Le gouvernement tente de passer en force sur la mise en œuvre d’une réforme du lycée et du baccalauréat périlleuse et inégalitaire. Pourtant, sur le terrain, professeurs, parents d’élèves, lycéens ne cessent de faire entendre objections et alertes.
C’est que le gouvernement poursuit un double objectif qui s’oppose au service public de l’Éducation Nationale : supprimer massivement (120 000 !) postes de fonctionnaire à commencer par les plus nombreux, les professeurs, morceler pour privatiser le service public. Avec cette nouvelle loi s’inscrivant dans la suite de la réforme de l’école et de la réforme des collèges puis de la réforme du lycée et du bac et Parcoursup, c’est une nouvelle grave étape qui serait franchie. Une escalade dans l’application des ordres fixés par l’Union Européenne à travers la stratégie de Lisbonne.
Rappelons que les effectives de lycéens s’accroissent de 40 000 en 2019
La réforme Blanquer du lycée c’est :
- la suppression de 2h30 d’enseignement en seconde générale
- la suppression d’options
- la suppression des mathématiques du tronc commun en section générale
- la réduction des choix en section technologiques
- au final la réduction du nombre d’heures d’enseignement, c’est l’équivalent de 2700 enseignants à plein temps !
- la fin du diplôme national du bac, le même pour tous, au profit d’un bac à épreuves et correction locales.
- etc.
Attention, la Loi Blanquer, c’est le début de la fin de l’Éducation Nationale, ce service public garantissant l’égalité d’accès et de traitement pour chaque enfant de la République.
La fin de l’Éducation Nationale : Selon que vous serez riches ou pauvres, une école différente
La Loi Blanquer, actuellement en discussion au Parlement, vise à caporaliser les professeurs, à instaurer des établissements de natures différentes au sein même du service public (établissements des savoirs fondamentaux, aux objectifs pédagogiques restreints, pour les quartiers populaires et les zones rurales, avec des échanges de services imposés entre premier et second degré … et à l’autre bout de la hiérarchie sociale, les établissements internationaux qui pourront sélectionner leurs élèves, leurs professeurs et recevoir des dons des entreprises privées), privilégie les établissements privés (financement par les communes des maternelles privées, libéralisation de la mission pédagogique, ouvertes à toutes sortes d’acteurs).
Faire voler en éclat le statut de la fonction publique pour précariser et caporaliser
Il faut également comprendre que la loi Blanquer n’est pas isolée. Elle fonctionne de concert avec la loi de casse de la fonction publique. Un tandem mortifère que l’on retrouve dans d’autres domaines (Loi Santé, Loi Mobilité etc…) .
La Loi Dussopt de « transformation de la Fonction Publique » démantèle le statut, c’est-à-dire le socle des droits et garanties collectives, en déverrouillant le recours aux contractuels précaires – ce serait assurément demain la règle de recrutement, en donnant les pleins pouvoirs aux chefs d’établissement sur le recrutement, l’affectation, la promotion, la rémunération.
Pour ce faire, les commissions paritaires perdraient toute prérogative sur les mutations, l’avancement, les promotions, dès le 1er janvier 2020!
La réforme des retraites serait particulièrement douloureuse pour les personnels de l’éducation nationale.
Rejoindre la riposte pour défendre l’Éducation Nationale pour nos enfants
Face à ces attaques, les organisations syndicales ne baissent pas la tête et organisent la riposte.
Les mobilisations sont en croissance forte, comme nous l’avons constaté le mardi 19 mars, le samedi 30 mars et le jeudi 4 avril. D’autres dates sont déjà annoncées comme le 1er mai, qui sera cette année placé sous l’égide de la défense du service public d’éducation et de la Fonction Publique, la grève cruciale du jeudi 9 mai 2019. Et les syndicats d’enseignant, notamment le SNES, organisent une manifestation nationale à Paris le samedi 18 mai
Entre ces temps forts de convergence nationale, toutes sortes d’actions se déroulent au quotidien dans des centaines d’écoles, de collèges et de lycées : portes ouvertes revendicatives, occupations symboliques, rencontres avec les parents, refus collectifs d’être professeur principal, notes « de confiance », grèves locales….
Les organisations syndicales appellent à mettre en œuvre des modalités d’action en phase avec ce qu’une majorité de collègues de l’établissement est prête à faire, dans une logique de montée en puissance et d’élargissement de l’action. Quant aux fédérations de parents d’élèves, elles appellent également à l’image de la principale d’entre elles, la FCPE, à rejoindre sans tarder l’action.
