Le FN faisait déjà le grand écart depuis des années entre un électorat sudiste largement bourgeois, dans lequel grouillent les nostalgiques du colonialisme, et un électorat nordiste d’origine ouvrière qui vote FN en croyant ainsi punir la fausse gauche qui, en se ralliant au mensonge de l’« Europe sociale », a massacré les services publics, la protection sociale et le « produire en France ».
Cette déchirure sociopolitique, qu’essayait au moins de masquer la POSTURE du FN sur l’euro (sa prétendue « sortie concertée de l’euro », laissant à Berlin le dernier mot en la matière) est devenue franche béance entre les deux tours de la présidentielle : en effet une partie du FN proche de Philippot voulait tenir bon, au moins en apparence, sur la critique ostentatoire de l’euro, dont les classes populaires savent d’expérience combien il a plombé les salaires, les exportations industrielles et les acquis sociaux. Alors que toute la grande bourgeoisie qui, de Dupont-Aignan à la « droite forte » des LR en passant par les LR, le CAC-40 et toute la grande presse qu’ils contrôlent, a fait de l’ euro-démontage national sa nouvelle religion thatchérienne, atlantiste et antisociale.
Le FN un parti de droite, ultra libéral, européen et antipatriote
Comme on pouvait s’y attendre en raison de la nature de classe du FN, ce parti héritier de Versailles, de Vichy et de l’OAS, le courant euro-phile, renforcé par le ralliement du faux souverainiste Dupont-Aignan, a réussi à infléchir la campagne du FN dans la seconde direction. Si bien que MLP s’est proclamée de plus en plus « européenne » au fur et à mesure qu’approchait le 6 mai. Cela ne pouvait que la plomber face à l’euro-béat COHERENT qu’est Macron, et ne laissait plus à MLP qu’une échappatoire : celle d’en rabattre sur la sortie de l’euro, donc sur la posture patriotique et sociale qui était jusqu’alors celle du FN. Ainsi la promesse de rétablir la retraite à 60 ans a-t-elle subitement été retirée du programme du FN en tant qu’objectif immédiat (car il est impossible de « faire du social » si l’on reste dans l’UE, dont les Accords de Barcelone prescrivent très officiellement le « passage à 67 ans en moyenne dans l’UE de l’âge de la retraite » .
Que pouvait alors faire Marine Le Pen, que les observateurs superficiels accusent d’avoir « mené une mauvaise campagne » et d’avoir produit un « mauvais débat », sinon substituer au fond, de plus en plus inconsistant face à l’argumentation euro-macronienne, l’agressivité sans contenu, les attaques personnelles, bref, tout ce qui a finalement plombé la candidate au moment même où elle croyait masquer ainsi sa dérobade programmatique.
Un parti divisé ? mais un parti dangereux
Cela signifie-t-il que le FN, ouvertement divisé sinon déjà en crise, soit devenu moins dangereux ? Certes pas, car il est très possible que le FN « devienne ce qu’il est » en imitant franchement ces grands partis de l’ultra-droite européenne qui, des pays baltes à Kiev en passant par la Pologne et par la Hongrie d’Orban, font assaut de xénophobie à défaut de causer le moindre tort à la sacro-sainte UE… Laquelle s’accommode fort bien de ce « nationalisme »… raciste, anticommuniste et antinational !
En outre la grande bourgeoisie a toujours su « garder deux fers au feu », et elle peut fort bien avoir besoin du FN, seul ou en coalition avec la « droite forte », pour, le moment venu, « mettre la France en ordre » si le brutal Macron, digne héritier de Valls, n’y parvient pas tout seul. En clair, un FN ayant clairement accepté l’UE pourrait devenir fort utile au grand patronat pour écraser le mouvement ouvrier. Ce serait même une excellente manière, non seulement de précipiter la mort de la France en ajoutant à sa destruction euto-atlantique, le déshonneur que serait, pour le pays des Lumières, le triomphe d’un parti ouvertement xénophobe.
