Il y a 108 ans la première journée internationale des femmes. C’était le 19 mars 1911. En 1913, la journée est déplacée au 8 mars.
Revenons avec ce texte de Alexandra Kollontaï de 1920 sur le pourquoi, le comment et le quand de cette journée internationale
La journée internationale des femmes – Alexandra Kollontaï (1920)
Une fête militante
La Journée de la Femme ou la Journée de l’Ouvrière est un jour de solidarité internationale et un jour pour passer en revue la force et l’organisation des femmes prolétariennes.
Mais ce n’est pas un jour spécial uniquement pour les femmes. Le 8 mars est une journée historique et mémorable pour les ouvriers et les paysans, pour tous les ouvriers russes, et pour tous les ouvriers du monde. En 1917, ce jour là, la grande Révolution de Février a éclaté [1]. Ce sont les ouvrières de Petersbourg qui ont commencé cette révolution; ce sont elles qui, en premier, ont décidé de soulever la banderole de l’opposition au tsar et à ses associés. C’est pourquoi la journée de la femme est une double fête pour nous.
Mais si c’est un jour férié général pour tout le prolétariat, pourquoi l’appelle-t-on ‘Journée de la Femme’? Pourquoi alors tenons-nous des fêtes et des réunions spéciales destinées avant tout aux ouvrières et aux paysannes? Cela ne compromet-il pas l’unité et la solidarité de la classe ouvrière? Pour répondre à ces questions, nous devons regarder en arrière et voir comment la Journée de la Femme est arrivée et pour quelle raison elle a été organisée.
Comment et pourquoi la Journée de la Femme a-t-elle été organisée ?
Il n’y a pas longtemps, en fait, il y a dix ans environ, la question de l’égalité des femmes et la question quant à savoir si les femmes pourraient prendre part au gouvernement aux côtés des hommes étaient chaudement débattues. La classe ouvrière dans tous les pays capitalistes luttait pour les droits des ouvrières: la bourgeoisie ne voulait pas accepter ces droits. Ce n’était pas dans l’intérêt de la bourgeoisie de renforcer le vote de la classe ouvrière au parlement; et dans chaque pays, elle a entravé l’adoption des lois qui donnaient ce droit aux ouvrières.
Les socialistes en Amérique du Nord ont insisté sur leurs exigences pour le droit de vote avec une particulière persistance. Le 28 février 1909, les femmes socialistes des USA ont organisé d’énormes manifestations et réunions à travers le pays, exigeant les droits politiques pour les ouvrières. C’était la première ‘Journée de la Femme’. L’initiative d’organiser une journée de la femme appartient donc aux ouvrières américaines.
En 1910, durant la Seconde Conférence Internationale des Ouvrières, Clara Zetkin [2] a mis en avant la question d’organiser une Journée Internationale de l’Ouvrière. La conférence a décidé que chaque année, dans tous les pays, on devrait célébrer le même jour une ‘Journée de la Femme’ avec le slogan ‘Le droit de vote pour les femmes unira notre force dans la lutte pour le socialisme’.
Durant ces années, la question de rendre le parlement plus démocratique, par exemple, en élargissant le droit de vote et en l’étendant au vote des femmes, était une question vitale. Même avant la première guerre mondiale, les ouvriers avaient le droit de voter dans tous les pays bourgeois, sauf en Russie [3]. Seules les femmes, ainsi que les fous, restaient sans ces droits. Cependant, la réalité discordante du capitalisme exigeait la participation des femmes dans l’économie du pays. Chaque année, il y avait une augmentation du nombre de femmes qui devaient travailler dans les usines et dans les ateliers, ou comme domestiques et femmes de ménage. Les femmes travaillaient aux côtés des hommes et la richesse du pays était créée par leurs mains. Mais les femmes restaient sans droit de vote. Mais dans les dernières années avant la guerre, l’augmentation des prix a forcé même la ménagère la plus pacifique à s’intéresser aux questions de la politique, et à manifester fortement contre l’économie de pillage de la bourgeoisie. Les ‘soulèvement des femmes au foyer’ sont devenus de plus en plus fréquents, s’intensifiant soudainement à des moments différents en Autriche, en Angleterre, en France et en Allemagne.
Les ouvrières ont compris qu’il n’était pas suffisant de détruire les étals au marché ou de menacer le commerçant singulier: elles ont compris qu’une telle action ne réduit pas le coût de la vie. Il faut changer la politique du gouvernement. Et pour réussir cela, la classe ouvrière doit voir que le droit de vote est élargi.
