Loi Dussopt, AP 2022, circulaires Philippe et Castaner, les attaques en catimini sont cependant massives contre les services publics de l’État.
La loi Dussopt est la boîte à outils pour mener le programme AP 2022 de suppression de 120 000 postes de fonctionnaires et de libéralisation, fermetures et privatisations massives des services publics, tout particulièrement ceux de l’État. Cette loi organise la précarisation massive des fonctionnaires et agents publics et la fin, de fait, des statuts particuliers de la fonction publique, de la transparence dans la gestion des postes et carrières. En violation du principe d’égalité de traitement.
Analyse de deux exemples avec les services départementaux interministériels, les DDI, c’est-à-dire les DDT(M) du Ministère de l’Écologie et de l’Agriculture, les DIRECCTE dépendant de Bercy et de l’Industrie et comprenant les inspecteurs du travail. Et on pourrait multiplier les exemples avec les DDJSCS (Jeunesse, sports et cohésion sociale, DDPP (Protection des populations), les DDFiP (impôts) etc…
Le Ministère de l’Écologie et de l’Équipement en voie de disparition !
Le ministère de la Transition écologique « est à la veille de l’extinction, et s’il tient, c’est parce que ses agents tiennent contre vents et marées », juge Laurent Janvier, pour la fédération Équipement- Écologie de FO.
Les syndicats du Ministère de la Transition écologique estiment ne pas être écoutés par François de Rugy.
« Le projet de loi de réforme de la fonction publique porte en lui les germes de la fin des compétences de l’État », craint Simon Lery, du syndicat SNE-FSU. Le texte prévoit notamment un recours accru aux contractuels, lesquels ne bénéficieront pas du statut de fonctionnaire qui permet de résister aux pressions politiques, selon le syndicaliste. Or, cette mesure n’est qu’une étape d’un mouvement plus large.
Prise de pouvoir des Préfets
Les syndicats dénoncent aussi une récente décision qui fait passer la gestion des DDI dans le giron du Ministère de l’Intérieur et non plus du Premier ministre. « Les Préfets ont mis la main sur les services de l’État, ce qui pose la question de l’indépendance des agents », juge Laurent Janvier pour Force ouvrière. « Jusque-là, il y avait la possibilité d’avoir des lieux où on disait : « ce projet n’est pas possible ». Désormais, toute décision sera liée à l’avis du Préfet et aux pressions qu’il subit. » « On sait bien qu’avec lui, c’est rarement l’environnement qui gagne », abonde Simon Lery.
Autre mesure récente qui fait bondir les syndicats : l’expérimentation territoriale d’un droit de dérogation par une quinzaine de Préfets (1), qui pourrait bientôt être généralisée. Le préfet peut ainsi déroger à des normes relevant de divers domaines (environnement, agriculture, forêts, emploi, aménagement du territoire, construction, logement, urbanisme, protection du patrimoine culturel, activités sportives, etc.). Dans les faits, « 80 % des sujets concernent nos deux ministères et les architectes des bâtiments de France », assure Laurent Janvier.
– 40 % d’effectif depuis 2007
Cette « préfectoralisation des politiques » s’ajoute à une forte diminution des effectifs que connaît le ministère ces dernières années. En 2019, ce sont 1300 postes qui doivent être supprimés, après 1400 en 2018. Soit « une baisse de 40 % des effectifs » depuis la création du « grand ministère » voulu par Jean-Louis Borloo en 2007, au moment du Grenelle de l’environnement. « Chaque année, nous sommes soit médaille d’or, soit médaille d’argent » des ministères perdant le plus d’effectifs, ironise Laurent Janvier. Résultat : certains agents ont connu trois réaffectations en moins de dix ans, ce qui entraîne un mal-être au travail, voire des suicides. Fabienne Tatot, pour la CGT, en dénombre au moins « un par mois depuis fin 2018 ».
Simon Lery dénonce « la contradiction » qu’il observe entre l’affichage de l’exécutif sur la biodiversité (lire sur AEF info) et « la baisse des moyens » dévolus au futur Office Français pour la Biodiversité (issu de la fusion de l’AFB et de l’ONCFS). En tout, 200 emplois devraient être supprimés d’ici à 2022. Or, le gouvernement affiche « l’objectif de faire plus de contrôles ! On ne sait pas par quel miracle on y arrivera ».
S’agissant du 11e parc national des forêts de Champagne et Bourgogne, les syndicats craignent qu’il soit créé uniquement à partir des neuf emplois déjà existants pour la phase de préfiguration.
« On bascule dans un monde différent »
Quant aux Voies navigables de France, ses moyens sont tellement réduits que l’établissement a adopté un « plan de dénavigation« , dénonce Malvina Simon, du Syndicat national des ingénieurs des travaux publics et des collectivités territoriales. Ce qui signifie que certains sites ne vont bientôt plus être ouverts à la navigation.
« Entre la prise en main des services de l’État par les Préfets et le développement des établissements publics, dans lesquels il est plus facile de recruter des contractuels, on bascule dans un monde différent », juge Francis Combrouze, pour la CGT. « On est à la veille de l’extinction et si le ministère tient, c’est parce que ses agents tiennent contre vents et marées », dénonce Laurent Janvier.
Refusons le démantèlement des services du Ministère du Travail!
L’appel de l’intersyndicale du Ministère du Travail
Signer la pétition de soutien
Les services déconcentrés du Ministère du Travail et de l’Emploi (et d’autres administrations) assurent des missions essentielles à destination des salarié.e.s et demandeur.euses d’emploi. Déjà touchés par une diminution d’effectifs de 20% entre 2009 et 2017, deux projets de circulaire prévoient le démantèlement de ces services et la disparition des unités départementales.
La fin des unités départementales et des DIRECCTE, cela signifie :
- Des suppressions massives de postes au détriment des salariés ! des postes à l’inspection du travail vont encore être supprimés cette année : il reste moins de 2000 agents de contrôle pour toute la France. L’objectif du gouvernement est d’arriver à un ratio d’1 agent pour 10000 salarié-e-s soit 2 millions de salariés exclus d’un recours auprès de l’inspection du travail !
- La perte pure et simple de certaines missions, telles que la Main d’œuvre étrangère (qui autorise le travail des salariés étrangers par exemple) qui sera rattachée à la préfecture…
- Des services dédiés à la politique de l’emploi en difficulté alors que les besoins et les sollicitations sont considérables, que ce soit pour l’insertion des publics en difficulté ou la gestion des mesures d’accès à l’emploi. Ils sont menacés par l’annonce d’une nouvelle vague de décentralisation qui augure une inégalité de traitement entre les territoires.
- Un service gratuit de renseignement du public en droit du travail perdu au sein d’une nouvelle direction interministérielle aux contours et moyens flous.
- Des services supports, qui viennent en soutien de tous ces métiers, transférés aux préfectures dans un objectif de diminution d’effectifs !
Il n’y a pas de magie… avec moins d’agents, c’est forcément moins de service public moins de contrôle de la réglementation du travail, des salariés moins protégés, moins de renseignements au public, moins d’aide à l’accès à l’emploi pour les publics les plus en difficultés. Ce sont aussi les conditions de travail qui se dégradent, parfois de façon dramatique puisque les suicides et tentatives de suicides se multiplient au sein de ces services.