En finir avec l’instrumentalisation du collège unique, collège démocratique et avec l’obsession libérale et européenne de « l’Ecole du Socle ».
Le niveau scolaire des jeunes français ne cesse de s’effondrer depuis 1995. Cela n’est pas un mantra décliniste, c’est un constat objectif, mesuré par toutes les études scientifiques nationales et internationales (Cedre, TIMSS, Pirls, PISA).
Ainsi de “nation de tête” en mathématiques en 1995, la France est maintenant l’une des dernière du classement. De même, en 2001,parmi les quinze pays de l’actuelle Union européenne qui avaient participé à l’évaluation des compétences en lecture (Pirls) au cours moyen: la France se situait alors au dixième rang. En 2006, elle n’était plus que quatorzième sur 18, puis dix-huitième sur 22 en 2011, puis, en 2016, vingtième-et-unième, devant Malte et la Belgique francophone seulement. En sciences, elle figure au dernier rang.
Les causes et les responsables de ce désastres sont connus, ils ne s’agit ni des enfants immigrés ni des enseignants prétendument toujours en grève alors que malheureusement, nos collègues sont si réticents à “fronder” et à se mobiliser syndicalement :
- La stratégie européenne de Lisbonne pour l’Education de 2000 prolongée depuis par Europa 2020 a conduit à l’instauration d’un système scolaire à plusieurs vitesses caractérisé par :
- l’éclatement du cadre national des enseignements et des diplômes (LMD, LRU, disparition du Bac national)
- la mise en œuvre d’un “socle de compétences”, véritable Livret ouvrier 2.0 minant l’enseignement disciplinaire et visant à développer la concurrence entre individus employables au rabais, tout cela au détriment d’une formation scientifique solide basée sur des connaissances disciplinaires.
- une stratégie éducative (dés-éducative?) mise en œuvre sans discontinuer par des ministres « de Gauche » ou « de Droite », tous inféodés à la Commission européenne. Allègre et Jospin, Lang, Fillon, Chatel, Peillon, Hamon, Vallaud-Belkacem, Blanquer et Ndiaye ont tous, non seulement validé les contre-réformes antérieures les plus désastreuses, mais supprimé les redoublements, réduit les dédoublements, supprimé les notes en primaire afin d’empêcher les parents des classes populaires de prendre conscience du désastre, bradé le DNB (contrôle continue à 15/20!!!) et le Baccalauréat transformé en formalité, le véritable tri universitaire s’effectuant à la discrétion des établissements d’enseignement supérieur via Parcours Sup. Dans le même temps la haute hiérarchie pléthorique et grassement payée pour obéir à leurs ordres (Recteurs, chefs de service au ministère, Inspection Générale, IA-IPR, IEN trop souvent aux ordres) s’attaquaient à l’enseignement rigoureux et scientifique des contenus disciplinaires, les remplaçant par de pseudo « compétences transversales » véritables coquilles vides ouvrant grand les bras à l’obscurantisme et à l’exploitation facile qui en découle. En finir avec la démonstration mathématique et avec la compréhension éclairée de la langue par la grammaire pour jouer à des escape games, voilà ce qu’ont imposé les tenants de la Stratégie de Lisbonne depuis vingt ans. Ils ont eu pour cela la bénédiction des “péda-gogos” (souvent véritables sociaux-traîtres du SGEN-CFDT ou de l’UNSA) et des Associations bourgeoises de parents trop heureux de voir leur enfant-roi, conforté dans ses illusions, revenir à la maison avec des “compétences vertes” sans savoir ni écrire, ni faire une liaison correcte, ni compter, ni connaître un tant soit peu l’histoire de son pays, faute d’avoir permis à leurs enseignants d’accomplir leur mission. Tout ce « beau-monde » s’unissant dans le mépris du professeur fonctionnaire statutaire et s’acharnant à le maltraiter, à le sous-payer, à l’injurier sans cesse dans les médias et à réduire ses droits alors qu’à travers eux se jouait l’avenir de la nation, l’égalité de traitement et la “bienveillance” véritable due aux élèves.
