Des « grandes écoles » font du coaching auprès des cadres et futures cadres femmes pour leur enseigner comment négocier – individuellement, bien sûr – leur salaire. Le Monde du 29 octobre 2021 consacre un article aux formations mises en place par des écoles de commerce « pour aider les femmes à mieux mettre en avant leurs compétences et déconstruire les stéréotypes de genre ».
Le PRCF militant activement contre les inégalités salariales, y compris celles qui frappent les femmes cadres, il n’y a aucune raison que ces dernières soient moins payées que leurs collègues masculins pour faire le même travail.
Ce qui frappe cependant dans cet article bourré de bons sentiments et très en phase avec l’idéologie dominante, c’est que, tout en dénonçant les inégalités de « genre », il fait une impasse totale sur la situation sociale désastreuse que doivent affronter les femmes des classes populaires, dont la majorité touche des salaires indignes avec des conditions de travail souvent cruelles à l’heure de l’euro-austérité, de la casse des services publics et des réformes infâmes du gouvernement Macron.
Les femmes dont s’occupe l’école de commerce Audencia de Nantes, « gratuite et réservée aux femmes » avec l’objectif de leur apprendre à négocier leur salaire, ne sont pas nettoyeuses, infirmières, enseignantes, assistantes maternelles, vendeuses, coiffeuses ou caissières — qui auraient pourtant le plus grand besoin de voir leur salaire augmenter. Le journaliste a beau nous dire que « tous les profils sont représentés », il ne cite que des « étudiantes, jeunes actives, cadres confirmées ». L’une est « bientôt diplômée en stratégie financière », une autre « chimiste en entreprise », une troisième « responsable commerciale ». Et quand, nous indique Le Monde, « neuf femmes sur dix obtiennent une augmentation de leur rémunération » (tant mieux) à l’issue du négotraining, elles arborent un chandail frappé du slogan I got the power — « J’ai eu le pouvoir, j’ai gagné » – car le globish fait évidemment partie de ce genre d’initiative. What else ?
Le syndicalisme ? L’action collective ? La solidarité ? La condition de la majorité des femmes qui subissent des violences bien plus cruelles au jour le jour, dans leur travail, les salaires insuffisants, les transports harassants, la course pour récupérer les enfants à la crèche et acheter de quoi nourrir la famille le soir ? Connaît pas. Voilà bien le féminisme (petit-)bourgeois ! Il n’y a pas de lutte de classe, il n’y a que des femmes, chacune dans sa bulle, toutes sœurs. Mais certaines sont plus sœurs que les autres…
Le PRCF et sa commission Femmes soutiennent toutes les revendications des femmes pour obtenir l’égalité des salaires. Mais il alerte sur le danger des mesures sparadrap et publicitaires (car cette initiative d’écoles de commerce n’est rien d’autre que de la pub) qui individualisent une question essentielle pour la survie de dizaines de milliers de femmes en France pour en faire, au nom de « l’égalité des chances », une affaire sociétale (le problème de ces apprenties en négociation salariale, c’est qu’elles n’osent pas « parler d’argent ») et se parer des plumes de la participation à « l’égalité des chances ».
Cette lutte concerne toute la classe travailleuse, hommes et femmes unis pour arracher aux patrons de meilleurs salaires pour les femmes. Elles y gagneront, les hommes aussi, et toute la classe. Comme disaient dans les années 1970 les femmes vietnamiennes combattant aux côté des hommes l’invasion nord-américaine de leur pays : « L’égalité des sexes passe par leur égalité économique », mais aussi : « On ne peut réclamer sa libération si on ne participe pas activement à la lutte pour la libération de tous les opprimés ».