Il a été décidé d’avoir une Journée de la Femme dans tous les pays en tant que forme de lutte pour obtenir le droit de vote pour les ouvrières. Ce jour était destiné à être une journée de solidarité internationale dans le combat pour des objectifs communs et une journée pour passer en revue la force organisée des ouvrières sous la bannière du socialisme.
La première Journée Internationale de la Femme
La décision prise lors du Second Congrès International des Femmes Socialistes n’est pas restée sur papier. Il a été décidé de tenir la première Journée Internationale de la Femme le 19 mars 1911. Cette date n’a pas été choisie au hasard. Nos camarades allemandes ont sélectionné ce jour à cause de son importance historique pour le prolétariat allemand. Le 19 mars de l’année de la Révolution de 1848, le roi prussien a reconnu pour la première fois la force de la population armée et a cédé devant la menace d’un soulèvement prolétarien. Parmi les nombreuses promesses qu’il a faites, et qu’il a plus tard échoué à tenir, figurait l’introduction du droit de vote pour les femmes. Après le 11 janvier, des efforts ont été faits en Allemagne et en Autriche pour préparer la Journée de la Femme. Ils ont fait connaître les projets pour une manifestation à la fois par le bouche à oreille et par la presse. Durant la semaine précédant la Journée de la Femme, deux journaux sont apparus: ‘The Vote for Women’ (Le Droit de Vote pour les Femmes) en Allemagne et ‘Women’s Day (Journée de la Femme) en Autriche. Les divers articles consacrés à la Journée de la Femme – ‘Women and Parliament’ (Femmes et Parlement), ‘The Working Women and Municipal Affairs’ (Les ouvrières et les Affaires Municipales), ‘What Has the Housewife got to do with Politics?’ (Qu’à la Femme au Foyer à voir avec la Politique?), etc – ont analysé à fond la question de l’inégalité de la femme dans le gouvernement et dans la société. Tous les articles ont souligné le même point: qu’il était absolument nécessaire de rendre le parlement plus démocratique en étendant le droit de vote aux femmes.
La première Journée Internationale de la Femme a eu lieu en 1911. Son succès a dépassé toutes les attentes. Durant cette Journée de l’Ouvrière, l’Allemagne et l’Autriche n’étaient qu’une mer de femmes grouillante et tremblante. Des meetings ont été organisés partout – dans les petites villes et même dans les villages, les salles étaient tellement remplies qu’on a dû demander aux ouvriers de laisser leurs places aux femmes.
Ceci a certainement été la première démonstration de militantisme de la femme ouvrière. À cette occasion, les hommes sont restés à la maison avec leurs enfants, et leurs femmes, les femmes au foyer prisonnières, sont allées aux meetings. Durant les plus grandes manifestations dans la rue, auxquelles 30000 ont participé, la police a décidé d’enlever les calicots des manifestants: les ouvrières ont résisté. Dans la bagarre qui a suivi, le carnage n’a été empêché que grâce à l’aide des députés socialistes au parlement.
En 1913, la Journée Internationale de la Femme a été transférée au 8 mars. Ce jour est resté le jour du militantisme de l’ouvrière.
Une Journée de la Femme est-elle nécessaire ?
La Journée de la Femme a eu des résultats ahurissants en Amérique du Nord et en Europe. Il est vrai que pas un seul parlement bourgeois n’a pensé à faire des concessions aux ouvriers ou à répondre aux exigences des femmes. Car à cette époque, la bourgeoisie n’était pas menacée par une révolution socialiste.
Mais la Journée de la Femme a réussi quelque chose. Elle s’est avérée par dessus tout être une excellente méthode d’agitation parmi nos sœurs prolétaires les moins politisées. Elles ne pouvaient pas aider, mais ont tourné leur attention vers les réunions, les manifestations, les affiches, les tracts et les journaux qui étaient consacrés à la Journée de la Femme. Même l’ouvrière politiquement arriérée s’est dit à elle-même «Ceci est notre journée, le festival pour les ouvrières», et s’est précipitée aux meetings et aux manifestations. Après chaque Journée Internationale de la Femme, plus de femmes rejoignent les partis socialistes et les syndicats grandissent. Les organisations se sont améliorées et la conscience politique s’est développée.
