Le 9 mars, la CFDT a refusé d’appeler à manifester pour le retrait de la loi travail présentée par la ministre du travail El Khomri, rédigée probablement sous la dictée des « syndicats » des patrons, MEDEF et CGPME et pour répondre aux diktats de la Commission Européenne. Elle a appelé à manifester ce 12 mars, contre le retrait de la loi travail et pour en négocier quelques aspects cosmétiques. Résultat sans appel, aucun travailleurs ou presque n’a répondu à la mobilisation. Il n’est même pas sûr que les quelques centaines de manifestants à travers toutes la France dépassent le nombre de permanent de l’organisation. La preuve est ici faite, la CFDT ne représente pas les travailleurs.
En haut: la manif des syndicats «réformistes». En bas: les autres. Devine avec qui le gouvernement veut négocier? pic.twitter.com/wCltrfBCJd
— Sébastien Fontenelle (@vivelefeu) 12 mars 2016
Il est vrai que la CFDT a toujours été à la manœuvre pour faire passer – avec sa signature – les pires régressions sociales. De Nicole Notat signant le plan Juppé à François Cherèque parafant la casse des retraites jusqu’à Laurent Berger signant l’ANI, la casse des retraites complémentaires ou encore récemment le protocole PPCR dans la fonction publique…
Sous couvert de se présenter comme un syndicat « raisonnable », « réformateur », négociateur », la CFDT revendique son intégration au coté du pouvoir de la classe dominante – en « partenaire du dialogue social » si l’on veut reprendre les éléments de langage et la com’ patronal – c’est à dire en pièce maitresse de la classe capitaliste servant à tenter de faire croire aux travailleurs que la casse de leurs droits et de leurs salaires est le résultat d’une négociation et d’une concertation. Car en réalité, la CFDT ne négocie rien et signe tout. Et derrière le partenaire du dialogue social ce cache la collaboration de classe. Elle ne fait qu’affaiblir le rapport de force que peuvent construire les travailleurs et briser le front syndical, puis planter un couteau dans le dos des travailleurs en signant systématiquement des contre réformes inacceptables.
La CFDT est de fait le principal allié des Hollande, Sarkozy et autre MEDEF pour mettre en œuvre toutes les régressions sociales, la liquidation des conquêtes sociales du Conseil National de la Résistance, à l’image de la Sécu ou des retraites, et désormais du Code du travail.
Qui s’étonnera donc de voir l’actuel secrétaire général de la CFDT se comporter en véritable VRP de Hollande Valls Macron Gattaz et de l’UE. Faisant la promotion des soit disant aspects positifs de la loi travail pour refuser d’en exiger le retrait ? qui s’en étonnera quand on sait que l’individu n’a pas eu de mots assez dur pour applaudir la condamnation par une justice de classe des 8 syndicalistes de Goodyear !
Pas grand monde. Dans la rue, d’ailleurs, Notat puis Chérèque ne peuvent plus approcher une manifestation … A Rennes ce 12 mars, une contre manifestation de jeune est venu dire leur fait aux quelques dizaines de permanents de la CFDT ou de la CFTC qui s’apprêtent à trahir, affichant une banderole C’est Fini De Trahir
Loi El Khomri, manif´ et contre manif´ au rassemblement CFDT, CFE-CGC, CFTC à #rennes pic.twitter.com/I1GIKpFicP
— Ouest-France 35 (@ouestfrance35) 12 mars 2016
CFDT – CES : syndicalisme d’accompagnement…. des patrons et de l’UE du Capital
Autogestionnaire ou réformiste, la com’ de la CFDT a varié, mais pas son alignement systématique sur le PS, son anticommunisme viscéral et son engagement au coté du patronat pour construire cette prison des peuples qu’est l’Union Européenne. La CFDT est l’un des membres historiques de la Confédération Européenne des Syndicats (CES). Institution grassement subventionnée par la Commission Européenne qui a accompagnée toutes les contre réformes, toutes les privatisations, toutes les régressions sociales. Jusqu’à aller l’été dernier à demander l’annulation du referendum en Grèce contre le nouveau memorandum de la Troika pour maintenir et renforcer l’austérité en proclamant :
« L’orientation européenne de notre pays est non négociable ; Nous disons oui à l’Europe des peuples et de la solidarité ! Nous disons oui à la monnaie commune et à une Europe fédérale ! »
Il est d’ailleurs tout à fait tragique d’avoir vu la CGT ou la FSU rejoindre la CFDT au sein de la CES, en abandonnant la Fédération Syndicale Mondiale (FSM) qui rassemble pourtant les syndicats du monde entier.
