Rappelons qu’il y a quelques années, la CGT avait fait le choix de se désaffilier de la FSM dont elle était un membre historique pour rejoindre la CES, une organisation largement financée par l’Union Européenne et ayant obligation de défendre la construction de l’Europe du Capital, pour y rejoindre notamment les organisations syndicales affidés au patronat, tel que la CFDT. Cependant ces dernières années, d’importantes fédérations syndicales de même que des unions départementales ont décidé de se réaffilier à la FSM.
Au-delà des personnalités de la FSM, et nombre de militants de la CGT, étaient notamment présents des camarades du Front Syndical de Classe, qui milite en France pour la reconstruction d’un mouvement syndical de classe et de masse, soutenant la FSM, dont notre camarade Roger Sylvain, interviewé par une représentant de la FSM et qui s’est entretenu avec Georges Mavrikos.
JBC pour www.initiative-communiste.fr l’information par et pour les communistes.
Discours du secrétaire général de la FSM, George Mavrikos : « Nous honorons le passé, nous construisons l’avenir »
Chers collègues, frères et sœurs,
Nous vous remercions tous et toutes pour votre présence à cet événement commémoratif des deux premiers secrétaires généraux de la FSM, qui ont été tous les deux français : Louis Saillant et Pierre Gensous. En outre, nous remercions tout particulièrement l’épouse de Pierre Gensous, camarade Alena, ainsi que la fille d’Ibrahim Zakaria qui est venue de Prague pour être avec nous aujourd’hui et nous l’informons que nous allons préparer également un événement respectif en commémoration et reconnaissance à son père qui a été secrétaire général élu de la FSM.
Chers amis,
Nous avons commencé cette série d’événements commémoratifs l’année dernière, en 2017, à Foggia, en Italie, en rendant hommage à une figure combative du mouvement syndical de classe internationale, à l’Italien Giuseppe di Vittorio, président de la FSM. Nous allons continuer ce type d’initiatives.
Pourquoi organisons-nous et pourquoi allons-nous continuer ces événements ?
- Parce que nous voulons honorer les héros de la classe ouvrière, les militants d’avant-garde qui ont ouvert de nouvelles voies avec leurs idées et surtout avec leurs actions.
- Parce que nous voulons, en tirant parti des traits positifs et négatifs de chaque époque, apprendre, tirer des conclusions et construire le présent et l’avenir du mouvement syndical avec des matériaux contemporains.
- Parce que nous voulons que la nouvelle génération connaisse la véritable histoire de la FSM, l’histoire syndicale mondiale, pour pouvoir, à travers cette connaissance, juger et décider par elle-même, sans les mensonges de la bourgeoisie et des gouvernements qui veulent réécrire l’histoire selon leurs propres intérêts.
- Parce que nous, la FSM, nous sommes fiers de notre histoire, car toujours et partout la FSM a été du côté du peuple, du côté des travailleurs, contre l’impérialisme et la barbarie capitaliste, contre la fondation de l’OTAN, contre le plan Marshall, du côté du Vietnam, de la révolution cubaine, du Chili d’Allende, de l’Espagne, du Portugal et de la Grèce ; La FSM a toujours été du côté des peuple, contre les dictatures, contre le colonialisme. En Irak, en Libye, en Yougoslavie, en Syrie, en Palestine, la FSM a toujours été du côté du peuple.
Les syndicats jaunes cachent leur histoire car jusqu’à présent, leur histoire est une histoire de honte. Ils ont toujours été du côté des impérialistes et des mécanismes du capital.
L’histoire est une fenêtre sur l’avenir
Chers collègues,
En lisant et en étudiant la vie et les actions de Louis Saillant et de Pierre Gensous, je crois qu’on peut tirer des conclusions utiles et opportunes pour le présent. Permettez-moi de souligner certaines d’entre elles.
- Ils ont été des leaders nés dans la classe ouvrière, eux-mêmes ouvriers, ils ont ressenti l’exploitation capitaliste, ils aimaient leur branche et ils respectaient les ouvriers. Ils n’étaient pas des bureaucrates de la direction.
- Ils croyaient aux principes de la lutte de classe, ils ont milité pour le renversement du capitalisme, ils ont entré en conflit contre les opportunistes qui tentaient d’embellir le système capitaliste. Ils ont lutté contre les réformistes.
- Ils ont également été des protagonistes des évolutions politiques généraux de leur époque, étant présents dans la guerre contre les nazis. Ils étaient internationalistes et anti-impérialistes. Ils se sont battus contre le plan Marshall, la fondation de l’OTAN, l’hystérie anti-socialiste. Ils n’ont pas prétendu être neutres.
- Ils ont tracé de nouvelles voies à leur époque, fondant de nouveaux syndicats, coordonnant les luttes de chaque continent, analysant les évolutions de leur époque.