La Journée de la Femme a encore servi à une autre fonction: elle a renforcé la solidarité internationale des travailleurs. Les partis des différents pays échangent habituellement des conférenciers pour l’occasion: des camarades allemands vont en Angleterre, des camarades anglais vont en Hollande,… La cohésion internationale de la classe ouvrière est devenue solide et ferme et cela signifie que la force combattante du prolétariat en tant qu’ensemble qui a grandi.
Journée de la Femme Ouvrière en Russie
Les ouvrières russes ont pour la première fois pris par à la ‘Journée de l’Ouvrière’ en 1913. C’était une période de réaction alors que le tsarisme tenait les ouvriers et les paysans dans son étau – comme un contrôle. Il ne pouvait y avoir aucune pensée de célébrer la ‘Journée de l’Ouvrière’ par des manifestations au grand jour. Mais les ouvrières organisées étaient capables de marquer leur journée internationale. Les deux journaux légaux de la classe ouvrière – la ‘Pravda’ bolchévique et la ‘Looch’ menchévique – ont transmis des articles à propos de la Journée Internationale de la Femme [4]: ils ont publié des articles spéciaux, des portrait de certaines de celles qui prenaient part au mouvement des ouvrières et des salutations de camarades tels qu’August Bebel et Clara Zetkin [5].
Durant ces sombres années, les meetings étaient interdits. Mais à Petrograd, à la Bourse de Kalashaïkovsky, ces ouvrières qui appartenaient au Parti (bolchévique) ont organisé une réunion publique sur ‘La Question de la Femme’. Le prix d’entrée était de cinq kopecks. C’était un meeting illégal mais la salle était absolument pleine. Les membres du parti ont parlé. Mais cette réunion ‘fermée’ animée s’est terminée péniblement quand la police, alertée par de tels débats, est intervenue et a arrêté de nombreux conférenciers.
Il a été d’une grande importance pour les travailleurs du monde que les femmes en Russie, qui vivaient sous l’oppression tsariste, devraient se joindre et d’une manière ou d’une autre s’arranger pour se reconnaître dans les actions de la Journée Internationale de la Femme. C’était un signe bienvenu que la Russie se réveillait et que les prisons et les gibets tsaristes étaient impuissants pour tuer l’esprit de lutte et de protestation des travailleurs. En 1914, la Journée de l’Ouvrière en Russie a été mieux organisée. Les deux journaux des ouvriers se sont sentis concernés eux-mêmes par la fête. Nos camarades ont mis beaucoup d’efforts dans la préparation de la Journée de l’Ouvrière. À cause de l’intervention policière, ils ne sont pas parvenus à organiser une manifestation. Ceux qui étaient impliqués dans l’organisation se sont retrouvés dans les prisons tsaristes et beaucoup ont été plus tard envoyés dans le grand nord. Car le slogan ‘pour le droit de vote des femmes’ était naturellement devenu en Russie un appel public pour le renversement de l’autocratie tsariste.
Journée de l’Ouvrière durant la guerre impérialiste
La première guerre mondiale a éclaté. La classe ouvrière de chaque pays était recouverte du sang de la guerre [6]. En 1915 et 1916, la Journée de l’Ouvrière à l’étranger a été une faible affaire – les femmes de l’aile gauche socialiste qui partageaient les vues du Russian Bolshevik Party (Parti Bolchévique de Russie) ont essayé de transformer le 8 mars en une manifestation des ouvrières contre la guerre. Mais ces traîtres du parti socialiste en Allemagne et dans d’autres pays ne permettraient pas aux femmes socialistes d’organiser des rassemblements; et les femmes socialistes se sont vues refuser des passeports pour aller dans des pays neutres où les ouvrières souhaiteraient tenir des réunions internationales survivait.
En 1915, il n’y a qu’en Norvège qu’elles se sont débrouillées pour organiser une Journée de la Femme et en Russie, car ici, la puissance du tsarisme et de la machine militaire était effrénée.
Ensuite est arrivée la grande, grande année 1917. La faim, le froid et les épreuves de la guerre, ont brisé la patience des ouvrières et des paysannes de Russie. En 1917, le 8 mars (23 février) pour la Journée de l’Ouvrière, elles sont hardiment sorties dans les rues de Pétrograd. Les femmes – certaines étaient ouvrières, certaines étaient des femmes de soldats – ont exigé du ‘Pain pour nos enfants’ et le ‘Retour de nos maris des tranchées’. À ce moment décisif, les protestations des ouvrières ont présenté une telle menace que même les forces de sécurité tsaristes n’ont pas osé prendre les mesures habituelles contre les rebelles mais ont regardé avec confusion la mer orageuse de la colère populaire.
