La construction européenne vue par B. Frachon et H. Krasucki
On aurait tendance à l’oublier mais les syndicalistes de luttes en France ont combattu pied à pied la construction européenne. Dénonçant ce que serait l’Union Européenne. La triste réalité actuelle démontrent qu’ils avaient raison. Pourtant, c’est le moment où certains dirigeants ralliés à la CES privilégient la défense de cette prison des peuples qu’est l’UE, de cette armes de destruction massive des salaires qu’est l’euro.
Retour sur les déclarations de Benoît Frachon et Henri Krasucki : effectivement sans aucune espèce d’illusion sur l' »Europe sociale » si chère à nos benêts réformistes! Merci au FSC d’avoir ressorti ces déclarations qui demeurent pleinement – la crise grecque et les plans européens d’austérité en France et ailleurs le prouvent – d’actualité.
Dès le 9 janvier 1956, le Bureau confédéral de la CGT pose les raisons de l’opposition de la confédération aux projets de Marché commun. Dans son communiqué, elle rejette aussi
« tout protectionnisme conservateur et son appui à toute formule authentique de coopération économique internationale. »
« – La libre circulation des marchandises, donc le déchaînement de la concurrence fondée sur l’infériorité des salaires et de la législation sociale, l’harmonisation par le bas des conditions sociales dans les différents pays, l’opposition renforcée à toutes les revendications des travailleurs. (…)
– La libre circulation des capitaux, le danger d’évasion des capitaux, de dévaluation et même de remplacer la monnaie nationale par une monnaie commune. (…) »
Et en 1957, avant la ratification par la France du Marché commun, la CGT, par la voix de Jean Duret, directeur du Centre d’études économiques de la confédération déclare:
L’enjeu est énorme : le Marché commun conduit infailliblement, à plus ou moins brève échéance, à la disparition des souverainetés nationales, à la création d’un super-Étateuropéen, réduisant à sa plus simple expression tout ce qui pourrait subsister d’individuel, de politiquement et économiquement indépendant chez les membres de la Communauté. Ce super-État sera dominé par le pôle d’activité économique le plus puissant : la Ruhr; par la puissance la plus énergique et la plus dynamique : l’Allemagne de l’Ouest. […] Pour la France, la réalisation du Marché commun c’est l’acceptation de l’hégémonie allemande. Son industrie ne pouvant lutter contre la concurrence d’outre-Rhin tombera sous la coupe des konzerns de la Ruhr.
On n’a pas fait mieux depuis !
Voici quelques déclarations de certains de nos pères fondateurs, prouvant si besoin, qu’ils étaient empreins d’une formidable lucidité par rapport à la question Européenne. Une lucidité qui manque atrocement aujourd’hui à tous ceux qui, sensés défendre la classe ouvrière, ont quitté la révolutionnaire Fédération Syndicale Mondiale et se fourvoient dans des institutions réformistes telles que la Confédération Européenne des Syndicats, où le parlement Européen, et qui, trop préoccupés par la lutte des Places, adhèrent au moule d’une forme de pensée consensuelle bien loin de la Lutte des Classes, abandonnant de fait les peuples à leur sort.
Cette Europe Capitaliste menée par des banquiers dont certains issus de la Goldman Sachs, et que d’aucuns avaient pourtant rejetée avec nous lors du référendum de 2005, n’est qu’un rouleau compresseur qui écrase les peuples Européens et autres, au service d’un capitalisme de plus en plus conquérant.
Nos anciens avaient bien compris que la construction Européenne était une invention des Classes Possédantes, et qu’elle serait réalisée contre la réelle Internationale Ouvrière, dont elle ne prendrait que les apparences un certain temps, question de brouiller les cartes et surtout brouiller la Classe Ouvrière avec elle-même.
Finalement, ils avaient bien anticipé et nous avaient bien mis en garde contre tout ce que nous constatons et déplorons aujourd’hui, il suffisait tout simplement de les relire pour prendre le bon chemin.
Benoît FRACHON
Discours prononcé en 1964 devant le Conseil général de la Fédération Syndicale Mondiale :
« Nous nuirions à la collaboration fraternelle des peuples, nous retarderions l’union ouvrière pour le progrès, pour la liberté et la paix, si nous laissions croire un seul instant que dans l’Union européenne que les capitalistes veulent réaliser, il y a la moindre parcelle de cet internationalisme auquel aspirent les travailleurs.