- L’euro–austérité imposée par le Traité de Maëstricht et le TFUE (pourtant refusé démocratiquement par le NON du peuple français à la constitution européenne en mai 2005). Cette austérité indissociable du fonctionnement de la monnaie unique (monétarisme institutionnel, fin de la gestion nationale de la monnaie et du budget, exigence européenne permanente, exigée par Berlin, de réduire le “coût du travail” et les dépenses sociales) a conduit :
- à une augmentation dramatique du nombre d’élèves par division,
- à une paupérisation scandaleuse des enseignants au point que cette profession est maintenant en crise profonde : il n’y a plus suffisamment de candidats compétents pour enseigner, d’une part du fait du tarissement des viviers (Masterisation et perte de compétences), d’autre part du fait des salaires devenus proprement minables (gel du point d’indice pendant une décennie) et des conditions de travail très dures, indissociables à la fois du nombre d’élèves par classe et aussi, osons le dire, du laxisme systémique des responsables d’établissement pratiquant une culture du laisser-faire à l’égard des élèves et des parents perturbateurs et de malveillance, voire de maltraitance systématique à l’encontre des professeurs tentant de se faire respecter.
- La mise en concurrence imposée par Bruxelles dont les traités – contre lesquels “il n’y a pas de choix démocratique” selon Jean-Claude Juncker, l’ex-patron de la Commission de Bruxelles – , gravent dans le marbre le primat de la « l’économie de marché ouverte sur le monde où la concurrence est libre et non faussée », ce pilier de tous les traités européens qui impose totalitairement à chaque pays de l’UE une politique néolibérale de privatisation (pour la France, la poste, EDF et la SNCF avec les dramatiques résultats qu’on sait), de précarisation galopante de la classe ouvrière, des artisans et des paysans, et de laxisme total à l’égard des délocalisations provoquées par le grand capital “français” à l’affût de super-profits impérialistes. Cette mise en concurrence se traduit par :
- Le séparatisme entre Ecole publique républicaine et enseignement privé. Ce dernier, qui trie ses élèves et qui est honteusement subventionné par la collectivité, permet à la bourgeoisie de se réserver les meilleures places (Parcours Sup) tout en abimant l’enseignement des plus pauvres soumis à la pseudo-autonomie des établissements, c’est-à-dire à la fois à une privatisation de fait du fonctionnement de l’école et à des distorsions croissantes entre établissements fonctionnant dans des zones “riches” et établissements situés dans des zones de recrutement populaire ou carrément défavorisé. Cela confine au cynisme le plus total lorsque le ministre de l’Education Nationale Pap N’Diaye, faisant montre d’un mépris total pour les agents de son ministère, scolarise ses propres enfants à l’Ecole Alsacienne de Paris, c’est–à-dire dans un établissement huppé et privé de la capitale!
- Les attaques incessantes contre le Statut de la fonction publique hérité du ministre communiste de 1945, Maurice Thorez. Ainsi les agents de garderie sont maintenant recrutés en “Job-dating” (!) sur la base d’un entretien de 30 minutes pour occuper, sinon pour instruire, les jeunes de la classe ouvrière entassés dans les établissements périphériques (urbains ou ruraux).
Las, au moment même où, à l’image de l’hôpital public, l’Ecole de la République agonise sous ces coups, ses bourreaux profitent de la sidération induite par cette anti-thérapie de choc pour tenter de l’achever et comble du cynisme accentue le « prof-bashing » afin de s’en prendre au premier échelon du Second degré, celui qui accueille tout le monde sans trier : le collège.
Selon Pap N’diaye, le collège serait « l’homme malade » de l’Education. C’est faux et les statistiques le prouvent.
Alors que la France est aux derniers rangs de l’UE aux évaluations de la fin de primaire, elle se situe au onzième rang à la sortie du collège. Le collège permet donc aux élèves de pallier en partie les lacunes héritées d’une école primaire devenue, bien malgré les professeurs des écoles, le véritable laboratoire de la néolibéralisation de l’Ecole imposée par Bruxelles. Le collège n’est certainement pas malade, il est empoisonné et entravé dans son action, par la cure d’austérité, d’obscurantisme et de mise en concurrence que lui impose N’diaye dans la foulée de ses prédécesseurs.
De plus, le collège ne peut faire de miracles : alors qu’un tiers des élèves qui y rentrent en Sixième ne maîtrisent pas les bases pour y réussir, notamment en termes de lecture, de calcul et de maîtrise de la langue française, on y constate que la situation des élèves en difficulté à empiré par rapport à la fin du XXe siècle. Qui aurait pu le prévoir, pour citer Macron… alors que pourtant, nos syndicats ont crié casse-cou à chacune des contre-réformes qui ont accablé le système scolaire sous couvert de le “soigner” depuis près de trente années?