- Ils ont été altruistes, honnêtes, sincères, ils ont mis le « nous » au-dessus du « moi ». Ils avaient de l’éthique et de la dignité. Ils se sont caractérisés par leur courage et leur patience. Ils avaient des principes et des sensibilités envers les gens simples.
Avec ces caractéristiques principales, depuis cette première période de la FSM, ils ont commencé à construire et à consolider la supériorité éthique, morale, politique et idéologique de la FSM et du mouvement syndical de classe contre les directions syndicales jaunes et les instruments du capital.
Chers frères et sœurs,
Eux, ils ont accompli leur tâche. Louis Saillant, Pierre Gensous, Henri Krasucki, vice-président de la CGT qui souhaitait que la CGT soit active et joue un rôle de premier plan dans la FSM, et Ibrahim Zakaría, secrétaire général de la FSM, ils ont accompli leur tâche et ils ont ouvert de nouveaux horizons au mouvement syndical de leur temps. Ils ont défendu et obtenu des droits pour les travailleurs, amélioré la vie des gens simples, conquis des libertés syndicales et démocratiques. Nous allons les honorer pour toujours.
Notre tâche consiste maintenant à répondre aux besoins contemporains en tant que syndicalistes.
Nous vivons dans un monde dont les deux caractéristiques principales sont la barbarie du système capitaliste qui génère la pauvreté et le chômage. Dans un monde où, dans le contexte de crise économique profonde du système, ils attaquent avec brutalité contre les acquis des travailleurs. La deuxième caractéristique principale est l’agressivité des impérialistes, les contradictions infra-impérialistes et leurs conséquences cruelles pour les peuples.
En Europe, où nous vivons, la situation devient encore plus complexe :
- Des mécanismes internationaux tels que l’Union européenne, le FMI, la Banque mondiale et l’OTAN développent les politiques anti-travailleurs les plus extrêmes dans tous les pays européens.
- Les gouvernements appliquent des politiques anti-travailleurs et démantèlent les relations de travail, la sécurité sociale et les droits salariaux. Ils privatisent tout en utilisant les “dialogues sociaux” comme leur instrument essentiel.
- Augmentation dangereuse du racisme, de la xénophobie, du populisme et des partis politiques néo-fascistes.
- Dans le même temps, une puissante bureaucratie syndicale a été formée en Europe, isolée de la base, avec une ligne réformiste contrôlant les grandes organisations syndicales. Cependant, cette bureaucratie syndicale réformiste est coresponsable des maux subis par les travailleurs européens, car, par leur position, ils minent les luttes des travailleurs. Par exemple, les positions et le rôle de la CFDT en France, de la CGIL en Italie, de la DGB en Allemagne, de la LO en Norvège, des syndicats au Danemark, en Turquie, en Belgique, en Grèce, aux Pays-Bas, de la TUC en Bretagne, sont les exemples les plus caractéristiques de ces dirigeants réformistes conformistes qui agissent en tant que soldats de la collaboration des classes et en tant que « figures grotesques » des dialogues sociaux. Par ailleurs, Ils sont devenus de puissants mécanismes qui « exportent » leurs théories réformistes aussi vers d’autres continents.
D’autre part, il y a une vision optimiste. Contrairement aux difficultés mentionnées ci-dessus, on voit une partie considérable des travailleurs européens qui descendent dans la rue, résistent, désobéissent, avec un esprit de classe et combatif, contre les décisions des gouvernements et des organisations supranationales.
De grandes grèves, des marches et des activités militantes ont été organisées et continuent d’être organisées en France, en Grèce, au Portugal, en Italie, en Belgique, en Turquie, en Espagne et dans d’autres pays européens. Ces parties des travailleurs et des organisations syndicales qui dirigent ces mobilisations sont les éléments les plus vivants et les plus prometteurs de la classe ouvrière de toute l’Europe. Ces activités militantes comportent des éléments positifs, à la fois quantitatifs et qualitatifs, et constituent l’espoir d’un regroupement du pôle de classe dans le cadre du mouvement syndical européen.
Que faisons-nous ? Quelle est l’alternative ?
Les directions de la CSI et de la CES affirment que le problème est « le management » dans les syndicats … et un peu la corruption syndicale. Mais, alors même que ces organisations continuent de changer les « managers », leur ligne devient encore plus réformiste.
Les « managers » changent, mais leur soutien aux guerres impérialistes, leur soumission à la stratégie de l’Union européenne, leur trajectoire commune avec le FMI et l’OTAN restent invariables.
Il est clair que le grand problème du réformisme est sa stratégie. Le capitalisme ne peut pas être embelli, l’impérialisme ne peut pas devenir humain. Par conséquent, qu’il s’agisse d’un gestionnaire australien ou italien, le train suivra le même itinéraire et ira plus loin à droite.
