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www.initiative-communiste.fr vous propose de retrouver gratuitement une des articles des pages luttes du numéro 160 d’Initiative Communiste de juillet aout 2015 !
Crise agricole, cas d’école…
Beaucoup de jeunes agriculteurs se voient patrons. Ils investissent et s’endettent dans l’espoir de faire la culbute. Mais le système capitaliste moderne a tout organisé pour qu’ils n’y arrivent jamais…
Le rêve chinois
Dans cette profession syndicalement dominée par la FNSEA (Fédération Nationale des Syndicats d’Exploitants Agricole) – une étrange machine qui prétend défendre à la fois les intérêts de l’éleveur de chèvres de Lozère et ceux du céréalier beauceron, alors qu’un monde les sépare – la mondialisation capitaliste n’est pas perçue a priori comme une menace. La plupart des jeunes croient au discours libéral – ceux qui travaillent dur gagnent. Leur miroir aux alouettes, ce sont les grands pays à fort taux de croissance comme la Chine : la demande de produits agricole y progresse rapidement…
L’agriculteur qui débute est donc tenté de voir grand, d’autant que le système des aides fixées par les commissions départementales d’orientation de l’agriculture (où siègent des représentants des banques, des assurances, et des syndicats – donc surtout de la FNSEA) pousse au rendement. Il va donc s’endetter pour acheter des terres et des équipements dernier cri. Mais comme la course à la productivité est générale, la production globale croît plus vite que les besoins, même compte tenu des marchés émergents, et les cours chutent.
Salariés déguisés
Au bout de quelques années, le paysan se rend compte – trop tard – qu’il travaille à perte, pour rembourser ses prêts – d’autant que l’agro-industrie et la grande distribution se sucrent au passage. « Les éleveurs sont les victimes de l’absence de régulation des marchés et des prix, ils sont devenus les esclaves de leurs clients abatteurs, transformateurs, distributeurs, » dénonce Jean Mouzat, président du syndicat paysan MOuvement de Défense des Exploitants Familiaux, dans un communiqué cet été.
L’agriculteur se rêvait patron, le voilà en réalité salarié d’une banque. L’une des mesures du « plan d’urgence » de Stéphane le Foll cet été a d’ailleurs été le report du remboursement de la dette des jeunes agriculteurs – mesure qui ne règle rien sur le long terme. « Sur les 600 millions d’euros de mesures d’allègement de trésorerie, seuls 100 millions constituent une aide réelle, le reste n’est que report d’échéances », proteste le MODEF.
« Cela fait des années que le MODEF réclame un encadrement des marges de la grande distribution (coefficient multiplicateur) et la fixation de prix minimum garanti qui couvrent les coûts de production et la rémunération du travail paysan, tempête Jean Mouzat. Qu’on ne vienne pas nous dire que ce n’est pas le rôle d’un gouvernement de fixer des prix quand celui-ci administre les prix du biogaz, de l’énergie solaire et éolienne. »
Ce qui permet au système de durer, ce sont les subventions, sans lesquelles le nombre de fermetures d’exploitations agricoles, déjà impressionnant (26 % selon le recensement décennal de 2010), serait vertigineux. Ce qui revient à dire que les aides (payées par le contribuable) sont d’abord là pour aider les banques, l’agro-industrie et la grande distribution à continuer de rançonner les paysans…
La dimension européenne
Comme de juste, l’U.E. aggrave le problème. Ses aides sont proportionnelles à la taille des exploitations, et elles vont aux propriétaires des terres, ce qui permet à la Reine d’Angleterre d’empocher 500 000 euros de subventions par an… Si elles sauvent des petits exploitants (pas tous), elles renforcent la domination des gros.
Par ailleurs, la libre-circulation imposée par les traités européens permet la concurrence déloyale. Voilà longtemps que l’Espagne inonde la France de fruits produits sous serres par des Polonais sous-payés, ce sont à présent ses cochons qui sont pointés du doigt par les éleveurs bretons– sans parler des industriels de la filière porcine allemande, qui ont laminé les salaires grâce à une importation massive de main-d’oeuvre roumaine…
« Il est possible au nom de la souveraineté alimentaire de limiter les importations à bas prix de viande bovine et d’imposer aux produits importés les mêmes règles de production que celles qui sont imposées aux éleveurs français, » affirme Jean Mouzat. Certes, mais dans quel cadre ? Le 22 juillet, le MODEF, dont il est président, notait : « Le gouvernement prône l’exportation pour régler la crise, mais il participe via la création de zones de libre-échange européennes à ouvrir les frontières à l’importation de viande bovine, porcine, ovine et lait à prix cassés. Est-ce la nouvelle définition du développement durable et du bon sens paysan ? » Bien sûr que non : c’est la logique européenne du grand marché unique. Et si la sortie de l’UE ne suffira pas pour faire rendre gorge aux pillards nationaux, elle sera nécessaire pour restaurer la « souveraineté alimentaire »…
Vincent Flament pour Initiative Communiste n°160 septembre 2015