Dirigeant de la CFDT ? la collaboration payée du denier de Judas par le MEDEF et le système capitaliste
Mais il ne serait pas tout à fait juste de dire que la CFDT ne négocie rien … elle négocie parfaitement le reclassement doré de ses dirigeants, tout en laissant en plan les syndicalistes sincères de la base de la centrale qui à chaque trahison sont nombreux à quitter le navire, quand ils ne sont pas manu militari mis dehors.
Jugez plutôt :
- Nicole Nota : secrétaire de la CFDT de 1992 à 2002. Après son zèle pour l’approbation de l’euro austéritaire plan juppée, elle prend la présidence de l’UNEDIC, succédant à Bernard Boisson du CNPF (devenu MEDEF) depuis la CFDT et le MEDEF président à tours de rôle l’UNEDIC. En 2002, alors que François Chérèque lui succède, elle devient la PDG d’une entreprise de conseil et d’évaluation « sociale ». Vigéo, issue de la Caisse des Dépots et Consignations. Spécialisée dans « l’audit » et le benchmark ». Un reportage de Canal Plus ne tarde pas à pointer son financement par des multinationales (plus d’info sur Vigéo). Le 1er janvier 2011 elle est coopté comme présidente du club Le Siècle, succédant au patron du MEDEF Denis Kessler. Elle émarge également auprès du Conseil Européen. Et a été nommé membre des conseil d’administration de la Coface et du journal Le Monde…. Dirigeant de la CFDT, et collabo du MEDEF, cela rapporte.
- François Cherèque : Secrétaire général de la CFDT de 2002 à 2012, il est le fils d’un des principaux dirigeant de la CFDT dans les années 80 et ministre de Roccard. En pleine mobilisation contre le plan fillon, il signe la casse des retraites en 2003. Le 3 janvier 2013, récompensée de ses services, cet éducateur spécialisé est nommé en conseil des ministres haut fonctionnaire comme inspecteur général des affaires sociales. Et double son salaire par rapport à celui de permanent de la CFDT ! Le 12 janvier 2013 il est choisi comme président du think tank libéral Terra Nova. Dès la fin de l’année 2013, il est nommé président de l’Agence du Service Civique…. Dirigeant de la CFDT, et collabo du MEDEF, cela rapporte.
- Edouard Martin : délégué CFDT d’arcelor Mital. Malgré les promesse de François Hollande, Florange ferme en 2013. Sur la base d’un accord signé par la CFDT. Après avoir reconnu que François Hollande lui avait menti les yeux dans les yeux et que le gouvernement l’avait trahi…. il est intronisé tête de la liste PS aux élections européenne de 2014. Oui la CFDT réussi de beau reclassement !
- Anousheh KARVAR : Cette ancienne trésorière de la CFDT est l’une des principale dirigeante de la CFDT de ces dernières années : elle est un moment pressenti pour diriger la centrale à la suite de François Chérèque. Elle est nommée inspectrice des affaires sociales en 2012… Tiens donc, comme François Cherèque ! En 2011, elle est membre du comité consultatif de la Halde. La Halde pour qui Nicole Notat assure également des travaux… L’ancienne secrétaire nationale de la CFDT Cadre et responsable des questions de formation est depuis devenue le 9 février 2016 Directrice de cabinet adjointe chargée de l’emploi et de la formation professionnelle …. de Myriam El Khomri ! En charge donc de la Loi Travail . Mais quelle hypocrisie que d’entendre Laurent Berger l’actuel secrétaire national de la CFDT prétendre découvrir le projet de Loi El Khomri. De fait il se paye la tête des travailleurs ! et l’on peut être assuré qu’effectivement Laurent Berger n’aura pas de mal à s’entendre sur un texte qui est en fait porté par d’autres dirigeants historiques de la CFDT !
- Laurent Berger : gageons que pour ses services rendu à l’oligarchie, ce dernier sera récompensé d’une sinécure dorée comme ses prédécesseurs… et qu’il fera tout pour saboter le mouvement social contre la loi El Khomri.
Personne ne doit donc être dupe de ce qu’est la CFDT : un succursale du PS, une officine du MEDEF travaillant à la division des travailleurs, militant pour faire passer la casse des droits des travailleurs. Car quand le PS rétablie l’esclave, le CFDT négocie le poids des chaines
La CFDT est en phase d’achever son intégration au pouvoir de l’État.
Pour ne parler que du quinquennat de Hollande, le syndicat est un des principaux appuis de la politique de Hollande, de Valls et du MEDEF auprès des salariés et a participé à toutes les régressions sociales, toutes les attaques contre les salaires, les retraites, le Code du travail, a couvert toutes les fermetures d’entreprises et tous les plans de licenciements. Son secrétaire général, Laurent Berger, se comporte même en véritable VRP de Hollande-Valls-Macron-Gattaz.