G pour www.initiative-communiste.Fr
Revue des horreurs avec le décodage de la loi blanquer par le SNES
Orientation fin de Seconde et spécialités
Libre choix… Dans la limite des places disponibles !(..)un courrier adressé aux recteurs d’académie, le 6 mars vient préciser la note de service publiée le 28 septembre dernier. La DGESCO y expose les règles internes de « traitement des choix des enseignements de spécialité de 1ère générale « , pour les élèves actuellement en 2nde GT
(…)
https://www.snes.edu/Libre-choix-dans-la-limite-des-places-disponibles.html
Après avoir rappelé la communication habituelle, qui ne trompe que ceux qui veulent y croire, le ministère tombe donc le masque :
» Le proviseur détermine l’organisation de son établissement en fonction des demandes formulées (…) par les élèves (…) et des contraintes spécifiques propres à l’établissement qu’il dirige. En fin d’année, il ouvre les groupes nécessaires, dans la limite de ses contraintes d’organisation, pour satisfaire les demandes exprimées (…) « .
Ainsi donc, on ne pourra pas vraiment satisfaire toutes les demandes » libres » des élèves. Le ministère est même assez précis :
» Dans certaines situations, qui doivent rester exceptionnelles, il peut s’avérer impossible de satisfaire le choix des élèves au sein des établissement :
si la composition des choix n’est pas possible compte tenu des contraintes d’organisation de l’établissement ;
si la capacité d’accueil est atteinte dans un enseignement et qu’il n’est plus possible d’ouvrir un groupe supplémentaire ;
si un des enseignements demandés n’est pas proposé dans l’établissement «
Libre choix des spécialités et de leur combinaison personnalisée ? Dans la limite des places disponibles et de l’organisation des emplois du temps !
Que faire des surnuméraires ?
Une fois cette règle posée, les choses sont claires : certains élèves se verront opposer un refus à leur choix de spécialité, et devront donc être affectés dans une autre spécialité : leur 4ème vœu dans l’établissement, ou une spécialité dans un lycée voisin, ou une spécialité proposée par le CNED, ou enfin » un autre enseignement de spécialité (…) qui ne figurait pas dans les 4 souhaits formulés par l’élève « . Le » libre choix « … d’aller là où il y a de place, et tant pis si ce n’est pas ce que l’élève souhaitait !
Comment opérer le tri de ces élèves surnuméraires ? » Les élèves sont départagés selon les recommandations du conseil de classe et les notes de l’élève en lien avec les enseignements de spécialité demandés « . Autrement dit, les spécialités très demandées trieront pour garder les meilleurs élèves, et les spécialités les moins demandées serviront de » réceptacle » pour les élèves les plus faibles… Et donc cette réforme remet en cause les hiérarchies entre formations… Du moins si on y croit !
Scolarisation à 3 ans ? pas de moyens dédiés mais un cheval de Troie pour faire financer les écoles privées :
» Articles 2 à 4bis : scolarité obligatoire dès 3 ans
https://www.snes.edu/Projet-de-loi-Ecole-de-la-confiance.htm
Cette mesure concernant l’École obligatoire à 3 ans est essentiellement un affichage, puisque plus de 98 % des enfants de cet âge sont déjà scolariés. Elle ne donne pas d’outils supplémentaires pour réussir réellement la scolarisation à l’école maternelle. Par contre, le projet de loi montre qu’elle est prétexte à ouvrir la voie au financement des écoles privés sous contrat. Avec la FSU, le SNES rappelle son attachement à la défense du service public de l’Éducation. Il craint que ce financement de l’école maternelle privée ne renforce la concurrence entre les enseignements publics et privé. Cet effet d’aubaine aura des conséquences défavorables sur la mixité sociale au sein des écoles et donc sur la démocratisation de la réussite scolaire. «
Vers un Bac Européen dans des établissement internationaux pour les enfants des riches
https://www.snes.edu/Projet-de-loi-Ecole-de-la-confiance.html
« Article 6 : EPLEI, établissements publics locaux d’enseignement international
Ces établissements ont vocation à scolariser des élèves bilingues de la maternelle au lycée. Il seront financés en partie par des fonds privés, pourront déroger à l’organisation pédagogique habituelle. Le rôle des personnels dans le Conseil d’administration est prévu pour être minoré. Établissements élitistes au fonctionnement proche de l’enseignement privé, ils constituent un cadeau de l’État aux plus aisés. Ils ne pourront que contribuer à dégrader encore davantage la mixité sociale et scolaire qui fait défaut à l’enseignement public français, et que pointent les études internationales comme responsable de ses résultats médiocres. Ces établissements sont un signal supplémentaire du mépris du gouvernement pour la scolarité des enfants issus des milieux populaires. «