“De l’autre côté du fleuve’’, c’est nous ; nous qui nous acceptons et croyons en la théorie immortelle marxiste des classes sociales ; dans les principes de la lutte de classe. Nous, qui nous savons que les sociétés n’avancent pas avec des prières mais avec des luttes sociales de classe, comme l’a montré l’histoire de l’humanité.
Cependant, pourquoi, en même temps que nous avons une théorie correcte, que nous avons essentiellement une stratégie correcte et des forces existantes et combatives presque partout, que nous organisons des luttes importantes, malgré tout, se poursuivent les politiques anti-libérales des gouvernements et de l’Union Européenne ?
À la FSM, nous sommes très préoccupés par ces questions. Nous avons débattu à la fois au sein de notre bureau régional européen et au niveau central. Ce débat reste ouvert, permanent et nous prendrons des initiatives concrètes pour un échange d’idées plus essentiel.
Nous ne prétendons pas que les luttes ne fonctionnent pas. Toutes les luttes portent leurs fruits, même lorsqu’il y a une grande distance entre la plantation et la récolte. Sans les luttes, les pertes pour les travailleurs seraient encore plus grandes. En Grèce, on dit que « les luttes perdues sont celles qui n’ont pas été menées ».
Maintenant, permettez-moi de souligner seulement 3 points, qui ne sont pas de simples problèmes de stratégie :
- Coordination : aux niveaux national et européen, des grèves sont organisées, même sporadiques, une fois par mois, une fois par an, aujourd’hui dans un certain secteur et dans cinq mois dans un autre. Ils sont donc utiles, mais ils ne gênent pas la bourgeoisie, ils n’arrêtent pas la production, ils donnent aux gouvernements et aux patrons le temps de trouver des solutions. Elles n’unissent pas la classe ouvrière contre l’autre classe sociale. Ils ne renforcent pas le contenu politique de la lutte.
- Concentration des forces : parmi les syndicats qui acceptent la théorie marxiste de la lutte de classe, certains appartiennent à la FSM, d’autres bougent individuellement, d’autres sont des « hôtes » de la CES ou de la CSI. Par conséquent, il y a une division des forces militantes. Alors que nous avons besoin de l’unité de classe de la classe ouvrière et de l’unité au sein des syndicats militants, pour qu’on puisse tous ensemble construire le mouvement syndical européen ; un véritable torrent européen INTERNATIONALISTE -UNITAIRE – DE CLASSE – MASSIF – ANTIIMPÉRIALISTE – CONTRE LES MONOPOLES.
- L écart entre la base et la direction : il existe un écart entre la combativité des bases et la tactique des directions. Cet écart continue à augmenter et à générer une déception parmi les bases, tout en renforçant les pratiques antidémocratiques parmi les directions. La solution consiste pour les directions à faire attention aux bases. C’est la base qui a le premier mot. Des syndicats de classe signifient nécessairement deux oreilles et deux yeux toujours ouverts vers les bases. On doit voir et entendre les messages des bases.
Chers collègues,
notre vision pour l’Europe et le mouvement syndical en Europe nous impose de nous asseoir tous ensemble, d’analyser la situation en profondeur, de rechercher les causes des problèmes des syndicats, de tracer conjointement notre stratégie et tactique envers un mouvement syndical européen contemporain, de classe, internationaliste, anti-monopole et anti-impérialiste. Un tel mouvement, vibrant et actif, avec du respect à la base et doté de solides fonctions démocratiques, peut donner d’espoir et perspective optimiste.
Depuis mai, nous avons envoyé à la direction de la CGT France certaines de nos réflexions et propositions de débat sur ces questions importantes. Nous les avions également invités par écrit à notre événement commémoratif d’aujourd’hui. À ce jour, nous n’avons reçu aucune réponse.
Nous, dans notre effort, nous avons besoin de la CGT France qui, avec son histoire militante, ses luttes et son prestige peuvent et doivent jouer un rôle moteur dans les efforts nécessaires pour le regroupement de classe du mouvement syndical européen.
En 2019, nous prendrons des initiatives et nous essaierons d’ouvrir un débat franc et fraternel sur les priorités des syndicats en Europe dans la conjoncture actuelle. Nous sommes ouverts à un dialogue sincère, sur un pied d’égalité, avec respect mutuel et esprit fraternel.
Nous espérons que tous et toutes les militants, nous marcherons ensemble, unis par l’intérêt des travailleurs et des peuples d’Europe.
Avec de telles initiatives, nous honorerons dans la pratique, avec nos actions et pas avec des mots, la mémoire des militants avant-gardistes de la FSM, comme ils l’étaient Louis Saillant et Pierre Gensous.
Nous remercions tous les membres et amis de la FSM en France qui, malgré les difficultés et les obstacles, ont réussi à organiser ce bel événement.
Nous demandons à tous et toutes de diffuser les principes, positions et actions de la FSM dans votre pays. Surtout en France. C’est la tâche principale de tous les membres et amis de la FSM.
Merci pour votre attention.