Qui, en effet, aurait pu prévoir qu’une politique scolaire visant à priver de moyens les établissements les plus défavorisés, à détruire la formation des maîtres avec une réforme de masterisation qui a été remaniée 11 fois en 11 ans (!), à laisser passer de classe en classe des élèves privés de connaissances scolaires et de possibilités d’un rattrapage culturel au sein de leurs familles, souvent éclatées et précarisées, conduirait à un tel désastre ? Qui ? Voir les tartuffes des grands médias comme le Figaro ou le Monde s’en inquiéter fait rire jaune tant ces grands médias conformistes et eurolibéraux ont été complices de cette casse géante, continue et acharnée menée par les ministres successifs du Parti Maëstrichtien Unique, qu’ils soient du PS, de la droite classique ou du pseudo “ni droite ni gauche” macroniste.
Les syndicalistes de lutte, et les militants progressistes au premier rang desquels les militants enseignants du PRCF n’ont cessé d’alerter et de lutter contre cette entreprise méthodique de démolition menée à l’échelle européenne, avec ce “plus”, concernant la France, qui a consisté à briser toutes les spécificités scolaires positives issues de notre histoire, qu’il s’agisse de la maternelle à la française ou, à l’autre bout des enseignements scolaires, de l’enseignement philosophique propre à notre pays et directement lié à la séparation laïque des Eglises et de l’Education nationale.
Alors alertons encore une fois. Si la Macronie s’en prend au collège, c’est dans un double objectif doublement réactionnaire.
- En finir avec le collège unique (dit “petit lycée”) que la bourgeoisie foncièrement anti-égalitaire n’a jamais digéré. Comment accepter que les enfants de prolétaires aient accès au même enseignement de qualité que les héritiers de la bourgeoisie qui fréquentaient seuls naguère les lycées, puis l’Université ou les Grandes Ecoles ? Ils n’ont donc de cesse de vouloir en finir avec ce collège pour revenir à une prétendue “école du socle” mélange de sous-Certificat d’Etudes primaires et de sous-Collège d’Enseignement Technique, cependant que les rejetons de la bourgeoisie se formeraient dans un parfait séparatisme dans des officines privées payantes à coup de certificats. A l’arrière-plan de ce projet pseudo-”bienveillant”, qui accompagne la casse des Lycées professionnels et des filières techniques au bénéfice de l’apprentissage patronal direct, la volonté acharnée de l’UE de “réduire le coût du travail” (en clair, les salaires) en rognant les qualifications arrimées aux diplômes nationaux que validaient jusqu’ici les conventions collectives nationales de branche du privé, ainsi que les concours de l’enseignement public attachés aux statuts nationaux. Bref, dénationalisation rampante de l’Education “nationale”, dénationalisation des diplômes et des formations (par ex. le bac délivré de facto au niveau local et en contrôle continu et la mise en place pan-européenne des “compétences rechargeables”, donc précaires comme l’emploi), tout cela sur fond d’affaiblissement systémique du Code du travail (lois El Khomri-Macron, puis Macron II) et des négociations nationales des salaires (système Ambroise Croizat, du nom du ministre communiste du Travail de 1945, le syndicaliste CGT qui inventa aussi la Sécu, les retraites par répartition et les comités d’entreprise du privé) au profit des “négociations d’entreprise” validées par les lois Macron et approuvées par la CFDT aux dépens de l’unité des travailleurs salariés, qui n’est forte que lorsqu’elle est nationalement, et si possible internationalement, unie.
- En finir avec les enseignants statutaires de Lycée et de Collège, certifiés et agrégés enseignant avec compétence une discipline universitaire clairement identifiée, pour les remplacer par un corps unique multidisciplinaire assurant la garderie et l’animation de la maternelle à la Troisième: en fait de modernité, c’est le vieux projet réactionnaire et corporatiste dit d’ “Ecole fondamentale” que portrait déjà le SNI-PEGC dans les années 1960 et dont le but était de réduire les exigences dans le premier degré public, de le couper du lycée comme c’était le cas avant les années 1980 et plus encore dans les années 1960 où moins de 20% d’une classe d’âge parvenait au lycée, donc au supérieur: bravo pour l’égalité des chances et pour l’ “ascenseur social” que par ailleurs, les hypocrites personnages au pouvoir, y compris ceux de la fausse gauche, se targuent de promouvoir!