La Journée de l’Ouvrière de 1917 est devenue mémorable dans l’histoire. Ce jour-là, les femmes russes ont soulevé la torche de la révolution prolétarienne et ont mis le feu au monde. La Révolution de Février a débuté ce jour là.
Notre appel au combat
La ‘Journée de l’Ouvrière’ a été organisée pour la première fois il y a 10 ans durant la campagne pour l’égalité des femmes et pour la lutte pour le socialisme. Cet objectif a été rempli par les femmes de la classe ouvrière en Russie. En République Soviétique, les femmes ouvrières et paysannes ne doivent pas se battre pour le droit de vote ou leurs droits civils. Elles ont déjà gagné ces droits. Les travailleurs russes et les femmes paysannes sont des citoyens égaux – dans leurs mains se trouve une arme puissante pour rendre la lutte pour une vie meilleure plus facile – le droit de vote, de participer aux soviets et dans toutes les organisations collectives [7].
Mais les droits seuls ne sont pas assez. Nous devons apprendre à les utiliser. Le droit de vote est une arme que nous devons apprendre à maîtriser pour notre propre bénéfice, et pour le bien de la république des ouvriers. Durant les deux années de pouvoir des soviets, la vie en elle-même n’a pas absolument changé. Nous sommes seulement dans le processus de lutte pour le communisme et nous sommes encerclés par le monde dont nous avons hérité du passé, sombre et répressif. Les entraves de la famille, du ménage, de la prostitution pèsent toujours lourdement sur la femme ouvrière. Les ouvrières et les paysannes ne peuvent se débarrasser de cette situation et obtenir l’égalité dans la vie elle-même, et pas juste dans la loi, que si elles mettent toutes leurs énergies pour faire de la Russie une vraie société communiste.
Et pour accélérer son arrivée, nous devons d’abord redresser la barre de l’économie délabrée de la Russie. Nous devons examiner la solution de nos deux tâches les plus urgentes – la création d’une force de travail bien organisée et consciente politiquement et la restauration du transport. Si notre armée du travail fonctionne bien, nous devrions bientôt avoir à nouveau des machines à vapeur; les chemins de fer recommenceront à fonctionner. Cela signifie que les ouvriers et les ouvrières recevront le pain et le bois de chauffage dont ils ont désespérément besoin.
Obtenir le retour à la normale du transport accélèrera la victoire du communisme. Et avec la victoire du communisme viendra l’égalité complète et fondamentale des femmes. C’est pourquoi le message de la ‘Journée de l’Ouvrière’ doit cette année être «Ouvrières, paysannes, mères, femmes et sœurs, tous les efforts pour aider les travailleurs et les camarades à surmonter le chaos des chemins de fer et à rétablir le transport. Tout le monde dans la lutte pour le pain, le bois de chauffage et les matières premières».
L’an dernier, le slogan de la Journée de l’Ouvrière était: «Tous pour la victoire du Front Rouge» [8]. Maintenant, nous appelons les ouvrières à rallier leur force sur un nouveau front sans effusion de sang: le front du travail! L’Armée Rouge a battu l’ennemi extérieur parce qu’elle était organisée, disciplinée et prête à l’abnégation. Avec de l’organisation, du travail dur, de l’auto-discipline et de l’abnégation, la république des travailleurs surmontera l’ennemi interne – la dislocation du transport et de l’économie, la famine, le froid et la maladie. «Tous pour la victoire du front du travail sans effusion de sang! Tous pour la victoire!»
Les nouvelles tâches de la Journée de l’Ouvrière
La Révolution d’Octobre a donné aux femmes l’égalité avec les hommes, pour autant que les droits civils sont concernés. Les femmes du prolétariat russe, qui étaient il n’y a pas si longtemps, les plus malheureuses et opprimées, sont aujourd’hui dans la République Soviétique, capables de montrer avec fierté aux camarades d’autres pays le chemin vers une égalité politique par l’intermédiaire de l’établissement de la dictature du prolétariat et du pouvoir des soviets.
La situation est très différente dans les pays capitalistes où les femmes sont toujours surmenées et défavorisées. Dans ces pays, la voix de l’ouvrière est faible et inanimée. Il est vrai que dans divers pays – en Norvège, en Australie, en Finlande et dans certains des États d’Amérique du Nord – les femmes ont gagné les droits civils même avant la guerre [9].
En Allemagne, après que le kaiser a été rejeté et qu’une république bourgeoise dirigée par les ‘conciliateurs’ [10] a été établie, 36 femmes sont entrées au parlement – mais pas une seule n’était communiste!
