Par Georges Gastaud, auteur du Nouveau Défi léniniste (Delga 2017)
Jeune ouvrier pâtissier devenu, aux côtés du mineur Maurice Thorez, du cheminot Sémard et du métallo Benoît Frachon, l’un des grands dirigeants du Parti communiste français alors combatif et révolutionnaire, Jacques Duclos est décédé le 25 avril 1975.
UNION DES DEUX DRAPEAUX
On ne lui doit pas seulement le mérite, totalement étranger aux dirigeants actuels du PCF-PGE, d’être resté fidèle sa vie durant à la classe ouvrière, mais aussi celui d’avoir profondément innové, dans le sillon du marxisme-léninisme et non pas en s’en écartant de manière démagogique à la manière des opportunistes et des révisionnistes à la Robert Hue. C’est notamment Duclos qui, au grand meeting du 14 juillet 1935 organisé au Stade Buffalo de Paris pour lancer le Front populaire, lança successivement au micro la Marseillaise et l’Internationale tout en appelant les ouvriers parisiens à unir le drapeau tricolore de Valmy au drapeau rouge orné de l’emblème ouvrier et paysan. Au VIIème congrès de l’Internationale communiste (1935), Dimitrov devait d’ailleurs rendre un hommage appuyé à Thorez et au Parti communiste français pour avoir les premiers expérimenté la stratégie victorieuse de Front antifasciste, populaire, patriotique et anti-impérialiste. Cette stratégie, l’Internationale allait la généraliser avec succès et sur d’indépassables bases de principe pour construire les fronts antifascistes nationaux (dont sortira le CNR français) et la grande coalition antihitlérienne. Laquelle viendra à bout du Troisième Reich sous l’impulsion de l’Union soviétique. Une stratégie aussi distante de l’isolement sectaire du gauchisme que de l’union sans principe derrière n’importe la social-démocratie, comme s’y appliquent de manière totalement démoralisante les directions opportunistes successives des PC dénaturés issus du ruineux « eurocommunisme » des années 70…
CHEF DE FILE DU PARTI CLANDESTIN LUTTANT SUR LE SOL FRANCAIS DURANT TOUTE LA GUERRE
C’est du reste Duclos qui, avec l’aide de Benoit Frachon et de Charles Tillon, animera la lutte clandestine du PCF de 1939 à 1945 sans jamais quitter le sol national et en supportant en permanence l’énorme tension d’un combattant en chef menacé d’arrestation, de torture de de mort s’il était pris. C’est lui qui présidait l’Assemblée nationale en 1945, quand le « Parti des Fusillés » était le premier parti de France et que ses camarades Thorez, Billoux, Wallon, Casanova, Croizat, Paul, donnaient à la classe ouvrière et à la République renaissante les plus grandes avancées de son histoire, nationalisations, statuts, conventions collectives, code du travail protecteur, Sécu, retraites par répartition, etc., bref tout ce que les Sarko, Hollande et autre Macron s’emploient désormais à casser pour le compte de l’UE avec le secours de la fausse gauche bêlant après l’introuvable « Europe sociale ».
C’est encore Duclos qui, durant la guerre froide, et alors que Maurice Thorez devait parfois soigner sa grave maladie hors de France, dut tenir le grand choc de la guerre froide et des guerres coloniales. Il mena courageusement la bataille contre la Communauté Européenne de Défense, cette première formule d’armée européenne arrimée à l’OTAN qui était à la fois destinée à relancer la militarisation de l’Allemagne et à préparer la troisième guerre mondiale antisoviétique sous l’égide de Washington. Ce climat anticommuniste exacerbé valut du reste à Duclos d’être emprisonné durant l’épisode ridicule – pour ses persécuteurs! – du prétendu « complot des pigeons ». Une intense campagne de solidarité fut alors menée par le PCF et la JC et elle obtint assez vite la libération de notre camarade qui, durant la période qui suivit, sut à la fois prendre la défense des peuples colonisés par la France réclamant leur indépendance, et défendre l’indépendance française contre sa néo-colonisation rampante par les Etats-Unis, leur politique agressive et leur invasion culturelle insidieuse. Sans oublier l’imposant combat pour la paix mondiale mené par le PCF d’alors sous l’égide de l’Appel de Stockholm et sous le symbole ô combien actuel de la Colombe figurée par notre camarade Pablo Picasso (inlassablement traîné dans la boue aujourd’hui, comme Aragon et Eluard ou Joliot-Curie, les grands intellectuels communistes de la période…).
