15 mars 2020- Paris – Déclaration du Secrétaire National, de la commission Luttes et de la sous-commission Education Nationale du PRCF
Jeudi 12 mars 2020, contredisant de manière cinglante le pathétique ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer (qui assurait encore l’après-midi même qu’il n’y aurait pas de fermeture générale des écoles…), Emmanuel Macron a annoncé la fermeture des crèches et de tous les établissements scolaires de la maternelle à l’université, affirmant que « la priorité absolue de notre nation sera notre santé » et que « la santé n’a pas de prix », appelant ainsi à privilégier le télétravail dès que c’est possible
Visiblement, cette demande n’a pas été entendue par un certain nombre de chefs d’établissements et de recteurs d’académie, ce dont témoigne ce courriel envoyé par la rectrice de l’académie de Versailles, Charline Avenel – qui doit sa nomination à son ami Macron et à la modification de la loi de nomination des recteurs d’académie en octobre 2018… –, à l’ensemble des personnels de l’Académie le 13 mars 2020 au soir :
« Madame, monsieur,
Je tiens tout particulièrement, ce soir, à vous remercier pour votre action dans les écoles et établissements scolaires. Je sais le rôle essentiel que vous avez auprès des élèves et leurs familles.
Comme vous le savez, afin de protéger au mieux l’ensemble de la population et de tenir compte de l’évolution de l’épidémie de COVID-19, les élèves ne seront plus accueillis dans les écoles et établissements scolaires à compter du lundi 16 mars jusqu’à nouvel ordre à l’exception dans les écoles et collèges des enfants des personnels indispensables à la gestion de la crise sanitaire
Nous nous sommes préparés, avec vous, à cette situation inédite et je sais que dans chaque école et chaque établissement, le travail des équipes est en cours pour répondre à l’objectif de continuité pédagogique et administrative afin d’accompagner chaque élève.
Les établissements et écoles restent ouverts. Les personnels rejoignent leur lieu de travail autant que possible. Les personnels qui ne pourront se déplacer (personnels fragiles, parents devant garder leur enfant à domicile, situations particulières) seront recensés par les responsables.
Un plan de continuité pédagogique est mis en œuvre pour lequel des instructions ont été transmises aux établissements. Un plan de continuité d’activité identifie les fonctions les plus critiques pour lesquelles des solutions d’organisation doivent être trouvées. Le dispositif sera ajusté au fur et à mesure de l’évolution de la situation et des besoins.
Votre engagement au quotidien permet de mettre en œuvre la continuité pédagogique et administrative dans la crise que nous connaissons, dans un climat de sérénité.
Je sais pouvoir compter sur l’engagement de chacun. Je vous assure de tout mon soutien dans cette période où vous êtes particulièrement sollicités.
Charline Avenel
Rectrice de l’académie de Versailles »
N’ayant visiblement pas digéré la ridiculisation dont il a été la victime collatérale, Jean-Michel Blanquer a annoncé ce samedi 14 mars que les établissements scolaires restaient ouverts pour les « équipes éducatives » chargées d’assurer une « permanence pédagogique » dans les établissements dès lundi … contredisant ainsi la priorité accordée au télétravail et aux « cours en ligne » pouvant être assurés depuis les domiciles. Le soir même, sautant sur l’occasion, la rectrice, copine de Macron, écrit de nouveau à l’ensemble des personnels de l’académie de Versailles, sommant les personnels de rejoindre « les écoles et les établissements scolaires autant que possible en fonction de la modalité fixée » par « les chefs d’établissement, les inspecteurs du premier degré et les directeurs d’école » : autrement dit, en conférant les pleins pouvoir à des logiques locales déjà à l’œuvre dans la politique de mise à mort de l’Éducation nationale.
Pourtant, samedi soir, le Premier ministre a encore contredit Jean-Michel Blanquer, réaffirmant que la « meilleure façon de freiner la progression de l’épidémie est la distanciation sociale » et annonçant la fermeture de « tous les lieux recevant du public non indispensables à la vie du pays » : les établissements scolaires au sein desquels ne doivent pas se rendre les élèves constituent-ils des lieux si indispensables au point que Blanquer et ses laquais de recteurs – celle de Reims ayant adopté des positions similaires à celle de Versailles – pour obliger les enseignants à être le plus présents possible dans des lieux vides et, de surcroît, rarement bien équipés pour assurer le travail à distance ?!
