C’est une région censée être « à gauche », avec un exécutif conduit par le PS Alain Rousset issue d’une liste d’union avec le Parti Communiste Français. Et elle a voté le 12 juin dernier une délibération d’une nouvelle convention d’exploitation des trains régionaux TER pour 2024-2030 avec SNCF voyageurs.
Une convention qui précise dès son premier vu : « Vu le Règlement CE n° 1370/2007 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer tel que modifié par le Règlement UE n° 2016/2338 du 14 décembre 2016 en ce qui concerne l’ouvert ure du marché des services nationaux de transport de voyageurs par chemin de fer, et particulièrement ses articles 7§2 et 5 bis ». On ne saurait faire plus clair et ceux qui refusent ici de dénoncer simplement et clairement la responsabilité totale et le rôle moteur de l’Union Européenne dans la privatisation de la SNCF et la mise en concurrence et libéralisation au profit du privé de nos lignes de trains vendues à la découpe ne peuvent apparaitre que comme les complices déterminés de cette mise à sac. Rappelons que la loi pacte ferroviaire de 2018 imposée par la force en dépit d’une grève combative des cheminots a transcrit dans la loi les derniers éléments des directives européennes du paquet ferroviaire. A l’époque, le silence avait été trop souvent complet dans les directions syndicales sur l’origine européenne de l’attaque.
De fait, si la convention prolonge jusqu’en 2030 que le service est confié à la SNCF, elle acte aussi l’ouverture à la concurrence. Sa page 11 souligne : » La nouvelle convention TER respecte par ailleurs les obligations de la loi de service ferroviaire signé après le 25 décembre 2023 à une mise en concurrence préalable , mais qui permet de signer un contrat en gré – à – gré avec SNCF Voyageurs avant cette date pour une durée ne pouvant excéder 10 ans. Dans un souci de meilleure maîtrise du service, et en continuité avec le découpage en cinq lots de la convention actuelle, la Région divise le réseau en quatre lots géographiques (…) la mise en concurrence prescrite par la loi NPF sera mise en œuvre progressivement pendant la durée de la convention, par détachement des 4 lots. » L’ouverture à concurrence sera ainsi lancée dès 2027 pour le Poitou Charente, puis deux autres suivront.
Une conclusion s’impose pour qui veut préserver et développer le service public ferroviaire, défendre la SNCF 100% publique qui seule a permis de rendre le train accessible à tous les voyageurs, qui seule permettait un transport efficace et responsable sur le plan écologique de marchandise dans tout le pays. Cette conclusion c’est celle de la sortie de l’Union Européenne du Capital qui est construite pour et par la classe capitaliste pour mettre en coupe réglée l’ensemble des domaines échappant « aux marchés ». C’est à dire à la privatisation des services publics (trains, transports, énergie, télécomunications qui ont chacun eu droit à leur paquet de directive décliner en loi NOME et autres contre réformes, sans oublier l’éducation et la santé…)et la captation par l’exploitation des travailleurs de gigantesques profits. Pour en sortir, l’UE il faut en sortir. Pour des trains publics pour tous, le frexit progressiste s’impose. Et vite. C’est bien pour cette alternative rouge tricolore, pragmatique et concrète, sociale et populaire, démocratique et écologique que les communistes avec le PRCF invitent à rejoindre. De fait, les cheminots en lutte ne s’y trompent désormais plus, en ciblant directement la commission européenne.
JBC pour www.initiative-communiste.fr
INTERVENTION DE DIDIER LE RESTE Président de la CONVERGENCE NATIONALE RAIL A BORDEAUX LE LUNDI 12 JUIN 2023
Bonjour à toutes et à tous,
Merci aux organisateurs de cette journée (CRVF N-A, CSE TER N-A…), de leur invitation et d’organiser une telle initiative au moment où les élus-es du Conseil Régional sont appelés à se prononcer sur une délibération visant à mettre, à terme ,en concurrence certains lots de TER et de débattre, in fine, d’une nouvelle convention TER qui pourrait entraîner de nouvelles formes de déshumanisation du Service public ferroviaire.
La CONVERGENCE NATIONALE RAIL (CNR), de composition pluraliste, forte de 117 collectifs et comités d’usagers adhérents, de collectivités locales, d’élus-es, de syndicats, d’associations, de citoyennes et citoyens, intervient sur l’ensemble des problématiques qui fondent la consistance du Service public ferroviaire. Elle constitue un relais, un point d’appui pour les mobilisations qui se déroulent en territoires. C’est un outil d’impulsion, de coordination et d’intervention vis-à-vis des autorités publiques et des Directions de la SNCF.
Je rappelle d’entrée que la CNR, contrairement à la FNAUT par exemple, est résolument opposée à l’ouverture à la concurrence des activités ferroviaires. Car, comme pour d’autres services publics qui ont vu leurs activités livrées à la concurrence conduisant à des formes de libéralisation voire à des privatisations partielles ou totales, ce sont toujours les mêmes arguments et prétextes fallacieux qui sont avancés, du style : « plus de choix pour les usagers/consommateurs- baisse des tarifs-amélioration du service-baisse des coûts de production … » et j’en passe ! Malheureusement la réalité est tout autre ! Les coûts ne baissent pas à service égal et rapidement sous le coup d’impératifs financiers et de restructurations, le service se dégrade et les tarifs augmentent.