En 1919, en Angleterre, une femme a été élue pour la première fois en tant que membre du parlement. Mais qui était-elle? Une ‘lady’. Cela signifie une propriétaire de terres, une aristocrate [11].
En France aussi, la question de l’extension du droit de vote aux femmes est apparue plus tard. Mais de quelle utilité sont ces droits pour l’ouvrière dans la structure des parlements bourgeois? Tant que le pouvoir est dans les mains des capitalistes et des propriétaires terriens, aucun droit politique n’évitera à la femme ouvrière la position traditionnelle d’esclavage dans la maison et dans la société. La bourgeoisie française est prête à envoyer une autre mouillette à la classe ouvrière, face à la croissance des idées bolchéviques parmi le prolétariat: elle est prête à donner le droit de vote aux femmes [12].
Monsieur le Bourgeois – il est trop tard !
Après l’expérience de la Révolution d’Octobre russe, il est clair pour chaque ouvrière en France, en Angleterre et dans d’autres pays, que seule la ‘dictature de la classe ouvrière’, seul ‘le pouvoir des soviets’ peuvent garantir l’égalité complète et absolue, la victoire ultime du communisme démolira les chaînes de la répression centenaires et le manque de droits. Si la tâche de la ‘Journée Internationale de l’Ouvrière’ était antérieurement de combattre pour le droit de vote des femmes face à la suprématie des parlements bourgeois, aujourd’hui, la classe ouvrière a une nouvelle tâche: organiser les ouvrières autour des slogans de combat de la Troisième Internationale. Au lieu de prendre part au fonctionnement du parlement bourgeois, écoutez l’appel de la Russie. «Ouvrières de tous les pays! Organisez un front prolétarien uni dans la lutte contre ceux qui pillent le monde! À bas le parlementarisme de la bourgeoisie! Nous accueillons le pouvoir des soviets! Supprimons les inégalités subies par les hommes et les femmes travailleurs! Nous nous battrons avec les ouvriers pour le triomphe du communisme mondial!»
Cet appel a été entendu pour la première fois au milieu des épreuves d’un nouvel ordre, il sera entendu dans les batailles de la guerre civile et aura une résonance dans les cœurs des ouvrières dans d’autres pays. Les ouvrières écouteront et croiront cet appel à la raison. Jusqu’à il y a peu, elles pensaient que si elle s’arrangeaient pour envoyer quelques représentantes au parlement, leurs vies seraient plus faciles et que l’oppression du capitalisme seraient plus supportable. Maintenant, elles savent le contraire.
Seul le renversement du capitalisme et l’établissement du pouvoir des soviets les sauvera du monde de souffrances, d’humiliations et d’inégalités qui rendent la vie de l’ouvrière dans les pays capitalistes si difficile. La ‘Journée de l’Ouvrière’ est passée d’une journée de lutte pour le droit de vote à une journée internationale de lutte pour la libération totale et absolue des femmes, ce qui signifie une lutte pour la victoire des soviets et pour le communisme!
À BAS LE MONDE DE LA PROPRIÉTÉ ET DU POUVOIR DU CAPITAL !
À BAS INÉGALITÉ, LE MANQUE DE DROITS ET L’OPPRESSION DES FEMMES – HÉRITAGE DU MONDE BOURGEOIS !
EN AVANT VERS L’UNITÉ INTERNATIONALE DES OUVRIÈRES ET DES OUVRIERS DANS LA LUTTE POUR LA DICTATURE DU PROLÉTARIAT – LE PROLÉTARIAT DES DEUX SEXES !
Notes :
[1] La Russie tsariste utilisait toujours le vieux calendrier ‘Julien’ du Moyen Âge qui était 13 jours derrière le calendrier ‘Grégorien’ utilisé dans la plupart du reste du monde. Ainsi, le 8 mars était le ’23 février’ dans l’ancien calendrier. C’est aussi pourquoi la révolution de mars 1917 est appelée ‘la Révolution de Février’ et celle de novembre 1917 ‘la Révolution d’Octobre’.
[2] Clara Zetkin était une dirigeante du mouvement socialiste allemand et la dirigeante principale du mouvement international des ouvrières. Kollontaï était une déléguée à la conférence internationale représentant les ouvrières du textile de Saint-Pétersbourg.