Nous devons au contraire démasquer leurs subterfuges et expliquer que les Etats-Unis d’Europe dont parlent d’abondance les représentants les plus typiques des monopoles, ne seraient qu’une simple association réactionnaire d’exploiteurs unissant leurs efforts pour maintenir les peuples sous leur domination, et empêcher l’évolution de la société vers le socialisme, vers une véritable collaboration fraternelle des peuples. »
Et
« Nous le disons très franchement aux militants des organisations qui participent aux institutions du Marché Commun, nous n’avons aucune confiance dans la possibilité de transformer ces organismes, de les infléchir vers une politique différente. »
Benoit Frachon suite ,
L’Humanité du 8 février 1962
« Dans tous les pays du Marché commun, l’Etat fait corps avec les monopoles et met à leur service le pouvoir politique. Comme on le voit, le Marché commun n’est pas ce qu’en disent en général ses promoteurs, un moyen d’améliorer le niveau de vie général des populations. C’est une entente, une association des grands capitalistes en vue d’essayer de surmonter leurs contradictions et de renforcer leur puissance sur le dos des masses exploitées. L’habilité des capitalistes est d’avoir obtenu de certains dirigeants réformistes, qui siègent sur des strapontins au Marché commun, qu’ils couvrent leur marchandise. »
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Henri KRASUCKI 1991
« Ne jamais renoncer à un devoir international mondial, même complexe, dans l’espoir, d’ailleurs illusoire, d’être admis dans une organisation ouest européenne qui boycotte la CGT, non pour son adhésion à la FSM, mais parce qu’elle est la CGT, par anticommunisme, sur des bases politiques et idéologiques. Une question de dignité et d’efficacité »
Enfin comme toujours,
Henri KRASUCKI et l’inoubliable discours sur la Lutte des Classes,
« Rien ne fait plus de mal aux travailleurs que la collaboration de classes. La lutte de classes, au contraire, est la base de l’unité, son motif le plus puissant.
C’est pour la mener avec succès en rassemblant l’ensemble des travailleurs que fut fondée la CGT. Or la lutte de classes n’est pas une invention, c’est un fait. Ilne suffit pas de la nier pour qu’elle cesse : renoncer à la mener équivaut pour la classe ouvrière à se livrer pieds et poings liés à l’exploitation et à l’écrasement.
« La régression sociale ne se négocie pas, elle se combat ! »
Certains de nos dirigeants politiques et syndicaux actuels feraient bien de s’inspirer de ces quelques discours et déclarations, qui bien que datant de plusieurs années, voire décennies, sont plus que jamais d’actualité.
Et si toutefois, ce dont je doute, cela ne suffisait pas à améliorer leur inspiration, je les invite à décrypter les hiéroglyphes Egyptiennes, ou les peintures de la grotte de Lascaux, ils auraient de fortes chances d’y trouver
meilleure matière, qu’en feuilletant les revues politiques actuelles, dont la grande majorité est en phase avec cette bouillie nauséabonde et mensongère, que nous servent les médias chiens de garde à longueur de journée.
Les Belges avec leur grève générale nous ont montré comment bien finir une année. Suivons leur exemple et essayons de bien commencer la future année, afin que la grève générale ne soit pas qu’une affaire de Belge et que l’Internationale ne soit pas qu’un chant de manifestation ou de fin de congrès,mais une réalité !
Alors, comme le comme le chantait si bien Jacques Brel nous pourrons leur dire :
« Non, Jef, t’es pas tout seul ! »
A tous ceux qui ne courbent pas l’échine, qui ne lâchent rien, et qui ne se préoccupent pas des consensus, je souhaite une Bonne année 2015
Yves
#transmis et repris depuis le site des syndicalistes de luttes du Front Syndical de Classe : http://www.frontsyndical-classe.org/2015/08/notre-camarade-yves-cimbolini-d-edf-nous-communique-ses-remarques-et-les-declarations-de-benoit-frachon-et-henri-krasucki-seffective