Si on devait se convaincre en citant un exemple, ce serait celui de la Région PACA où l’octroi à la société TRANSDEV de l’exploitation de la ligne TER MARSEILLE-NICE voit l’argent public couler à flots pour tenter de démontrer que le privé fait mieux que le Service public ! Pour bien préparer l’arrivée du Privé, le Président Macroniste de la Région PACA , a subitement supprimé une tarification avantageuse pour les usagers du rail !!
Contrairement à un Service Public, digne de ce nom, une entreprise privée recherche pour le moins une rentabilité financière à court terme voire doit verser des dividendes à des actionnaires. L’ouverture à la concurrence induit de plus en plus de gaspillage dans la gestion administrative (multiplicité des structures, lancement appels d’offres, négociations et procédures de contestation avec les autres opérateurs , notamment avec ceux non retenus…) au-delà même du gaspillage consécutif aux dysfonctionnements induits par la séparation de la gestion de l’infrastructure de celle de l’exploitation, sans parler des incohérences coupables liées à la balkanisation de l’organisation interne de la SNCF , accentuée depuis la structuration de celle-ci en 5 sociétés anonymes.
Le rail, vous le savez, est un système de transport guidé, intégré, qui s’exploite en réseau. Séparer la gestion de l’infrastructure de celle de l’exploitation, faire intervenir des opérateurs différents sur un même réseau ne peut que nuire à son efficacité par l’absence de coordination, la dilution des responsabilités, l’absence de complémentarité et de mutualisation. Avec la multiplication d’opérateurs, la sécurité ferroviaire pâtirait de la perte de vision globale de l’ensemble du réseau, singulièrement dans des zones à forts trafics puisque le privé se positionne prioritairement sur des relations jugées rentables au sens financier du terme.
Dans le cadre du dogme libéral européen traduit par cette fumeuse formule « la concurrence libre et non faussée » qui s’avère être complètement faussée, le choix que font certains décideurs politiques de favoriser l’arrivée du privé sur les rails, participe de l’idée de répondre à des intérêts privés et non pas de répondre aux problèmes que rencontrent les usagers au quotidien.
En matière de sécurité ferroviaire, il faut bien voir que certains opérateurs et pas des moindres, déplorent le fait que les impératifs techniques et juridiques liées au niveau de la sécurité ferroviaire, sont trop contraignants car, disent –ils , ils les empêchent de faire du business sur les rails comme ils le souhaiteraient !! Nous posons une question : « est ce que la sécurité ferroviaire va devenir une variable d’ajustement des politiques libérales entraînant libéralisation, dérèglement et démantèlement du secteur ferroviaire ? Voyons bien que dans le cadre d’appels d’offres, l’attribution des lignes à différents opérateurs, interdira la redistribution des recettes et des dépenses entre les lignes d’une même région afin de gommer certaines inégalités.
Les coûts jugés trop élevés du transport ferroviaire en France ne proviennent pas de l’absence de concurrence mais de politiques délibérées , consécutives à des choix clairement assumés : désengagement financier de l’Etat qui subventionne largement les routes, dette portée par l’infrastructure réseau qui pèse lourdement sur tout le système ferroviaire, subventions massives aux modes de transports concurrents du rail ( routier, secteur aérien…) pourtant bien plus néfastes en matière tant écologique que sociale . De plus l’augmentation exponentielle du montant des péages (droit d’accès, droit de circuler…), les plus élevés d’Europe, que doit verser la SNCF pour faire circuler ses trains, se répercute sur le prix des titres de transport alors que le transport routier ne paie pratiquement rien pour utiliser les infrastructures routières et que les coûts externes (pollutions, accidentologie, bruits ,dégradation des infrastructures routières, congestions routières…) qu’il génère pour la collectivité nationale, ne sont pas répercutés sur le coût du transport.
Afin de préparer l’arrivée de la concurrence, les Régions (AOT) réduisent les moyens des conventions TER (-10% en Nouvelle Aquitaine : suppression des contrôleurs dans certains trains) et de concert, les Régions et SNCF ferment les gares, les guichets et réduisent ou suppriment les postes de cheminots dans les gares, les trains et sur les quais. Ces politiques de deshumanisation des emprises de la SNCF en vigueur depuis nombre d’années sont source d’insécurité et de dégradation de la qualité du service rendu aux usagers. C’est bien cette politique d’atrophie du Service public et de discriminations dont sont victimes nombre d’usagers de la SNCF, face notamment à la dématérialisation de la vente des titres de transports qu’a dénoncée à plusieurs reprise la Défenseure des Droits et qui a conduit la CNR à déposer au Tribunal Administratif de MONTREUIL(93) deux recours contre la Direction Générale de la SNCF et de SNCF Voyageurs.
