Enfin, le gouvernement a pris la mesure de la catastrophe sanitaire qui s’annonce si rien n’est fait. Car le virus n’a que faire des grandes déclarations de la macronie sur le fait que la « vie économique » ne doit pas s’arrêter ou de ses réflexions racistes contre les Chinois et les Italiens.
Ordre a été clairement donné par le chef du gouvernement qu’un maximum de travailleurs restent chez eux, en télétravail lorsque c’est possible. Pourtant la consigne a l’air d’avoir du mal à se diffuser auprès des employeurs, privés comme publics. À l’image des ordres aberrants diffusés par le ministre Blanquer dont chaque sortie médiatique s’accompagne d’un correctif dans les heures qui suivent.
Pourtant, la limitation des contacts interpersonnels est essentiel pour stopper l’épidémie et permettre aux hôpitaux de soigner et sauver les malades graves. C’est pourquoi IC se mobilise et fait le point sur le droit d’alerte et le droit de retrait.
Modèle de courrier aux directeurs d’administrations
Le texte suivant est un modèle de courrier largement inspiré de courriers syndicaux que nous avons pu récupérer sur la toile et auprès des militants syndicaux qui nous les ont communiqués. Il peut aussi bien être utilisé, en étant adapté, dans l’Éducation nationale, dans les administrations que dans des grandes entreprises, par des représentants du personnel afin de faire jouer le droit d’alerte et inviter les directions à prendre sérieusement leur responsabilité pour ne pas mettre en danger la santé des salariés et des agents publics.
Les termes entre crochets sont à adapter, ce texte pouvant également servir de modèle dans les entreprises privées:
Monsieur le [DIRECTEUR]
Les annonces du Président de la République le 12 mars 2020 et celles du Premier Ministre le 14 mars 2020 invitent l’ensemble de la population à prendre des mesures drastiques d’évitement social destinées à freiner la propagation de l’épidémie de Covid-19 qui frappe actuellement plus d’une centaine de pays.
Samedi soir, contredisant les [déclarations du ministre Blanquer] / [instructions préfectorales contradictoires au demeurant de celles édictées par certains ministères] / [vos instructions] assurant que la majorité des [personnels]/[salariés] devrait être dans les [établissements] / [physiquement présents dans les services] / [physiquement présents à leur poste] lundi, le premier ministre déclarait ainsi : « Nous devons impérativement limiter les déplacements, les réunions, les contacts », appelant les entreprises et les administrations à développer le télétravail pour permettre à un maximum de gens de rester à leur domicile.
De leur côté, les personnels médicaux demandent l’aide de chacun en lançant une campagne : « restez chez vous ».
Dans ce contexte de crise sanitaire générale qui impose des dispositions inédites, le [SYNDICAT] alerte [l’administration / le(s) directeur(s)] sur la nécessité d’assurer la consigne simple rappelée par les plus hautes autorités :
– annulation de toutes les réunions
– présence minimale dans les services
[Dans le même temps, nous avons bien conscience qu’il est impensable de laisser [des millions d’élèves / de concitoyens] sans accès à [l’éducation / aux fonctions essentielles et d’urgence du service public strictement nécessaire à la continuité de l’État] pendant une durée que nous ne connaissons pas. ]
[Il est bien sûr indispensable de maintenir un lien pédagogique entre l’Éducation nationale et les élèves.]. [Il est bien sûr indispensable d’assurer les missions essentielles telles que vous avez dû normalement les définir dans le plan de continuité d’activité, dont les dernières semaines de préparation de la crise sanitaire ont dû vous conduire à une mise à jour]
Toutefois, cette contribution nécessaire ne saurait se faire au détriment de notre santé et se fera dans la limite des moyens matériels et techniques mis à notre disposition, en sachant que nous ne pourrons que « limiter les dégâts » car rien ne remplace [le travail en classe / le fonctionnement normal des services], [en particulier pour les élèves en difficulté].
En espérant que le bon sens et la raison l’emporteront sur les discours contradictoires de [notre ministre / nos autorités préfectorales ou ministérielles], démentis [par deux fois] ces derniers jours par le président de la République puis le Premier ministre, nous vous assurons de notre attachement au service public [d’Éducation] et aux valeurs de solidarité et de fraternité que porte notre modèle social issu du Conseil National de la Résistance et des luttes sociales.
[Syndicat]
Droit d’alerte, droit de retrait : que dit la loi.
Droit d’alerte et droit de retrait selon le code du travail – salariés du privé
Le code du travail fait droit de façon individuelle à chaque salarié de se retirer d’une situation présentant un danger grave et imminent pour sa santé. C’est le droit de retrait.
Il fait également droit au preprésentant du personnel en CSE d’alerter l’employeur : c’est le droit d’alerte.
