Qu’il s’agisse de la réforme territoriale sous toutes ses facettes (Etat, collectivités territoriales), ou de la territorialisation de la santé, la restructuration des services produit partout ses effets catastrophiques.
http://france3-regions.francetvinfo.fr/rhone-alpes/2015/06/22/reorganisation-des-services-de-l-etat-en-rhone-alpes-auvergne-753219.html
méthodes brutales et antidémocratiques
Dans la fonction publique de l’Etat, le décret du 7 mai 2015, portant « charte de la déconcentration », permet aux préfets d’être « chargés, dans leur circonscription administrative, de la mise en œuvre des mutualisations nécessaires à un meilleur fonctionnement des services déconcentrés » (article 13). Le préfet peut également « déroger aux règles fixées par les décrets relatifs à l’organisation des services déconcentrés de l’Etat et à la répartition des missions entre les services » (article 16). En clair, les préfets sont chargés de restructurer les services de l’Etat et serrer davantage la vis de l’austérité.
Derrière la Réforme Territoriale de l’Etat (Réate) prenant appui sur les lois NOTRe (nouvelle organisation territoriale de l’Etat) même pas encore votée, et les loi MAPAM (disparition des communes et départements au profits d’euro-métropoles) et de la loi de fusion de région, se cachent un vaste plan social dans la fonction public.
Le gouvernement affiche une volonté de « dialogue social ». Vaste blague cynique. Il ne s’agit que d’occuper les travailleurs des services publics avec quelques réunions sans contenu alors que les décisions sont prises ailleurs pour les empécher de réagir, pour le faire entrer dans le broyeur de ces réorganisations. Méthodes criminelles dont on sait les effets : des milliers d’individus brisés, dont certains ne se relèveront pas. La violence du système capitaliste dans toute sa brutalité.
Blitzkrieg contre les services publics, plan social dans la fonction publique
Dans ces conditions, les diagnostics territoriaux des différentes régions, établis par les préfets, proposent systématiquement davantage d’interministérialité, de mutualisations, de fusions et de transferts de missions.
C’est une nouvelle vague de concentration des services publics de l’état au niveau des quelques euro-métropoles mis sous la coupe des prefets dont les objectifs prioritaires sont la réduction des budgets et des effectifs. Fusions et transferts de missions, mutualisations/externalisation, et interministérielle faisant voler en éclat les statuts sont la règle. Des milliers de postes vont être supprimés, des dizaines de milliers de fonctionnaires et leurs familles confrontés à des mobilités forcées, le tout sous la menace de la loi mobilité permettant de faciliter le licenciement d’un fonctionnaire dans le cadre de ces « ré » organisations.
Dans la fonction publique territoriale, la réforme territoriale et le projet de loi NOTRe (Nouvelle Organisation Territoriale de la République) se traduisent par la réorganisation de nombreux services qui va impacter directement les agents et augmenter des inégalités entre territoires :
- Avec les fusions des services, les mobilités forcées ;
- Avec des pertes massives d’emplois de personnels territoriaux et par des atteintes fortes aux droits collectivement acquis des agents ;
- Avec le plan d’économies de 11 milliards pour les collectivités territoriales d’ici 2017, qui poursuit la réduction des investissements locaux, des effectifs et de la masse salariale sans se préoccuper des besoins des populations.
Le gouvernement met en place des « maisons des services aux publics »… ouvertes aux privés. Euro-austérité et subvention à dizaines de milliards des profits des multinationales du Capital oblige, le maillage de proximité des services publics a été liquidé, provocant la colère des usagers. Dès 1998, l’État a donc créé le concept de « maisons de services publics ». Celles-ci regroupent sous le même toit quelques guichets de services publics, n’ouvrant souvent que quelques heures par semaine. Jusque-là toutefois, le terme de « services publics » demeurait encore au fronton de ces maisons, ersatz des implantations de services publics disparues. Depuis 2010, les gouvernements du Parti Maastrichien Unique ont transformé ces structures en « maisons de services au public ». Exit la notion de « services publics », comme dans la directive européenne des « services » de 2006. Ces maison des services aux publics – dont les frais de fonctionnement sont financés par la collectivité – abritent donc des grands opérateurs privés (privatisés en vertu des directives européennes par exemple !). Bien sûr ces maisons aux services à la carte (aux mépris de l’égalité d’accès des citoyens aux services publics) devront aussi réspecter les règles de la concurrence commerciale édictée par… l’Union Européenne. C’est qu’il s’agit en fait que les intérêts privés puissent mettre la main sur ces juteux marchés (estimé à plusieurs milliards d’euros).
Dans la fonction publique hospitalière, en application des diktats de l’UE exigeant explicitement à la France de réduire ses dépenses de santé publique (lire ici) c’est un plan triennal de 3 milliards d’économies qui est imposé aux hôpitaux qui va se traduire par la suppression de 22 000 emplois. Le projet de loi santé prévoit notamment, avec la » territorialisation de la santé « , l’obligation pour les hôpitaux de se regrouper, dans l’objectif de réduire encore le nombre de postes ; aggravant ainsi les conditions de travail et de prise en charge des patients.
Ce sont donc bien les trois versants de la fonction publique qui sont dans le collimateur de l’eur-austérité et confrontés à la même logique de « réforme territoriale ».
Réagir et agi !
Dans les services publics, la colère monte : mouvement social à l’INSEE, mobilisation au sein des DREAL, grèves des hopitaux publics et dans les collectivités territoriales le 25 juin dernier…
C’est tous ensemble et en même temps qu’il faut agir !