Des rapports l’ont déjà pointé, la multiplication des entités et des responsabilités affecte l’efficacité organisationnelle du système ferroviaire. C’est ainsi, par le surcoût pour les finances publiques, la dégradation du service rendu aux usagers, la désorganisation du système, la pression des citoyens-es, prés d’une dizaine de Pays en Europe ont repris en gestion publique des activités ferroviaires, préalablement confiées au privé singulièrement pour l’exploitation du transport régional de voyageurs.
Dans le cadre de correspondances, en situation perturbée de surcroît, impliquant plusieurs opérateurs, quelles seront les garanties et quelles seront les compensations pour les usagers ? On voit déjà de plus en plus , en raison de la structuration de la SNCF en 5 sociétés anonymes, autonomes voire concurrentes entre elles, des TER partir quasi-vides car ils n’ont pas attendu quelques minutes un TGV légèrement retardé qui allait les remplir d’usagers ! Plus le nombre d’opérateurs se multipliera, plus ces aberrations se multiplieront. Parmi les défenseurs de la concurrence circule l’idée que la SNCF est déficiente, ce que l’on peut constater à certains moments et le déplorer, et que l’arrivée de la concurrence l’obligerait à améliorer la qualité de son service. C’est totalement faux ! La préparation de l’arrivée de la concurrence, avec la baisse des coûts de production, donc moins de moyens humains et matériels pour soit disant rester compétitifs, cela constitue avec le désengagement public du rail, avec l’autoconcurrence au sein du groupe SNCF, les principales causes de la détérioration de la qualité de service fourni aux usagers.
La concurrence ne saurait répondre aux problèmes des zones désertées par les trafics ferroviaires. Ils concernent des zones peu rentables financièrement contrairement aux grands axes. Les sociétés privées, fussent elles coopératives, sont soumises à l’équilibre financier et n’ont pas l’intention, à moins d’être arrosées de subventions publiques, de s’aventurer à desservir des campagnes peu peuplées où l’agriculture et l’industrie sont en déclin.
De ce point de vue , certains amateurs de trains et d’autres anti-SNCF se sont emballés pour le projet « coopératif » porté par la SCIC(Société Coopérative d’Intérêt Collectif) dénommée RAILCOOP, prévoyant de rouvrir la ligne ferroviaire BORDEAUX-LYON, de faire circuler des trains de FRET et annonçant de façon cyclique des ouvertures de nouvelles lignes. Cette société qui, a son lancement, indiquait sur son site, faire rouler des trains « sans subventions publiques » s’appuie essentiellement sur des fonds publics, principalement des collectivités territoriales. Contrairement à la complémentarité affichée, RAILCOOP agit aujourd’hui en concurrent des activités de la SNCF. Quand on examine nombre « de sillons ferroviaires » sollicités par RAILCOOP à SNCF Réseau, on s’aperçoit que plusieurs d’entre eux rentrent en concurrence avec les TER de la SNCF. Si il fallait se convaincre de la vraie nature et de la finalité de l’opération « RAILCOOP » voyons bien que la direction de cette société milite activement en faveur de la poursuite de la libéralisation du secteur ferroviaire, allant jusqu’à adhérer au lobby européen dénommé « ALLRAIL »qui représente les concurrents ferroviaires aux opérateurs historiques de chemin de fer. Aujourd’hui, c’est beaucoup plus RAILFLOP que RAILCOOP ! Dans le prolongement des différentes analyses produites par la CNR , pointant le fait que l’opération RAILCOOP constituait le « cheval de Troie » de l’ouverture à la concurrence , la presse spécialisée n’a pas hésité ces dernières semaines à titrer ses articles : « RAILCOOP : la privatisation ferroviaire sous façade citoyenne » ou encore RAILCOOP : un laboratoire de la privatisation du rail « .
Dans un contexte de poursuite de la libéralisation du Secteur ferroviaire comme on le voit aujourd’hui avec les attaques de la Commission Européenne visant à démanteler l’activité FRET de la SNCF où l’ouverture à la concurrence à fait tant de dégâts, la Convergence Nationale Rail milite avec d’autres , ici avec le Comité Régional de Vigilance Ferroviaire, pour revenir à un Service public ferroviaire unique, intégré , permettant cohérence, cohésion territoriale, mutualisation et coordination des moyens et ressources, péréquation, égalité d’accès et de traitement , facilitant les complémentarités, l’inter et la multi- modalité, travaillant les synergies, les coopérations entre les activités au lieu de la concurrence. En matière de tarification, nous proposons de revenir à un tarif kilométrique, dégressif, flexible et bon marché. La concurrence n’est pas la solution aux problèmes du train mais au contraire constitue un élément de déstabilisation. Elle n’est pas inéluctable ! La montée en puissance inévitable des enjeux écologiques et nos luttes pluralistes et convergentes peuvent imposer au contraire le renouveau du service public ferroviaire, seul moyen de répondre à l’intérêt général de façon satisfaisante en réussissant une véritable transition écologique et énergétique.
Ainsi, la Convergence Nationale Rail demeure disponible pour s’inscrire comme aujourd’hui dans des actions et autres initiatives visant à mettre en échec la casse du Service public ferroviaire et à faire prévaloir d’autres orientations plus conformes à l’intérêt général et à la réponse aux besoins du plus grand nombre.
Je vous remercie de votre attention.