Voilà pourquoi Ndiaye veut imposer des Professeurs des écoles pour enseigner dans le premier degré du Secondaire, alors même que c’est bien l’Ecole primaire qui à la suite de vingt ans de démolition organisée par les gouvernement européistes européistes, et malgré les efforts des professeurs d’école qui “rament”, comme leurs collègues du second degré, pour tenter encore d’instruire leurs élèves, n’arrivent plus, tous les chiffres l’établissent à profusion, à remplir sa mission, notamment, redisons-le, quant à la maîtrise élémentaire du calcul et des structures de la langue française (le gavage d’anglais “immersif” ne faisant qu’aggraver le problème en popularisant le “globish” sans former réellement des bilingues et tout en détruisant largement la maîtrise correcte d’un français de plus en plus abâtardi et appauvri). Gageons par ailleurs que cela permettra de payer de quelques cacahuètes d’heures sup’ et de quelques flatteries d’ego les enseignants peu regardants, et peu solidaires de leurs collègues du second degré ainsi humiliés et désavoués, qui accepteraient de participer à une telle forfaiture au lieu d’exiger, avec l’ensemble des acteurs du système éducatif, des moyens convenables et, pour commencer, l’abrogation des contre-réformes qui ont déstabilisé le premier degré, le collège et le lycée. Notons que cela sera d’autant plus facile, que les professeurs des écoles sont, scandaleusement, les enseignants les plus mal payés du système scolaire français, qu’ils ont sur le dos en permanence une inspection tâtillonne et souvent malveillante, et qu’on leur fait miroiter insidieusement la possibilité de coloniser le collège en contournant le CAPES et l’agrégation alors que tous, à tous niveaux, nous aurions grand besoin d’améliorer nos qualifications et nos formations élémentaires et continues.
Trois éléments prouvent la totale mauvaise foi et le plus profond cynisme de la Macronie (et de ces prédécesseurs de l’UMP de LR et du PS) : ils n’ont que faire des élèves en difficultés scolaires et n’ont que mépris pour les compétences des enseignants qu’ils soient PE, PLC ou PLP.
- La mise en place de 4e et 3e technologiques avait été suivie d’une amélioration des résultats scolaires de tous les collégiens, leur extinction sur l’autel de l’austérité européenne et du socle commun (Vallaud-Belkacem ayant fini d’enterrer le dernier fantôme de ce dispositif qu’étaient les classes de DP3) s’accompagnent logiquement d’un effondrement du niveau de tous, et en premier lieu, des plus fragiles scolairement.
- De même nos gouvernants successifs n’ont cessé de détruire l’enseignement adapté (SEGPA) destiné à des élèves en difficultés scolaires persistantes et dispensé par des professeurs des Ecoles titulaires d’une certification spécifique ainsi que des professeurs de Lycée professionnel au sein des collèges.
- Nos euro-proconsuls à la Blanquer viennent aussi de mettre en œuvre qui détruit l’enseignement professionnel au profit de l’apprentissage à l’allemande, livrant ainsi des jeunes de 15 ans à l’exploitation capitaliste directe en lieu et place de formation leur permettant de se réorienter au cours de leur vie professionnelle tout en disposant d’un niveau de culture générale et de retrouver le niveau bac et l’université s’ils le souhaitaient par la suite… Le pire étant que toute cette casse antirépublicaine s’opère, avec la grande compréhension de journalistes médiatiques complices (ou totalement ignorants des enjeux) au nom de l’ “égalité”.
Alors ne soyons pas dupes des cyniques manœuvres de division de ceux qui, comme Ndiaye, cassent l’Ecole de la République en prétendant la soigner comme ils ont “soigné” l’Hôpital public, la Poste, EDF, la SNCF, Renault, c’est-à-dire les services publics et le secteur public industriel issu de la Libération, en les détruisant à coups de contre-réformes, d’euro-privatisations et d’euro-délocalisation. Ce sont eux les responsables et si l’on veut retrouver l’Enseignement primaire et secondaire performant que nous avons connus jusque aux années 2000, non pour les restaurer à l’ancienne mais pour les projeter vers l’avenir sur des bases franchement républicaines, c’est à toute cette euro-mafia destructrice que nous devons tous ensemble demander des comptes, à eux et à leurs courroies de transmissions pléthoriques et surpayée qui à quelques exceptions d’autant plus admirables près, et de Recteurs-Attila en Inspecteurs consentants et d’Inspecteurs en Personnels de Directions et chargés de missions acharnés à casser les acquis syndicaux, n’ont cessé d’accumuler les primes (pour cela, il n’y a pas plus d’austérité que pour Mme von der Leyen, la patronne de la commission de Bruxelles qui perçoit 36 000 euros par mois) pour démolir l’Ecole, et derrière elle la Nation et l’avenir des jeunes, en mettant en œuvre la suicidaire stratégie anti-éducative de Lisbonne.