Et des établissements du socle à l’enseignement dégradé et basique pour les enfants des classes populaires
Article 6 quater : les établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux
Aux antipodes des EPLEI, et introduit par le groupe LREM à la demande du ministre, cet amendement reprend une recommandation d’une mission parlementaire d’août 2018 sur les directions des écoles : permettre le regroupement d’écoles avec un collège au sein d’un même établissement, à l’initiative des collectivités territoriales de rattachement. Selon l’exposé de l’amendement, « ces structures permettront de faciliter le parcours et le suivi individuel des élèves de la petite section à la Troisième. Elles permettront aussi à de très petites écoles […] d’atteindre une taille critique rendant possibles certains projets pédagogiques, ainsi que des collaborations entre enseignants de cycles différents ». Si les difficultés des écoles rurales servent de prétexte et que le texte insiste sur une spécificité de chacun des degrés, il s’agit bien d’institutionnaliser une « école du socle » pour les territoires défavorisés, avec un conseil d’administration et un conseil pédagogique communs. Pour les députés de la majorité, la mutualisation de personnels administratifs facilitera « les échanges, les innovations et les expérimentations » au niveau pédagogique. Un directeur adjoint au principal du collège remplacera le directeur d’école pour assurer la coordination entre premier et second degré, ainsi que le suivi pédagogique des élèves et l’animation du conseil des maîtres.
Alors qu’aucune expérimentation d’école du socle n’a fait l’objet d’une évaluation, il s’agit de faciliter les services partagés primaire-collège, les regroupements de niveaux, la bivalence… Vieilles lunes qui continuent d’être vendues comme des innovations en éducation prioritaire et dans les collèges isolés. Il n’a jamais été prouvé que ce type d’organisation améliorait la réussite des élèves. Il s’agit d’une modification profonde du système scolaire et d’une mise en cause du statut des enseignants qui ont pour objectif de construire, sur fond d’économies budgétaires, une école inégalitaire dont les élèves des espaces isolés et des milieux populaires feront les frais.
Voir aussi analyse : ici et modèle de lettre à faire parvenir aux élus.
https://www.snes.edu/Projet-de-loi-Ecole-de-la-confiance.html
Plutôt que le rétablissement d’un recrutement valorisant, des statuts précaires pour faire travailler les « pions » comme profs
» Article 14 : pré-professionnalisation pour les AED
https://www.snes.edu/Projet-de-loi-Ecole-de-la-confiance.html
Avant même l’adoption et la publication de la loi, le Comité technique ministériel (CTM) du 30 janvier devait étudier un projet de décret modifiant le statut des AED, afin de créer des « contrats de pré-professionnalisation » dès la rentrée 2019. La présentation a été reportée à la demande des représentants de la FSU, compte tenu des annonces faites par ailleurs par Jean-Michel Blanquer sur la place du concours (envisagé en M2 et non plus en M1). Le ministre prétend faire de ces contrats un levier d’attractivité du métier, et les députés de la majorité y voient, pour reprendre les mots de l’une d’eux, l’occasion pour les étudiants de recevoir « une formation concrète ». Cette appréciation est révélatrice de la conception qu’ont nos gouvernants de la formation des enseignants : elle renvoie toujours au terrain et à la mise en situation. Ainsi les AED engagés sous ce nouveau statut pourraient-ils être mobilisés pour des remplacements ponctuels en M1, à un tarif défiant toute concurrence. En L3, les étudiants ne seraient pas laissés seuls en responsabilité d’élèves, contrairement à ce que le ministère envisageait il y a quelques mois. Les interventions de la FSU lui ont fait entendre raison. La rémunération envisagée (de l’ordre de 700 euros mensuels en L2, pour 8 heures par semaine) est probablement plus attractive que ce que le ministère envisageait au départ, mais elle n’empêchera pas les étudiants non boursiers d’avoir à se chercher d’autres ressources. Est-ce la manière de leur garantir une bonne formation, et le succès au concours ? On en doute. On doutera plus encore de l’efficacité de la mesure sur l’élargissement du vivier lorsqu’on saura qu’en 2019, elle concernera 1 500 étudiants de L2 (3 000 en 2020), qui bénéficieront d’un contrat pour trois ans : il s’agira donc d’un flux annuel de 3 000 candidats (s’il n’y a pas de démission, parce que le ministère n’envisage pas de recruter en L3 ou en M1). À comparer aux plus de 180 000 qui s’inscrivent aux concours externes du premier et du second degré, et qui ne suffisent pourtant pas à pourvoir tous les postes. On parle donc de bout de chandelles. «