité et ne s’y intéresse pas. Dans cette période, la lutte est difficile, la CGT est mobilisée pour sauver les activités sur les sites de Villeurbanne et les autres en France. Les ouvriers des ateliers se sont mobilisés sur Villeurbanne, malgré les difficultés actuelles.
Initiative Communiste : Quelles sont vos revendications?
Serge Paolozzi CGT General Electric : Au niveau politique, on constate aujourd’hui qu’il n’y plus de constructeur français dans le secteur énergétique de la haute tension, il est américain depuis le rachat d’ALSTOM par General Electric. Notre entreprise est la seule dans notre secteur d’activité à faire ce qu’elle fait en France, avec son savoir-faire, et ses compétences françaises. Alors que General Electric, sous couvert de rentabilité, veut délocaliser notre travail dans des pays non qualifiés.
Nous voulons donc préserver notre outil et notre savoir-faire en France. Ensuite notre activité est stratégique, les réseaux électriques sont indispensables pour pouvoir alimenter en électricité le pays ; délocaliser à l’étranger c’est prendre le risque de perdre la souveraineté de notre pays sur ces activités. Il y a aussi la question de la transition énergétique : des projets innovants de transition écologique : Green gaz, et le transport d’électricité en courant continu, des enjeux français et européen qui sont importants, avec des projets de réseaux inter connectés qui permettraient de relier la production électrique des éoliennes en mer ou des panneaux solaires dans les pays du Sud vers les consommateurs d’électricité. C’est l’avenir, et il faudra être présents sur ces projets dans les années à venir !
Dans les plans de restructuration de General Electric, les budgets prévus pour cela vont être redirigés vers des produits conventionnels et le financement écologique est réduit de manière générale. Pour réduire les dépenses, on met en suspens ces activités.
À Villeurbanne, on défend aussi l’industrie dans les grandes villes, pour donner du travail aux gens, au lieu de vouloir délocaliser très loin. Il est prévu de supprimer 285 emplois à Villeurbanne et plus d’un millier d’emplois si on compte les sous-traitants qui travaillent avec nous.
Initiative Communiste : À l’heure à laquelle nous parlons, quelles sont les réponses que vous obtenez des patrons, mais aussi du gouvernement ?
Serge Paolozzi CGT General Electric : Vis-à-vis de l’entreprise, il y a eu une négociation d’un accord de méthode, qui a été signé majoritairement par 2 syndicats (CGC et CFDT) : Ce n’est qu’un accord de calendrier, mais il donne aussi des moyens aux élus de pouvoir travailler sur la restructuration. Ce qui a été obtenu, c’est une phase de discussions sur des solutions alternatives. Les syndicats ont donc travaillé pour présenter à la direction des solutions alternatives, mais ce n’est pas gagné du tout. General Electric transfère le travail à l’étranger et on ne pense pas qu’ils vont revenir sur leur projet facilement.
Au niveau politique, on a pensé que l’on pouvait être soutenu dans notre démarche, surtout en montrant que notre activité est essentielle et indispensable sur le territoire. Nous avons donc écrit à Bruno Lemaire 3 fois en 1 an et nous n’avons jamais eu aucun entretien ou aucune réponse. Malgré ces déclarations d’intentions dans les médias, il ne s’est rien passé avec GE et avec les organisations syndicales.
Par contre, nous avons rencontré le maire de Villeurbanne Cédric Van Styvendeal, des députés (Bruno Sommer Fabien Roussel, Bastien Lachaud, Olivier Marleix, Daniele Cazarian) et le sénateur du Rhône Gilbert Devinaz, des élus de la métropole de Lyon, la Région, et toutes ces personnes nous ont soutenu. On aimerait que l’Etat intervienne sur le dossier, car comme on l’a dit une délocalisation de nos activités de production, d’ingénierie et de R&D en chine et inde seraient une catastrophe pour le bon fonctionnement de nos réseaux électrique en France dans les années à venir: un prestataire étranger serait beaucoup moins efficace pour gérer les problèmes comme on a pu le constater pendant la période du COVID avec les masques ou les respirateurs !