Zanni – Lundi, 21 Septembre, 2009 – L’Humanité
Travail. Retenu par la direction, un document élaboré il y a un an révèle un nombre effarant de gestes suicidaires parmi les agents du ministère.Le ministère de Jean-Louis Borloo serait-il aujourd’hui un second France Télécom ? On peut le craindre à la lecture d’un document que {l’Humanité} s’est procuré. Il porte en titre « Éléments de connaissance et d’approfondissement pour la prévention des crises suicidaires » et a été adopté à l’unanimité le 1er octobre 2008 par le Comité central d’hygiène et sécurité (CCHS) du ministère de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de la Mer. Il est le fruit de deux ans d’un travail commun de représentants de la direction, des syndicats, et de médecins experts sur le suicide au travail. Depuis un an, il est retenu au secrétariat général du ministère. Ce document reconnaît « qu’aucune évaluation à ce jour ne peut informer sur le nombre réel de suicides par an dans cette institution ». Mais il avance des chiffres effarants : chez les agents de l’équipement et de l’environnement, le nombre de tentatives de suicide par an serait de 150 à 250 et le nombre de décès par suicide serait de 15 à 25 ! Le rapport indique que le taux annuel de suicides parmi les agents du ministère serait de 25/100 000, sensiblement supérieur à celui de la population française en général.
Ces chiffres sont hélas corroborés par des enquêtes récentes. En 2006, 18 décès par suicide d’agents du ministère sont recensés. La CGT fait état de 67 décès par suicide depuis 2004, dont 26 en 2008 et 11 depuis le 1er janvier 2009. Depuis 2004, le syndicat demandait la création de ce groupe de travail sur le geste suicidaire. Au départ, cette demande s’est heurtée au refus de la direction de recenser les suicides, arguant qu’il s’agissait d’un acte personnel. C’est à la ténacité des élus CGT au CCHS qu’on doit la création de ce groupe de travail en 2006. « L’un des mérites du document élaboré par le groupe de travail sur les gestes suicidaires, explique le secrétaire général de la fédération, Jean-Marie Rech, est qu’il préconise une enquête lorsqu’on a connaissance d’un suicide ou d’une tentative. Tant que la circulaire est bloquée, il n’y a pas d’enquête. » Du côté du ministère, on affirme que des circulaires seront proposées au CCHS début octobre, qu’il n’y a aucun blocage mais « une difficulté à traduire le document en circulaires ». Notre interlocuteur, qui n’a pas souhaité être cité, affirme « qu’il n’y a pas forcément de liens avec le travail » et qu’on ne constate pas « la montée de phénomènes inquiétants ».
pression hiérarchique, stress
Alors, y a-t-il corrélation entre le taux anormalement élevé de suicides dans les services de l’équipement et de l’environnement et les conditions de travail ? Le secrétaire général de la fédération FO, Jean Hedou, estime que « les réorganisations de services en cours, les mobilités géographiques ou fonctionnelles, imposées, annoncées ou effectives, la pression hiérarchique et le stress ainsi généré constituent des facteurs aggravants et parfois déclenchants ». Son syndicat relève qu’il y aurait eu au moins 3 décès par suicide sur le lieu de travail en 2008 et 1 en 2009. Même analyse du côté la CGT. Jean-Marie Rech affirme avoir porté à la connaissance du CCHS le contenu de deux lettres de suicidés mettant en cause explicitement les conditions de travail dans la détermination de leur geste. « Le dernier suicide connu est le fait d’un chef de service de La Rochelle qui élevait seul sa fille handicapée. On lui avait annoncé que, dans le cadre de la réorganisation de son service, il était transféré à Bordeaux. »
Quant au document lui-même, il ne constitue pas une enquête sur les raisons des suicides d’agents de l’équipement et de l’environnement. Mais il met en exergue les « causes précipitantes » : « Rupture de carrière ou dégradation d’itinéraire professionnel, manque de reconnaissance, épuisement professionnel, conflits éthiques sur la valeur du travail, perte de sens du travail. » Et surtout il livre en conclusion de cette analyse un verdict sans appel : « Il ne faut pas attendre la crise pour agir, il est indispensable de veiller à la promotion du bien-être au travail. »
Or c’est exactement une politique contraire qui est menée à l’équipement et à l’environnement comme dans toute la fonction publique.
35000 agents transférés aux départements
En 2004, les agents de l’équipement, qui forment le gros bataillon des 100 000 employés dépendant du ministère, ont subi la décentralisation. 35 000 d’entre eux ont été transférés aux départements. Et à partir de 2007, avec Nicolas Sarkozy, c’est la révision générale des politiques publiques (RGPP), une politique de réorganisation qui ne répond qu’à un seul objectif : faire baisser la masse salariale dans la fonction publique avec le non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partants à la retraite. La loi sur la mobilité adoptée cet été, qui stipule que le fonctionnaire dont le poste serait supprimé et qui refuserait trois propositions d’emploi pourrait être exclu de la fonction publique, constitue pour les salariés une menace supplémentaire. Même s’il se refuse à toute comparaison avec France Télécom, Nicolas Baille, secrétaire adjoint de la fédération CGT, assure « qu’à force de regroupements des directions, les agents du ministère sont dans une spirale de réorganisations des services, avec des mobilités, des mouvements, des déménagements imposés. Au point qu’ils perdent le sens de leur travail ». Et de leur vie ?