Ces dispositions engagent la responsabilité de l’employeur.
Code du travail, 4e partie – livre III
Article L4131-1
Le travailleur alerte immédiatement l’employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection.
Il peut se retirer d’une telle situation.
L’employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection.
Article L4131-2
Le représentant du personnel au comité social et économique, qui constate qu’il existe une cause de danger grave et imminent, notamment par l’intermédiaire d’un travailleur, en alerte immédiatement l’employeur selon la procédure prévue au premier alinéa de l’article L. 4132-2.
Article L4131-3
Aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un travailleur ou d’un groupe de travailleurs qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d’eux.
Article L4131-4
Le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur prévue à l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale est de droit pour le ou les travailleurs qui seraient victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un représentant du personnel au Comité Social et Économique avaient signalé à l’employeur le risque qui s’est matérialisé.
Droit d’alerte et de retrait dans l’administration :
Des dispositions similaires sont prévues par décret pour les fonctionnaires, encadrées par le Décret n°82-453 du 28 mai 1982 relatif à l’hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu’à la prévention médicale dans la fonction publique
Article 5-6 – droit de retrait
I. – L’agent alerte immédiatement l’autorité administrative compétente de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu’elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu’il constate dans les systèmes de protection.
Il peut se retirer d’une telle situation.
L’autorité administrative ne peut demander à l’agent qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d’une défectuosité du système de protection.
II. – Aucune sanction, aucune retenue de salaire ne peut être prise à l’encontre d’un agent ou d’un groupe d’agents qui se sont retirés d’une situation de travail dont ils avaient un motif raisonnable de penser qu’elle présentait un danger grave et imminent pour la vie ou la santé de chacun d’eux.
III. – La faculté ouverte au présent article doit s’exercer de telle manière qu’elle ne puisse créer pour autrui une nouvelle situation de danger grave et imminent.
IV. – La détermination des missions de sécurité des biens et des personnes qui sont incompatibles avec l’exercice du droit de retrait individuel défini ci-dessus en tant que celui-ci compromettrait l’exécution même des missions propres de ce service, notamment dans les domaines de la douane, de la police, de l’administration pénitentiaire et de la sécurité civile, est effectuée par voie d’arrêté interministériel du ministre chargé de la fonction publique, du ministre chargé du travail et du ministre dont relève le domaine, pris après avis du Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ministériel compétent et de la commission centrale d’hygiène et de sécurité du Conseil supérieur de la fonction publique de l’État.
Article 5-7 – droit d’alerte
Le représentant du personnel au Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail qui constate qu’il existe une cause de danger grave et imminent, notamment par l’intermédiaire d’un agent, en alerte immédiatement le chef de service ou son représentant selon la procédure prévue au premier alinéa de l’article 5-5 et consigne cet avis dans le registre établi dans les conditions fixées à l’article 5-8.
Le chef de service procède immédiatement à une enquête avec le représentant du Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail qui lui a signalé le danger et prend les dispositions nécessaires pour y remédier. Il informe le Comité des décisions prises.
En cas de divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, notamment par arrêt du travail, de la machine ou de l’installation, le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail compétent est réuni d’urgence, dans un délai n’excédant pas vingt-quatre heures. L’inspecteur du travail est informé de cette réunion et peut y assister.
Après avoir pris connaissance de l’avis émis par le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail compétent, l’autorité administrative arrête les mesures à prendre.
À défaut d’accord entre l’autorité administrative et le Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail sur les mesures à prendre et leurs conditions d’exécution, l’inspecteur du travail est obligatoirement saisi.
Article 5-8
Les avis mentionnés au premier alinéa de l’article 5-7 sont consignés dans un registre spécial côté et ouvert au timbre du Comité. Il est tenu, sous la responsabilité du chef de service, à la disposition :
-des membres du Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail ;
-de l’inspection du travail ;
-des inspecteurs santé et sécurité au travail du présent décret.
Tout avis figurant sur le registre doit être daté et signé et comporter l’indication des postes de travail concernés, de la nature du danger et de sa cause, du nom de la ou des personnes exposées, les mesures prises par le chef de service y sont également consignées.
Article 5-9
Le bénéfice de la faute inexcusable de l’employeur définie à l’article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale est de droit pour les agents non fonctionnaires qui seraient victimes d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle alors qu’eux-mêmes ou un membre du Comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail avaient signalé au chef du service ou à son représentant le risque qui s’est matérialisé.
Article 5-10
L’autorité administrative prend les mesures et donne les instructions nécessaires pour permettre aux agents, en cas de danger grave et imminent, d’arrêter leur activité et de se mettre en sécurité en quittant immédiatement le lieu de travail.