CANDIDAT COMMUNISTE PERFORMANT AUX ELECTIONS PRESIDENTIELLES DE 1969
C’est encore à Duclos que le PCF demanda en 1969 de le représenter au premier tour des élections présidentielles où il obtint le score remarquable de 21%, manquant de peu le second tour du fait des candidatures de division, non seulement du socialiste Defferre flanqué de Mendès-France, mais du gauchisme anticommuniste représenté par Laguiller, Rocard et Krivine. Il est permis de rêver à ce qui se fût produit si Duclos avait atteint le second tour face à Pompidou en devançant le « centriste » pro-OTAN Poher, le PCF encore officiellement marxiste-léniniste de l’époque devenant alors officiellement la force n°1 de l’alternative au pouvoir du grand capital…
OUVRIER FIDELE A SA CLASSE ET FIN INTELLECTUEL MARXISTE
Impossible pour finir de ne pas évoquer le grand tribun successeur de Jaurès qui faisait vibrer les foules ouvrières, l’homme simple qui ne faisait qu’un avec son épouse Gilberte, camarade héroïque elle aussi, le grand intellectuel communiste qu’était devenu Duclos à force de travail : un homme qui est tout-à-fait capable d’évoquer la physique quantique et la cosmologie sur des bases parfaitement dialectiques et matérialistes dans son livre « Ce que je crois » publié dans les années 1970 avec pour but de populariser la politique du Parti.
PATRIOTISME FRANCAIS, REFUS DE L’ANTISOVIETISME ET DEFENSE DE LA PAIX NE FONT QU’UN!
Bien entendu, la réaction et les révisionnistes tentent aujourd’hui d’occulter sa figure, voire celle de Maurice Thorez, de mettre en avant s’ils ne peuvent faire autrement Marcel Paul, créateur d’EDF, Ambroise Croizat, créateur de la Sécu, alors que ces deux grands militants travaillaient en parfaite entente avec Thorez (créateur de Charbonnages de France, du statut des mineurs, du statut des fonctionnaires et de la première forme de SMIG, qui dit mieux?) et avec Duclos qui orchestrait les réformes progressistes à partir de son poste de président de l’Assemblée nationale malgré les attaques incroyablement violentes de la réaction d’alors. Bien sûr, les mêmes individus, notamment ceux qui ont détruit et dénaturé le PCF au nom de la « mutation » après l’avoir entraîné à soutenir le liquidateur capitulard Gorbatchev, vont « déplorer » le fait que Duclos et Thorez, qui n’en était pas moins de grands patriotes français, n’aient jamais reculé sur la nécessité de combattre l’antisoviétisme au point de s’écrier, en pleine guerre froide menant à la guerre nucléaire antisoviétique, « le peuple de France ne fera jamais la guerre à l’Union soviétique » dont De Gaulle lui-même avait du reste déclaré en 1944 qu’elle « avait joué le rôle principal dans notre libération ». Peine perdue: pour les vrais communistes qui ne sont pas ceux qui, à l’instar de Roussel et de Chassaigne, eussent voté au Parlement l’envoi d’armes lourdes au régime pronazi, fauteur de guerre continentale et hyper-atlantiste de Zelensky, cette capacité à défendre à la fois le drapeau rouge international des ouvriers et le drapeau tricolore de la Nation, l’indépendance de la France et la solidarité internationale avec les peuples construisant le socialisme, reste une source profonde d’inspiration quotidienne.
Honneur à Jacques Duclos!
Georges Gastaud, fils de Résistant gaulliste, philosophe marxiste, militant de la Renaissance Communiste.
Merci cher Georges, grâce à toi et à ton texte je viens de revivre une période qui a énormément compté dans ma vie, comme probablement dans la vie d’autres communistes, avec qui à ce moment-là je militais et luttais avec l’espoir et la conviction que ce MONDE MEILLEUR pour lequel nous nous battions, il était vraiment possible de l’atteindre.
C’est à cette époque-là que Jacques Duclos est venu, au Muy, déjeuner chez mes parents et la lecture de ton article a ranimée chez moi le souvenir de ces années-là ou nous avions tous la conviction que nous étions devant la porte de ce pourquoi nous nous battions.
Merci Georges et Merci encore, d’avoir rallumé chez moi et probablement chez d’autres Anciens aussi l’espoir pour lequel nous nous battons.
Léon LANDINI Président d’Honneur du PRCF. Résistant FTP-MOI.