Démasquer le FN pour mieux le faire reculer ! Le FN c’est LE parti du système
En attendant, camarades communistes, syndicalistes et insoumis, il faut élargir la brèche en expliquant aux ouvriers tentés d’utiliser le bulletin lepéniste pour « secouer le cocotier », que, non seulement le FN reste un poison majeur pour la démocratie, mais qu’il n’est ni social ni même national puisqu’en réalité, il ne veut sortir ni de l’euro, ni de l’UE ; il vaut juste matraquer le mouvement social et repeindre en tricolore les chaînes de l’UE/OTAN. Non seulement il n’est pas l’alternative au système, mais il le verrouille en brouillant la véritable perspective, celle d’une union progressiste et antifasciste du drapeau rouge et du drapeau tricolore pour l’indépendance nationale, le progrès social et la coopération internationale.
Plus que jamais, le PRCF adjure les vrais communistes, les vrais progressistes, les syndicalistes de classe, les patriotes antifascistes, de porter avec lui la seule stratégie alternative qui puisse ouvrir à la France la voie d’une franche insoumission au mortifère ordre néolibéral cuirassé de fascisation : celui du Frexit progressiste, celui des quatre sorties, de l’euro, de l’UE, de l’OTAN et du capitalisme. Ensemble, lançons une grande campagne pour en finir avec l’euro et l’UE, expliquons que ce n’est pas en y restant que nous nous en sortirons, et que c’est au contraire en n’y restant pas que nous nous en sortirons !
Georges Gastaud – secrétaire national du PRCF
Cf l’étude ci-dessous qui, sans toutefois indiquer les racines de classe de ces contradictions insolubles, montre devant quelles difficultés politiques objectives est placé le FN.
Remous au FN après son échec à la présidentielle
Alors qu’elle était invité (pour la nième fois) du journal télévisé de TF1 la présidente du FN a reconnu avoir commis de multiples erreurs tactiques lors de sa campagne. Elle se présentera à Hénin Beaumont pour les législatives
D’après le Canard Enchainé, la fille Le Pen ne se remet pas de son impressionnante défaite face à un Emmanuel Macron pourtant rejeté par la population.
« La cheftaine héroïque est au fond du trou. Terrée chez elle, elle poste mollement un tweet par semaine. »
Dans le même temps, sa nièce, et chef de file du FN dans le sud est de la France l’une des principales régions électorales du parti d’extrême droite, prend la tangente, tandis que le numéro 2 du FN structure son propre parti dans le parti.
De fait, le débat catastrophique de l’entre deux tours a fortement fragilisé Marine Le Pen au sein d’un FN qui s’attendait à un bien meilleur résultat que les 10,6 millions de voix au second tour. Marine Le Pen reconnait sa responsabilité – il est vrai que face à un Macron pourtant si mauvais, sa performance est apparue très médiocre à la France entière.
« Quand on est candidat, de toute façon on est responsable, et je ne vais pas essayer de dévier de cette responsabilité… » « »Incontestablement, il y a ce débat, qui a été raté, il faut le dire. »
Elle se défend molement indiquant « J’ai fait un choix, j’ai souhaité mettre en lumière les grandes craintes que je nourrissais, et nourris toujours, à l’égard de la politique que va mener Emmanuel Macron » mettant sa médiocrité sur le compte de la fougue : »Je l’ai fait avec fougue, avec passion – peut-être trop de fougue, trop de passion. Je sais que certains n’attendaient pas cela. Dont acte. »
Il n’empèche que les français auront pu constater combien Marine Le Pen serait dangereuse comme présidente de la république. Il est vrai qu’elle doit sa candidature à la présidentielle au fait d’avoir hérité du parti fondé par son père.
Voilà pour la forme. Pour le fond, Marine Le Pen tombe le masque sur la question de l’Europe, annonçant l’abandon de la sortie de l’euro pour un alignement clair sur les positions de la droite ultra libérale, donnant raison au PRCF
« Evidemment, j’ai bien conscience que le sujet de l’euro a inquiété considérablement les Français, et même, il faut bien le dire, de manière presque irrationnelle. C’est un fait. »
« Et nous allons devoir en tenir compte, nous allons devoir discuter, réfléchir, c’est le chantier que nous ouvrirons après les législatives. Ce sera le temps du congrès, où ces débats auront lieu, où chacun pourra s’exprimer », promet-elle.
Cette évolution est à mettre en perspective d’avec son alliance avec Dupont Aignan et la recherche – que n’a jamais réellement abandonné le FN – d’une alliance avec la droite parlementaire.
En tout état de cause, le FN apparait divisé et les électeurs pourraient bien se débarrasser de ce verrou de la vie politique française en lui faisant subir la défaite électorale qu’il mérite aux législatives.