Les déclarations de Blanquer – acculé et qui se contredit à longueur de temps, comme ce dimanche matin – et les injonctions de ses valets de recteurs et autres chefs d’établissement zélés sont proprement inacceptables et irresponsables. Elles témoignent du mépris constant et croissant de la part de recteurs souvent plus attachés au montant de leur prime d’activité de fin d’année qu’à assurer la protection d’un personnel enseignant dévoué, réussissant des prouesses au quotidien et dans le cadre de cette crise sanitaire pour s’adapter et planifier un travail sans contact avec les enfants.
Elles témoignent également du manque de considération flagrant de technocrates démagogues – Blanquer en tête –, dont de telles injonctions reviennent à laisser entendre que les professeurs ne travailleraient pas à leur domicile : comme si les préparations de cours, les corrections de copie, le travail à distance (correspondance avec les parents d’élèves, remplissage du cahier de texte électronique, des notes et des bulletins…), etc., ne constituaient pas déjà du travail (au demeurant, fort mal rémunéré) !
Elles témoignent enfin du zèle fanatique d’une partie croissante de la hiérarchie administrative qui, telle Charline Avenel, multiplie les injonctions et intimidations envers les enseignants au quotidien, menace les syndicalistes et les personnels en lutte contre la destruction du lycée et du baccalauréat, l’arasement des retraites par répartition, le recrutement contractuel croissant, la mise au pas des contenus disciplinaires, etc.
Les enseignants de tous les degrés scolaires méritent autant le respect et l’attention sanitaire adéquats dans le cadre de cette pandémie qui menace également leur vie et qui, pour nombre d’entre eux, sont également parents ! Il est inacceptable que Blanquer, dont les propos sont en contradiction flagrante avec ceux de Macron et Philippe, et que des chefaillons locaux ou académiques voulant satisfaire les desiderata de leurs maîtres, obligent les personnels à travailler dans les établissements scolaires, alors même que l’OMS prône la « distanciation sociale » et que le président de la République lui-même, dans un très rare élan de lucidité, affirme accorder la priorité au télétravail et à la santé de l’ensemble des populations.
Le PRCF condamne ces intimidations, injonctions et pressions relevant de la démagogie néolibérale et de l’autoritarisme local, témoignant du degré d’irresponsabilité et de nuisance extrême d’une partie (de plus en plus importante) de la hiérarchie administrative de l’Éducation nationale, qui passe pourtant son temps à prôner hypocritement la bienveillance envers les élèves (mais certainement pas envers les enseignants !), mais aussi de l’impréparation de nombre d’établissements pour faire face à une telle crise – et ce malgré les propos mensongers, une nouvelle fois, d’un ministre aux abois et totalement dépassé par les événements.
Le PRCF exige une uniformité des règles à l’échelle nationale pour l’ensemble des professeurs de la maternelle à l’université, en privilégiant au maximum, et à titre provisoire, le travail à distance au nom du principe de protection sanitaire, et apporte son soutien à tous les personnels enseignants, mais aussi aux personnels administratifs, techniques et médicaux responsables qui font preuve de discernement face à cette pandémie mondiale. Il appelle l’ensemble des personnels à faire usage de leur droit de retrait sans hésitation en cas de pressions et d’intimidations.
Le PRCF met également en garde contre la tentation d’instrumentalisation de cette crise sanitaire sans précédent pour promouvoir de manière structurelle une « école en ligne » qui viserait, à terme, à détruire le statut de la fonction publique enseignante, à privilégier le recrutement de personnels contractuels, à renforcer l’autonomie des établissements (en réalité, des chefs d’établissement), à assouvir la pression des groupes privés vendeurs de services marchands pour l’éducation. En somme, à accélérer l’ensemble des contre-réformes réclamées par le MEDEF et l’UE, et appliquées avec zèle par les Chirac-Raffarin-Ferry, Sarkozy-Fillon-Chatel, Hollande-Valls et autres Macron-Philippe-Blanquer, ayant déjà fortement déstructuré l’Éducation de moins en moins « nationale » et de plus en plus européiste, socialement ségrégative et « territorialisée ».