Initiative Communiste : Lorsque « General Electric » a racheté, avec le soutien de Macron, la branche énergie d’Alstom, ce dernier avait promis qu’il n’y aurait pas de suppression d’emplois mais au contraire des embauches et un développement de l’activité : quelle est en réalité la situation ?
Serge Paolozzi CGT General Electric :
Un accord avait été signé entre l’Etat français et General Electric :. Cet accord prévoyait la création de 3 entreprises lors du rachat, pour 3 activités distinctes pour la partie énergie. L’entreprise devait respecter cela et gardant les centres de compétences en France, Villeurbanne en est un. General Electric n’a pas respecté cela en délocalisant progressivement toutes les activités énergie.
L’accord devait créer 1000 emplois sur 3 ans. C’est l’inverse qui s’est produit, on a perdu 1000 emplois. Le gouvernement n’a pas fait respecter l’engagement, baisse la tête face à General Electric. Il n’y a aucune intervention. Le pire c’est que General Electric a bénéficié d’argent public pour la recherche, alors que l’entreprise baisse l’investissement chez nous et licencie.
Initiative Communiste : Depuis des années, le PRCF propose la renationalisation complète du secteur de l’énergie et la création d’un grand pôle public de ce secteur, (lire notre dossier spécial en cliquant ici: ) et un grand pôle public des transports (cliquer ici pour lire).
En effet, les patrons successifs d’Alstom/GE n’ont pas la volonté de conserver et développer les activités industrielles dans l’énergie et les transports en France.
Pour sauver les emplois, la production, la recherche et le développement en France de GE/Alstom, que pensez-vous de cette solution de nationalisation et de pôle public ?
Serge Paolozzi CGT General Electric : Pourquoi pas, on pourrait aussi imaginer qu’un partenaire historique comme EDF rentre au capital avec l’état Français avec un montage financier avec la BPI par exemple. De la a une nationalisation je ne sais pas, mais en tout cas que l’Etat reprenne la main su
De la à une nationalisation je ne sais pas, mais en tout cas que l’État reprenne la main sur les filières importantes : la filière énergétique est essentielle. S’il ne le fait pas maintenant ce sera trop tard, on n’aura plus les compétences et quand tout sera transférer à l’étranger on aura beau faire des constats catastrophiques, il sera trop tard !
À lire, sur la privatisation de l’énergie
- le dossier spécial énergie d’Initiative Communiste
- La Commission Européenne veut exploser EDF : service public de l’Énergie et Frexit progressiste ou UE et privatisation, il faut choisir !
- Quand un patron décrit la destruction du secteur de l’énergie en France par les privatisations imposées par l’Union Européenne.
- Sur ordres de Bruxelles, le PS privatise les barrages hydroélectriques !
Initiative Communiste : À de multiples reprises c’est la Commission européenne qui a imposé le fractionnement des activités d’Alstom, c’est ainsi elle qui a encouragé la spéculation agressive de General Electric, Siemens, Fincantieri et bien d’autres. C’est aussi l’UE qui installe le dumping social et favorise les délocalisations.
Pour empêcher la fermeture de nos usines, réindustrialiser le pays et donc, pour produire en France – ne faut il pas oser briser les chaines de l’Union européenne ?
Serge Paolozzi CGT General Electric : Pour moi il faut maitriser la production de l’électricité, la transmission de l’électricité, sa distribution : toute la filière énergétique. C’est ce que faisait Alstom dans le passé.
Aujourd’hui, General Electric ne cherche que la rentabilité avec la délocalisation de ses activités. Ce ne sont pas les élus Européen qui décident, mais les patrons des grandes entreprises : ils font la pluie et le beau temps avec l’aval des gouvernements.
Initiative Communiste : Que peut-on faire pour aider à la lutte ?
Serge Paolozzi CGT General Electric : En la relayant, en la popularisant. IIl faut gagner l’opinion publique, c’est le rôle des médias, en donnant les informations aux citoyens. C’est l’opinion publique et les citoyens qui feront bouger les choses, notre bataille est donc aussi citoyenne et d’intérêt public pour les usagers !
- la pétition lancée par la CGT General Electric : General Electric : la situation est grave! Elle nécessite l’intervention de l’État !
Propos recueilli et retranscrit par Dark Vlador le 3 novembre 2020.