L’alliance entre le gouvernement, le patronat et la CFDT, était officiellement scellée dès janvier 2013. C’était l’ANI (accord national interprofessionnel) que la CFDT signe avec le MEDEF afin d’accroître la « flexibilité du travail » et favoriser la compétitivité des entreprises. Pour rappel, les fameux accords de compétitivité-emploi sont consacrés par l’ANI et permettent aux patrons de négocier la solution locale la plus adaptée pour faire baisser le coût horaire du travail. L’ANI c’est aussi des licenciements facilités, avec des délais de recours raccourcis ou amputés pour les salariés, mais également des plans de mobilité interne imposée. La CFDT est fidèle au poste : toujours aux côtés du patronat pour l’aider à maintenir son taux de profit.
Les bouchées doubles
Mais depuis septembre 2015, le bon élève de Valls et Gattaz met les bouchées doubles. Le bilan des trahisons infligées aux salariés, que la CFDT est censée « représenter », est impressionnant. Cela commence le 2 septembre 2015, Laurent Berger déclare au Monde : « Le code du travail est illisible ». En bon collaborateur de Valls et Macron, il prépare les esprits et le terrain de la réforme à venir. Et le syndicat de mettre les mains dans le cambouis des plus crapuleuses mesures anti-ouvrières, signataire des pires accords :
— en pleine annonce d’un plan de 2 900 licenciements à Air France, Laurent Berger – en bon chien garde de Valls et du PDG Alexandre de Juniac – accable les représentants de salariés à deux reprises : début octobre, il attaque le Syndicat national des Pilotes de Ligne qui ne défendrait pas l’intérêt des salariés (« c’est un syndicalisme corporatiste ») ; puis le 5 octobre, il condamne sans réserve les syndicalistes qui ont investi le comité central d’entreprise (« cela ne représente pas le syndicalisme »). Le seul syndicalisme responsable est celui qui s’adapte au capitalisme.
— le 16 octobre, la CFDT signe avec le MEDEF l’accord sur les retraites complémentaires Agirc et Arrco : sous prétexte du déséquilibre financier de ces caisses de retraite, l’âge de la retraite passe de fait de 62 à 63 ans et le montant des pensions est revu à la baisse ! Gattaz est aux anges et rend hommage à ces courageux représentants des salariés : « Ils ont joué un rôle très important et ont été responsables »
— le 27 octobre 2015, alors qu’elle ne représente que 18% du personnel de l’AP-HP, la CFDT signe seule un accord avec Martin Hirsch qui aboutit à la perte pour les salariés de 3 jours de RTT (dont une journée accordée jusque-là aux mères de famille) et à une flexibilité accrue du travail (horaires changeants ; retour des journées de 12h le week-end…). La responsable de la CFDT de l’AP-HP assume la régression sociale qui permet à la direction d’économiser environ 1 000 postes : « Cet accord représente une perte d’avantages sociaux, c’est vrai, mais sommes-nous dans une société qui évolue positivement ? L’AP-HP n’échappe pas à cette réalité. ». Surtout s’adapter et courber l’échine devant les « réformes » dont ont besoin les capitalistes !
L’état d’urgence« légitime »…
Mais le pire était à venir. Suite aux ignobles attentats du 13 novembre, Hollande a instauré l’état d’urgence et l’a fait prorogé par le Parlement jusqu’au 26 février 2016. Il se traduit concrètement pour le mouvement syndical et revendicatif par une interdiction de manifester. Or, loin de s’inquiéter des conséquences désastreuses de l’état d’urgence sur la démocratie et de son impact mortifère sur la lutte des classes, Laurent Berger déclare le 23 novembre 2015 : « l’unité et la responsabilité de chacun s’imposent plus que jamais. Nous devons être lucides sur la gravité des menaces qui pèsent sur nous et sur notre façon de vivre. Oui, l’état d’urgence qui a été décrété est légitime. Cela ne met pas un frein à l’action syndicale […] Il faut renforcer la sécurité des personnes. Ce n’est pas un gros mot, c’est une attente des citoyens. Il faut lutter contre l’idéologie totalitaire de Daech, mais aussi construire du lien social. »
Décidément la CFDT joue parfaitement son rôle : partie intégrante de l’État, chargée de réprimer la classe ouvrière, elle est de tous les refrains que celui-ci lui demande d’entonner, comme ce petit couplet sur l’union sacrée qui nous ramène en 1914 et au ralliement des syndicats d’alors pour la guerre.