[3] Ceci n’est pas correct. La grande majorité des ouvriers non-qualifiés en Angleterre, en France et en Allemagne ne pouvaient pas voter. Un plus petit pourcentage des hommes de la classe ouvrière aux États-Unis ne pouvait pas voter – en particulier les hommes immigrés. Dans le sud des USA, les hommes noirs étaient souvent empêchés de voter. Les mouvements de la classe moyenne pour le suffrage dans tous les pays européens ne se sont pas battus pour donner le droit de vote aux femmes de la classe ouvrière, ni aux hommes de la classe ouvrière.
[4] Durant son Congrès de 1903, le Russian Social Democratic Labour Party (Parti Russe Social Démocratique du Travail) s’est divisé en deux ailes, les bolchéviques (ce qui signifie ‘majorité’ en russe) et les menchéviques (ce qui signifie ‘minorité’). Dans la période entre 1903 et 1912 (quand la division est devenue permanente), les deux ailes ont travaillé ensemble, se sont unifiées pendant un moment, et puis se sont encore divisées. De nombreux socialistes, y compris l’ensemble des organisations locales, ont travaillé avec les deux ailes ou ont essayé de rester neutres dans les désaccords. Kollontaï, une socialiste active et combattante pour les droits des femmes depuis 1899, était d’abord indépendante des factions, puis est devenue menchévique pour plusieurs années. Elle a rejoint les bolchéviques en 1915 et est devenue la seule femme membre de leur comité central. Elle a également siégé comme commissaire du bien-être de la République Soviétique et comme directrice de la section féminine du Parti bolchévique.
[5] August Bebel (1840-1913) était un dirigeant du German Social-Democratic Party (Parti Social-Démocrate Allemand). Il était un supporter bien reconnu du mouvement des femmes et l’auteur d’un ouvrage classique sur le marxisme et les femmes ‘Die Frauenfrage’, traduit en anglais ‘Woman under Socialism’ (Femme et Socialisme), qui a été traduit en de nombreuses langues.
[6] Lorsque la guerre a éclaté en 1914, il y avait une énorme scission dans le mouvement socialiste international. La majorité des socio-démocrates en Allemagne, en Autriche, en France et en Angleterre soutenait la guerre. D’autres socialistes, tels que Kollontaï, Lénine, le Parti bolchévique et Léon Trotsky en Russie, Clara Zetkin et Rosa Luxemburg en Allemagne, et Eugene Debs aux États-Unis, pour ne nommer que quelques dirigeants, ont dénoncé les socialistes pro-guerre d’être des traîtres à la classe ouvrière et au combat pour la révolution des ouvrières.
[7] Le mot ‘soviet’ signifie ‘conseil’. Les soviets, ou conseils des ouvriers, sont des corps démocratiques dans lesquels les délégués sont élus dans des réunions des usines et du voisinage et sont contrôlés par leurs frères et sœurs ouvriers. Les représentants des soviets doivent faire rapport à leur circonscription électorale et sont sujets à un rappel immédiat.
[8] Après la saisie du pouvoir par la classe ouvrière en octobre/novembre 1917, l’État ouvrier russe était confronté à deux problèmes majeurs. L’un était une invasion, y compris des États-Unis, l’autre était la résistance des éléments pro-monarchistes et pro-capitalistes en Russie. Principalement sous la direction de Léon Trotsky, les soviets ont créé une armée ‘des ouvriers et des paysans’, l’Armée Rouge, qui a battu les forces de contre-révolution.
[9] Les femmes avaient gagné le droit de vote dans plusieurs États des États-Unis avant la Première Guerre Mondiale. Un amendement fédéral garantissant à toutes les femmes de plus de 21 ans le droit de vote a été voté le 26 août 1920. Il a fallu attendre les années 60 pour que la dernière barrière légale au vote de personnes de la classe ouvrière aux États-Unis soit abolie.
[10] Les conciliateurs auxquels Kollontaï fait référence sont les dirigeants du Parti Social-Démocrate qui formaient un nouveau gouvernement capitaliste en Allemagne après la chute du kaiser en 1918. Ils sont activement soutenu la contre-révolution après leur arrivée au pouvoir.
[11] Alors que l’aristocrate Lady Astor était en effet la première femme à siéger au parlement anglais, la première femme élue au parlement a été la révolutionnaire irlandaise Constance Markievicz. Avec d’autres membres du parti Sinn Fein, elle a refusé de prendre son siège au parlement impérial.
[12] Les femmes françaises n’ont finalement pas obtenu le droit de vote avant la Deuxième Guerre Mondiale.